Test Blu-ray / L’Énigmatique Monsieur D., réalisé par Sheldon Reynolds

L’ÉNIGMATIQUE MONSIEUR D. (Foreign Intrigue) réalisé par Sheldon Reynolds, disponible en Combo Blu-ray + DVD – Édition Limitée le 6 mars 2024 chez Rimini Editions.

Acteurs : Robert Mitchum, Geneviève Page, Ingrid Thulin, Frédéric O’Brady, Eugene Deckers, Inga Tidblad, John Padovano, Lauritz Falk…

Scénario : Sheldon Reynolds, Harold Jack Bloom & Gene Levitt

Photographie : Bertil Palmgreen

Musique : Paul Durand

Durée : 1h35

Année de sortie : 1956

LE FILM

En villégiature sur la Côte d’Azur, le riche homme d’affaires Victor Danemore meurt subitement. Travaillant pour Danemore et présent au moment de sa mort, l’agent de publicité Dave Bishop est intrigué par le mystérieux passé de son ancien employeur. Il découvre que celui-ci était un maître-chanteur. En pleine guerre froide, il suit alors ses traces en France, en Suède et en Autriche.

Rétrospectivement parlant, on ne peut pas dire que L’Énigmatique Monsieur D. fasse partie des films les plus connus de la carrière de Robert Mitchum. Situé entre La Nuit du chasseur de Charles Laughton (qu’on ne présente plus) et Bandido Caballero ! de Richard Fleischer (méconnu et pourtant très bon), Foreign Intrigue est en réalité l’une des premières adaptations d’une série télévisée au cinéma. Foreign Intrigue ou Foreign Assignment est donc à la base une série dramatique et d’espionnage créée et produite par Sheldon Reynolds, plus de 150 épisodes répartis sur quatre saisons tournées entre 1951 et 1955. Ayant de la suite dans les idées, le « showrunner » décide de transposer son bébé pour le grand écran, en proposant à la fois une suite et un récapitulatif de l’histoire déjà connue des spectateurs. Exit Jerome Thor, James Daly et Gerald Mohr, vedettes respectives des deux premières saisons, de la troisième et de la quatrième, place à Robert Mitchum à qui le trench-coat sied évidemment à ravir. S’il avait déjà derrière-lui La Griffe du passé, Ça commence à Vera Cruz, Un si doux visage et Rivière sans retour, le comédien, à l’aube de ses 40 ans, n’était pas encore totalement reconnu dans le milieu et continuait à passer d’un genre à l’autre avec la même apparente décontraction. Un talent insolent qui fait le sel de L’Énigmatique Monsieur D., qui n’est certes pas transcendant, mais qui n’en reste pas moins agréable à suivre et qui vaut surtout pour la prestation de ses deux actrices principales, la française Geneviève Page et la suédoise Ingrid Thulin. Une curiosité, une découverte.

Le millionnaire Victor Danemore, résidant sur la Côte d’Azur, décède subitement d’une crise cardiaque. Son secrétaire, Dave Bishop, veut en savoir plus sur la vie de son employeur. Étonnamment, même sa jeune épouse ne sait rien des antécédents de son mari, ni de la manière dont il a gagné sa fortune. Bishop entre dans un monde d’espionnage et de chantage tout en découvrant le passé secret de Danemore. Des indices le conduisent à Vienne et à Stockholm, où il apprend que Danemore faisait chanter les personnes qui ont coopéré avec les nazis pendant la Seconde Guerre mondiale.

À l’instar de la série originale, L’Énigmatique Monsieur D. se déroule en Europe, en France, en Suède, en Autriche, en Suisse, dans l’après-guerre. Robert Mitchum, les mains dans les poches, l’air blasé, promène son mètre 85 comme si son personnage attendait que les réponses à ses questions lui tombent tout cuit dans le bec, ce qui finit d’ailleurs souvent par arriver. Il est de ce fait solidement épaulé par Geneviève Page (peu de temps après Fanfan la Tulipe et la même année que le triomphe international de Michel Strogoff de Carmine Gallone), à la fois inquiétante et sensuelle, la magnifique Ingrid Thulin, qui allait exploser l’année suivante avec Les Fraises sauvages d’Ingmar Bergman, avec lequel elle tournera dix longs-métrages, de 1957 à 1983. La seconde enflamme l’écran de sa beauté froide et mystérieuse, son accent apportant également un exotisme érotique encore rare à Hollywood. Beaux atouts que les autres seconds rôles, parmi lesquels se distinguent Frédéric O’Brady (l’étonnant Jonathan Spring), visage connu des cinéphiles et croisé chez Jean Renoir, Marcel Carné, Julien Duvivier, André Cayatte et même Orson Welles dans Monsieur Arkadin (Dossier secret).

De son côté, Sheldon Reynolds filme tout ce beau petit monde comme s’il le faisait pour la télévision, avec des effets de montage typiques de la petite lucarne, une photographie Eastmancolor étonnamment standard (pour un film de genre), signée Bertil Palmgren, qui avait officié sur la moitié des épisodes de la série originale. L’Énigmatique Monsieur D. peut se voir comme une compilation de trois épisodes d’une mini-série, le film étant divisé en autant de parties distinctes, avec un climax invitant le (télé)spectateur à suivre encore les aventures de Dave Bishop.

Si la partie « histoire d’amour » en Suède crée un ventre mou dans le récit, le dernier acte tient toutes ses promesses quand tous les fils se dénouent et placent Mitchum au milieu des espions et des traîtres collabos. Rien d’inoubliable donc, mais assurément récréatif.

LE BLU-RAY

Merci à Rimini Éditions de nous permettre de découvrir L’Énigmatique Monsieur D., jusqu’alors inédit en France, en DVD et Haute-Définition. Les deux disques reposent dans un boîtier Blu-ray classique de couleur bleue, glissé dans un fourreau cartonné, arborant un visuel d’origine évidemment plaisant. Le menu principal est animé et musical.

La bande-annonce s’accompagne d’une solide et pertinente intervention de l’excellent Laurent Aknin (20’35). L’historien du cinéma que nous avons déjà croisé à plusieurs reprises, donne toutes les informations nécessaires sur L’Énigmatique Monsieur D. Vous saurez donc tout sur la série originale, l’avènement de la télévision qui éloignait alors les spectateurs des salles de cinéma, la carrière de Sheldon Reynolds, la délocalisation des tournages hollywoodiens en Europe, les influences (Alfred Hitchcock, Orson Welles, Carol Reed, Stanley Donnen), le casting, les ruptures de ton, le film étant également replacé dans la carrière de Robert Mitchum.

L’Image et le son

En avant-programme, un panneau annonce que le master présente encore de nombreux défauts, même si l’éditeur a pris l’initiative d’en corriger une bonne partie. Honnêtement, on a déjà vu bien pire ! D’ailleurs, la copie de L’Énigmatique Monsieur D. n’a absolument rien de déshonorant. En dehors de diverses rayures verticales et de poussières subliminales, l’ensemble se tient, l’image est stable, même si la texture argentique manque souvent à l’appel et a même été trop lissée à notre goût. Les visages apparaissent parfois rosés. Il n’en reste pas moins que Rimini Éditions a une fois encore pu mettre la main sur une œuvre très rare dans nos contrées et que découvrir Foreign Intrigue dans ces conditions était encore inattendu. Blu-ray au format 1080p.

Pas de version française. Le mixage anglais s’avèrent dynamique et sans souffle parasite. L’ensemble est équilibré, de très bonne qualité, avec un bon dosage des dialogues, des ambiances et des effets annexes. La piste est exemplaire et limpide. Les sous-titres français ne sont pas imposés.

Crédits images : © Rimini Éditions / Mr Robert C. Mitchum / MGM / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

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