Test Blu-ray / La Police était au rendez-vous, réalisé par Joseph Pevney

LA POLICE ÉTAIT AU RENDEZ-VOUS (Six Bridges to Cross) réalisé par Joseph Pevney, disponible le 12 septembre 2023 en DVD et Combo Blu-ray + DVD chez Elephant Films.

Acteurs : Tony Curtis, George Nader, Julie Adams, Jay C. Flippen, Sal Mineo, Jan Merlin, Richard Castle, William Murphy…

Scénario : Sydney Boehm, d’après le roman de Joseph F. Dinneen

Photographie : William H. Daniels

Musique : Frank Skinner & Herman Stein

Durée : 1h36

Année de sortie : 1955

LE FILM

Des années 30 à 50, l’ascension d’un gangster de Boston qui a fort à faire face à un fonctionnaire de police besogneux. Une étrange amitié naît entre les deux hommes, mélange d’admiration et de crainte…

La carrière de Bernard Schwartz, alias Tony Curtis prend son envol dans les années 1950 ! Cela s’est fait par étapes successives, le comédien passant progressivement à l’avant-plan, jusqu’à porter un film sur ses épaules. Ainsi, les spectateurs ont pu le voir dans Winchester ’73 d’Anthony Mann, Sierra d’Alfred E. Green, Kansas en feu Kansas Raiders de Ray Enright, mais ce sont Le Voleur de Tanger The Prince Who Was a Thief de Rudolph Maté, No Room for the Groom de Douglas Sirk, Le Fils d’Ali Baba Son of Ali Baba de Kurt Neumann et Houdini le grand magicien – Houdini de George Marshall qui vont changer la donne. Désormais, Tony Curtis est un acteur sur lequel le studio Universal peut miser pour attirer le public, surtout qu’il parvient aisément à tourner quatre voire cinq longs-métrages par an. Pour La police était au rendez-vousSix Bridges to Cross, il collabore pour la seconde fois avec Joseph Pevney (1911-2008), qui l’avait dirigé en 1952 dans le film noir et sportif Flesh and Fury, qui se déroulait dans le milieu de la boxe. La Police était au rendez-vous est la transposition du roman They Stole $25,000,000 – And Got Away with It de Joseph F. Dinneen, alors reporter pour le Boston Globe, qui s’inspirait d’un véritable fait divers. Écrivain à ses heures, on lui doit notamment le livre Underworld U.S.A, que Samuel Fuller transposera en 1961, Dinneen était réputé pour ses descriptions pointilleuses des crimes et délits. S’il y a bien quelques affaires illégales dans Six Bridges to Cross, ce qui intéresse premièrement Joseph Pevney et son scénariste Sydney Boehm (Violence à Jericho, Bungalow pour femmes, Les Inconnus dans la ville, Règlement de comptes), est l’amitié qui unit un policier et un jeune criminel, un lien unique qui va perdurer durant une vingtaine d’années. La Police était au rendez-vous contentera non seulement les amateurs de braquages à l’écran, mais aussi ceux plus intéressés par la psychologie des personnages, Pevney trouvant le parfait équilibre entre les deux et livrant au final un film noir très attachant, tout en offrant à Tony Curtis un nouveau rôle tremplin.

L’histoire commence avec les événements qui ont conduit la jeune Jerry Florea à devenir un escroc. Une nuit, il reçoit une balle dans le dos, tirée par Edward Gallagher, un policier débutant. Ce dernier vient lui rendre visite à l’hôpital et étrangement une complicité naît entre les deux individus, au point où Edward et sa femme Ellen le prennent sous leurs ailes. Devenu un adulte et malgré sa promesse de ne pas retomber dans le crime, Jerry les trompe et prétextant obtenir un emploi dans une station service située en face d’une banque, entreprend de braquer l’établissement avec l’aide de complices. Mais Edward n’est pas dupe et comprend les intentions de Jerry.

Certaines tâches sont indélébiles…

Tourné dans les rues de Boston, La Police était au rendez-vous se regarde comme un lit un pulp tout élimé, mais qu’on ne peut lâcher de la première à la dernière page. Le film joue sur l’évidente sympathie qu’inspire le personnage formidablement interprété par Tony Curtis, qui conserve un regard d’enfant innocent, même à l’âge de 30 ans. Pourtant, Jerry Florea n’est pas un enfant de choeur, mais un gosse de la rue, qui a brûlé sa jeunesse à voler les passants et les commerçants avec ses potes, jusqu’à ce qu’un larcin tourne mal, au point d’être hospitalisé pour une blessure très grave, qui l’empêchera d’avoir un enfant plus tard. La balle responsable a été tirée par Edward Gallagher, qui avait surpris la bande, qui était alors en train de prendre la poudre d’escampette. Le récit s’étant après sur deux décennies. Tandis que Gallagher ne cesse de monter dans la hiérarchie, au point de devenir lieutenant de police à 6200 dollars par an, Jerry, qui a été arrêté près de 40 fois et qui a passé 14 ans en prison, se fait la même somme chaque mois. Ses affaires sont « excusées » par Gallagher, en raison du fait que Jerry est son principal indic et lui a permis de gravir les échelons. Mais quand Jerry dépasse les bornes, Gallagher, en dépit de son immense attachement pour Jerry, est bien décidé à le coincer.

Outre Tony Curtis, le méconnu George Nader, sous contrat avec Universal, est impeccable dans un rôle à l’origine prévu pour Jeff Chandler (on dit même qu’un certain Clint Eastwood aurait auditionné, avant d’être remercié par Joseph Pevney), qui avant de se retirer du film avait tout de même écrit la chanson titre avec Henry Mancini, interprétée par Sammy Davis Jr. Tout juste auréolé par le Golden Globe de la révélation masculine de l’année pour le western Quatre tueurs et une fille Four Guns to the Border de Richard Carlson, George Nader s’impose sans mal et livre une prestation étonnamment riche en émotions. Car La Police était au rendez-vous est avant tout un drame où deux êtres, placés chacun d’un côté de la loi, voient leur amitié être rattrapée par la réalité.

Du point de vue formel, Joseph Pevney, loin d’être un manchot, livre de très beaux plans et sait diriger sa solide distribution (dont la belle et excellente Julie Adams, vue dans Le Shérif aux mains rouges, L’Étrange créature du Lac Noir, Le Déserteur de Fort Alamo, Les Affameurs…), la photographie est confiée aux mains et à l’oeil virtuoses de William H. Daniels (F comme Flint, Je suis un aventurier, À l’assaut du Fort Clark) qui joue sur les contrastes afin de refléter l’opposition constante entre les deux protagonistes principaux. Et pour info, l’histoire ce de ce casse, à l’époque le plus gros coup réalisé sur le sol américain, inspirera aussi William Friedkin pour Têtes vides cherchent coffres pleins The Brink’s Job (1978).

LE BLU-RAY

Nous finissons cette nouvelle salve d’Elephant Films consacrée au film noir, par la chronique de La Police était au rendez-vous de Joseph Pevney, jusqu’alors inédit en DVD et Blu-ray en France. Vive la collection Cinema Master Class – La Collection des Maîtres ! Le menu principal est fixe et musical.

Excellente intervention que celle de Samir Ardjoum, critique de cinéma chez Microciné, qui passe en revue tous les aspects de La Police était au rendez-vous (10’30). Tony Curtis est au centre de ce module, puisque le film de Joseph Pevney est replacé au sein de sa carrière et de sa filmographie. Celles du réalisateur sont aussi évoquées, Samir Ardjoum souhaitant réhabiliter ce « cinéaste qui savait raconter des histoires, qui avait le sens du rythme, une touche, un style », en disséquant quelques points forts de Six Bridges to Cross.

L’éditeur s’est ensuite procuré un document étonnant, où l’on voit Tony Curtis répondre à des questions à un intervenant hors-champ et que nous n’entendrons pas, et pour cause puisqu’il s’agit d’images tournées sur lesquelles devaient être appliquées les images d’un journaliste qui devait faire semblant de se retrouver face à l’acteur. Ce dernier parle de sa femme Janet Leigh, de La Police était au rendez-vous, de son personnage…

L’interactivité se clôt sur un lot de bandes-annonces.

L’Image et le son

C’est pas mal du tout. Si nous dénichons diverses scories et instabilités, la copie présentée par Elephant Films ne déçoit pas et permet de (re)découvrir La Police était au rendez-vous dans de belles conditions techniques. La restauration visiblement 2K tient ses promesses et donne un petit coup de jeune au film de Joseph Pevney, avec un piqué convaincant, des détails acérés sur les scènes diurnes, des contrastes solides, une texture argentique préservée et relativement bien gérée. Blu-ray au format 1080p.

Seule la version originale aux sous-titres français ( de couleur blanche ou jaune) non imposés est disponible sur cette édition. La restauration est satisfaisante, l’écoute est frontale, riche, dynamique et vive, après une première partie plus couverte et marquée par un léger souffle. Les effets annexes sont conséquents et le confort acoustique assuré.

Crédits images : © Elephant Films / Universal Pictures / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

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