Test Blu-ray / Jugement à Nuremberg, réalisé par Stanley Kramer

JUGEMENT À NUREMBERG (Judgment at Nuremberg) réalisé par Stanley Kramer, disponible en DVD et Blu-ray le 8 janvier 2019 chez Rimini Editions

Acteurs : Spencer Tracy, Burt Lancaster, Richard Widmark, Marlene Dietrich, Maximilian Schell, Judy Garland, Montgomery Clift, William Shatner…

Scénario : Abby Mann

Photographie : Ernest Laszlo

Musique : Ernest Gold

Durée : 3h

Date de sortie initiale : 1961

LE FILM

En 1948, le juge Haywood est envoyé à Nuremberg pour présider le procès de quatre magistrats allemands accusés de trop de complaisance à l’égard du régime Nazi. L’un d’eux, Janning, se renferme dans un silence méprisant et, en écartant les témoignages et les films sur les camps de concentration, dit qu’il n’a fait qu’appliquer la loi en vigueur…

On parle souvent du procès de Nuremberg, celui intenté par les puissances alliées contre 24 des principaux responsables du Troisième Reich, accusés de complot, crimes contre la paix, crimes de guerre et crimes contre l’humanité. Un évènement qui s’est tenu du 20 novembre 1945 au 1er octobre 1946. En réalité, il s’agissait de la partie immergée de l’iceberg puisque d’autres procès visant différents acteurs et responsables des atrocités commises sous le Troisième Reich ont découlé du premier. Entre autres le procès des médecins, le procès Pohl (la bureaucratie des camps de concentration), le procès des Otages (les généraux basés dans l’ Sud-Est de l’Europe), le procès des Einsatzgruppen. Mais celui qui a retenu l’attention du scénariste américain Abby Mann (1927-2008) est celui moins connu des Juges et des juristes.

Dans ce procès, le troisième de Nuremberg, les accusés étaient seize juristes et avocats allemands. Neuf avaient été fonctionnaires du Reich au ministère de la Justice, d’autres étaient procureurs et juges de tribunaux spéciaux et tribunaux populaires du Troisième Reich. Ils étaient tenus pour responsables de la mise en œuvre et la promotion de la « pureté raciale » nazie par le biais d’un programme d’eugénisme et de lois raciales. C’est tout d’abord la télévision et le réseau CBS qui s’emparent du sujet d’Abby Mann (né d’une famille juive d’origine russe), dans le cadre de son programme Playhouse 90, qui proposait quelques téléfilms de 90 minutes. Réalisé par George Roy Hill et diffusé en avril 1959, Judgment at Nuremberg ne parvient pas réellement à trouver son public, malgré la présence de Claude Rains dans le rôle du juge Dan Haywood et de Maximilian Schell dans celui de l’avocat de la défense allemand Otto Rolfe. Amie d’Abby Mann, Katharine Hepburn montre ce téléfilm à son compagnon Spencer Tracy. Bien qu’extrêmement fatigué, le comédien se laisse séduire par l’idée d’interpréter le juge Haywood. Abby Mann reprend son scénario et l’étoffe en se basant une fois de plus sur de véritables archives et les vraies plaidoiries. Bien que non mentionné, le comédien Montgomery Clift collabore également à l’écriture du film. Spencer Tracy accepte à la condition que Stanley Kramer (1913-2001) réalise, vu que les deux hommes s’étaient merveilleusement entendus l’année précédente sur Procès de singeInherit the Wind. La production est lancée. Jugement à Nuremberg est une date dans l’histoire du cinéma.

Tout comme le procès des criminels de guerre en 1945, celui des hauts fonctionnaires du régime nazi se déroule à Nuremberg en 1948. Haywood, un vieux juge à la retraite désigné par les Etats-Unis, préside les séances. Quatre accusés sont présents. Trois plaident non-coupables, le quatrième, Janning, un juge à la réputation de haute probité, souhaite se taire, trouvant ce procès indigne et non fondé. Les pressions politiques deviennent de plus en plus fortes autour de la personnalité de Haywood. On lui demande d’être clément. Il s’y refuse. Il tente cependant de comprendre (« Je veux comprendre, vraiment, il le faut ! ») le comportement des accusés en discutant avec la veuve d’un général, pendu pour avoir commis des atrocités.

Stanley Kramer et Abby Mann font le pari de se concentrer uniquement sur le procès méconnu des Juges, survenu trois ans après la fin de la Seconde Guerre Mondiale et le procès des grands dirigeants nazis, alors que l’Allemagne et le reste de l’Europe entamaient leur reconstruction. Seulement voilà, ce ne sont pas des hommes comme les autres qui doivent faire face à la justice et répondre de leurs actes. Ceux-ci sont accusés d’avoir ordonné la stérilisation de Juifs ou d’avoir envoyé des milliers d’hommes dans les camps de la mort. Personne ne veut juger et la plupart s’en désintéressent, raison pour laquelle un vieux juge est appelé à la rescousse. Les tensions entre les Américains et les Soviétiques se resserrent. La guerre froide naît. Si le réalisateur adopte le point de vue du juge américain que le gouvernement américain a sorti de sa retraite pour venir conduire ce procès, Stanley Kramer préfère mettre les spectateurs dans sa peau comme témoin avant tout, comme vecteur.

Par un procédé aussi risqué qu’inventif, le cinéaste parvient à basculer de la langue allemande à l’anglais, pour offrir ainsi à ses comédiens un plus grand confort de jeu, mais aussi pour une meilleure exportation du film à l’international. Durant sa première plaidoirie, l’avocat Hans Rolfe (Maximilian Schell, qui reprend son rôle tenu dans le téléfilm), s’exprime tout d’abord en allemand, traduit en anglais par des traducteurs via un micro relié à des écouteurs portés par les américains. Par un effet de mise en scène inattendu, la langue bascule définitivement en anglais, tandis que les traducteurs continuent visiblement leur travail dans leur cabine. John McTiernan s’inspirera de ce subterfuge pour faire parler Sean Connery en anglais, après s’être rapidement exprimé en russe, dans A la poursuite d’Octobre Rouge. Jugement à Nuremberg peut alors véritablement démarrer.

180 minutes filmées comme un thriller ! Pas un seul moment de répit. Le spectateur est aspiré dans cet affrontement qui se tient essentiellement dans un tribunal. Stanley Kramer redouble d’inventivité derrière la caméra pour maintenir l’attention du spectateur (zooms sur les visages, sur les gestes, travellings, plans de grue), tandis que le grand chef opérateur Ernest Laszlo, collaborateur attitré de Robert Aldrich, capte les visages fatigués et les traits marqués des protagonistes. Certes, les dialogues sont très abondants, mais alors quelles répliques et surtout quels comédiens se font face et rivalisent de virtuosité ! Face à Spencer Tracy, impérial dans l’un de ses derniers rôles, apparaissent tour à tour Burt Lancaster (dans un rôle quasi-muet et qui ne s’exprime réellement qu’au bout de deux heures de film), Richard Widmark, dont le tempérament de feu explose l’écran une fois de plus, Marlene Dietrich qui représente l’Allemagne « victime » des atrocités du dictateur, Maximilian Schell, époustouflant et saisissant (lauréat de l’Oscar du meilleur acteur dans un second rôle et du Golden Globe du meilleur acteur dans un film dramatique), Judy Garland (bouleversante) et Montgomery Clift qui incarne la victime d’un faux procès qui a conduit à sa stérilisation en raison de ses troubles mentaux.

Entre deux plaidoiries, toutes plus extraordinaires les unes les autres, Stanley Kramer s’offre quelques moments pour permettre à ses personnages (et aux spectateurs) de souffler, en mettant le nez à l’extérieur, en suivant Haywood déambuler dans les rues de Nuremberg, près des habitations en ruine et des lieux où Hitler crachait ses discours devant ses admirateurs au bras levé. La rencontre d’Haywood avec madame Berthold (Marlene Dietrich) le place face au ressenti d’une nation tout entière, consciente d’être désignée comme coupable, mais également comme victime puisqu’inconsciente (ou non) des actes atroces commis par les nazis envers les juifs dans les camps de concentration. A ce titre, Jugement à Nuremberg reste également très célèbre pour la séquence où le colonel Ted Lawson (Richard Widmark) fait projeter à l’assemblée les (authentiques) images tournées durant la libération des camps, avec les corps dans les charniers, les enfants parqués, le fruit des expériences menées par les « scientifiques » du Troisième Reich.

Stanley Kramer expose les faits, les paroles tenues d’un côté et de l’autre. Bien sûr, l’issue est connue de tous, mais le cinéaste et Abby Mann (Oscar du meilleur scénario) vont plus loin en montrant que ces quatre monstres exposés à la vue de tous sont avant tout des êtres humains dont la pensée et les actes ont été « libérés » par un autre, grâce à son charisme, à son talent d’orateur, à son « patriotisme ». Les auteurs ne stigmatisent pas seulement les allemands (« si l’Allemagne est coupable, le monde l’est aussi, y compris les industriels américains qui ont participé au réarmement de l’Allemagne » déclare Rolfe), et démontrent que le mal est universel, qu’il n’a pas de visage et qu’il peut frapper à nouveau si nous n’y prenons pas garde.

Comment répondre à la question de la responsabilité individuelle et collective ? Comment sanctionner une nation alors que les Etats-Unis tentaient de s’en faire un allié contre les Soviétiques au tout début de la guerre froide ? Le jugement rendu par Hayward devrait être diffusé et étudié dans toutes les écoles, tandis que la dernière réplique du personnage – qui tombe comme un couperet – envers celui campé par un Burt Lancaster incroyable dans le rôle du démon conscient de ses actes, ne cesse de trotter dans la tête. Jugement à Nuremberg est un immense chef d’oeuvre. Sur onze nominations aux Oscars, le film est récompensé par deux statuettes, tandis que Stanley Kramer reçoit de son côté le Golden Globe du meilleur réalisateur.

LE BLU-RAY

Le Blu-ray de Jugement à Nuremberg, disponible chez Rimini Editions, repose dans un boîtier classique de couleur noire, glissé dans un surétui cartonné. Jaquette sobre, concentrée sur les visages des immenses stars du film. Le menu principal est fixe et musical. A noter que le film n’est pas présenté avec ses cartons d’ouverture, d’entracte et de fermeture diffusés à sa sortie, en raison de sa durée de 3 heures. Jugement à Nuremberg était sorti en DVD en 2004 chez MGM dans une édition aujourd’hui complètement obsolète.

Le premier supplément est une discussion entre l’auteur et scénariste Abby Mann et le comédien Maximilian Schell, réalisée en 2004 (20’). Si les deux intervenants passent un peu trop de temps à se féliciter l’un et l’autre (Abby Mann n’hésite pas à lui dire que le succès du film lui revient), ce rendez-vous permet d’en savoir plus sur la genèse et la première adaptation de Judgment at Nuremberg (dont nous parlons dans la critique), mais aussi et surtout de la performance de Maximilian Schell. Ce dernier évoque également son interprétation d’Ernest Janning (rôle tenu par Burt Lancaster dans le film) dans l’adaptation pour le théâtre, jouée à Broadway en 2001. Quelques anecdotes de tournage sont également au programme.

Karen Sharpe Kramer, épouse et veuve du cinéaste, évoque sa rencontre avec Stanley Kramer, les thèmes récurrents de l’oeuvre de feu son époux, sa passion pour le cinéma et son rapport aux comédiens (2004 – 14’30). Des photos de plateau de Jugement à Nuremberg viennent illustrer l’ensemble, ainsi qu’une intervention d’Abby Mann.

Ce dernier est de retour dans le dernier module intitulé La Valeur d’un seul être humain (6’), qui se focalise cette fois sur le verdict du juge Haywood, sur l’écriture de Jugement à Nuremberg et les intentions de l’écrivain.

L’interactivité se clôt sur la bande-annonce.

L’Image et le son

Oui de très nombreuses tâches, des points noirs et d’autres poussières apparaissent encore fréquemment à l’image, mais le master HD de Jugement à Nuremberg ne déçoit pas. Quelques images d’archives au tout début font craindre le pire, mais la vraie copie apparaît dès l’arrivée du juge Haywood à Nuremberg avec des transparences toutefois très artificielles sur les scènes en voiture. Pas de réducteur de bruit, le grain est présent, la gestion est même parfois aléatoire avec une image plus grumelée sur certains aplats. Les très nombreux gros plans regorgent de détails (la sueur sur la peau, les cicatrices sur le visage de Montgomery Clift, le maquillage de Burt Lancaster), le rendu des matières (les boiseries) est palpable, la copie est stable. Le N&B est peut-être un peu léger, mais les contrastes trouvent un équilibre plaisant.

Pas de son HD. On peut d’abord tiquer quant à la présence d’une piste anglaise Dolby Digital 5.1, mais celle-ci parvient à tirer son épingle du jeu du point de vue spatialisation de la musique et sur les scènes en extérieur, même si tout reste relatif et anecdotique. N’hésitez pas à sélectionner la mixage anglais PCM 2.0, la meilleure option de ce Blu-ray, même si l’écoute reste souvent étouffée et marquée par un souffle. La version française vaut surtout pour son casting royal composé de Serge Nadaud, Claude Bertrand, Raymond Loyer, Lita Ricio, Roger Rudel…

Crédits images : © MGM / Rimini Editions / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / La Nonne, réalisé par Corin Hardy


LA NONNE (The Nun) réalisé par Corin Hardy, disponible en DVD et Blu-ray chez Warner Bros. le 23 janvier 2019

Acteurs : Taissa Farmiga, Demian Bichir, Jonas Bloquet, Bonnie Aarons, Ingrid Bisu, Charlotte Hope, Sandra Teles, August Maturo…

Scénario : Gary Dauberman

Photographie : Maxime Alexandre

Musique : Abel Korzeniowski

Durée : 1h36

Date de sortie initiale : 2018

LE FILM

Quand on apprend le suicide d’une jeune nonne dans une abbaye roumaine, la stupéfaction est totale dans l’Église catholique. Le Vatican missionne aussitôt un prêtre au passé trouble et une novice pour mener l’enquête. Risquant leur vie, les deux ecclésiastiques doivent affronter une force maléfique qui bouscule leur foi et menace de détruire leur âme. Bientôt, l’abbaye est en proie à une lutte sans merci entre les vivants et les damnés…

En 2013, Conjuring : Les dossiers Warren, produit avec un budget modeste de 13 millions de dollars en rapporte 318 millions dans le monde. Bien que surestimé, le film de James Wan (Saw, Insidious 1 et 2) casse la baraque y compris en France avec plus d’1,1 million d’entrées. Annabelle n’est pas une suite, mais un spin-off préquel dirons-nous puisque l’action se déroule avant celle de Conjuring et se focalise sur « l’origine » de la poupée maléfique aperçue dans la salle des trophées du couple d’exorcistes dans l’oeuvre de James Wan. Un film à tout petit budget (5 millions de dollars !) pour surfer allègrement sur le triomphe de Conjuring et en espérant amasser le plus possible de billets verts. Avec 245 millions de dollars de recette et 1,5 million d’entrées en France, la mission est réussie. 2016, James Wan donne suite aux aventures des Warren avec Conjuring 2 : Le Cas Enfield : 315 millions de dollars récoltés. La Warner n’allait pas laisser passer l’opportunité de surfer sur le succès d’Annabelle en lui donnant une suite, une préquelle plutôt avec Annabelle 2 : La Création du mal, qui se permet de surpasser le premier volet au box office avec 305 millions de dollars de recette pour un budget de 15 millions. Une entreprise très lucrative. James Wan et les studios ont le nez fin. Sachant que le personnage de la Nonne maléfique de Conjuring 2 : Le Cas Enfield avait fait sensation auprès des spectateurs, un nouveau spin-off est encore imaginé. Voici donc tout simplement La Nonne The Nun, « premier » volet dans l’ordre chronologique des événements de la franchise et qui est devenu le plus grand succès commercial de la saga. S’il n’a rien de bien innovant, La Nonne est cependant une agréable surprise avec ses superbes décors gothiques, une photo élégante et une solide interprétation.

Par une sombre nuit de l’année 1952, deux nonnes terrifiées se rendent dans les catacombes de leur abbaye de Saint-Carta, en Roumanie. Après avoir ouvert une sinistre porte sur laquelle sont gravés les mots « Finit hic deo » (Dieu s’arrête ici), l’une des nonnes disparaît dans l’obscurité, tandis que l’autre, après s’être enfuie, finit par se pendre en se jetant par une fenêtre de l’abbaye. La nouvelle de sa mort se répand rapidement après la découverte de son corps pas un jeune paysan des environs. Or, le suicide étant considéré par l’Eglise comme un péché envers Dieu, un prêtre au passé trouble et une sœur novice sont missionnés par le Vatican pour mener l’enquête. Une fois sur place, les deux ecclésiastiques constatent que malgré son passé glorieux, l’abbaye est devenu un lieu sinistre et délabré, craint par les habitants de la région. Seul le paysan ayant découvert le corps de la nonne, un Québécois installé sur place depuis plusieurs années, accepte de les y accompagner. Leur première impression se révèle rapidement exacte puisqu’à peine arrivés sur place, après avoir été « accueillis » par la mère supérieure du couvent dissimulée sous un voile noir, le paysan se fait attaquer sur le chemin du retour par la nonne suicidée revenue d’entre les morts. Le prêtre et la novice ne sont pas non plus épargnés, puisque le premier, réveillé par l’apparition d’un jeune garçon qu’il n’a pu sauver quelques années auparavant, est enterré vivant, puis sauvé par la novice, elle-même attaquée à son tour par une nonne malfaisante. Il semble donc clair que de sombres forces sont à l’œuvre et les deux ecclésiastiques décident de mener l’enquête chacun de leur côté. Le prêtre s’occupe de rassembler des informations sur la présence maléfique, tandis que la novice part à la recherche des Sœurs.

Avec son personnage de religieuse peu catholique, son prologue et son épilogue, La Nonne fait évidemment le lien avec les autres épisodes et notamment le premier opus réalisé par James Wan. Non seulement ça, le personnage principal Sister Irene est interprété à l’écran par…Taissa Farmiga, la sœur de Vera Farmiga, alias Lorraine Warren dans les deux épisodes Conjuring. Un lien qui n’est pourtant pas utilisé dans le récit, mais qui n’en demeure pas moins troublant. D’ailleurs, en ce qui concerne les acteurs, outre l’excellente Taissa Farmiga (vue dans The Bling Ring de Sofia Coppola et La Mule de Clint Eastwood), nous retrouvons également le comédien mexicain Demián Bichir, qui plongé dans la pénombre rappelle un peu notre Gilles Lellouche national et qui s’impose dans le rôle du Père Burke. N’oublions pas le belge Jonas Bloquet, aperçu et apprécié chez Joachim Laosse (Elève libre), Guillaume Brac (Tonnerre) et Paul Verhoeven (Elle), dont la carrière internationale s’ouvre toujours un peu plus après un détour chez Luc Besson (Malavita, Valérian et la Cité des mille planètes) et McG (3 Days to Kill).

Nettement plus solide qu’Annabelle, La Nonne flatte les rétines avec ses décors naturels filmés en Roumanie, mais aussi son atmosphère et ses ambiances réussies. Le récit rappelle parfois Sanctuaire de Michele Soavi, chose amusante quand on sait que le premier long métrage du réalisateur Corin Hardy s’intitulait…Le Sanctuaire. Si les autres spin-off étaient également des projets bâtis uniquement pour remplir le tiroir-caisse de la Warner, La Nonne (à qui l’impressionnante Bonnie Aarons prête son visage émacié) peut compter sur la passion pour le genre horrifique du réalisateur.

S’il reste avare en scènes fortes et marquantes, le dernier tiers enchaîne les sursauts attendus et efficaces, après une longue, lente, mais maîtrisée exposition qui ne manque certainement pas de charme. En attendant un retour prévisible de la Nonne sur les écrans, nous pourrons découvrir d’ici là le troisième volet d’Annabelle, le troisième de Conjuring, tandis qu’un autre spin-off, consacré cette fois au Crooked-Man, l’Homme tordu aperçu dans Conjuring 2 : Le cas Enfield est en préparation. Le producteur James Wan a du pain sur la planche !

LE BLU-RAY

Le Blu-ray de La Nonne, disponible chez Warner Bros., repose dans un boîtier classique de couleur bleue et écolo (moins de plastique). Le menu principal est fixe et musical.

Une toute petite interactivité consacrée au dernier-né de la franchise Conjuring !

Le premier module de 5 minutes se contente de mettre en valeur la « nouvelle icône » du cinéma d’horreur, qui donne son titre au spin-off de la franchise Conjuring. James Wan, mais aussi les comédiens, le scénariste Gary Dauberman (lui-même à la barre du prochain Annabelle) et le réalisateur Corin Hardy présentent ce préquel de la saga, en se penchant surtout sur les conditions de tournage.

Le supplément suivant se concentre lui sur les lieux de tournage en Roumanie (6’), les décors naturels, ainsi que ceux reconstitués afin de donner vie à l’univers de La Nonne.

Le troisième bonus replace tout naturellement La Nonne dans l’univers cinématographique de Conjuring (4’).

L’interactivité se clôt sur 12 minutes de scènes coupées, intéressantes et qui auraient mérité d’être incluses au montage final.

L’Image et le son

On frôle l’excellence : relief, colorimétrie, piqué (acéré), contrastes (impressionnants), densité des noirs, on en prend plein les yeux. Les teintes froides s’allient avec les gammes chatoyantes, désaturées pour donner un aspect fifties, et chaque détail aux quatre coins du cadre large est aussi saisissant qu’étourdissant. Ce transfert immaculé soutenu par un encodage AVC solide comme un roc laisse pantois d’admiration. Heureusement, les scènes sombres sont logées à la même enseigne. Ce master HD de La Nonne permet de se plonger dans le film dans de superbes conditions.

Le spectateur est littéralement plongé dans l’atmosphère du film grâce aux mixages DTS-HD Master Audio 5.1 et Dolby Atmos anglais. Le moins que l’on puisse dire, c’est que ces options sonores ne font pas dans la dentelle. En effet, la composition est parfois trop mise à l’avant pour en mettre plein les oreilles et aurait mérité d’être un peu plus équilibrée sur l’ensemble des enceintes. Mais bon, nous sommes en plein « conte » fantastique et les latérales, ainsi que les frontales et le caisson de basses remplissent parfaitement leur fonction, à savoir distiller un lot conséquent d’effets qui font sursauter, même à bas volume. Les conditions acoustiques sont donc soignées, amples, précises, les voix des comédiens jamais noyées par tout le fracas sonore annexe. La version française bénéficie d’une piste Dolby Digital 5.1 qui parvient également à tirer son épingle du jeu même si l’ensemble se révèle évidemment en deçà de son homologue en terme de fluidité et d’homogénéité.

Crédits images : © Warner Bros. / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test 4K Ultra-HD / En eaux troubles, réalisé par Jon Turtletaub


EN EAUX TROUBLES (The Meg) réalisé par Jon Turtletaub, disponible en DVD, Blu-ray et Ultimate Edition – 4K Ultra HD + Blu-ray 3D + Blu-ray chez Warner Bros. le 22 décembre 2018

Acteurs : Jason Statham, Li Bingbing, Rainn Wilson, Cliff Curtis, Winston Chao, Ruby Rose, Page Kennedy, Robert Taylor, Ólafur Darri Ólafsson…

Scénario : Dean Georgaris, Jon Hoeber, Erich Hoeber d’après le roman « The Meg » de Steve Alten

Photographie : Tom Stern

Musique : Harry Gregson-Williams

Durée : 1h54

Date de sortie initiale : 2018

LE FILM

Au cœur de l’océan Pacifique, le sous-marin d’une équipe de chercheurs a été attaqué par une créature gigantesque qu’on croyait disparue : le Megalodon, un requin préhistorique de 23 mètres de long.
Le sauveteur-plongeur Jonas Taylor doit risquer sa vie pour sauver les hommes et les femmes prisonniers de l’embarcation… et affronter le prédateur le plus terrible de tous les temps. 

Vous vous souvenez des Dents de la mer ? Ce petit film de Steven Spielberg qui a juste révolutionné le cinéma de divertissement en 1975, au point de devenir le « premier » blockbuster, ça vous rappelle quelque chose ? Alors vous pouvez dormir tranquille, car ce n’est pas En eaux troublesThe Meg, réalisé par le « yes man » Jon Turtletaub qui détrônera le chef d’oeuvre de Steven Spielberg. Même si on s’y attendait, cette série B au budget colossal de 130 millions de dollars n’arrive pas à la cheville de Jaws. S’il y avait tout sur le papier pour nous réjouir, c’était sans compter sur la décision de la production de couper purement et simplement les séquences jugées trop « sanglantes ». Entre fausses promesses d’offrir aux spectateurs un film de genre aux séquences violentes et une sortie au cinéma finalement pour tout public, En eaux troubles a engrangé plus d’un demi-milliard de dollars et attiré 1,6 million de français dans les salles. Mais, malgré toute l’affection que l’on peut avoir pour Jason Statham, rien ou presque ne fonctionne dans ce produit sans âme et qui peine à remplir son cahier des charges de l’ « entertainment ».

Jonas Taylor est un ancien capitaine de la Marine et un plongeur spécialisé dans les eaux profondes. Il est recruté pour plonger dans l’océan Pacifique, pour sauver une équipe de scientifiques coincée dans l’épave d’un submersible attaqué et endommagé par un requin préhistorique de vingt mètres de long, connu sous le nom de Mégalodon. Engagé par un océanographe chinois, Taylor devra surmonter ses peurs et affronter une deuxième fois le prédateur qu’il a auparavant rencontré lors d’une expédition pour sauver des hommes et des femmes piégés dans les profondeurs de l’océan.

Franchement, ça aurait eu de la gueule, surtout avec Eli Roth – initialement prévu – à la barre qui souhaitait un film Rated R. Le britannique qui se retrouve face au plus grand requin du monde, un animal préhistorique en fait, avec des bouillons de sang autour des deux adversaires…mais cela restera de l’ordre du fantasme. En eaux troubles, aka The Meg ou bien encore Mégalodon chez nos amis québécois, ne parvient jamais à aller au-delà de son affriolant postulat de départ. Production sino-américaine oblige, l’action se déroule en plein océan Pacifique avec quelques comédiens chinois. Pour mettre en scène, en mouvement plutôt, ce récit, la Warner a confié le joujou à Jon Turtletaub, rescapé des années 1990 grâce aux succès de Rasta Rockett (1993) et Phénomène (1996) avec John Travolta, puis plus tard des deux Benjamin Gates (2004 et 2008) où Nicolas Cage se mettait à la recherche du Trésor des Templiers et du Livre des secrets. Après un passage à vide et deux pitreries oubliées dès leur passage dans les salles (L’Apprenti sorcier et Last Vegas), ce « maker » prend les commandes de cette attraction destinée à remplir le tiroir-caisse de la Warner durant l’été 2018. Le studio change alors son fusil d’épaule et coupe les scènes de carnage promises au public et sur lesquelles s’est vendu le film suite à l’achat des droits du roman de Steve Alten, Meg : A Novel of Deep Terror, publié en 1997. Le résultat à l’écran est navrant.

Non seulement Jon Turtletaub ne crée aucune tension à l’écran, mais il n’insuffle aucun rythme non plus. Les images glacées et bleutées sont compilées sans aucune gestion de la dramaturgie, chaque séquence agitée est expédiée à travers un montage chaotique. Tout cela, sans oublier la direction d’acteurs en tout point inexistante. Si Jason Statham n’est certes pas le comédien le plus expressif de la planète, sa prestation s’inscrit dans le top de ses pires performances. Ruby Rose continue sa collection de navets-nanars (on sauvera John Wick 2 hein) en affichant la même moue et ses tatouages. On préférera revoir Instinct de survie – The Shallows pour mater Blake Lively, ou même Peur bleue de Renny Harlin, sorti en 1999 au moment où Disney planchait justement sur l’adaptation du livre de Steve Alten. Au moins, on y rigolait bien et on ne ronflait pas comme devant ce truc bien trop sérieux et qui coûte presque trois plus cher.

LE BLU-RAY

En eaux troubles, disponible chez Warner Bros., est arrivé dan une édition Steelbook comprenant l’édition 4K du film, le Blu-ray standard et sa version 3D. Les suppléments sont disposés sur la version Blu-ray. Le menu principal est fixe et musical.

Hum…Pas grand-chose à se mettre sous la dent…Il faudra se contenter de deux featurettes promotionnelles, la première faisant office de making of officiel (12’), la seconde étant centrée sur la création du Meg (10’30). Les comédiens, quelques responsables des départements techniques et surtout le réalisateur Jon Turtletaub reviennent sur les conditions de tournage, la préparation à la plongée des comédiens et l’investissement de Jason Statham (grand absent de cette interactivité) dans ses scènes d’action.

L’interactivité se clôt sur une pub du genre « Viendez en Nouvelle-Zélande » avec l’équipe qui loue la beauté du pays et la facilité des prises de vue dans un cadre idyllique (2’).

Dommage de ne pas pouvoir bénéficier des scènes coupées…

L’Image et le son

Evidemment, c’est absolument fabuleux ! L’image UHD est tellement ahurissante que l’on parvient à distinguer les égratignures, les cicatrices, et la nageoire dorsale du Meg qui comporte des trous et des traces de morsure. Disque de démonstration, l’édition 4K d’En eaux troubles aveugle avec ses scènes diurnes luminescentes, la transparence de l’eau, ses bleus tétanisants, son piqué acéré comme la lame d’un scalpel et ses contrastes d’une densité abyssale (oh oh). Ajoutez à cela des détails à foison aux quatre coins du cadre large et des noirs sublimes, et vous obtenez ce qui s’avère probablement un des plus impressionnants master 4K actuellement sur le marché.

Sans surprise, dès l’apparition du logo Warner, le fracassant et immersif mixage Dolby Atmos-True HD anglais exploite les latérales dans leurs moindres recoins, et ce jusqu’à la fin du film. C’est peu dire que The Meg met à mal toute installation acoustique digne de ce nom. La musique de Harry Gregson-Williams (Seul sur Mars, The Town) bénéficie d’une spatialisation percutante et systématique, les effets en tout genre, déflagrations et ambiances annexes foisonnent sans jamais noyer les dialogues. A titre de comparaison, la piste française Dolby Digital 5.1 fait pâle figure face à son homologue du point de vue homogénéité car trop rentre-dedans et manque singulièrement de finesse. Les rares séquences calmes jouissent d’un beau traitement de faveur. N’oublions pas le caisson de basses qui ne tient pas en place sur le sol et fait vibrer les murs. Top démo là encore si vous désirez épater la galerie !

Crédits images : ©
2018 WARNER BROS. ENTERTAINMENT INC., GRAVITY PICTURES FILM PRODUCTION COMPANY, AND APELLES ENTERTAINMENT, INC. / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test DVD / Guy, réalisé par Alex Lutz

GUY réalisé par Alex Lutz, disponible en DVD le 9 janvier 2019 chez Studiocanal

Acteurs : Alex Lutz, Tom Dingler, Pascale Arbillot, Brigitte Roüan, Dani, Nicole Calfan, Élodie Bouchez, Bruno Sanches…

Scénario : Alex Lutz, Thibault Segouin, Anaïs Deban

Photographie : Mathieu Le Bothlan

Musique : Vincent Blanchard, Romain Greffe

Durée : 1h37

Date de sortie initiale : 2018

LE FILM

Gauthier, un jeune journaliste, apprend par sa mère qu’il serait le fils illégitime de Guy Jamet, un artiste de variété française ayant eu son heure de gloire entre les années 60 et 90. Celui-ci est justement en train de sortir un album de reprises et de faire une tournée. Gauthier décide de le suivre, caméra au poing, dans sa vie quotidienne et ses concerts de province, pour en faire un portrait documentaire.

C’est la grande surprise de la fin d’été 2018. Guy, second long métrage réalisé par Alex Lutz est un documenteur passionnant, troublant, fascinant et surtout merveilleusement interprété. Né à Strasbourg en 1978, Alexandre Lutz aka Alex Lutz, fait ses débuts au cinéma en 2008 dans Les Femmes de l’ombre de Jean-Paul Salomé. Parallèlement à son succès sur scène, il apparaît dans OSS 117 : Rio ne répond plus (2009), puis dans moult comédies pas franchement réussies (euphémisme) comme La Croisière, Bowling, Turf, Les Visiteurs : La Révolution, Les Aventures de Spirou et Fantasio. Pourtant, malgré la qualité « relative » de ces films, Alex Lutz a toujours brillé à chaque apparition. Pour son spectacle sobrement intitulé Alex Lutz, il se voit récompenser par le Molière de l’humour en 2016. A la télévision, depuis 2012 sur Canal+, il interprète la blonde du tandem Catherine et Liliane, aux côtés de son comparse l’excellent Bruno Sanches, dans la revue de presse du Petit Journal de Yann Barthès. En 2015, il passe tout naturellement de l’autre côté de la caméra avec sa première mise en scène, Le Talent de mes amis, qui passe complètement inaperçu. Trois ans plus tard, débarque ce Guy dont on n’attendait rien ou pas grand-chose, et qui pourtant s’impose comme une très grande réussite. En reprenant le personnage d’un de ses sketchs joué à la cérémonie des Molières, Alex Lutz explose littéralement à l’écran. Un rôle qui le place en grand favori pour le César du meilleur acteur. Le film est d’ailleurs nommé dans trois autres catégories, meilleur réalisateur, meilleur film et meilleur scénario original.

Après avoir vu le film, le personnage de Guy nous accompagne. Son lent débit, ses doigts qui tiennent une cigarette fine, son regard qui semble toujours perplexe, sa bouche souvent ouverte (on a l’impression de voir André Dussollier), ses gestes ralentis, ses tâches de vieillesse (incroyable maquillage qui nécessitait plus de 4 heures pour transformer Alex Lutz), son dos courbé, ses cheveux blancs qui volent au vent. Guy c’est l’incarnation d’une idole qui a vieilli en même temps que ses fans. Si le film est souvent ponctué de répliques drôles et vachardes, Guy est une œuvre furieusement mélancolique. La tirade finale sur le temps qui passe, sur la postérité, sur le souvenir et la transmission foudroie le spectateur en plein coeur et il est alors difficile de retenir ses larmes.

Sous couvert d’un vrai documentaire sur une fausse star de la chanson française (inspiré d’Herbert Léonard, Guy Marchand, Michel Delpech, Julien Clerc, Frank Michael et bien d’autres), Alex Lutz, également auteur avec Vincent Blanchard et interprète des chansons originales créées spécialement pour le film (un vrai répertoire), s’interroge sur la brièveté de l’existence, en nous donnant envie de profiter au maximum du peu de temps qui nous est imparti. Film étonnamment riche et complexe, Guy délivre son message de façon subliminale, tandis que nous admirons le jeu d’Alex Lutz, qui nous fait croire à ce personnage, y compris une fois le film terminé. L’acteur-réalisateur s’entoure de solides comédiens, la géniale et trop rare Pascale Arbillot dans le rôle de la compagne dévouée et qui équilibre son compagnon, Tom Dingler qui incarne Gauthier, dont le spectateur adopte le point de vue du début à la fin, celui d’un fils qui découvre son père (qui ne sait rien de cette paternité), qui l’observe, qui le découvre, qui apprend à l’aimer. Nicole Calfan, Dani, Elodie Bouchez, Brigitte Roüan, Bruno Sanchez, ainsi que quelques vedettes de la radio et de la télévision participent à l’authenticité du film, tout comme les reconstitutions des shows à la Maritie et Gilbert Carpentier façon Podium.

Guy est le portrait d’un artiste quelque peu oublié des médias, qui n’a pourtant jamais cessé de travailler. C’est aussi une déclaration d’Alex Lutz envers son public, puisqu’on y ressent une envie folle d’aimer et d’être aimé. Pour résumer, Guy, présenté à la Semaine de la Critique du festival de Cannes, est un vrai petit miracle, un futur film culte et probablement le meilleur biopic jamais consacré à un artiste français.

LE DVD

Guy s’est malheureusement soldé par un échec dans les salles, d’où l’absence d’édition HD pour ce titre. Le DVD repose dans un boîtier Amaray classique de couleur noire. La jaquette reprend le visuel de l’affiche. Le menu principal est fixe et musical.

Pas grand-chose en guise de suppléments…quatre teasers d’une minute chacun, qui font également office de scènes coupées avec Guy à la radio, avec ses fans, avec Sophie et avec son webmaster.

L’Image et le son

A l’instar d’un réel documentaire ou d’un reportage pris sur le vif, le film d’Alex Lutz est la plupart du temps filmé à l’épaule. La copie est quasi exempte de défauts. Le piqué est constamment acéré sur les plans rapprochés, la colorimétrie est vive, la clarté fort agréable. Seules les séquences tournées en basse lumière apparaissent moins définies. Les contrastes sont soignés, le relief est indéniable et les séquences diurnes n’ont rien à envier à un transfert HD traditionnel.

Contrairement à ce que l’on pouvait attendre, la piste Dolby Digital 5.1 instaure quelques petites ambiances latérales au moment des séquences de concert ou même en extérieur. Les dialogues sont clairs et se détachent sans mal sur la centrale. La stéréo est également de fort bon acabit et dynamique à souhait. L’éditeur joint également les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant, ainsi qu’une piste Audiodescription.

Crédits images : © Apollo Films / Studiocanal / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

 

Test Blu-ray / Arrow, saison 6

ARROW– SAISON 6, disponible en DVD et Blu-ray  le 28 novembre 2018 chez Warner Bros.

Acteurs : Stephen Amell, Katie Cassidy, David Ramsey, Willa Holland, Paul Blackthorne, Emily Bett Rickards, John Barrowman, Colton Haynes, Manu Bennett, Caity Lotz, Susanna Thompson, Echo Kellum…

Musique : Blake Neely

Durée : 22 épisodes de 43 minutes + 4 épisodes du crossover Crisis on Earth-X (avec Supergirl, Flash et DC’s Legends of Tomorrow)

Date de sortie initiale : 2017-2018

LA SAISON 6

Quelques mois après l’affrontement explosif avec Adrian Chase sur l’île de Lian Yu, Oliver jongle toujours entre ses responsabilités de maire et sa mission de justicier. Pour l’aider à protéger les habitants de Star City, son équipe reste soudée à ses côtés, même si tout le monde ne s’en est pas sorti indemne du cauchemar vécu sur Lian Yu. Une solidarité d’autant plus précieuse que leurs ennemis ne leur laissent pas de répit. Cayden James, le chef de Helix s’en prend désormais à l’équipe Arrow avec pour but de se venger du justicier en recrutant plusieurs mercenaires et connaissances d’Oliver dont Black Siren.

Difficile de se renouveler après 5 saisons et 115 épisodes ! Surtout après une cinquième saison épique, l’une des plus grandes du show, qui avait su apporter un vent de fraîcheur et qui reposait entre autres sur le meilleur bad-guy de la série, Prometheus. Après le final dantesque sur Lian Yu, la sixième saison démarre mollement et n’est clairement pas à la hauteur des espérances. Comme souvent, il faut attendre le crossover pour que la nouvelle saison d’Arrow démarre véritablement. Un bon tiers des épisodes font du surplace avec des intrigues éculées, indépendantes, où l’on nous ressert même Deathstroke, vedette d’un double-épisode, celui de sa quête de rédemption. Les auteurs tournent en rond, nous font croire qu’un cyber-terroriste machiavélique, Cayden James (Michael Emerson, lisse) sera le grand adversaire d’Oliver et de sa clique durant ces 23 épisodes. Pour secouer un peu la fourmilière, les scénaristes ont décidé cette saison de semer la discorde au sein de l’équipe de justiciers, au point de les séparer en deux équipes distinctes. Oliver se retrouve donc seul avec John et Felicity, tandis que Curtis (Echo Kellum, très bon), Rene (Rick Gonzalez, bad-ass) et Dinah font comme qui dirait « chambre à part ». Cette séparation fait partie du plan de celui qui manipule en réalité tout ce beau monde, Ricardo Diaz. Ce dernier est interprété par le convaincant Kirk Acevedo (Oz), qui possède la voix d’Al Pacino et une part de son charisme animal.

Le problème, c’est que les showrunners mettent bien trop de temps pour dévoiler le pot aux roses et que le peu d’intérêt des épisodes précédents finit par s’effondrer. Comme bien souvent, quelques personnages sont sacrifiés au fil des saisons. Cette fois, Paul Blackthorne aka Quentin Lance, dans sa dernière apparition dans la série, est vraiment insupportable. Il est malheureusement peu aidé par une intrigue bien trop récurrente en ce qui le concerne, autrement dit le deuil impossible de sa fille Laurel. Les scénaristes eux-mêmes ont avoué par la suite qu’ils ne savaient plus quoi lui faire faire. Il n’est pas le seul à être évincé devant le peu d’inspiration des auteurs, qui ont décidément trop de personnages à gérer, et contre toute attente c’est également au tour de Willa Holland (Thea Queen) de quitter (provisoirement?) le show.

Pour résumer (avec spoilers) cette saison diffusée du 12 octobre 2017 au 17 mai 2018 sur The CW, aux États-Unis : Cinq mois ont donc passé depuis l’explosion de Lian Yu. Oliver (Stephen Amell, qui n’a eu de cesse de s’améliorer au fil des saisons est ici parfait) a repris son poste de maire ainsi que le costume de Green Arrow. Il a recueilli son fils William, sa mère Samantha étant morte sur l’île. Sur le terrain, Oliver et son équipe doivent arrêter Alex Faust, terroriste spécialiste des explosifs financé par Black Siren (l’insupportable Katie Cassidy), que tous pensaient morte sur Lian Yu. À la suite de la révélation de la photo d’Oliver dans le costume de Green Arrow, Oliver fait l’objet d’une campagne de presse insistante et d’une enquête du FBI. Oliver ne peut donc pas renfiler le costume sans risquer d’être démasqué ni d’être tué et laisser William orphelin, mais Anatoly Knazyev revient à Star City pour s’en prendre à une délégation markovienne. Dinah (la sexy Juliana Harkavy) voit que Diggle (David Ramsey au jeu soporifique) cache la vérité sur sa condition qui le retient d’utiliser son arme sur le terrain. Sous le coup d’une enquête du FBI et avec son fils qui a besoin de sa présence, Oliver a confié le costume de Green Arrow à Diggle (rires). Dinah s’inquiète que la condition physique du nouvel archer ne soit un danger pour l’équipe, mais devant une unité para-militaire cherchant à mettre la main sur un gaz neurotoxique, c’est la capacité de Diggle à faire des choix difficiles qui pose problème.

Oliver consacre plus de temps à son fils, mais pour l’aider dans ses études, il préfère demander de l’aide à Felicity (Emily Bett Rickards, en retrait dans cette saison). Black Siren réapparaît à Star City et laisse les corps de personnes a priori sans histoire. Felicity ne peut les aider à faire le lien car Alena l’appelle au secours : Cayden James, le pirate informatique qu’elle a malgré elle fait libérer, s’est retourné contre Helix et a un plan visant à détruire le réseau Internet. Pendant ce temps, Oliver part avec Slade Wilson pour Kasnia, où Joe, le fils de Slade, est prisonnier. Slade espère utiliser une voie diplomatique pour le libérer. Diggle est donc chargé de défendre Star City alors que le « Justicier » réapparaît avec dans son viseur, la conseillère Pollard, qui défend son décret anti-justiciers. L’agent spécial Watson interroge un à un les amis de Oliver. Tandis que Slade continue de découvrir ce qu’est devenu son fils, Oliver cherche un moyen d’empêcher les attentats prévus par les Chacals. Pendant ce temps, Green Arrow mène l’équipe dans une bataille contre le « Dragon », un criminel du nom de Ricardo Diaz qui assassine et vole de la technologie coûteuse à Star City afin de fabriquer des drogues très puissantes et qui s’avère être le dealer auprès de qui John Diggle s’approvisionne afin de contrôler ses tremblements. Oliver est arrêté pour les crimes du Green Arrow alors que Black Siren et Cayden James réapparaissent pour dérober de quoi construire une bombe dévastatrice. La santé de John empire et personne n’est de taille à être le Green Arrow contre la menace.

A la fin du crossover en quatre parties (voir notre chronique sur la quatrième saison de Flash), Oliver et Felicity célèbrent leur mariage lors d’une grande réception. Mais rapidement, leurs missions les rappellent : l’agent Watson a un témoin prêt à dénoncer Oliver sous serment, visiblement un membre de l’équipe, et au même moment, Black Siren enlève Quentin Lance pour forcer le Green Arrow à voler un bien détenu par ARGUS. Devant l’importance des enjeux, Oliver commence à remettre en question la confiance qu’il a en son équipe. L’équipe se sépare. Oliver se retrouve seul à affronter sur le terrain Cayden James, mais il a la surprise de voir que le hacker s’est associé avec plusieurs ennemis de Green Arrow. Cayden James commence une vague de piratage des infrastructures de Star City et les premières victimes se font vite connaître. Oliver se prépare à agir à la fois en tant que maire et Green Arrow, tout en espérant une collaboration avec ses anciens alliés. Oliver et John découvrent que le Vigilante est un agent double et collabore avec Dinah, Curtis et Rene pour faire tomber Cayden James. L’ARGUS s’étant montré incapable de contrer la menace du hacker sur Star City, Oliver accepte l’aide du justicier. Quentin pense pouvoir se rapprocher de Laurel. Felicity et Alena parviennent à prouver que la vidéo du meurtre d’Owen James a été trafiquée. Cayden James lance alors un dernier ultimatum : lui livrer ses trois anciens partenaires en vie avant minuit ou la bombe qui rasera Star City explosera. Mais Dinah est résolue à saisir la première opportunité pour tuer Black Siren.

La mort de Cayden James met Star City et son maire, Oliver Queen, dans une situation délicate : les 70 millions extorqués par le hacker ont disparu et Star City risque la faillite totale. Felicity découvre que c’est Black Siren qui a récupéré l’argent, avant de disparaître. L’autre Laurel a en fait été recueillie par Quentin en secret, persuadé de pouvoir la ramener dans le droit chemin. Black Siren s’est rendue à la police de Star City en se présentant comme Laurel Lance. Sa disparition soudaine permet de découvrir que c’est Ricardo Diaz qui tire les ficelles depuis la mort de Cayden James et qu’une partie de la police est sous ses ordres. Oliver a un autre objectif : Roy Harper a été capturé et torturé pour témoigner contre lui, et Thea veut le faire libérer. Thea se prépare pour une nouvelle vie avec Roy loin de Star City mais Nyssa al Ghul revient avec à ses trousses une nouvelle ligue des Assassins fondée avant sa mort par Malcolm Merlyn. Thea reconsidère alors son avenir tout comme Oliver qui peine à redonner le costume de Green Arrow à John. Dinah et Curtis continuent à démasquer un à un les policiers corrompus par Diaz. À mesure qu’Oliver combat le réseau de Ricardo Diaz, il découvre à quel point il s’étend dans Star City. John comprend qu’Oliver ne lui rendra pas le costume de Green Arrow, ce qui le met dans une colère sourde qu’il ne s’explique pas. Oliver, dans son premier costume d’Arrow, se lance dans une opération suicide, affrontant à lui seul les policiers corrompus qui protègent Ricardo Diaz. Quelques heures auparavant, il se débattait avec le conseil municipal qui envisage de lancer la procédure de destitution et constatait sa solitude alors que tous ses anciens alliés sont partis.

Ricardo Diaz quitte Star City avec Laurel pour la nouvelle étape de son plan : obtenir un rendez-vous avec les dirigeants du Quadrant, une organisation criminelle secrète mais puissante. Laurel va avoir l’occasion de découvrir ce qui pousse son partenaire à toujours prévoir un plan de longue durée. Oliver agit désormais seul comme justicier dans Star City. Felicity n’assurant plus ses arrières, elle se plonge dans le travail d’Helix avec Curtis. Rene sort de l’hôpital, prêt à renfiler le costume de Wild Dog et combattre le réseau de Diaz. Les Outsiders vont tomber sur une opération du Quadrant, déjà surveillée par ARGUS et Diggle. Oliver prend le risque de confronter Knazyev avec une offre : il peut réintégrer la Bratva s’il le souhaite, mais l’ancien Pakhan affirme renoncer à l’honneur de son ancien clan pour rester fidèle à Diaz, même s’il n’a aucun honneur. À peine prend-il le siège de maire que Quentin Lance découvre que Laurel est restée aux ordres de Diaz.

Le procès d’Oliver Queen pour ses actes de vigilantisme commence et Diaz a tout fait pour que le verdict soit coupable. Alors que les témoins défilent et que certains remettent en question leur allégeance envers le Dragon, Diggle a prévu un plan pour sortir Oliver libre du procès. Puisque Ricardo Diaz n’a pas réussi à faire tomber Oliver Queen et l’envoyer en prison, il change de plan et lance toutes ses forces pour le tuer avec son entourage. Les justiciers doivent se réunir avec le soutien d’ARGUS, mais aussi leur atout : Anatoly Knyazev, qui joue les agents doubles avec Diaz. Avec son arrangement avec Samandra Watson, Oliver a désormais le soutien du FBI pour démanteler le réseau de Ricardo Diaz au sein de Star City. Quentin Lance, en tant que maire et père d’adoption de Black Siren, devient la cible des pressions de Diaz. Pendant le combat, Oliver se réconcilie avec ses anciens alliés, prêt à leur confier la tâche de protéger la ville.

Quant au dénouement…nous ne le révélerons pas ici, mais cette saison 6 en demi-teinte n’est clairement pas à la hauteur de la précédente. La faute à trop d’épisodes qui ne servent tout simplement à rien. Cette fois, une bonne moitié de la saison rame trop pour retenir l’attention. n’ayant plus recours à l’intrigue parallèle sous forme de flashbacks, procédé qui commençait à s’épuiser et à fatiguer les spectateurs, les showrunners ont perdu leur appui quand ils étaient en manque d’inspiration. C’est donc ici flagrant puisqu’ils doivent désormais se concentrer sur le présent de leurs personnages, qui tournent souvent en rond, pour revenir à leur point de départ. Les spectateurs américains commencent d’ailleurs à se lasser puisque cette saison a enregistré les pires audiences depuis le début de la série. Nous l’avons déjà évoqué, mais le crossover en quatre épisodes est en revanche passionnant, excellemment réalisé et se permet même de surpasser la plupart des films DC Comics en dosant parfaitement l’action, l’humour, l’émotion, avec d’excellents effets visuels. Néanmoins, la saison va en s’améliorant et il faut s’armer de patience (beaucoup trop de longueurs, de redondances) car cela vaut franchement la peine. La série n’a jamais été aussi brutale et la violence de certaines séquences étonne. Diaz est un antagoniste très intéressant, torturé à souhait, déchaîné, cinglé et ses actes feraient parfois passer Deathstroke pour un enfant de choeur. L’épisode qui lui est entièrement consacré est d’ailleurs l’un des meilleurs de la saison.

Malgré cette semi-déception, on a quand même hâte de découvrir la septième saison (diffusée actuellement) afin de voir si les auteurs sauront cette fois être à la hauteur du twist qui clôturait la précédente. D’autant plus que la fin de la série est cette fois indéniablement envisagée.

LE BLU-RAY

La sixième saison d’Arrow en Blu-ray, disponible chez Warner Bros., se compose de quatre disques placés dans un boîtier classique de couleur bleue, glissé dans un surétui cartonné. La liste des épisodes apparaît au verso, tout comme celle des suppléments. Le menu principal est identique sur les quatre Blu-ray, fixe et musical, qui reprend le visuel de la jaquette. Signalons que l’éditeur a eu la bonne idée de proposer l’intégralité de l’épisode crossover divisé sur les quatre séries DC. Cette édition se compose donc de 26 épisodes de 42 minutes.

Sur le premier disque, nous trouvons un module consacré au parcours de Slade Wilson aka Deathstroke au fil des précédentes saisons, jusqu’à son apparition dans la saison 6 (12’). Un bonus classique, composé d’images d’épisodes et d’interviews des producteurs.

Le second Blu-ray contient un débat bien rythmé entre les producteurs des séries DC, qui répondent aux questions de l’animateur Hector Navarro (42’) sur la création de l’énorme crossover, Crisis on Earth-X, composé des épisodes 8 de Supergirl, Arrow, Flash et DC’s Legends of Tomorrow. C’est ici que vous apprendrez chacune des étapes ayant conduit à cette histoire de tentative d’invasion de la Terre par des soldats nazis issus d’un monde dystopique appelé Terre-X. Les spoilers sont évidemment au rendez-vous. Chacun aborde la difficulté d’écrire pour une vingtaine de personnages réunis à l’écran et sur les défis finalement relevés.

Sur le troisième disque, l’éditeur propose un supplément sur le personnage de Cayden James (11’). Même chose que pour Deathstroke, les producteurs et scénaristes se contentent de paraphraser ce qui se passe dans la série. Alors attention aux spoilers très nombreux !

L’interactivité se clôt sur un best-of du Comic-Con 2017 avec notamment un résumé des présentations des nouvelles saisons de Supergirl, Flash, Arrow, DC’s Legends of Tomorrow et Gotham (58’).

L’Image et le son

Les épisodes sont proposés au format HD (1080p, AVC). Les couleurs sont froides, toujours marquées par quelques touches vertes, caractéristiques du personnage principal. Le piqué est acéré, les contrastes au top et la profondeur de champ très appréciable. Les séquences diurnes sont éclatantes et les scènes de nuit sont aussi bien définies. Warner Bros. met la barre haute et prend soin de l’arrivée de Arrow dans les salons avec même un léger et élégant grain typique du tournage avec la caméra Arri Alexa. Le résultat est superbe et la promotion HD indispensable.

Sans surprise, seule la version originale est livrée au format DTS-HD Master Audio 5.1. Privilégiez évidemment cette option qui instaure un confort acoustique digne des plus grands blockbusters avec une spatialisation tonitruante, des effets latéraux à foison, une percutante délivrance des dialogues et une balance frontale explosive. Mention également au caisson de basses très souvent sollicité dans les scènes d’action. Les réfractaires à la V.O. devront se contenter d’une toute petite VF Dolby Digital 2.0 Stéréo au doublage nian-nian souvent indigne de la série. Etrangement, les allemands disposent d’un mixage Dolby Digital 5.1.

Crédits images : © Warner Bros. / DC Comics / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test DVD / The Black Cage, réalisé par Sadrac González-Perellón

THE BLACK CAGE (Black Hollow Cage) réalisé par Sadrac González-Perellón, disponible en DVD le 8 janvier 2019 chez Rimini Editions

Acteurs : Julian Nicholson, Lowena McDonell, Lucy Tillett, Haydée Lysander, Marc Puiggener, Daniel M. Jacobs, Will Hudson…

Scénario : Sadrac González-Perellón

Photographie : Iván Romero

Musique : Sergio Ramis

Durée : 1h41

Date de sortie initiale : 2017

LE FILM

Une jeune fille vit dans une maison isolée, au cœur des bois, avec son père et son chien loup. A la suite d’un accident, elle a perdu un bras. Que lui est-il arrivé ? Dans la forêt, elle découvre un mystérieux cube noir. Il semble avoir la faculté d’agir sur le passé…

Etrange film que The Black Cage aka Black Hollow Cage en version originale, premier long métrage réalisé en solo de l’espagnol Sadrac González-Perellón, après quelques courts aux très beaux titres (La jaula o Analogía de los pájaros, El señor cuello largo) et une mise en scène à deux têtes avec Sonia Escolano sur Le Départ de Myna (2009). Sur The Black Cage, il officie en tant que directeur de casting, designer du cube, opérateur caméra, producteur, scénariste et bien évidemment réalisateur. The Black Cage est une proposition de science-fiction intéressante sur le papier, mais qui peine à maintenir l’intérêt du spectateur du début à la fin. Les partis pris sont froids, glacials même, la mise en scène essentiellement composée de plans fixes peut dérouter et les enjeux sont somme toute limités. Néanmoins, il y a là une vraie personnalité, une âme, un ton, une forme qui ne peuvent laisser indifférents.

Le décor avec cette villa moderne constituée de grandes baies vitrées et perdue dans les bois rappelle celui d’Ex Machina, très grand film d’Alex Garland. La ressemblance est même troublante. On pense également au poussif (pour ne pas dire chiant) Morgane de Luke Scott avec cette jeune fille étonnante cloîtrée dans un environnement high-tech. Sans tomber dans l’ennui du second, mais loin de la virtuosité du premier, The Black Cage manque de chair. Beaucoup plus convaincant sur la forme que sur le fond, le film de Sadrac González-Perellón s’apparente à une œuvre de mathématicien, avec des événements calculés qui renvoient à d’autres, qui eux-mêmes sont la résultante d’autres éléments narratifs, puisque The Black Cage évoque le voyage dans le temps. Le problème c’est que tout est tellement figé, qu’il ne se crée aucune empathie, y compris pour Alice, interprétée par Lowena McDonell, qui passe très bien à l’écran et qui participe à la part de mystère distillée par l’intrigue, mais qui est finalement peu aidée par un personnage cloisonné et réduit au maximum.

Du coup, ce drame intimiste sur le deuil impossible se regarde essentiellement comme une expérience, tout ce qui tourne autour du bras mécanique et à la rééducation de la jeune fille amputée interpelle, tout comme cette chienne « parlante » qu’Alice appelle « maman », croyant que sa mère s’est réincarnée dans le canidé. Mais rien ou presque ne touche jamais vraiment les spectateurs, surtout dans le dernier tiers où le récit part dans tous les sens, au risque de perdre les spectateurs qui auront eu la patience d’arriver jusque-là. Certaines séquences étonnent par leur violence graphique, sèche, asphyxiante, osée même puisqu’elles mettent en scène des enfants. Les images sont belles, rien à redire là-dessus et le travail du chef opérateur Iván Romero est soigné avec sa photo entre chaud et froid, le reflet des vitres omniprésentes et ce cube étrange planté dans la forêt qui n’est pas sans rappeler le monolithe de 2001, l’Odyssée de l’espace.

The Black Cage ressemble à un film de fin d’études. On sent le potentiel de Sadrac González-Perellón, qui aime le genre, l’anticipation, la science-fiction, mais il lui faudrait un vrai sujet pour éviter de tomber dans cet écueil popularisé par Christopher Nolan, qui consiste à juxtaposer des images au vernis glacé, sans rythme, à la B.O. pompeuse, en espérant être considéré comme un nouveau prodige du cinéma. Sadrac González-Perellón a encore le temps de faire ses preuves. En tout cas, même s’il apparaît trop épuré, The Black Cage témoigne d’un vrai sens esthétique et c’est déjà pas mal.

LE DVD

The Black Cage apparaît dans les bacs français sous l’égide de Rimini Editions. Le visuel de la jaquette est suffisamment étrange pour attirer la curiosité du cinéphile. Le menu principal est animé et musical.

Seule la bande-annonce est disponible comme supplément.

L’Image et le son

Pas d’édition HD pour The Black Cage, mais un DVD de fort bonne qualité avec une copie éclatante dans les scènes diurnes (en forêt principalement) et aux contrastes élégants sur les séquences sombres et nocturnes. La colorimétrie est froide, aux teintes bleutées et vertes, la définition est solide, les noirs denses. Les visages sont peut-être un peu trop lisses, mais les détails ne manquent pas sur les décors. Notons également que le format 2.39 indiqué sur la jaquette semble recadré.

Seule la version originale est disponible. La piste Dolby Digital 5.1 instaure quelques ambiances sur les latérales avec le chant des oiseaux ou les insectes nocturnes. Quelques pics musicaux profitent également au caisson de basses. Les voix se détachent sans problème sur la centrale.

Crédits images : © Asallam Films / Rimini Editions / Captures DVD : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / La Folle journée de Ferris Bueller, réalisé par John Hughes

LA FOLLE JOURNÉE DE FERRIS BUELLER (Ferris Bueller’s Day Off) réalisé par John Hughes, disponible en Blu-ray le 9 janvier 2019 chez Paramount Pictures

Acteurs : Matthew Broderick, Alan Ruck, Mia Sara, Jeffrey Jones, Jennifer Grey, Cindy Pickett, Lyman Ward, Charlie Sheen…

Scénario : John Hughes

Photographie : Tak Fujimoto

Musique : Ira Newborn

Durée : 1h43

Date de sortie initiale : 1986

LE FILM

Un jour de printemps, Ferris décide de prendre le large loin du centre-ville de Chicago. En quête de liberté, il sèche les cours, s’enfuit avec sa petite amie et son meilleur copain. Le proviseur se lance à leurs trousses. Mais quand on est malin, courageux et qu’on roule en Ferrari la vie à 17 ans ne peut être que merveilleuse…

La vie bouge bien trop vite. Si tu ne t’arrêtes pas de temps en temps, elle peut te filer entre les doigts.

C’est toujours très difficile de s’attaquer à un film culte qui a su marquer plusieurs générations, qui continue de faire de nouveaux adeptes et sur lequel les années qui passent ont peu d’emprises. La Folle journée de Ferris BuellerFerris Bueller’s Day Off fait partie de ces chefs d’oeuvre, le quatrième consécutif pour John Hughes après Seize bougies pour Sam, The Breakfast Club et Une créature de rêve, qui se transmettent, vers lesquels on se dirige instantanément en cas de coup de blues et qui vous requinquent en moins de deux dès que vous récitez les dialogues en même temps que les personnages comme un film-karaoké. Ferris Bueller crève l’écran au point de briser également le quatrième mur et en s’adressant directement au spectateur. Procédé casse-gueule, ici virtuose, tandis que résonne encore le Chick chicka chicka du tube de Yello, Oh Yeah. Immense masterpiece, capolavoro, bref c’est valable dans toutes les langues, La Folle journée de Ferris Bueller est également l’une des pierres fondatrices de la comédie américaine des années 1980, 1990, 2000, 2010, que l’on citera sûrement encore en 2020.

A Chicago, le jeune Ferris Bueller est devenu une véritable idole dans son lycée. Rusé, débrouillard et charmeur, il a séduit tous ses proches à l’exception de Jeanie, sa soeur, et d’Ed Rooney, le proviseur de l’établissement, qui ne le connaissent que trop bien. Une fois de plus, Ferris a décidé de sécher les cours, pour la neuvième fois du semestre. Il réussit à duper ses parents, embarque Sloane, sa petite amie, et convainc Cameron, son complice de toujours, de les accompagner en ville. Pour s’y rendre, ils «empruntent» la superbe Ferrari 250 GT du père de Cameron. Jamais à court d’idées, Ferris est bien décidé à profiter de tout : vitesse, bons restaurants, événements sportifs, fêtes dans les rues. Mais le proviseur du lycée ne l’entend pas de cette oreille et les prend en chasse…

Save Ferris !

C’est LA référence pour celui ou celle qui a besoin de liberté. Ferris Bueller, c’est le jeune gars qui ne s’en fait pas, qui ne veut pas prendre la vie au sérieux et qui pour cela a décidé de s’autoriser quelques bifurcations. Si John Cusack, présent au générique de Seize bougies pour SamSixteen Candles en 1984 a été envisagé pour tenir le rôle principal, c’est finalement Matthew Broderick qui hérite du personnage qui allait lui coller à la peau tout le reste de sa carrière. Jeune vedette de WarGames (1983) de John Badham et du somptueux Ladyhawke, la femme de la nuit (1984) de Richard Donner, Matthew Broderick ne fait qu’un avec son personnage. Avec un naturel confondant, charismatique en diable, le sourire charmeur et pourtant capable de se montrer vachard quand on lui cherche des noises, le jeune comédien âgé de 23 ans devient une icône à part entière. Il donne la réplique à Alan Ruck, avec lequel l’alchimie est évidente puisque les deux amis partageaient l’affiche d’une pièce de théâtre à Broadway depuis plus d’un an. Plus âgé que son partenaire (il avait alors près de 30 ans au moment du tournage), Alan Ruck hérite du plus beau personnage du film, Cameron, jeune lycéen hypocondriaque, renfermé, mal dans sa peau.

Fils d’un avocat fortuné que l’on ne verra jamais à l’écran, cloisonné dans une habitation moderne en verre plantée au beau milieu de la forêt, dans une chambre plus petite que le garage qui protège les voitures de luxe de son paternel (dont la fameuse Ferrari), Cameron s’est toujours laissé embarquer par la tornade Ferris. Malgré leurs grandes différences, les deux lycéens sont les meilleurs amis du monde depuis la maternelle. C’est là la magie propre à John Hughes, puisque même si La Folle journée de Ferris Bueller est une comédie aussi hilarante que revigorante, une vraie mélancolie effleure très souvent avec des personnages qui se raccrochent le plus possible à une insouciance qui leur échappe inévitablement. Ce spleen provient également et surtout lorsque Cameron évoque son père, qui l’effraie véritablement. Agité, très nerveux, le jeune homme voit en Ferris sa seule bouée de sauvetage dans un monde qui lui fait aussi peur que son avenir. On pourrait d’ailleurs rapprocher Cameron de Jeanie Bueller, la sœur de Ferris, interprétée par la belle Jennifer Grey, juste avant d’exploser avec Dirty Dancing. Alors que ses parents passent tout à Ferris, Jeanie subit sans cesse leurs remontrances, ce qui entraîne une jalousie, une haine, une animosité qui font peur à ceux qui la croisent dans les couloirs du bahut. Comme Cameron, cette journée lui sera profitable, puisqu’elle fera la rencontre d’un jeune mec paumé (Charlie Sheen, venu de L’Aube rouge de John Milius) qui lui dira doucement ses quatre vérités et ce qu’elle n’osait pas s’avouer sur sa propre vie. Suite à cet échange, Jeanie apprendra enfin à penser à sa propre existence plutôt qu’à celle de son frère.

De son côté, Ferris a beau montrer un visage au sourire enjôleur, il respecte l’immense sensibilité de Cameron et l’aide à prendre confiance en lui. C’est donc également une folle journée pour Cameron Frye. L’atout charme vient de la ravissante et éternellement jeune (pour les spectateurs) Mia Sara, tout juste révélée par Legend de Ridley Scott. Si sa carrière restera essentiellement confidentielle, à part pour son rôle dans le génial Timecop (1994) de Peter Hyams aux côtés de Jean-Claude Van Damme, l’actrice incarne celle qui donne à Ferris Bueller son équilibre. Plus posée et rationnelle, elle n’en reste pas moins rêveuse, bienveillante et aimante envers son boyfriend, pourtant très convoité et le mec le plus populaire du bahut.

Dans le monde de John Hughes, le badguy est le personnage du proviseur, celui qui incarne le maintien de l’ordre et les règles à respecter. Ici, Ed Rooney a décidé, purement et simplement, d’avoir la peau de celui qui le nargue à travers ses absences à répétition. Loin d’être relégué au « personnage secondaire », Jeffrey Jones jouit des scènes les plus drôles du film, y compris lorsqu’il donne la réplique à Edie McClurg, éternelle secrétaire qui planque ses stylos dans sa coupe en boule. Chacune de ses répliques déclenche les fous rires et le personnage bénéficie d’ailleurs du dernier mot (ou presque puisqu’il y a une scène post-générique où Ferris interpelle une dernière fois son audience) durant les credits de fin.

Les récits initiatiques s’entrecroisent au cours de cette journée mémorable, dans un Chicago ensoleillé, formidablement éclairé par Tak Fujimoto, le chef opérateur de La Balade sauvage et La course à la mort de l’an 2000. Sans aucune vulgarité, sans raillerie ni aucun mépris, John Hughes fait d’un cancre invétéré un vrai héros de cinéma, mais aussi celui de plusieurs millions de spectateurs qui se reconnaissent alors en lui. Peu importe son âge, on a tous une part de Ferris Bueller en nous, celui qui nous donne envie de dire « Aujourd’hui, je n’ai pas envie », afin de profiter un peu plus en allant voir ce qui se passe dehors, plutôt que de rester sous les néons d’un bureau étriqué. En 2008, La Folle journée de Ferris Buelle est classé 15e par le magazine Empire parmi les 100 Meilleurs personnages de films de l’histoire, tandis qu’il est inscrit en 2014 au National Film Registry afin d’être conservé à la Bibliothèque du Congrès.

LE BLU-RAY

L’attente a été longue, très longue même, pour voir enfin débarquer La Folle journée de Ferris Bueller en Haute-Définition, près de vingt ans après sa première édition en DVD ! Dommage que le visuel original n’ait pas été repris pour cette nouvelle jaquette qui parviendra néanmoins à sauter aux yeux des adeptes du film. Sérigraphie très sobre. Le menu principal est un peu fouillis, animé sur quelques séquences du film.

En fait, le seul mauvais point de cette édition, et non des moindres, est de ne pas avoir repris le formidable commentaire audio de John Hughes au cours duquel le réalisateur se confiait sur sa propre adolescence, en révélant ainsi ce qui avait pu nourrir ses personnages. Néanmoins, nous bénéficions de près d’1h15 de bonus (réalisés en 2005) alors ne faisons pas la fine bouche, mais conservons tout de même l’ancien DVD.

Le premier supplément (28’) se focalise essentiellement sur les comédiens de La Folle journée de Ferris Bueller, avec les deux directrices de casting, mais aussi et surtout des interviews du casting principal, avec quelques images de John Hughes remontant à 1986 pour la sortie du film. Matthew Broderick, Alan Ruck, Mia Sara (images de 1986 uniquement), Jennifer Grey (1985 et 2005), Lyman Ward, Cindy Pickett, Jeffrey Jones, Richard Edson, Ben Stein, Kristy Swanson, Jonathan Schmock et Edie McClurg, sont tous réunis pour évoquer leurs souvenirs sur la genèse, les conditions de tournage, les personnages, les thèmes abordés et la postérité du chef d’oeuvre de John Hughes ! Quelques photos et images de plateau viennent également illustrer l’ensemble.

On retrouve tout ce beau petit monde dans un making of (15’30) qui se penche un peu plus sur la réalisation de certaines scènes clés du film. Cette fois encore, des images de tournage dévoilent l’envers du décor, les anecdotes se multiplient et l’on apprend entre autres que La Folle journée de Ferris Bueller a été écrit en six jours, juste avant la grève des scénaristes.

Le module intitulé Who is Ferris Bueller ? (9’) donne cette fois encore la parole aux mêmes intervenants, qui dressent le portrait du personnage principal, avec les valeurs qu’il représente. Quelques légères redites, mais dans l’ensemble, ce bonus parvient à compléter les précédents.

Bueller ? Bueller ? Bueller ? Vous connaissez cette réplique. On la doit à Ben Stein, qui interprète le professeur d’économie dans le film de John Hughes. Major de sa promotion à la fac de droit de Yale, auteur de discours des présidents Richard Nixon et Gerald Ford, écrivain, scénariste, avocat, Ben Stein a également participé à quelques longs métrages en tant qu’acteur comme S.O.S. Fantômes II et The Mask. Un segment lui est entièrement consacré (11’), avec des images de 1986 et de 2005, durant lequel l’intéressé revient sur sa carrière atypique. Avec une ironie mordante et toujours pince-sans-rire, Ben Stein explique que la journée de tournage passée sur le plateau de La Folle journée de Ferris Bueller est l’une des plus « parfaites » de toute sa vie. Une apparition qui a marqué son existence et celle des spectateurs, puisque même Kurt Cobain et George Bush, croisés par hasard, n’avaient pas pu s’empêcher de réciter ses répliques en sa présence. Ben Stein partage ses souvenirs et tente d’expliquer pourquoi La Folle journée de Ferris Bueller est selon lui un film très important.

L’éditeur joint enfin un montage (10’) d’interviews réalisées par les comédiens eux-mêmes avec d’un côté Matthew Broderick et Alan Ruck, Alan Ruck et Mia Sara, Matthew Broderick et Jeffrey Jones, avec en sus les images de tournage d’une scène coupée au restaurant, où le trio écoute les explications du maître d’hôtel sur la cuisine du…pancréas.

L’interactivité se clôt sur une galerie de photos.

L’Image et le son

En France, La Folle journée de Ferris Bueller ne possède pas le même statut qu’aux Etats-Unis, où le film est disponible en Blu-ray depuis…dix ans. C’est donc la même copie qui arrive dans nos contrées et le fait est que les canons de restauration de 2009 ne sont pas les mêmes qu’aujourd’hui. Anyway, la copie présentée est très propre, même s’il reste quelques pétouilles, griffures et autres. La HD est flagrante, surtout sur la luminosité et l’éclat des couleurs (le rouge de la Ferrari), bien que la définition puisse étonnamment varier sur un champ-contrechamp. Le grain est plutôt bien géré (même s’il est trop atténué à notre goût sur certains plans), le piqué agréable, les détails appréciables (la chambre de Ferris) et la profondeur de champ indéniable.

La version originale dispose d’une piste Dolby True HD 5.1. Les voix sont solidement plantées sur la centrale et la scène frontale n’a jamais semblé aussi riche. Les frontales se mêlent ardemment à l’ensemble en créant une vraie et solide spatialisation musicale (le mythique Oh Yeah de Yello), mais aussi avec des ambiances naturelles (la voie rapide, le stade et la performance de Ferris sur le char), le tout avec naturel, ainsi qu’une intervention du caisson de basses aux moments opportuns. Si comme l’auteur de ces mots vous avez découvert La Folle journée de Ferris Bueller quand vous étiez gamins, vous restez attachés à la version française et son immense doublage. Il faudra cependant vous contenter d’une piste Dolby Digital 2.0, mais heureusement celle-ci est plutôt dynamique.

Crédits images : © Paramount Pictures / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test DVD / Mademoiselle de Joncquières, réalisé par Emmanuel Mouret

MADEMOISELLE DE JONCQUIÈRES réalisé par Emmanuel Mouret, disponible en DVD le 16 janvier 2019 chez France Télévisions Distribution

Acteurs : Cécile de France, Edouard Baer, Alice Isaaz, Natalia Dontcheva, Laure Calamy, Jean-Michel Lahmi, Arnaud Dupont, Alban Casterman…

Scénario : Emmanuel Mouret d’après le roman Jacques le fataliste et son maître de Denis Diderot

Photographie : Laurent Desmet

Musique : Bach, Vivaldi, Boieldieu

Durée : 1h46

Date de sortie initiale : 2018

LE FILM

Madame de La Pommeraye, jeune veuve retirée du monde, cède à la cour du marquis des Arcis, libertin notoire. Après quelques années d’un bonheur sans faille, elle découvre que le marquis s’est lassé de leur union. Follement amoureuse et terriblement blessée, elle décide de se venger de lui avec la complicité de Mademoiselle de Joncquières et de sa mère…

Si toutes les femmes agissaient comme nous, l’honneur d’être une femme en serait grandi.

Mademoiselle de Joncquières est le neuvième long métrage d’Emmanuel Mouret. Neuf films réalisés en 18 ans, pour la plupart de vraies petites pépites comme Changement d’adresse (2006), Un baiser, s’il vous plaît ! (2007) et Caprice (2015), faisant du cinéaste l’un des plus précieux et atypiques du cinéma français aujourd’hui. Librement inspiré de l’histoire de Mme de la Pommeraye extrait de Jacques le fataliste et son maître, de Denis Diderot, Mademoiselle de Joncquières est une nouvelle grande réussite à inscrire au palmarès de son auteur.

L’action se déroule en France au XVIIIe siècle. Madame de La Pommeraye, jolie veuve, qui se pique de n’avoir jamais été amoureuse, finit par céder aux avances du marquis des Arcis, réputé libertin, qui la courtise avec assiduité. Deux ans plus tard, elle se rend compte que le marquis s’éloigne d’elle. Brisée et blessée dans son orgueil, elle entreprend de se venger en humiliant le marquis et l’amène à épouser mademoiselle de Joncquières, dont il s’est épris, mais dont il ignore qu’elle et sa mère sont tombées dans la prostitution suite à un revers de fortune.

En réalité, il y a toujours eu du Diderot dans chaque film d’Emmanuel Mouret. Cette fois, le cinéaste s’attaque frontalement à l’écrivain, philosophe et encyclopédiste français des Lumières, à travers l’épisode le plus célèbre de Jacques le fataliste et son maître, déjà adapté par Robert Bresson en 1945 avec son second film, Les Dames du Bois de Boulogne. Là où Robert Bresson transposait le récit original au XXe siècle à travers un drame sombre et impitoyable, Emmanuel Mouret mise sur la reconstitution d’époque. Mettre en scène un film en costume aujourd’hui est un pari que le cinéaste relève haut la main. Certes, la réalisation pourrait passer pour académique, mais Mademoiselle de Joncquières n’a rien de poussiéreux. Sa modernité étonne et d’ailleurs détonne avec son rythme vif et soutenu comme un thriller, ses dialogues percutants et pourtant respectueux du texte original, sans oublier les plans-séquences qui instaurent une vraie tension psychologique.

A ce petit jeu, Cécile de France est parfaite dans le rôle de Madame de la Pommeraye et sa maturité convient parfaitement à ce personnage de femme blessée et vengeresse. Face à elle, Edouard Baer n’a rien à lui envier et campe un marquis libertin très attachant dans sa complexité, tout en conservant son flegme habituel et son allure de dandy. Comme si Emmanuel Mouret prenait le comédien et nous révélait la face cachée de son personnage avec une réelle mélancolie. Sous couvert d’un vrai portrait de femme, Mademoiselle de Joncquières est également et surtout le récit initiatique d’un homme qui va découvrir l’amour pour la première fois et qui saura rester droit et digne lorsqu’il apprendra qu’il a été dupé et manipulé par son ancienne conquête. La présence du couple vedette à la prochaine cérémonie des César (le film est nommé six fois) est donc amplement justifiée et méritée, tout comme l’aurait été celle de la formidable Laure Calamy, qui interprète ici Lucienne, l’amie de Madame de La Pommeraye (inventé ici pour le film), et celle de la jolie Alice Isaaz (La Crème de la crème, Rosalie Blum) aka Mademoiselle de Joncquières qui devient malgré-elle l’instrument de la vengeance. Sans oublier la comédienne bulgare Natalia Dontcheva, poignante dans le rôle de la mère de la jeune fille.

On pourrait donc croire qu’Emmanuel Mouret s’efface derrière ses protagonistes, ce qui n’est pas du tout le cas, même s’il n’apparaît pas devant la caméra cette fois. Ses œuvres précédentes ont toujours été marquées par le thème de l’amour, sous toutes ses formes, c’est même la veine principale de chacun de ses films. Mais c’est comme si tout son travail passé devait conduire inévitablement le cinéaste à Mademoiselle de Joncquières, récit qui lui revenait de droit. Il s’en acquitte avec une suprême élégance et une grande délicatesse qu’il souligne à travers les compositions de Bach, Vivaldi et Boieldieu, dans de merveilleux décors et une clarté (de la photo aux costumes de soie clinquants) qui contraste avec les desseins les plus obscurs, ceux du coeur blessé de Madame de la Pommeraye.

Mademoiselle de Joncquières est assurément l’un des plus grands et passionnants films de 2018. A ce jour, il s’agit du plus grand succès dans les salles d’Emmanuel Mouret avec près de 550.000 entrées et c’est largement mérité.

LE DVD

Le test du DVD de Mademoiselle de Joncquières, disponible chez France Télévisions Distribution, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est animé et musical.

L’éditeur propose deux petites scènes coupées (4’). La première montre Madame de La Pommeraye, qui se confie à son amie Lucienne, quant à la fin de sa relation avec le marquis des Arcis. Emmanuel Mouret a finalement préféré supprimer le dialogue et montrer uniquement les deux femmes aux spectateurs, qui comprennent par eux-mêmes ce qui vient de se passer. La seconde scène est un dialogue entre le marquis des Arcis et un médecin (Laurent Stocker) dépêché pour s’occuper de Mademoiselle de Joncquières, après qu’elle ait été retrouvée inconsciente.

Ne manquez surtout pas le superbe court-métrage d’Emmanuel Mouret intitulé Aucun regret (2015-22’). Aurélie (Katia Méran) et Célia (Fanny Sidney) sont deux amies de l’école des beaux-arts quand Olivier (Mathieu Métral), un bel étudiant en architecture, séduit Aurélie. Célia la met en garde, il a mauvaise réputation avec les filles. Mais Aurélie ment alors à Célia en l’assurant qu’elle n’est pas intéressée par Olivier et cache qu’elle a accepté un rendez-vous. L’ombre de Diderot (et celle de Rohmer aussi) plane une fois de plus sur ce film sensuel et très sensible.

L’Image et le son

On ne change pas une équipe qui gagne et Emmanuel Mouret a de nouveau fait appel au chef opérateur Laurent Desmet, directeur de la photographie du metteur en scène depuis Changement d’adresse en 2006. Si les contrastes sont un peu léger, force est d’admettre que la copie se révèle claire et lumineuse, le relief est appréciable, la colorimétrie chatoyante, la profondeur de champ présente, le piqué ciselé et les détails indéniables aux quatre coins du cadre. Dommage de ne pas disposer d’édition HD pour Mademoiselle de Joncquières, d’autant plus que le film a été excellemment reçu par la critique et même par le public avec un très joli score dans les salles.

Comme à son habitude, Emmanuel Mouret privilégie la musique classique et Mademoiselle de Joncquières mixe les compositions de Bach, Vivaldi et Boieldieu, admirablement délivrées et spatialisées par le mixage Dolby Digital 5.1. Les voix s’imposent sans mal sur la centrale. Quelques ambiances naturelles parviennent à percer sur les latérales lors des séquences en extérieur, la balance gauche-droite est dynamique. L’éditeur joint également les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant, ainsi qu’une piste Audiodescription.

Crédits images : © Pascal Chantier / France Télévisions Distribution / Captures DVD : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Maximum Overdrive, réalisé par Stephen King

MAXIMUM OVERDRIVE réalisé par Stephen King, disponible en DVD et Blu-ray le 8 janvier 2019 chez ESC Editions

Acteurs : Emilio Estevez, Pat Hingle, Laura Harrington, Christopher Murney, Yeardley Smith, J.C. Quinn, Holter Graham, Frankie Faison, Giancarlo Esposito, Marla Maples, Stephen King…

Scénario : Stephen King

Photographie : Armando Nannuzzi

Musique : AC/DC

Durée : 1h38

Date de sortie initiale : 1986

LE FILM

En 1986, la comète Rhéa-M gravite autour de la Terre. Aussitôt, toutes les machines sur la surface du globe sont déréglées : un distributeur de billets insulte les clients, une enseigne lumineuse invite les passants à aller se faire voir… La situation devient tragique lorsqu’un pont mobile échappe à tout contrôle. Désormais, toutes les mécaniques sont autonomes et ne semblent poursuivre qu’un seul but : débarrasser la surface du globe de toute présence humaine…

Depuis la publication de son premier roman Carrie, mais surtout depuis son adaptation au cinéma par Brian De Palma en 1976, l’écrivain Stephen King devient un phénomène mondial. Suivent rapidement Salem, Shining, l’enfant lumière, Le Fléau, Dead Zone, Charlie, Cujo, Christine…que des best-sellers. Hollywood s’est donc très vite emparé des écrits de Stephen King. En 1980, l’immense Stanley Kubrick livre Shining, acclamé par la critique, succès commercial, mais rejeté par le romancier. Ce dernier retrousse ses manches et écrit le scénario de Creepshow, film à sketches composé des adaptations de ses nouvelles La Caisse et Mauvaise Herbe , ainsi que de trois parties originales, le tout réalisé par George A. Romero, qui devient un ami proche. C’est en 1983 que tout s’accélère avec Cujo (Lewis Teague) et Christine (John Carpenter). Le grand producteur italien Dino De Laurentiis est conscient de cet engouement et finance Dead Zone de David Cronenberg. Bien décidé à profiter de la popularité de Stephen King, le producteur prévoit alors coup sur coup les sorties dans les salles de Charlie (Mark L. Lester), Cat’s Eye (Lewis Teague) et Peur bleue (Daniel Attias). C’est alors que l’idée lui vient de proposer à Stephen King lui-même d’écrire et de mettre en scène la transposition de sa nouvelle Poids lourds, issue du recueil Danse macabre. Après quelques hésitations, l’écrivain accepte de relever le pari. Plus de trente ans après et malgré son relatif échec dans les salles, Maximum Overdrive est devenu un vrai film culte, un nanar de luxe, réalisé à la va comme je te pousse, mais animé par une envie de s’éclater, de se marrer et de faire rire les spectateurs. C’est sûrement pour cela que le film a su et pu traverser les années puisqu’il est aujourd’hui très prisé par les amateurs de mauvais films sympathiques. Et puis ce n’est pas tous les jours qu’un délire assumé repose également en grande partie sur une musique composée par AC/DC (l’album Who Made Who) , aujourd’hui dans toutes les mémoires, ce qui renforce encore plus cette idée d’attraction de fête foraine, pour toute la famille.

Dès la première séquence, Stephen King plante le décor à travers un panneau introductif, qui indique que tout ce qui va suivre n’est pas du tout sérieux. Alors qu’une comète passe près de la Terre (voir la planète entourée d’une sorte d’aurore boréale), des machines prennent soudainement vie. Tout commence par des incidents sans gravité : un distributeur de billets insulte les clients (dont Stephen King lui-même qui se fait traiter de connard), une enseigne lumineuse invite les passants à aller se faire foutre. La situation devient tragique lorsqu’un pont basculant se soulève pendant la circulation intense, ce qui fait que tous les véhicules alors sur le pont tombent dans la rivière ou entrent en collision. On pense alors au prologue d’un épisode de Destination finale. Le chaos s’installe alors que des machines de toutes sortes commencent à attaquer les humains. À un relais routier juste à l’extérieur de Wilmington, en Caroline du Nord, un employé, Duncan Keller, est aveuglé après qu’une pompe à essence lui a pulvérisé du diesel dans les yeux. Une serveuse est blessée par un couteau électrique, et un jeu d’arcade électrocute un homme. L’employé et ex-taulard Bill Robinson soupçonne que quelque chose ne va pas. Pendant ce temps, lors d’un match de Little League Baseball, un distributeur de boissons tue l’entraîneur en tirant des canettes à bout portant dans son crâne. Un rouleau compresseur écrase l’un des enfants en fuite, mais Deke Keller (le fils de Duncan) parvient à s’échapper. On passe alors à un couple de jeunes mariés, Connie et Curtis. Ce dernier s’arrête à une station-service, où un camion tente de l’écraser, mais lui et Connie s’échappent dans leur voiture. Deke se promène dans sa ville alors que des gens sont brutalement tués par des tondeuses à gazon, des tronçonneuses, des sèche-cheveux électriques, des radios de poche et des voitures télécommandées. Au relais routier, un camion Western Star arborant un masque géant du Green Goblin sur sa calandre tue le père de Deke et un vendeur de Bibles. Plus tard, plusieurs camions encerclent le relais routier. Tous les personnages parviennent alors à trouver refuge au relais. Mais les camions semblent bien déterminer à faire d’eux leurs esclaves.

On le voit, Stephen King ne manque pas d’imagination et son film regorge de trucs nawak en tous genres. Un camion BIC vient constamment faire son placement de produit, tandis que le grand Pat Hingle, qui incarne ici le boss Hendershot, sort quelques roquettes M72 LAW qu’il avait comme par hasard stockées dans un bunker caché sous son restaurant, pour affronter les nombreux camions. Les survivants tentent de trouver une sortie à l’insu des véhicules blindés, qui semblent suivre les directives du Green Goblin. Les comédiens sont chouettes et font le taf, tout en se doutant qu’ils ne sont pas en train de tourner le chef d’oeuvre du siècle. En première ligne, Emilio Estevez, qui sortait du carton d’Outsiders de Francis Ford Coppola et surtout de The Breakfast Club de John Hughes, assure en mode petit bad-ass qui roule des mécaniques, pris au dépourvu par celles des camions qui veulent sa peau. Dans le genre « nana qui hurle durant tout le film », Yeardley Smith s’impose comme une référence, la comédienne ayant été ensuite repéré par Matt Groening, qui allait lui confier la voix de Lisa Simpson, qu’elle interprète depuis maintenant plus de trente ans. Tout ce beau petit monde est bien obligé de se serrer les coudes et de trouver de nouvelles idées pour sortir de ce merdier, autour duquel les camions, bulldozers et autres véhicules militaires se rapprochent sans cesse.

Pendant ce temps, Stephen King s’amuse (aidé en cela par l’alcool et la cocaïne) avec les moyens mis à sa disposition par Dino De Laurentiis, près de dix millions de dollars donc, en multipliant quelques scènes d’horreur amusantes dans la première partie (mention spéciale à la scène du stade de baseball) et sa vision des rues dévastées annoncent quelque part celles de Derry dans Ça, qu’il était d’ailleurs en train d’écrire entre deux prises. En plus de cela, Maximum Overdrive a franchement de la gueule grâce à la photographie du chef opérateur italien Armando Nannuzzi, qui avait travaillé avec Luchino Visconti (Sandra), Luigi Comencini (L’Incompris), Mauro Bolognini (Le Bel Antonio), rien que ça ! A sa sortie, Stephen King est nommé pour le Razzie Award du pire réalisateur. Il dira durant la promotion qu’il s’agit d’un « film débile » et qu’il ne savait pas du tout ce qu’il faisait car toujours sous substance ou l’emprise de la bibine, ce qui n’a rien de mensonger. L’accueil est plutôt désastreux, mais l’entreprise est rentable commercialement.

Mine de rien, on prend un grand plaisir devant Maximum Overdrive, spectacle généreux de science-fiction vintage qui enchaîne les scènes de poursuites, les explosions, les effets sanglants, les répliques amusantes. En 1997, une autre version de la nouvelle de Stephen King voit le jour à la télévision, Trucks : Les Camions de l’enfer, mais Maximum Overdrive est restée une œuvre culte.

LE BLU-RAY

Le test du Blu-ray de Maximum Overdrive, disponible chez ESC Editions, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est animé et musical.

Plus de quatre heures de suppléments ! QUATRE HEURES !!! Pour Maximum Overdrive, excusez du peu ! Assurément la grande édition du mois de janvier !

Julien Sévéon propose une brillante et passionnante analyse du film qui nous intéresse ici (29’). En toute honnêteté, cette présentation aurait largement suffit si l’éditeur n’avait disposé que de ce bonus. En effet, l’auteur de l’ouvrage George A. Romero : Révolutions, Zombies et Chevalerie (Popcorn, 2017) revient sur TOUS les aspects de Maximum Overdrive. La genèse du projet, la nouvelle Trucks, les précédentes adaptations de Stephen King, l’engagement de ce dernier au poste de réalisateur, les conditions de tournage, la musique d’AC/DC, la sortie et ce qui reste de Maximum Overdrive, tout y est abordé comme d’habitude avec une passion contagieuse.

Nous trouvons un commentaire audio (vostf) de l’acteur Jonah Ray et du producteur Ryan Turek. On se demande pourquoi ces deux types ont été invités pour parler de Maximum Overdrive. Le premier n’avait que quatre ans à la sortie du film et n’est apparu que dans des trucs que personne n’a jamais vus, tandis que le second, plus « en phase » avec le film, est producteur du génial Happy Birthdead, d’Action ou vérité et du Halloween version 2018. Comme ils le disent eux-mêmes « Je ne garantis pas que ce commentaire complète quoi que ce soit ! » « C’est clair, t’as pas tort ! ». En effet, durant près d’1h40, les deux hommes ont beau être complices et raconter des vannes, nous n’apprendrons rien ou presque sur Maximum Overdrive. Quand c’est le cas, il s’agit d’anecdotes glanées ici là au fil de cette interactivité. Pour autant, le commentaire n’est pas déplaisant, dans le sens où les deux intervenants, qui se demandent constamment ce qu’ils font derrière le micro, passent le temps en passant du coq à l’âne, la plupart du temps sans aucun rapport avec Maximum Overdrive.

L’éditeur propose ensuite plusieurs interviews des comédiens du film. Laura Harrington (10’), Yeardley Smith et John Short (18’) et Holter Graham (17’). La première revient sur son parcours et surtout sur son personnage dans Maximum Overdrive, tout en parlant du travail avec ses partenaires et Stephen King. Les effets spéciaux et les lieux de tournage sont également abordés. Au cours de leur interview croisée, Yeardley Smith et John Short évoquent comment ils ont été recrutés pour Maximum Overdrive et se penchent un peu plus sur le travail de Stephen King derrière la caméra. Chacun parle évidemment de l’alchimie avec son partenaire et l’on regrette que les deux acteurs n’aient pas été enregistrés ensemble. On apprend qu’Emilio Estevez recevait la visite de son pote Tom Cruise sur le plateau, ainsi que de sa petite-amie Demi Moore. Les souvenirs de tournage sont amusants et les deux comédiens, peu dupes quant au produit fini, s’étonnent que le film soit devenu culte trente ans après sa sortie. L’entretien avec Holter Graham, onze ans au moment du tournage, croise rapidement quelques images d’une de ses interviews à la sortie de Maximum Overdrive, avec celle réalisée à l’occasion de son édition en Haute-Définition. Holter Graham se souvient de son désir d’être acteur, de ses premières auditions (grâce au soutien de Sissy Spacek), dont celle pour le film de Stephen King, son premier rôle à l’écran. Même chose que ses anciens partenaires, il partage ses souvenirs et anecdotes sur le film.

Du point de vue technique, n’hésitez pas à écouter l’intervention de Dean Gates, responsable des maquillages sur Maximum Overdrive (16’30), le film de sa carrière dont on lui parle le plus. C’est là que l’on apprend que le film aurait pu être beaucoup plus gore et sanglant (notamment pour la scène du rouleau compresseur), si Stephen King ne s’était pas fait réprimander par la production ! Quelques photos de tournage prouvent tout cela, à l’instar du coach de baseball qui se fait fracasser la tête à coups de canettes. Les conditions de tournage, le travail avec Stephen King et bien d’autres sujets sont abordés au cours de cet entretien, l’un des meilleurs de cette interactivité.

Que les fans de hard rock soient rassurés, la musique de leur groupe préféré AC/DC est largement évoquée au cours de l’interview de Murray Engleheart, co-auteur du livre AC/DC: Maximum Rock & Roll (6’30). Ce dernier replace les diverses compositions du groupe pour Maximum Overdrive, au moment où leur carrière battait de l’aile. De là à dire que la B.O a eu plus de succès que le film, il n’y a qu’un pas.

Ceux qui ont gardé beaucoup d’affection pour Maximum Overdrive, se souviennent évidemment du Green Goblin qui orne la calandre d’un des camions principaux du film. Au fait, qu’est devenu ce personnage à part entière ? Le dénommé Tim Shokey explique comment il a pu récupérer la carcasse explosée du Green Goblin après le tournage pour décorer son vidéo-club, avant de le restaurer réellement en 2011 (deux ans de boulot) afin de pouvoir en faire profiter les fans du film lors des conventions.

En 1980, Martha De Laurentiis est cofondatrice de la société de production Dino De Laurentiis Company (DDLC) avec son partenaire puis mari, Dino De Laurentiis. Elle revient ici sur l’aventure Maximum Overdrive (16’). Les souvenirs et anecdotes entendus ici se recoupent avec tous les précédents témoignages et la productrice n’admettra jamais que son film est un nanar.

En fait, ce qui éclaire le plus sur l’envers du décor reste le module intitulé The Wilmington Factor (30’). N’attendez pas les témoignages des comédiens, mais des habitants de cette petite ville de Caroline du Nord qui avaient pu trouver un emploi dans les années 1980, grâce à l’installation des studios de Dino De Laurentiis, alors le troisième plus grand studio du pays. Un décorateur, un reporter du coin, un régisseur devenu finalement maquilleur sur le plateau et quelques autres participants au tournage de Maximum Overdrive expliquent comment Hollywood a su s’implanter dans leur petite bourgade et comment ils ont pu bénéficier de cette part de rêve. Jusqu’à ce que les Républicains arrivent à la tête de l’état et décident de fermer les studios en supprimant les subventions pour les tournages. Un impact que les habitants n’ont pas oublié, dont ils regrettent la frénésie, le tout agrémenté par des anecdotes de tournage. Chacun donne également son avis sur le film. Mention spéciale à l’un des témoins qui indique « Je suis très doué pour travailler sur des films très mauvais ».

Seul bonus non sous-titré, mais cela n’a pas d’importance puisque le son est quasiment étouffé, « Les Coulisses » (9’) donne un aperçu du tournage à travers quelques images filmées sur le plateau.

L’interactivité se clôt (ouf !) sur la bande-annonce (VF et VO) qui est un supplément à part entière puisque présentée par Stephen King lui-même ! N’oublions pas les spots TV.

Probablement l’édition la plus impressionnante consacrée à un nanar !

L’Image et le son

Voilà une édition chiadée de A à Z ! En effet, outre la tonne de suppléments, le Blu-ray de Maximum Overdrive ne déçoit pas et il est même dingue de (re)découvrir le film de Stephen King dans ces conditions techniques. La clarté est éloquente, tout comme la propreté et la stabilité de la copie, les contrastes affichent une vraie solidité, le piqué est agréable, le grain original respecté. Quelques scènes sont certes moins définies, surtout les séquences sombres ou nocturnes, mais le résultat est là, ce master HD tient ses promesses avec notamment des couleurs ravivées, comme le vert du Green Goblin.

La version française vaut son pesant et de ce point de vue-là la stéréo assure et fait son office avec un petit cachet nanar fort sympathique. La piste originale bénéficie elle à la fois d’une DTS-HD Master Audio 5.1 et 2.0. La première instaure surtout une spatialisation musicale avec les compositions d’AC/DC délivrées sur toutes les enceintes. La Stéréo anglaise est un poil étouffée, mais se révèle suffisante pour ce spectacle.

Crédits images : © ESC Editions / ESC Distribution Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test DVD / L’Enigme du Lac Noir, réalisé par Michael Gordon

L’ÉNIGME DU LAC NOIR (The Secret of Convict Lake) réalisé par Michael Gordon, disponible en DVD le 19 janvier 2019 chez Sidonis Calysta

Acteurs : Glenn Ford, Gene Tierney, Ethel Barrymore, Zachary Scott, Ann Dvorak, Barbara Bates, Cyril Cusack, Richard Hylton…

Scénario : Oscar Saul, Victor Trivas

Photographie : Leo Tover

Musique : Sol Kaplan

Durée : 1h20

Date de sortie initiale : 1951

LE FILM

Six repris de justice viennent de s’évader et marchent dans la montagne enneigée. Après la mort de l’un d’eux, Canfield conduit les survivants au hameau de Monto Diablo Lake. Il affirme vouloir se venger d’un certain Rudy, qui l’a dénoncé pour un crime. Mais Greer, un de ses compagnons, est convaincu que Canfield a caché quelque part 40 000 dollars. Tous les hommes du village sont partis travailler, les femmes sont restées seules : parmi elles la belle Marcia, la fiancée de Rudy.

Pour la plupart des spectateurs, Michael Gordon (1909-1993) est le réalisateur de comédies légères et endiablées comme Confidences sur l’oreiller (1959) et Pousse-toi, chérie (1963) avec Doris Day, ou bien encore Garçonnière pour quatre (1962) avec Kim Novak. En revanche, pour les cinéphiles, Michael Gordon est le metteur en scène de solides polars, The Web (1947), Le Droit de tuer (1948), L’Araignée (1950). L’Enigme du lac noir (1951) est un film très particulier dans sa carrière. D’une part parce qu’il s’agit de son premier western, il y reviendra en 1966 avec Texas, nous voilà (Dean Martin face à Alain Delon), mais il s’agit surtout de son dernier long métrage réalisé avant de disparaître durant presque dix ans en raison de son nom inscrit sur la tristement célèbre Liste Noire. Avant d’être banni de Hollywood, le cinéaste livre ce qui est souvent considéré comme son meilleur film. Pourtant, The Secret of Convict Lake est souvent oublié de la plupart des livres consacrés au western américain et ce en dépit de ses deux magnifiques têtes d’affiche, Gene Tierney et Glenn Ford. L’Enigme du lac noir est à réhabiliter et surtout à faire connaître au plus grand nombre puisqu’il s’agit d’un western atypique, formidablement photographié, souvent tendu comme un film noir.

Le 17 septembre 1871, 29 prisonniers s’évadent de la prison de Carson City dans le Nevada et tente de rejoindre la Californie à travers les montagnes enneigées. 23 ont déjà été repris ou sont morts de froid. Cinq semaines plus tard, six d’entre eux sont piégés dans le blizzard et finissent par atteindre le village isolé de Monte Diablo. Là, ils s’aperçoivent que tous les hommes sont partis et que le village n’est plus occupé que par des femmes. Les fuyards, James Canfield, Greer, Limey, Clyde et Matt, demandent à celles-ci de quoi manger et dormir. Bien que méfiantes et armées, elles finissent par accepter de les loger pour une nuit. Canfield, ne s’est pas dirigé vers Monte Diablo par hasard. Il est à la recherche de Rudy Schaeffer, l’homme qui l’a injustement fait condamner pour meurtre et vol de 40 000 dollars. Ses compagnons suivent quant à eux Canfield afin de mettre la main sur ce butin. Bien armées, les femmes maintiennent tout d’abord l’autorité sur leurs invités. Mais bien vite, la situation se retourne et les forçats prennent le contrôle du village. Seul Canfield s’oppose aux intentions malveillantes de ses acolytes, mais il ne peut les maîtriser seul. Marcia Stoddard, une des habitantes, est fiancée à Schaeffer.

L’Enigme du lac noir est une œuvre originale, tendue et oppressante, comme un huis clos à ciel ouvert. Même si le roman de Thomas Cullinan ne date que de 1966, il n’est pas interdit de penser aux Proies. Dès les premières scènes, Michael Gordon nous fait ressentir le froid intense avec cette giboulée de neige qui parasite l’écran et paralyse ses personnages, épuisés, tentant de semer leurs poursuivants prêts à tout pour les remettre derrière les barreaux. Après avoir abandonné l’un des leurs dont le coeur n’a pas réussi à combattre le gel extérieur, les hommes arrivent dans un petit patelin paumé, comme une oasis inespérée. Seulement les amazones présentes ne sont pas prêtes à les dorloter ou à prendre soin d’eux comme ils auraient pu l’espérer.

The Secret of Convict Lake est un western mâtiné de polar. Tendu, sec, inquiétant, le film étonne par ses partis pris dans la première partie. Le décor est étouffant, ce groupe de femmes laissé à l’abandon depuis trois mois par leurs hommes ne cesse d’étonner, surtout l’une d’entre elles, Marcia, interprétée par la sublime Gene Tierney. Visiblement, cette dernière est arrivée de nulle part quelques mois auparavant, sait se servir d’un fusil, essaye de faire sa place dans cette petite communauté et de se faire une vie. Elle doit d’ailleurs épouser un dénommé Rudy, le frère d’une autre femme du village (géniale Anne Dvorak), femme frustrée qui voit d’un mauvais œil cette future union. L’arrivée inattendue de ces hommes, rapidement démasqués par Marcia, ne cesse d’inquiéter les habitantes. La doyenne de Monte Diablo, interprétée par la grande Ethel Barrymore, dirige ce groupe tout en restant alitée, mais accepte de parler avec Canfield.

Michael Gordon (pour l’anecdote le grand-père de l’acteur Joseph Gordon-Levitt) installe son récit avec une réelle virtuosité. La photographie de Leo Tover (Uniformes et jupon court, Le Jour où la terre s’arrêta, L’Héritière) foudroie avec ses partis pris quasi-gothiques, le décor renvoie parfois à l’expressionnisme. Si le déroulé de l’intrigue écrite par Victor Trivias (et Ben Hetch, même si son nom n’est pas crédité) est après plus classique, cela n’empêche pas d’admirer les comédiens, avec Gene Tierney et Glenn Ford en première ligne. Le réalisateur parsème ensuite son histoire de séquences marquantes, étonnamment violentes comme celle où les femmes sauvent l’une des leur en utilisant leurs fourches et d’autres armes improvisées pour neutraliser l’assaillant.

L’Enigme du lac noir, titre « belge » puisque ce western psychologique de Michael Gordon, inspiré d’une histoire vraie, n’a pas été exploité dans les salles françaises, est une très grande réussite et un vrai petit bijou à découvrir.

LE DVD

Le test du DVD de L’Enigme du lac noir, disponible chez Sidonis Calysta, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est animé et musical.

Deux présentations sur cette édition.

La première est réalisée par Patrick Brion (10’), qui propose un tour d’horizon des westerns réalisés en 1951, avant de dresser le portrait de Michael Gordon, avec son renvoi d’Hollywood pendant près de dix ans suite à l’inscription de son nom sur la Liste Noire par le sénateur McCarthy, avant de citer ses films les plus célèbres. L’historien du cinéma en vient ensuite à L’Enigme du lac noir, en mettant en avant beaucoup de points positifs, même s’il manque pour lui une atmosphère. Le casting est également abordé.

C’est au tour de François Guérif de dire ce qu’il pense de L’Enigme du lac noir (11’30). Ce dernier encense plus le film de Michael Gordon que Patrick Brion, « malgré quelques défauts et lenteurs, mais qui contient des scènes stupéfiantes ». Il évoque la sortie de The Secret of Convict Lake en Belgique, l’oubli du film dans les livres spécialisés malgré le prestige de son casting et de son équipe technique. Un film quasi-disparu que François Guerif défend en parlant des comédiens, du réalisateur (quelques redites avec les propos de son prédécesseur), avant d’aborder le film qui nous intéresse. Le fond et la forme se croisent avec une passion contagieuse. Enfin, François Guérif nous donne son interprétation du dénouement.

L’Image et le son

La copie 1.33 (4/3) présentée a été restaurée. Le N&B est parfois un peu léger, surtout dans la première partie avec la neige qui donne du fil à retordre à la définition et dans laquelle se fondent les points blancs. Dès l’arrivée des évadés à Monto Diablo, les noirs se renforcent, les gris s’enrichissent, la copie trouve une stabilité, les contrastes sont plus convaincants. Dommage que le grain paraisse souvent trop atténué. Quelques fils en bord de cadre et des raccords de montage sont toujours présents, ainsi que des décrochages sur les fondus enchaînés. Le film de Michael Gordon était encore inédit en DVD dans nos contrées.

Seule la version originale aux sous-titres français imposés est disponible sur cette édition. La restauration est satisfaisante, aucun souffle à déplorer, l’écoute est frontale, riche, dynamique et vive. Les effets annexes sont conséquents et le confort acoustique assuré.

Crédits images : © 20th Century Fox / Sidonis Calysta Captures DVD : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr