Test Blu-ray / Un si noble tueur – The Gentle Gunman, réalisé par Basil Dearden

UN SI NOBLE TUEUR (The Gentle Gunman), réalisé par Basil Dearden, disponible en combo Blu-ray/DVD le 28 février 2024 chez Studiocanal.

Acteurs : John Mills, Dirk Bogarde, Robert Beatty, Elizabeth Sellars, Barbara Mullen, Eddie Byrne, Joseph Tomelty, Liam Redmond…

Scénario : Roger MacDougall, d’après sa pièce de théâtre

Photographie : Gordon Dines

Musique : John Greenwood

Durée : 1h22

Date de sortie initiale : 1952

LE FILM

En 1941, un petit groupe d’hommes de l’I.R.A. dépose des bombes dans les stations du métro de Londres. Un membre, Terence, a fini par prendre conscience de la stupidité et de l’inutilité de la violence, et il déserte. Son frère Matt vient alors d’Irlande pour prendre sa place. Après l’arrestation de deux des hommes, Matt, croyant que Terence les trahissait, revient en Irlande et fait son rapport au chef de l’I.R.A., Shinto, et à une femme, partisane fanatique. Elle a aimé Terence mais maintenant elle reporte son amour sur son frère. Lorsqu’ils apprennent que deux prisonniers doivent venir à la prison de Belfast, Shinto projette de les faire échapper.

Noblesse oblige, De l’or en barres, Tueurs de dames, Passeport pour Pimlico, L’Homme au complet blanc, Tortillard pour Titfield, fleurons, monuments de la comédie anglaise des années 1940-50 ont toutes un point commun, elles sortent des Ealing Studios. Cependant, on a tendance à oublier que ces derniers ont toujours su se diversifier. C’est le cas des films de guerre (Un contremaître est allé en France, The Next of Kin, The Bells Go Down, Went the Day Well?) ou même fantastico-horreur (le génial Au coeur de la nuit Dead of Night). Avec près d’une vingtaine d’opus à son actif réalisés pour le compte des Ealing Studios, Basil Dearden (1911-1971), le metteur en scène de Pool of London Les Trafiquants du Dumbar, Police sans arme The Blue Lamp, Le Pas de l’oie The Goose Steps out, où d’ailleurs il ne se cantonne pas au registre comique, est l’un des rares cinéastes sous contrat à faire preuve de diversité. À ce titre, Un si noble tueur The Gentle Gunman, adapté d’une pièce de théâtre de Roger MacDougall, sorti au Royaume-Uni en 1952 (et deux ans plus tard dans nos contrées) est un thriller politique sombre furieusement moderne, pour ne pas dire toujours autant d’actualité. Certes, le film contient quelques touches d’humour étonnantes, qui contrastent avec le reste et servent avant tout de soupapes pour permettre aux spectateurs de reprendre leur souffle, mais Un si noble tueur est un vrai film noir qui se déroule dans le milieu encore rarement exploité au cinéma de l’IRA. Ainsi, bien avant Au nom du père et The Boxer de Jim Sheridan, Michael Collins de Neil Jordan, Ennemis rapprochés d’Alan J. Pakula, Bloody Sunday de Paul Greengrass, Le Vent se lève et Secret défense de Ken Loach, Hunger de Steve McQueen, ‘71 de Yann Demange, évidemment plus tardifs et reconnus, Un si noble tueur se penchait déjà avec réalisme sur le bouillonnement de cette lutte armée. Si Basil Dearden s’inspire vraisemblablement de ce que l’immense John Ford avait fait avant lui avec Le Mouchard The Informer (4 Oscars) en 1935 et The Plough and the Stars l’année suivante, il serait temps de (re)découvrir et surtout de réhabiliter The Gentle Gunman.

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Test Blu-ray / L’Énigmatique Monsieur D., réalisé par Sheldon Reynolds

L’ÉNIGMATIQUE MONSIEUR D. (Foreign Intrigue) réalisé par Sheldon Reynolds, disponible en Combo Blu-ray + DVD – Édition Limitée le 6 mars 2024 chez Rimini Editions.

Acteurs : Robert Mitchum, Geneviève Page, Ingrid Thulin, Frédéric O’Brady, Eugene Deckers, Inga Tidblad, John Padovano, Lauritz Falk…

Scénario : Sheldon Reynolds, Harold Jack Bloom & Gene Levitt

Photographie : Bertil Palmgreen

Musique : Paul Durand

Durée : 1h35

Année de sortie : 1956

LE FILM

En villégiature sur la Côte d’Azur, le riche homme d’affaires Victor Danemore meurt subitement. Travaillant pour Danemore et présent au moment de sa mort, l’agent de publicité Dave Bishop est intrigué par le mystérieux passé de son ancien employeur. Il découvre que celui-ci était un maître-chanteur. En pleine guerre froide, il suit alors ses traces en France, en Suède et en Autriche.

Rétrospectivement parlant, on ne peut pas dire que L’Énigmatique Monsieur D. fasse partie des films les plus connus de la carrière de Robert Mitchum. Situé entre La Nuit du chasseur de Charles Laughton (qu’on ne présente plus) et Bandido Caballero ! de Richard Fleischer (méconnu et pourtant très bon), Foreign Intrigue est en réalité l’une des premières adaptations d’une série télévisée au cinéma. Foreign Intrigue ou Foreign Assignment est donc à la base une série dramatique et d’espionnage créée et produite par Sheldon Reynolds, plus de 150 épisodes répartis sur quatre saisons tournées entre 1951 et 1955. Ayant de la suite dans les idées, le « showrunner » décide de transposer son bébé pour le grand écran, en proposant à la fois une suite et un récapitulatif de l’histoire déjà connue des spectateurs. Exit Jerome Thor, James Daly et Gerald Mohr, vedettes respectives des deux premières saisons, de la troisième et de la quatrième, place à Robert Mitchum à qui le trench-coat sied évidemment à ravir. S’il avait déjà derrière-lui La Griffe du passé, Ça commence à Vera Cruz, Un si doux visage et Rivière sans retour, le comédien, à l’aube de ses 40 ans, n’était pas encore totalement reconnu dans le milieu et continuait à passer d’un genre à l’autre avec la même apparente décontraction. Un talent insolent qui fait le sel de L’Énigmatique Monsieur D., qui n’est certes pas transcendant, mais qui n’en reste pas moins agréable à suivre et qui vaut surtout pour la prestation de ses deux actrices principales, la française Geneviève Page et la suédoise Ingrid Thulin. Une curiosité, une découverte.

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Test Blu-ray / L’Enquête est close – Circle of Danger, réalisé par Jacques Tourneur

L’ENQUÊTE EST CLOSE (Circle of Danger), réalisé par Jacques Tourneur, disponible en combo Blu-ray/DVD le 27 septembre 2023 chez Studiocanal.

Acteurs : Ray Milland, Patricia Roc, Marius Goring, Hugh Sinclair, Naunton Wayne, Edward Rigby, Marjorie Fielding, John Bailey…

Scénario : Philip MacDonald

Photographie : Oswald Morris

Musique : Robert Farnon

Durée : 1h26

Date de sortie initiale : 1953

LE FILM

À la fin de la seconde guerre mondiale, Clay Douglas, citoyen américain, enquête sur la mort de son jeune frère, Hank, tué d’une balle alors qu’il combattait aux côtés des forces britanniques. Pour Clay, le tir ne venait pas des lignes allemandes mais bien du commando dont Hank était membre. Du Pays de Galles à l’Angleterre en passant par l’Écosse, Clay tente de retrouver la trace des membres survivants pour comprendre ce qui a pu se passer.

Du cinéaste franco-américain Jacques Tourneur, on connaît surtout Cat People (La Féline, 1942), Vaudou (I walked with a zombie, 1943) ou encore The Leopard Man (1943), emblèmes flamboyants du cinéma fantastique de l’âge d’or. Nettement moins ses films policiers, genre auquel Circle of danger semble appartenir. En apparence seulement. Car sous les oripeaux formels d’une enquête classique, voilà en réalité une comédie romantique qui ne dit pas son nom. C’est bien là la principale surprise d’un film qui nous en ménage une autre, et de taille, dans ses ultimes minutes. De fait, le protagoniste interprété par Ray Milland va au cours de son investigation en terres britanniques, faire la rencontre d’une illustratrice écossaise, Elspeth (Patricia Roc). Bien davantage que les membres du commando dont Clay remonte progressivement la piste, la jeune femme devient le pivot du récit, lequel prend une tournure sentimentale totalement décalée. Ce qui intéresse ici Jacques Tourneur, est donc autant l’évolution de l’enquête que la relation entre Clay et Elspeth, marquée par une série de rendez-vous manqués plutôt cocasse. Mais dans la résolution du meurtre comme dans les prémices de l’histoire d’amour, Jacques Tourneur déroule un seul et même fil rouge : la thématique du temps. Clay passe ainsi une bonne partie du sien à demander l’heure à ses interlocuteurs pour s’assurer de ne pas arriver en retard à ses rendez-vous avec Elspeth (le seul ressort comique du film consistant à le faire invariablement échouer). Entre l’obsession de la vérité et la liaison naissante, l’incompatibilité est manifeste et l’urgence signifiée : Tourneur filme explicitement les montres, les horloges et les injonctions verbales à l’empressement (tel personnage somme Clay de se dépêcher s’il ne veut pas rater son train, un autre lui demande d’abréger leur discussion car il manque de temps, Elspeth semble avoir toujours un pays d’avance sur Clay lors de leurs déplacements simultanés). Confère également cette scène magnifique où le couple en devenir se tient sur une falaise face à la mer, en réalité – trucage typique de l’époque – la photo en trompe-l’oeil d’un paysage écossais où rien, à part les acteurs, ne bouge. Ni les nuages ni les vagues. Et soudain… le silence. Tourneur utilise ici de façon très consciente l’artificialité de son décor non seulement à des fins techniques, mais aussi au profit de ce qu’il raconte : littéralement, il suspend le temps et invite les deux personnages (et le spectateur) au sursis.

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Test Blu-ray / La Police était au rendez-vous, réalisé par Joseph Pevney

LA POLICE ÉTAIT AU RENDEZ-VOUS (Six Bridges to Cross) réalisé par Joseph Pevney, disponible le 12 septembre 2023 en DVD et Combo Blu-ray + DVD chez Elephant Films.

Acteurs : Tony Curtis, George Nader, Julie Adams, Jay C. Flippen, Sal Mineo, Jan Merlin, Richard Castle, William Murphy…

Scénario : Sydney Boehm, d’après le roman de Joseph F. Dinneen

Photographie : William H. Daniels

Musique : Frank Skinner & Herman Stein

Durée : 1h36

Année de sortie : 1955

LE FILM

Des années 30 à 50, l’ascension d’un gangster de Boston qui a fort à faire face à un fonctionnaire de police besogneux. Une étrange amitié naît entre les deux hommes, mélange d’admiration et de crainte…

La carrière de Bernard Schwartz, alias Tony Curtis prend son envol dans les années 1950 ! Cela s’est fait par étapes successives, le comédien passant progressivement à l’avant-plan, jusqu’à porter un film sur ses épaules. Ainsi, les spectateurs ont pu le voir dans Winchester ’73 d’Anthony Mann, Sierra d’Alfred E. Green, Kansas en feu Kansas Raiders de Ray Enright, mais ce sont Le Voleur de Tanger The Prince Who Was a Thief de Rudolph Maté, No Room for the Groom de Douglas Sirk, Le Fils d’Ali Baba Son of Ali Baba de Kurt Neumann et Houdini le grand magicien – Houdini de George Marshall qui vont changer la donne. Désormais, Tony Curtis est un acteur sur lequel le studio Universal peut miser pour attirer le public, surtout qu’il parvient aisément à tourner quatre voire cinq longs-métrages par an. Pour La police était au rendez-vousSix Bridges to Cross, il collabore pour la seconde fois avec Joseph Pevney (1911-2008), qui l’avait dirigé en 1952 dans le film noir et sportif Flesh and Fury, qui se déroulait dans le milieu de la boxe. La Police était au rendez-vous est la transposition du roman They Stole $25,000,000 – And Got Away with It de Joseph F. Dinneen, alors reporter pour le Boston Globe, qui s’inspirait d’un véritable fait divers. Écrivain à ses heures, on lui doit notamment le livre Underworld U.S.A, que Samuel Fuller transposera en 1961, Dinneen était réputé pour ses descriptions pointilleuses des crimes et délits. S’il y a bien quelques affaires illégales dans Six Bridges to Cross, ce qui intéresse premièrement Joseph Pevney et son scénariste Sydney Boehm (Violence à Jericho, Bungalow pour femmes, Les Inconnus dans la ville, Règlement de comptes), est l’amitié qui unit un policier et un jeune criminel, un lien unique qui va perdurer durant une vingtaine d’années. La Police était au rendez-vous contentera non seulement les amateurs de braquages à l’écran, mais aussi ceux plus intéressés par la psychologie des personnages, Pevney trouvant le parfait équilibre entre les deux et livrant au final un film noir très attachant, tout en offrant à Tony Curtis un nouveau rôle tremplin.

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Test Blu-ray / Dans l’ombre de San Francisco, réalisé par Norman Foster

DANS L’OMBRE DE SAN FRANCISCO (Woman on the run) réalisé par Norman Foster, disponible le 12 septembre 2023 en DVD et Combo Blu-ray + DVD chez Elephant Films.

Acteurs : Ann Sheridan, Dennis O’Keefe, Robert Keith, John Qualen, Frank Jenks, Ross Elliott, Jane Liddell, Joan Shawlee…

Scénario : Alan Campbell & Norman Foster, d’après une histoire originale de Sylvia Tate

Photographie : Hal Mohr

Musique : Arthur Lange & Emil Newman

Durée : 1h17

Année de sortie : 1950

LE FILM

Un soir, Frank, un peintre raté, assiste sans le vouloir au meurtre d’un homme. Très vite interrogé par la police, il devient un témoin décisif dans l’enquête sur cet assassinat et donc, une cible à abattre. Pris de panique, il s’enfuit et laisse sa femme Eleanor dans l’incompréhension totale. Avec l’aide du reporter Dan Leggett, cette dernière cherche à retrouver la trace de son mari, sans se douter que les policiers et le meurtrier en personne sont aussi à leurs trousses.

Connu dans nos contrées sous le titre Dans l’ombre de San Francisco, Woman on the Run est un bijou du film noir que la critique et le public ont malheureusement totalement oublié. Réalisé par Norman Foster (1900-1976), comédien venu à la mise en scène qui a fait ses débuts derrière la caméra à la fin des années 30 avec la série des M.Moto (alias Peter Lorre), Woman on the Run a pour particularité de donner à une femme, en l’occurrence la formidable Ann Sheridan (tout juste sortie d’Allez coucher ailleurs d’Howard Hawks), le rôle principal dans l’intrigue, chose alors inhabituelle dans un film de ce genre. La comédienne signe une superbe prestation, une femme dont le mariage bat de l’aile, qui retrouve un regain de passion pour son époux accusé à tort d’un meurtre. Une redécouverte s’impose une fois de plus.

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Test Blu-ray / Détour, réalisé par Edgar G. Ulmer

DÉTOUR (Detour), disponible le 12 septembre 2023 en DVD et Combo Blu-ray + DVD chez Elephant Films.

Acteurs : Tom Neal, Ann Savage, Claudia Drake, Edmund MacDonald, Tim Ryan, Esther Howard, Pat Gleason…

Scénario : Martin Mooney & Martin Goldsmith, d’après le roman de Martin Goldsmith

Photographie : Benjamin H. Kline

Musique : Leo Erdody

Durée : 1h08

Année de sortie : 1945

LE FILM

Un pianiste de bar va, malgré lui, usurper l’identité d’un automobiliste qui l’a pris en stop mais qui meurt subitement. Le propriétaire de la voiture, que sa famille n’a pas revu depuis des années, était l’héritier d’un millionnaire agonisant…

Détour, ou tout simplement Detour (sans accent) en version originale, est un de ces films qui font l’unanimité depuis sa sortie, autrement dit depuis 75 ans, qui n’a eu de cesse d’être mis en avant par les historiens ou les experts du cinéma, à l’instar de Martin Scorsese et de David Lynch, ce dernier ayant rtoujours avoué s’en être inspiré pour Lost Highway et Mulholland Drive. Tourné en seulement six jours avec un budget restreint de 100.000 dollars (le film est d’ailleurs considéré comme le premier film indépendant de l’histoire du cinéma américain), Détour, adapté du roman Detour : An Extraordinary Tale de Martin Goldsmith (qui transpose lui-même son livre sorti en 1939), est l’une des plus grandes références de la série B, où l’on retrouve à la barre l’un des spécialistes en la matière, Edgar Georg Ulmer (1904-1972). Metteur en scène, scénariste, producteur et directeur de la photographie américain d’origine austro-hongroise, ancien comédien et décorateur, celui que l’on connaît plus communément sous le nom d’Edgar G. Ulmer est l’auteur de moult films chéris par les spectateurs. L’ancien assistant de F.W. Murnau, Robert Siodmak, Billy Wilder et Fred Zinnemann, vient de mettre en scène L’Ile des péchés oubliés (1943) et Barbe Bleue (1944) quand il entreprend Détour, qui restera son chef d’oeuvre, sélectionné par la Bibliothèque du Congrès parmi le premier groupe de cent films américains méritant un effort particulier de conservation. C’est dire l’importance de cet éminent film noir, sec, resserré sur une durée de 68 minutes, frontal, violent, où les archétypes s’inversent et où l’urgence du tournage se reflète constamment sur l’atmosphère et les personnages.

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Test Blu-ray / Le Tueur s’est évadé, réalisé par Budd Boetticher

LE TUEUR S’EST ÉVADÉ (The Killer Is Loose) réalisé par Budd Boetticher, disponible en Combo Blu-ray + DVD le 23 août 2023 chez Rimini Editions.

Acteurs : Joseph Cotten, Rhonda Fleming, Wendell Corey, Alan Hale Jr., Michael Pate, John Larch, Dee J. Thompson, John Beradino, Virginia Christine, Paul Bryar…

Scénario : Harold Medford, d’après une histoire originale de John Hawkins & Ward Hawkins

Photographie : Lucien Ballard

Musique : Lionel Newman

Durée : 1h10

Année de sortie : 1956

LE FILM

Leon Poole est un employé de banque méprisé par ses pairs. Un jour, il se fait complice de truands qui braquent l’établissement. Lorsque les policiers viennent le débusquer chez lui, le détective Sam Wagner tue sa femme par erreur. Après des années à purger sa peine, Poole s’évade et n’a qu’une idée en tête : tuer la femme de Wagner pour se venger.

Quand on lui évoque Budd Boetticher, le cinéphile pense immédiatement à ses westerns et plus particulièrement au légendaire cycle Ranown, les sept collaborations entre le réalisateur et l’acteur Randolph Scott. Juste avant Sept Hommes à abattreSeven Men from now, le cinéaste revenait au film noir avec Le Tueur s’est évadé The Killer is Loose après quelques westerns dont l’excellent Le Déserteur de Fort Alamo et À feu et à sangThe Cimarron Kid, un des premiers opus avec Audie Murphy. La même année qu’Un si doux visage d’Otto Preminger, Le Quatrième homme de Phil Karlson et les exceptionnels L’Énigme du Chicago Express et L’Homme à l’affût d’Edward Dmytryk, Budd Boetticher se livrait de son côté à un exercice de style rapide, sec, nerveux, qui va droit au but et qui vaut la peine d’être connu pour son personnage de criminel, solidement interprété par Wendell Corey, alors au sommet de sa carrière, puisqu’il venait d’enchaîner avant Le Tueur s’est évadé, Le Grand couteau de Robert Aldrich et Fenêtre sur cour d’Alfred Hitchcock. « Ce n’est pas un tueur ordinaire », indiquait une des affiches d’exploitation et effectivement Leon Poole est étonnamment bouleversant dans The Killer is Loose et Corey parvient même à voler facilement la vedette à Joseph Cotten, qui avait pourtant derrière lui Niagara, Le Troisième Homme, Le Portrait de Jennie, L’Ombre d’un doute, La Splendeur des Amberson et bien sûr Citizen Kane. C’est dire si Le Tueur s’est évadé mérite toute l’attention du passionné de polars rétros, dont l’atmosphère et même le scénario font penser à un western moderne.

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Test Blu-ray / La Ville captive, réalisé par Robert Wise

LA VILLE CAPTIVE (The Captive City) réalisé par Robert Wise, disponible en Combo Blu-ray + DVD le 22 août 2023 chez Rimini Editions.

Acteurs : John Forsythe, Joan Camden, Harold J. Kennedy, Marjorie Crossland, Victor Sutherland, Ray Teal, Martin Milner, Geraldine Hall…

Scénario : Karl Kamb & Alvin M. Josephy Jr.

Photographie : Lee Garmes

Musique : Jerome Moross

Durée : 1h28

Année de sortie : 1952

LE FILM

Pourchassés par des gangsters, Jim Austin et sa femme se réfugient dans un commissariat. Jim raconte aux policiers comment lui, simple éditeur d’un journal local, a été amené à enquêter sur une vaste affaire de corruption mêlant la police et la mafia.

Pour le cinéaste Robert Wise, tout va pour le mieux en 1952. Le Jour où la Terre s’arrêta The Day the Earth Stood Still a été un triomphe au box-office mondial et beaucoup pensent déjà – à juste titre – que le film entrera dans l’histoire du cinéma. Désireux de revenir à une production plus modeste, Robert Wise jette son dévolu sur un scénario coécrit par Karl Kamb (Le Kid du Texas de Kurt Neumann, Smith le taciturne de Leslie Fenton) et Alvin M. Josephy Jr., d’après une histoire vraie vécue par le second, alors journaliste au magazine Time, qui s’est retrouvé confronté à la mafia qu’il dénonçait à travers ses articles. À l’instar de La Brigade du suicide et Marché de brutes d’Anthony Mann, Robert Wise apporte sa virtuosité au film policier dit documentaire pour La Ville captive The Captive City, connu aussi sous le titre La Ville enchaînée, sous-genre hérité du grand succès rencontré à la télévision des procès des grands criminels. Les expériences personnelles et donc réelles survenues à Alvin M. Josephy Jr., le tout approuvé par le sénateur Estes Kefauver, président de la commission sénatoriale sur le crime organisé, ajoutés à la mise en scène toujours inspirée de Robert Wise et la beauté de la photographie du chef opérateur Lee Garmes (Scarface de Howard Hawks, L’Homme au fusil de Richard Wilson, Les Carrefours de la ville de Rouben Mamoulian, La Maison des otages de William Wyler) font de La Ville captive un petit trésor caché dans l’imposante et éclectique filmographie du réalisateur.

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Test Blu-ray / Dillinger, réalisé par John Milius

DILLINGER réalisé par John Milius, disponible en Combo Blu-ray + DVD + Livret – Édition limitée le 7 juin 2023 chez Rimini Editions.

Acteurs : Warren Oates, Ben Johnson, Michelle Phillips, Cloris Leachman, Harry Dean Stanton, Geoffrey Lewis, John P. Ryan, Richard Dreyfuss…

Scénario : John Milius

Photographie : Jules Brenner

Musique : Barry De Vorzon

Durée : 1h43

Année de sortie : 1973

LE FILM

Le gangster John Dillinger devient la cible du FBI de Kansas City après avoir participé au meurtre de cinq agents. A force de témérité, il s’attire la sympathie du public et devient vite l’ennemi public n°1…

Quinze ans après L’Ennemi public Baby Face Nelson de Don Siegel, le scénariste John Milius passe derrière la caméra et revient à Dillinger et sa bande dans…Dillinger. Ayant le vent en poupe et devenu l’un des auteurs les mieux payés d’Hollywood après avoir participé à L’Inspecteur Harry Dirty Harry, écrit Jeremiah Johnson de Sydney Pollack, Juge et Hors-la-loi The Life and Times of Judge Roy Bean de John Huston et bien sûr Magnum Force de Ted Post, John Milius accepte de baisser son énorme cachet habituel pour Dillinger, qui sera son premier long-métrage en tant que réalisateur. Après Lawrence Tierney dans Dillinger, l’ennemi public n° 1 de Max Nosseck et Leo Gordon dans L’Ennemi public, c’est au tour de l’exceptionnel Warren Oates d’enfiler le costume trois-pièces du gangster et qui une fois n’est pas coutume accède en haut de l’affiche. S’il s’acquitte admirablement de sa tâche, un autre comédien partage cette place convoitée en la personne du génial Ben Johnson, qui dans la peau de Melvin Purvis, l’agent du FBI lancé à la poursuite de Dillinger, est tout aussi remarquable et par ailleurs mis sur un pied d’égalité avec son partenaire. Anarchiste zen, comme il se définissait lui-même dans sa jeunesse, prenant le train en marche du Nouvel Hollywood, mais aussi et avant tout défenseur des valeurs traditionnelles américaines, John Milius met tout dans Dillinger, son mode de pensée, son âme, son adulation des armes à feu, sa vision de l’héroïsme américain, le tout marqué par une violence sèche, brutale, sanglante, qui participe à la pérennité de ceux qu’il considère alors comme des mythes. Il en résulte un polar mâtiné de film noir et même de western souvent implacable, teinté d’humour et qui n’omet pas l’émotion, qui s’avère aussi et surtout toujours divertissant un demi-siècle après sa sortie explosive.

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Test Blu-ray / J’ai le droit de vivre, réalisé par Fritz Lang

J’AI LE DROIT DE VIVRE (You Only Live Once) réalisé par Fritz Lang, disponible en Combo Blu-ray + DVD le 29 mars 2023 chez Studiocanal.

Acteurs : Sylvia Sidney, Henry Fonda, Barton MacLane, Jean Dixon, William Gargan, Jerome Cowan, Charles ‘Chic’ Sale, Margaret Hamilton, Warren Hymer, Guinn ‘Big Boy’ Williams, John Wray, Walter De Palma…

Scénario : Gene Towne & C. Graham Baker

Photographie : Leon Shamroy

Musique : Alfred Newman

Durée : 1h26

Date de sortie initiale : 1937

LE FILM

Après sa sortie de prison, Eddie Taylor ne peut profiter d’un répit. Accusé d’un braquage de banque meurtrier qu’il n’a pas commis, il est emprisonné à tort. Alors que la justice se rend compte de son erreur, Eddie Taylor s’évade. Il devient un véritable meurtrier en abattant accidentellement un aumônier. Il doit partir en cavale avec sa femme Joan et son bébé. Sa fuite éperdue se finit par sa mort, abattu par la police.

Ensemble, nous avons déjà eu l’occasion de revenir à plusieurs reprises sur les débuts et la carrière de Fritz Lang en Allemagne à travers nos chroniques sur Les Trois Lumières, Le Testament du Dr. Mabuse et M Le Maudit, ainsi que sur son passage aux États-Unis après avoir fui le nazisme, pour les sorties en Blu-ray des Pionniers de la Western Union, Espions sur la Tamise et Les Bourreaux meurent aussi. 1936, sort FurieFury, pamphlet sur le lynchage produit par Joseph L. Mankiewicz pour le compte de la MGM. Sur cette lancée, Fritz Lang se lance dans J’ai le droit de vivre You Only Live Once, qui déboule sur les écrans dès l’année suivante, dans lequel le réalisateur dirige à nouveau la magnifique Sylvia Sidney, qui tenait l’affiche de son précédent long-métrage. Considéré comme le second volet d’une trilogie dite judiciaire voulue « réaliste et sociale » à laquelle viendra se greffer Casier judiciaireYou and Me, toujours avec la même comédienne, J’ai le droit de vivre est une tragédie centrée sur un couple pourchassé par la police, qui serait inspirée par l’histoire de Bonnie et Clyde. Pas étonnant que Fritz Lang donne cette impression d’inventer « le Nouvel Hollywood » trente ans avant, surtout durant la dernière partie et la violence inédite de son dénouement. Ce serait un cliché de dire que « tout Fritz Lang se trouve » dans J’ai le droit de vivre, mais puisque c’est le cas…le thème du faux coupable ou plutôt de la culpabilité est le noyau central de You Only Live Once, merveilleux film porté par un casting exceptionnel mené par le couple Henry Fonda-Sylvia Sidney, le tout sublimement photographié par Leon Shamroy, chef opérateur de Bravados d’Henry King et de La Planète des singes de Franklin J. Schaffner. Un monument intemporel.

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