Test Blu-ray / Le Procès Goldman, réalisé par Cédric Kahn

LE PROCÈS GOLDMAN réalisé par Cédric Kahn, disponible en DVD & Blu-ray le 6 février 2024 chez Ad Vitam.

Acteurs : Arieh Worthalter, Arthur Harari, Stéphan Guérin-Tillié, Nicolas Briançon, Aurélien Chaussade, Christian Mazucchini, Jeremy Lewin, Jerzy Radziwilowicz…

Scénario : Cédric Kahn & Nathalie Hertzberg

Photographie : Patrick Ghiringhelli

Durée : 1h56

Date de sortie initiale : 2023

LE FILM

En 1976 débute à Amiens le deuxième procès de Pierre Goldman, militant d’extrême gauche, condamné en première instance à la réclusion criminelle à perpétuité pour quatre braquages, dont un ayant entraîné la mort de deux pharmaciennes. Il clame son innocence dans cette dernière affaire et devient l’icône de la gauche intellectuelle. Georges Kiejman, jeune avocat, assure sa défense.

Voilà un César du meilleur acteur bien mérité ! Même si la concurrence a été rude avec comme autres nommés Romain Duris pour Le Règne animal, Raphaël Quenard pour Yannick, Benjamin Lavernhe pour L’Abbé Pierre et Melvil Poupaud dans L’Amour et les Forêts, Arieh Worthalter méritait haut la main la compression pour le rôle-titre du Procès Goldman. Le douzième long-métrage de l’excellent Cédric Kahn est une expérience cinématographique à part entière. Quelques cartons en introduction placent le spectateur dans le contexte spatio-temporel et présentent les faits. Avril 1970, Pierre Goldman est inculpé pour quatre agressions à main armée, dont une ayant entraîné la mort de deux pharmaciennes. Décembre 1974, il est condamné en première instance à la réclusion criminelle à perpétuité, mais Goldman clame son innocence dans l’affaire de la pharmacie. Octobre 1975, l’incarcéré publie son livre plaidoyer écrit en prison, Souvenirs obscurs d’un juif polonais né en France. Un mois plus tard, la Cour de Cassation annule le premier jugement et renvoie l’affaire devant la Cour d’Assises d’Amiens. Avril 1976, ses avocats se préparent à cette nouvelle confrontation. Remarquablement réalisé, Le Procès Goldman est une plongée en apnée (il n’y a aucune scène se déroulant en extérieur, aucun flashback, aucune musique) au sein du tribunal, lieu où se déroule la quasi-intégralité de l’action, avec – en dehors de l’introduction dans le cabinet de maître Georges Kiejman – quelques petits apartés dans les « coulisses » entre deux témoignages. Pas un seul moment d’ennui devant Le Procès Goldman, qui rappelle certaines œuvres de Raymond Depardon (on pense bien sûr à 10e chambre, instants d’audience), mais qui évite toute théâtralité (ce qui aurait pu arriver avec cette unité de lieu, de temps et d’action) et côté documentaire, à travers une leçon de mise en scène de chaque instant. Un film captivant, passionnant par son sujet et à disséquer sur la forme.

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Test DVD / Le Ciel rouge, réalisé par Christian Petzold

LE CIEL ROUGE (Roter Himmel) réalisé par Christian Petzold, disponible en DVD le 20 février 2024 chez Blaq Out.

Acteurs : Thomas Schubert, Paula Beer, Enno Trebs, Langston Uibel, Matthias Brandt, Jennipher Antoni, Ralph Barnebeck, Esther Esche…

Scénario : Christian Petzold

Photographie : Hans Fromm

Durée : 1h43

Année de sortie : 2023

LE FILM

Une petite maison de vacances au bord de la mer Baltique. Les journées sont chaudes et il n’a pas plu depuis des semaines. Quatre jeunes gens se réunissent, des amis anciens et nouveaux. Les forêts desséchées qui les entourent commencent à s’enflammer, tout comme leurs émotions. Le bonheur, la luxure et l’amour, mais aussi les jalousies, les rancœurs et les tensions. Pendant ce temps, les forêts brûlent. Et très vite, les flammes sont là.

Les films de Christian Petzold sont toujours des événements et des présents pour les cinéphiles. Après l’enivrant et hypnotique Ondine, le réalisateur retrouve sa nouvelle muse, la magnétique Paula Beer, pour Le Ciel rouge Roter Himmel. Le cinéaste délaisse l’eau de son précédent long-métrage pour s’attaquer à un autre élément, le feu, celui qui dévaste les forêts qui environnent la mer Baltique, mais aussi celui qui embrase le personnage principal, Leon, incarné par l’autrichien Thomas Schubert, révélé en 2011 dans le percutant Nouveau souffle Atmen de Karl Markovics, vu par la suite dans The Dark Valley Das finstere Tal d’Andreas Prochaska, dans lequel jouait déjà Paula Beer. Si le comédien a particulièrement le vent en poupe avec rien de moins que cinq films et séries à son actif en 2023, espérons que Le Ciel rouge lui apporte une petite renommée auprès du public français. Celui-ci s’impose par son impressionnante carrure (il a pris du poids exprès pour le rôle), surtout face au mètre 67 de Paula Beer, Leon tombant instantanément amoureux (et on le comprend) de Nadja, au cours d’un été qui sera alors symbolique du premier carrefour de son existence. Christian Petzold, chef de file du nouveau cinéma d’auteur allemand, s’écarte de ses récurrents portraits de femmes, même si Nadja est tout de même bien présente au coeur du récit, mais se concentre cette fois sur un jeune homme mal dans sa peau, aspirant écrivain, sur les nerfs en permanence, dont l’équilibre déjà fragile à ce stade de sa vie va être encore plus ébranlé lors de l’apparition de cette femme lumineuse. S’il n’atteint pas la réussite de ses œuvres passées, Yella, Jerichow, Barbara, Phoenix pour ne citer que ceux-là, Christian Petzold demeure un metteur en scène exceptionnel, un fabuleux directeur d’acteurs, qui rend ici un vibrant hommage au cinéma d’Éric Rohmer, puisque Le Ciel rouge est à voir comme un véritable conte d’été.

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Test Blu-ray / Le Péril jeune, réalisé par Cédric Klapisch

LE PÉRIL JEUNE réalisé par Cédric Klapisch, disponible en Édition Blu-ray + 2 DVD + Livret le 5 mars 2024 chez Rimini Editions.

Acteurs : Romain Duris, Vincent Elbaz, Julien Lambroschini, Nicolas Koretzky, Joachim Lombard, Lisa Faulkner, Julie-Anne Roth, Hélène de Fougerolles, Caroline Damiens, Élodie Bouchez, Jackie Berroyer…

Scénario : Cédric Klapisch, Santiago Amigorena, Alexis Galmot & Daniel Thieux

Photographie : Dominique Colin

Durée : 1h41

Année de sortie : 1994

LE FILM

Dix ans après leur terminale, voici Léon, Bruno, Momo, Chabert. Quatre garçons chahuteurs devenus quatre hommes, jeunes encore, mais que la vie déjà grisaille, le cheveu plus sage, la tenue plus stricte. Ce qui les réunit ? La naissance imminente du bébé de Sophie, une ex-copine de classe. Ce qui les hante ? La mort de Tomasi, le père du bébé, leur pote, le feu follet. Au fil des conversations, les regards se rallument, les secrets se libèrent.

C’est ce qu’on appelle un film culte. Et il n’y en pas tant que ça en France. C’est surtout qu’on a quelque peu abusé (y compris l’auteur de ces mots) de cette expression, que l’on a tendance à mettre à toutes les sauces, un moyen sans doute détourné pour dire autrement que « le cinéma c’était mieux avant » sans être taxé de réac. Mais en ce qui concerne Le Péril jeune de Cédric Klapisch, c’est évident, incontestable. Ce film, ou plutôt téléfilm car à l’origine tourné pour la télévision et plus précisément pour La Sept-Arte, le quatrième ouvrage derrière la caméra du réalisateur après deux superbes courts-métrages (In Transit et Ce qui me meut) et son premier long-métrage Riens du tout (avec Fabrice Luchini) est très vite devenu un phénomène. Près de 650.000 spectateurs iront applaudir ces jeunes comédiens venus de nulle part, inconnus, se retrouver en eux, pour se rappeler leur propre jeunesse, tandis que ceux de la même génération que Tomasi, Chabert, Léon, Bruno, Momo, Sophie, Christine se projetaient en eux…Trente ans plus tard, celui qui incarnait Tomasi, Romain Duris est devenu une star du cinéma français, Vincent Elbaz, s’il n’a jamais connu le même statut que son partenaire, n’a jamais quitté les écrans, Élodie Bouchez a remporté deux César…Cédric Klapisch, qui a instantanément fait sa place dans le septième art hexagonal et continue de réjouir souvent les spectateurs, aura offert un véritable tremplin à cette troupe d’acteurs, tandis que ses personnages annonçaient déjà ceux que l’on allait découvrir à travers sa filmographie, notamment L’Auberge espagnole, dont l’engrais est déjà bien présent dans Le Péril jeune.

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Test Blu-ray / Pour l’amour du ciel, réalisé par Luigi Zampa

POUR L’AMOUR DU CIEL (È più facile che un cammello…) réalisé par Luigi Zampa, disponible en Combo Blu-ray + DVD Edition limitée le 24 avril 2024 chez Pathé.

Acteurs : Jean Gabin, Mariella Lotti, Antonella Lualdi, Julien Carette, Elli Parvo, Paola Borboni, Carlo Sposito, Elena Altieri, Nerio Bernardi…

Scénario : Cesare Zavattini, Suso Cecchi D’Amico, Vitaliano Brancati, Diego Fabbri, Giorgio Moser & Henri Jeanson

Photographie : Carlo Montuori

Musique : Nino Rota

Durée : 1h23

Date de sortie initiale : 1950

LE FILM

Lorsqu’il se fait mortellement renverser par un camion, le riche industriel romain Carlo Bacchi se voit refuser l’entrée au paradis. Le juge céleste lui donne alors douze heures pour racheter ses fautes en faisant le bonheur de Santini, un de ses ouvriers qui a tenté de se suicider.

Si beaucoup, y compris Jean Gabin lui-même, évoquaient une traversée du désert après la guerre, il ne faut pas oublier que les spectateurs continuaient d’aller au cinéma voir les films avec celui était alors l’acteur français le plus célèbre dans le monde. Ainsi, L’Imposteur, Martin Roumagnac, Au-delà des grilles et La Marie du port ont tous dépassé la barre des deux millions d’entrées. Si l’aura de Jean Gabin n’est plus la même, surtout depuis depuis son retour du front avec des cheveux blancs, celui-ci est bien toujours présent et tente de retrouver des projets intéressants, ce qui lui manque certainement désormais. Il est donc peu étonnant de le retrouver de l’autre côté des Alpes, sous la direction de Luigi Zampa (1905-1991), dans une des premières co-productions franco-italiennes, Pour l’amour du ciel È più facile che un cammello…. Complètement méconnu dans nos contrées, et pour cause puisqu’il s’agit d’un des pires scores au box-office de toute la carrière de Jean Gabin avec 679.000 entrées, au même niveau que les 641.000 entrées de Sous le signe du taureau de Gilles Grangier. Pourtant, Pour l’amour du ciel détonne puisqu’il plonge le « Vieux » dans un film quasi-fantastique, où son personnage arrive au purgatoire après un accident. Alors qu’il est sur le point d’être conduit en enfer et après s’être plaint, il obtient douze heures de sursis pour sauver son âme. Si Pour l’amour du ciel est loin d’être une entière réussite, cet opus vaut assurément pour son originalité.

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Test Blu-ray / La Tresse, réalisé par Laetitia Colombani

LA TRESSE réalisé par Laetitia Colombani, disponible en DVD & Blu-ray le 28 mars 2024 chez M6 Vidéo.

Acteurs : Kim Raver, Fotinì Peluso, Mia Maelzer, Sajda Pathan, Avi Nash, Manuela Ventura, Sarah Abbott, Francesco Marinelli…

Scénario : Laetitia Colombani (d’après son roman) & Sarah Kaminsky

Photographie : Ronald Plante

Musique : Ludovic Einaudi

Durée : 2h01

Date de sortie initiale : 2023

LE FILM

Inde. Smita est une Intouchable. Elle rêve de voir sa fille échapper à sa condition misérable et entrer à l’école.

Italie. Giulia travaille dans l’atelier de son père. Lorsqu’il est victime d’un accident, elle découvre que l’entreprise familiale est ruinée.

Canada. Sarah, avocate réputée, va être promue à la tête de son cabinet quand elle apprend qu’elle est malade.

Trois vies, trois femmes, trois continents. Trois combats à mener. Si elles ne se connaissent pas, Smita, Giulia et Sarah sont liées sans le savoir par ce qu’elles ont de plus intime et de plus singulier.

Difficile d’aborder l’adaptation d’un gros best-seller (5 millions d’exemplaires vendus, dont deux millions rien qu’en France) quand l’auteur de ces mots n’a pas lu le livre en question. Cette critique sera donc uniquement axée sur l’aspect cinématographique de La Tresse, même s’il y a fort à parier que Laetitia Colombani (née 1976), réalisatrice ici, n’a vraisemblablement pas trahi son roman, au risque de s’attirer les foudres de celles et ceux qui attendaient impatiemment cette transposition. Elle coécrit cette mouture pour le grand écran avec l’aide de Sarah Kaminsky, capable du pire (La Ch’tite famille, Raid Dingue) comme du meilleur (Adieu Monsieur Haffman, Gauguin – Voyage de Tahiti) dispose d’un budget étonnamment « modeste » (un peu plus de huit millions d’euros) et d’une mise en avant internationale. Après un tournage chaotique qui s’est étalé sur six mois en raison de la pandémie, La Tresse a une fois de plus rencontré son public avec plus d’1,2 million d’entrées, malgré une critique qui a fait quelque peu la fine bouche. En l’état, le film se suit agréablement, facilement, frôle souvent le pathos certes, mais s’en tire grâce à un excellent casting et une photographie soignée Ronald Plante, chef opérateur québécois remarqué pour son travail sur la mini-série Sharp Objects. Un divertissement forcément capillotracté et à un cheveu de tomber dans le misérabilisme, mais qui ne manque pas d’élégance.

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Test Blu-ray / Les Nuits blanches de Saint-Pétersbourg, réalisé par Jean Dréville

LES NUITS BLANCHES DE SAINT-PÉTERSBOURG réalisé par Jean Dréville, disponible en Blu-ray le 13 mars 2024 chez Gaumont.

Acteurs : Gaby Morlay, Jean Yonnel, Edmonde Guy, Pierre Renoir, Jacques Erwin, Annie Rozanne, André Bervil, Gisèle Gire…

Scénario : André Legrand

Photographie : Michel Kelber

Musique : Adolphe Borchard

Durée : 1h37

Date de sortie initiale : 1938

LE FILM

Pozdnycheff, jeune fêtard, a détruit par sa légèreté le bonheur conjugal d’un de ses amis d’enfance qui s’est suicidé. Depuis, il est hanté par ce souvenir. Il se marie et devient alors la proie d’une jalousie maladive qui le conduit à tenter d’assassiner sa femme et un violoniste qu’il croit être son amant.

Depuis dix ans, la maison Gaumont (comme l’appelait Georges Lautner) tente de remettre en avant les œuvres de Jean Dréville (1906-1997), quatre décennies cinéma, plus de trente longs-métrages, des succès voire des triomphes par dizaines (Copie conforme, La Cage aux rossignols). Le réalisateur, qui parvenait à sortir deux voire trois films par an a connu un important regain d’intérêt avec des opus comme La Fayette (1962), Normandie Niémen (1960), Les Cadets de l’océan (1945), qui ont tous subi une restauration en Haute-Définition, avant d’être exploité en Blu-ray. Il faudra désormais ajouter à cette liste Les Nuits blanches de Saint-Pétersbourg, qui comme l’indique Patrick Glâtre, spécialiste de Jean Dréville et par ailleurs auteur du passionnant ouvrage Jean Dréville cinéaste (Créaphis, 2006), se situe à un carrefour de sa carrière, où l’artiste mettra tout son immense savoir-faire technique au profit des histoires qui lui sont proposées. En dépit de ses scores pharamineux et enviés au box-office, Jean Dréville ne pourra jamais imposer un sujet qui lui tient à coeur ou dont il aurait été à l’origine, ce qui lui laissera un goût amer jusqu’à la fin de sa vie. Néanmoins, le public sera toujours présent. En 1937, sortent tour à tour Troïka sur la piste blanche, Maman Colibri, tandis que le metteur en scène emballe Les Nuits blanches de Saint-Pétersbourg, qui apparaît sur les écrans au mois de février de l’année suivante. Cette première collaboration entre Jean Dréville et la star Gaby Morlay est l’adaptation d’un court roman de Léon Tolstoï, La Sonate à Kreutzer (1889), dont il s’agit ici de la cinquième transposition (après trois films muets et une première version parlante réalisée en 1937 par Veit Harlan), surfant sur l’attrait des spectateurs pour la culture slave. Drame parfois très emphatique, Les Nuits blanches de Saint-Pétersbourg est un beau et bon film, dans lequel se distingue Jean Yonnel, Sociétaire de la Comédie-Française, star du somptueux Amok de Fédo Ozep, qui terminera son illustre carrière en interprétant le père de Bourvil dans Un drôle de paroissien de Jean-Pierre Mocky. Il est ici impérial, à la fois pathétique et flippant, le jeu forcément daté, mais foncièrement habité du comédien valant sacrément le détour.

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Test Blu-ray / Qui l’a vue mourir?, réalisé par Aldo Lado

QUI L’A VUE MOURIR? (Chi l’ha vista morire?) réalisé par Aldo Lado, disponible en Blu-ray chez Frenezy depuis le 6 décembre 2023.

Acteurs : George Lazenby, Anita Strindberg, Adolfo Celi, Nicoletta Elmi, Dominique Boschero, Peter Chatel, Piero Vida, José Quaglio, Alessandro Haber…

Scénario : Francesco Barilli, Massimo D’Avak, Aldo Lado & Rüdiger von Spies

Photographie : Franco Di Giacomo

Musique : Ennio Morricone

Durée : 1h34

Date de sortie initiale : 1972

LE FILM

En 1968, en France, une jeune fille est assassinée à coups de pierre par une personne mystérieuse, voilée et vêtue de noir. Quatre ans plus tard, à Venise, le sculpteur Franco Serpieri vit paisiblement avec sa maîtresse. Séparé de son épouse qui s’est installée à Londres, il reçoit fréquemment la visite de sa fille Roberta. Mais un soir, celle-ci ne rentre pas chez son père. Le lendemain, on retrouve son corps noyé dans un des canaux de la ville. La police se charge de l’enquête mais sans résultats. Franco, qui se sent responsable du drame, décide de se lancer seul à la poursuite du coupable…

Remarqué avec Je suis vivant !, son « film politique déguisé en giallo » comme il le qualifiait lui-même, Aldo Lado (1934-2023) pense déjà à son prochain opus comme metteur en scène, La Drôle d’affaire – La Cosa buffa, quand il reçoit la proposition du producteur allemand Dieter Geissler (Kill, Out of Order, Société anonyme anti-crime) de réaliser Qui l’a vue mourir ? – Chi l’ha vista morire?, d’après un scénario de Francesco Barilli (Le Parfum de la dame en noir, Prima della rivoluzione) et Massimo D’Avak (Exécutions, Si douces, si perverses), autre film de genre dans lequel il s’était précédemment illustré. Il laisse alors son ami Bernardo Bertolucci, avec lequel il préparait Le Dernier tango à Paris, décide de remanier le script en y ajoutant toutes ses connaissances sur Venise, lieu où se déroule l’action, ville qu’il connaît sur le bout des doigts pour y avoir grandi. Est-ce en raison de cette authenticité que Qui l’a vue mourir ? est aujourd’hui devenu l’un des gialli préférés des spectateurs, ou tout du moins qui revient souvent dans les tops des fans du thriller italien ? Pas seulement. Aldo Lado et ses scénaristes privilégient l’émotion, souvent oubliée au profit des effets sanglants, en combinant à la fois l’histoire d’un deuil impossible, le désir de vengeance et l’hypocrisie de la bourgeoisie. Un cocktail virtuose, amer en bouche certes, mais avec lequel Aldo Lado prouvait pour la seconde fois qu’il était à la fois un fabuleux conteur, doublé d’un brillant formaliste.

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Test DVD / Le Ravissement, réalisé par Iris Kaltenbäck

LE RAVISSEMENT réalisé par Iris Kaltenbäck, disponible en DVD et Blu-ray le 20 février 2024 chez Diaphana.

Acteurs : Hafsia Herzi, Alexis Manenti, Nina Meurisse, Younes Boucif, Radmila Karabatic, Dusko Badnjar, Ana Blagojevic, Grégoire Didelot…

Scénario : Iris Kaltenbäck, Naïla Guiguet & Alexandre de La Baume

Photographie : Marine Atlan

Musique : Alexandre de La Baume

Durée : 1h33

Date de sortie initiale : 2023

LE FILM

Comment la vie de Lydia, sage-femme très investie dans son travail, a-t-elle déraillé ? Est-ce sa rupture amoureuse, la grossesse de sa meilleure amie Salomé, ou la rencontre de Milos, un possible nouvel amour ? Lydia s’enferme dans une spirale de mensonges et leur vie à tous bascule…

C’est assurément l’un des meilleurs films de l’année 2023, qui vous reste en tête bien longtemps après la projection, qui vous triture les méninges, qui vous donne encore mal à l’estomac, qui vous bouleverse. Le Ravissement est le premier long-métrage d’Iris Kaltenbäck, huit ans après son court-métrage Le Vol des cigognes qui posait déjà les bases du film qui nous intéresse aujourd’hui. La scénariste du superbe L’Enfant rêvé de Raphaël Jacoulot prend son envol avec Le Ravissement, choc cinématographique, qui s’inspire d’un fait divers dont la réalisatrice a eu vent en lisant les journaux, un petit encart dans lequel était stipulé qu’une jeune femme avait « emprunté » l’enfant de sa meilleure amie, en faisant croire à un homme qu’il s’agissait du sien. Le Vol des cigognes était déjà un uppercut en soi et Le Ravissement va encore plus loin, imposant d’emblée son auteure comme l’une des plus prometteuses dans sa catégorie. Romanesque, terrifiant, à fleur de peau, triste (mais jamais pathos) et en même temps lumineux grâce à la présence toujours aussi envoûtante de la comédienne Hafsia Herzi, Le Ravissement est une œuvre sensationnelle de maîtrise et de maturité.

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Test Blu-ray / Le Chat et le canari, réalisé par Radley Metzger

LE CHAT ET LE CANARI (The Cat and the Canary) réalisé par Radley Metzger, disponible en Édition Collector Blu-ray + DVD + Livret le 22 mars 2024 chez Rimini Editions

Acteurs : Honor Blackman, Michael Callan, Edward Fox, Wendy Hiller, Olivia Hussey, Beatrix Lehmann, Carol Lynley, Daniel Massey, Peter McEnery, Wilfrid Hyde-White…

Scénario : Radley Metzger, d’après la pièce de théâtre de John Willard

Photographie : Alex Thomson

Musique : Steven Cagan

Durée : 1h29

Année de sortie : 1978

LE FILM

À Glendiff en 1914, le riche et extravagant Cyrus West meurt dans son château. Vingt ans plus tard, la notaire Allison Crosby réunit tous les héritiers dans la grande salle afin de divulguer le testament. Elle découvre qu’Annabelle West en est la légataire universelle. Peu à peu les invités disparaissent puis sont retrouvés assassinés…

Tandis que les gialli et films d’épouvante de Dario Argento et de ses confrères compatriotes remplissent les salles dans les années 1970, que le slasher est sur le point de prendre son envol avec La Nuit des masques – Halloween de John Carpenter et que les enquêtes d’Hercule Poirot semblent intéresser les spectateurs (après Le Crime de l’Orient-Express, Mort sur le Nil se profile à l’horizon), le producteur Richard Gordon (Inseminoïd, Monstres invisibles, Corridors of Blood) a de la suite dans les idées. Pourquoi ne pas mixer tous ces ingrédients, les passer à la sauce à la menthe (autrement dit british) et tenter de surfer sur ces effets de mode ? Voilà comment est né Le Chat et le canari The Cat and the Canary, adapté d’une pièce de théâtre de John Willard, déjà transposée dans les années 1920 par Paul Leni, qui combine le film d’horreur (plusieurs meurtres y sont commis), l’enquête policière (un assassin se cache dans une demeure) et le whodunit (le meurtrier en question est peut-être dissimulé parmi les personnages principaux). Formidable opus que Le Chat et le canari version 1978, solidement mis en scène par Radley Metzger (1929-2017), bourré de trouvailles à la fois sur le fond et sur la forme et surtout merveilleusement interprété par une troupe de dix comédiens exceptionnels qui ont l’air de s’amuser du début à la fin. Une belle et grande découverte.

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Test Blu-ray / Rien à perdre, réalisé par Delphine Deloget

RIEN À PERDRE réalisé par Delphine Deloget, disponible en DVD & Blu-ray le 22 mars 2024 chez Ad Vitam.

Acteurs : Virginie Efira, Félix Lefebvre, Arieh Worthalter, Mathieu Demy, India Hair, Alexis Tonetti, Andréa Brusque, Oussama Kheddam…

Scénario : Delphine Deloget, Olivier Demangel & Camille Fontaine

Photographie : Guillaume Schiffman

Musique : Nicolas Giraud

Durée : 1h52

Date de sortie initiale : 2023

LE FILM

Sylvie vit à Brest avec ses deux enfants, Sofiane et Jean-Jacques. Ensemble, ils forment une famille soudée. Une nuit, Sofiane se blesse alors qu’il est seul dans l’appartement et sa mère au travail. Un signalement est fait et Sofiane est placé en foyer. Armée d’une avocate, de ses frères et de l’amour de ses enfants, Sylvie est confiante, persuadée d’être plus forte que la machine administrative et judiciaire…

Delphine Deloget est à la base documentariste, reconnue, multi-récompensée dans les festivals du monde entier, remarquée dès ses premiers travaux, Qui se souvient de Minik, À l’ouest de la Mongolie, No London Today, Voyage en barbarie qui a remporté le Prix Albert Londres. Elle intègre la Fémis dans les années 2010, afin d’y développer un long-métrage de fiction, puis signe elle-même un court-métrage, Le Père Noël et le Cow-Boy (2012) avec Kévin Azaïs. Il lui faudra finalement attendre plus de dix ans avant de sauter le pas du long-métrage de fiction avec Rien à perdre, présenté au Festival de Cannes 2023 (sélection Un certain regard). Elle offre à Virginie Efira un nouveau grand rôle, ainsi qu’au jeune et talentueux Félix Lefebvre, découvert dans Été 85 de François Ozon, qui avait depuis confirmé dans l’excellent La Passagère d’Héloïse Pelloquet, qui s’est étoffé ici de vingt kilos pour créer son personnage. Décidément, après Benedetta, Revoir Paris, Les Enfants des autres et L’Amour et les forêts, la comédienne affiche une filmographie quasi-exemplaire (on oublie Adieu les cons, Lui, En attendant Bojangles, mais on a bien dit « quasi ») et s’impose une fois de plus parmi les plus grandes de sa génération.

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