Test Blu-ray / Une anglaise romantique, réalisé par Joseph Losey

UNE ANGLAISE ROMANTIQUE (The Romantic Englishwoman) réalisé par Joseph Losey, disponible en DVD et Blu-ray le 24 février 2021 chez BQHL Editions.

Acteurs : Glenda Jackson, Michael Caine, Helmut Berger, Michael Lonsdale, Béatrice Romand, Kate Nelligan, Nathalie Delon, Reinhard Kolldehoff…

Scénario : Tom Stoppard & Thomas Wiseman, d’après la pièce de ce dernier.

Photographie : Gerry Fisher

Musique : Richard Hartley

Durée : 1h52

Date de sortie initiale : 1975

LE FILM

Épouse de Lewis Fielding, un romancier à succès, Elizabeth Fielding s’accorde un séjour thermal à Baden-Baden. Si elle y fait la connaissance de Thomas Hursa, gigolo et convoyeur de drogue qui se prétend poète, elle ne s’attend pas à ce qu’il réapparaisse à son retour en Angleterre. Quelle n’est également pas sa surprise de voir son mari l’accueillir à leur domicile et même l’engager en tant qu’assistant. À la fois soupçonneux et manipulateur, Lewis Fielding observe sa femme se jeter dans les bras de son nouvel « ami », curieux de l’issue de cette relation.

Quand il entreprend Une Anglaise romantique – The Romantic Englishwoman, Joseph Losey (1909-1984) a déjà l’ensemble de sa longue, prolifique et éclectique carrière derrière lui. Le cinéaste américain qui possède assurément l’une des filmographies les plus impressionnantes de toute l’histoire du cinéma comptait parmi ses œuvres les plus célèbres Le Garçon aux cheveux verts (1948) avec Dean Stockwell encore tout gamin dans le rôle-titre, Le Rôdeur The Prowler (1951) ou bien encore M (1951), le formidable remake du chef d’oeuvre de Fritz Lang, Accident (1967), Grand prix du jury au Festival de Cannes en 1967, Le Messager (Palme d’or en 1971), sans oublier bien sûr Eva (1962), Les Damnés en 1963 (un des meilleurs épisodes de la Hammer !), The Servant (1963) et Cérémonie secrète (1968). S’il entame pour ainsi dire sa dernière décennie consacrée au septième art, Joseph Losey ne se reposera jamais sur ses lauriers et enchaînera quelques-uns de ses opus les plus illustres comme l’exceptionnel Deux hommes en fuite – Figures in a Landscape (1970) avec Robert Shaw et Malcolm McDowell, deux films avec Alain Delon (L’Assassinat de Trotsky et Monsieur Klein), le sublime Maison de poupée – A Doll’s House (1973) avec Jane Fonda et Delphine Seyrig, jusqu’à l’adaptation cinématographique de l’opéra Don Giovanni de Mozart et da Ponte, tournée entièrement en décors naturels. Au milieu de tous ces grands classiques, se cache Une Anglaise romantique, qui condense pourtant les thèmes et obsessions (la lutte des classes, le rapport dominant-dominé, la tension sexuelle), les motifs (les miroirs omniprésents comme chez Fassbinder) de Joseph Losey et que l’on pourrait rapprocher entre autres de Maison de poupée. Quand le mensonge, la suspicion, le doute, la frustration s’insinuent au sein d’un couple, il est déjà trop tard. Sur un scénario coécrit par Tom Stoppard (Brazil de Terry Gilliam, Indiana Jones et la Dernière croisade de Steven Spielberg), et Thomas Wiseman, d’après le roman du second, Une Anglaise romantique observe non seulement ses trois protagonistes principaux, interprétés par Michael Caine, Glenda Jackson et Helmut Berger, en train de jouer entre eux aux faux-semblants et à la bienséance feinte, mais pose également le spectateur en tant que témoin de ce jeu de dupes, où l’on sent que les conventions bourgeoises britanniques sont sur le point de voler en éclats à n’importe quel moment. C’est du grand art, un exemple de mise en scène, de narration et de direction d’acteurs. The Romantic Englishwoman est un drame passionnel et psychologique virtuose où les genres semblent s’affronter, se contredire, pour mieux perdre à la fois ses personnages et une audience alors malmenée dans ses attentes, mais toujours impliquée.

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Test DVD / Ils aimaient la vie – Kanal, réalisé par Andrzej Wajda

ILS AIMAIENT LA VIE (Kanal) réalisé par Andrzej Wajda, disponible en DVD depuis le 22 octobre 2020 chez Malavida Films.

Acteurs : Teresa Izewska, Tadeusz Janczar, Wienczyslaw Glinski, Tadeusz Gwiazdowski, Stanislaw Mikulski, Emil Karewicz, Vladek Sheybal, Jan Englert…

Scénario : Jerzy Stefan Stawinski

Photographie : Jerzy Lipman

Musique : Jan Krenz

Durée : 1h33

Date de sortie initiale: 1957

LE FILM

1944, ultime résistance des polonais de Varsovie contre l’occupant. Acculés, épuisés, et encerclés par les allemands, un détachement de soldats est contraint de fuir par les égouts pour rejoindre le centre ville où les combats se poursuivent encore. Tous ont une histoire, tous ont peur de mourir, tous ont tellement envie de vivre…

A la fin de la Seconde Guerre mondiale, Andrzej Wajda (1926-2016) fait ses études à l’Académie des beaux-arts de Cracovie puis à l’École nationale de cinéma de Lodz. Après deux courts-métrages, il réalise en 1955 Une fille a parlé – Pokolenie. Ce long-métrage est un récit de la jeunesse de Varsovie pendant l’occupation. Avec ce film, Andrzej Wajda va à contre-courant du réalisme socialiste prôné par le parti communiste et donne naissance au mouvement cinématographique « L’École polonaise de cinéma ». Deux ans plus tard, toujours dans le même style, il réalise Ils aimaient la vieKanal. Ce film revient sur l’Insurrection de Varsovie, durant laquelle la résistance polonaise s’est soulevée contre l’armée allemande du 1er août au 2 octobre 1944.

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Test Blu-ray / L’Héritière, réalisé par William Wyler

L’HÉRITIÈRE (The Heiress) réalisé par William Wyler, disponible en DVD et Combo Blu-ray + DVD le 18 mai 2021 chez Elephant Films.

Acteurs : Olivia de Havilland, Montgomery Clift, Ralph Richardson, Miriam Hopkins, Vanessa Brown, Betty Linley, Ray Collins, Mona Freeman…

Scénario : Ruth Goetz & Augustus Goetz,, d’après leur pièce de théâtre et le roman Washington Square de Henry James

Photographie : Leo Tover

Musique : Aaron Copland

Durée : 1h55

Année de sortie : 1949

LE FILM

William Wyler (1902-1981), un des plus grands réalisateurs du vingtième siècle, signe une fois de plus un film splendide récompensé par quatre Oscars en 1950 : Meilleure actrice, meilleurs costumes pour Edith Head et Gile Steele, meilleure musique pour Aaron Copland et meilleure direction artistique. Inspiré par la pièce d’Augustus et Ruth Goetz, elle-même adaptée du roman Washington Square, d’Henry James, L’Héritière est un film d’une cruauté verbale saisissante. Avec virtuosité, Olivia de Havilland (enlaidie pour le rôle) incarne Catherine Sloper, qui vit dans une riche demeure de Washington Square, le « beau quartier » de New York, en compagnie de son père, Austin Sloper, veuf, richissime et tyrannique. Celui-ci ne cesse d’humilier sa fille, la comparant sans cesse à sa brillante et séduisante épouse décédée. La jeune fille, effacée, naïve, timide et sans attraits, fait la rencontre du séduisant Morris Townsend au cours d’un bal. Le jeune homme lui fait aussitôt une cour empressée. Devenant un habitué de la maison des Sloper, il demande la main de Catherine à son père. Mais celui-ci ne tarde pas à l’accuser d’être un coureur de dot et refuse de donner suite à sa demande. Catherine persévère cependant dans ses espoirs d’un mariage d’amour. Son père lui explique qu’étant donné son manque de charme et d’intelligence, seul l’argent peut intéresser Morris Townsend. La suite des événements, dramatiques pour Catherine, semble lui donner raison. Elle va perdre son innocence, ses certitudes et ses repères. Une lente mais palpable transformation s’opère jusqu’à la dernière séquence. Doucement, Catherine calque son caractère sur celui qui l’a élevé et devient froide, dure et implacable. Ses proches (sa tante, sa domestique) ont du mal à la reconnaître et ne peuvent imaginer que cette personne impitoyable puisse être la même qu’ils ont alors connue. L’Héritière est un mélodrame sensationnel, pessimiste, élégant et cruel doublé d’un portrait de jeune femme poignant qui foudroie le cinéphile par la richesse de sa réalisation et de son interprétation. Extraordinaire directeur d’acteurs, le cinéaste obtient de ses comédiens (Olivia de Havilland, Montgomery Clift en tête) un jeu transcendant qui bouleverse le spectateur.

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Test DVD / La Muraille de feu, réalisé par Carlo Ludovico Bragaglia

LA MURAILLE DE FEU (La Gerusalemme liberata) réalisé par Carlo Ludovico Bragaglia, disponible en DVD le 4 mai 2021 chez Artus Films.

Acteurs : Francisco Rabal, Sylva Koscina, Gianna Maria Canale, Rik Battaglia, Philippe Hersent, Andrea Aureli, Alba Arnova, Nando Tamberlani…

Scénario : Sandro Continenza

Photographie : Rodolfo Lombardi

Musique : Roberto Nicolosi

Durée : 1h40

Date de sortie initiale : 1957

LE FILM

Lors de la première croisade aux pieds de la muraille de Jérusalem, les seigneurs chrétiens Tancrède, Renaud, Godefroy de Bouillon attendent de passer à l’attaque tandis que trois femmes musulmanes vont faire chavirer leur cœur et le tournant de la bataille.

Est-ce que le nom de Carlo Ludovico Bragaglia (1894-1998) vous dit quelque chose ? Pour tout vous avouer, moi non plus. Je n’avais jamais entendu parler de ce réalisateur italien, décédé à 103 ans, metteur en scène de plus de soixante longs-métrages sur une durée de trente années. Considéré comme l’un des cinéastes transalpins les plus prolifiques, Carlo Ludovico Bragaglia n’a cependant jamais connu de notoriété au-delà des frontières de son pays. Dans sa filmographie, on pourra évoquer six opus avec Totò (Animali Pazzi, 47 morto che parla, Figaro qua, Figaro là, Les Femmes de Barbe-Bleue, Totò cerca moglie et Totò le Moko), ainsi que diverses comédies musicales et même quelques péplums et films d’aventure dans les années 1950-60. De l’avis des spécialistes, La Muraille de feu – La Gerusalemme liberata est l’un de ses meilleurs films et force est de constater que cette évocation de la prise de Jérusalem par les guerriers de la première croisade (l’un des derniers films sur ce sujet) est élégamment réalisée et portée par un casting formidable sur lequel trône la sublime Sylva Koscina.

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Test DVD / Geneviève de Brabant, réalisé par José Luis Monter & Riccardo Freda

GENEVIÈVE DE BRABANT (Genoveffa di Brabante) réalisé par José Luis Monter & Riccardo Freda, disponible en DVD le 4 mai 2021 chez Artus Films.

Acteurs : María José Alfonso, Alberto Lupo, Stephen Forsyth, Beni Deus, Rosita Yarza, Andrea Bosic, Franco Balducci, Ángela Rhu…

Scénario : Riccardo Freda & José Luis Monter

Photographie : Julio Ortas & Stelvio Massi

Musique : Carlo Rustichelli

Durée : 1h26

Date de sortie initiale : 1964

LE FILM

Au XIIe siècle, le comte Siegfried s’éprend de Geneviève de Brabant et l’épouse. Lorsqu’il doit partir à la guerre au service de son roi, Geneviève se retrouve face à l’intendant félon Golo à la cruauté sans bornes.

Quand on lui parle de Riccardo Freda (1909-1999), l’amateur de cinéma d’exploitation italien a ses yeux qui s’illuminent. Si son premier métier était sculpteur, sa passion pour le septième art l’amène un peu par hasard à réaliser son premier film, le bien connu Don Cesera Di Bazan (1942). Après ce premier coup d’essai, le réalisateur se spécialise rapidement dans le film d’aventure et le genre cape et d’épée. Vaniteux, ne mâchant pas ses mots, il affirmera toute sa vie n’avoir fait du cinéma que pour l’argent, tout en critiquant ses « camarades » qu’il côtoyait à l’époque, y compris Roberto Rossellini. Même s’il est indéniable que le bonhomme était on ne peut plus aigri et imbu de sa personne, allant même jusqu’à déclarer qu’il était une « exception » en tant que cinéaste, on ne pourra jamais lui reprocher d’avoir chômé ou d’être allé à la facilité tout au long de sa prolifique carrière qui comptera plus de quarante films. On peut ainsi citer en vrac son adaptation des Misérables, connue en France sous le titre de L’Évadé du bagne (1948), Le Fils de d’Artagnan – Il Figlio di d’Artagnan (1949), auquel Bertrand Tavernier rendra hommage en écrivant La Fille de d’Artagnan (1994) que Riccardo Freda devait d’ailleurs mettre en scène lui-même, un Spartacus en 1953, Le Château des amants maudits (1956), inspiré de l’histoire de Beatrice Cenci, Les Vampires – I Vampiri (1957), qui sera finalement repris en main et terminé par Mario Bava, le cultissime L’Effroyable Secret du docteur Hichcock – L’Orribile segreto del Dr. Hichcock (1962). Retracer la filmographie de Riccardo Freda, c’est suivre les grandes étapes du cinéma italien d’exploitation, puisque le réalisateur touchera aussi bien au péplum qu’au giallo, au mélodrame, au film d’épouvante, allant même jusqu’à anticiper le poliziottesco dix ans avant son explosion avec Chasse à la drogue en 1961. Le film d’aventure tient aussi une belle place dans son œuvre. Outre Sept épées pour le roi – Le Sette spade del vendicatore (1962), qui n’est autre que le remake de Don Cesera di Bazan et L’Aigle de Florence – Il Magnifico avventuriero (1963), Riccardo Freda met les bouchées doubles en 1964 et met en scène sa version de Roméo et Juliette et celle des Deux orphelines. Parallèlement, il écrit le film Geneviève de Brabant, inspiré par la biographie de l’héroïne légendaire et populaire du Moyen Âge, Geneviève de Brabant donc, présente dans l’ouvrage La Légende dorée écrit par Jacques de Voragine, qui inspirera les écrivains, les peintres, les dramaturges, les compositeurs et les cinéastes puisqu’il s’agit ici du sixième film centré sur ce personnage. S’il est souvent indiqué que seul le réalisateur José Luis Monter est aux commandes, Riccardo Freda y a bel et bien participé en tant que metteur en scène. Et en voyant le film (inédit en France), force est de constater que l’on retrouve non seulement son style au niveau du scénario, mais aussi et surtout à l’écran avec des affrontements pleins de panache (le film démarre d’emblée par un fracas de lames croisées), une caractérisation spécifique et personnelle des personnages, ainsi que le souffle épique qui a souvent marqué les opus du cinéaste transalpin. Il en résulte un divertissement de haute volée, excellemment réalisé et interprété, qui vaut le coup d’oeil pour ses beaux décors, ses rebondissements multiples, ses dialogues très soignés et ses combats très bien chorégraphiés.

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Test Blu-ray / Où est la liberté…?, réalisé par Roberto Rossellini

OÙ EST LA LIBERTÉ…? (Dov’è la libertà…?) réalisé par Roberto Rossellini, disponible en Combo Blu-ray + DVD le 10 mars 2021 chez Tamasa Diffusion.

Acteurs : Totò, Vera Molnar, Nyta Dover, Franca Faldini, Giacomo Rondinella, Leopoldo Trieste, Fernando Milani, Vincenzo Talarico…

Scénario : Vitaliano Brancati, Ennio Flaiano, Antonio Pietrangeli, Roberto Rossellini & Vincenzo Talarico

Photographie : Aldo Tonti & Tonino Delli Colli

Musique : Renzo Rossellini

Durée : 1h28

Date de sortie initiale : 1954

LE FILM

Le barbier Salvatore Lojacono sort de prison après avoir purgé une peine de vingt ans pour crime passionnel. Il rentre chez lui à Rome, mais ne reconnaît plus ni sa famille ni ses voisins : il ne rencontre autour de lui qu’égoïsme et hypocrisie. Après plusieurs mésaventures, il ne voit plus qu’une issue, se faire condamner pour retourner en prison et retrouver la tranquillité.

À la fois précurseur du néoréalisme italien avec sa Trilogie Fasciste (Le Navire blanc, Un pilote revient et L’Homme à la croix) et figure majeure de ce mouvement cinématographique (Rome, ville ouverte, Païsa et Allemagne année zéro), Roberto Rossellini (1906-1977) est un des réalisateurs les plus en vue à la fin des années 1940. 1950 est un tournant dans sa carrière et par ailleurs dans sa vie, puisqu’il rencontre Ingrid Bergman, qui lui donnera trois enfants et avec laquelle il tournera cinq longs-métrages, de Stromboli à Jeanne au bûcher (1954). Quand on évoque Roberto Rossellini, s’il y a bien un genre auquel on ne pense pas c’est bien la comédie. Pourtant, il existe deux films dissimulés chaque fois entre deux « monuments ». Si le premier intitulé La Machine à tuer les méchants – La Macchina ammazzacattivi (1952) est quelque peu oublié, le second, coincé entre Europe 51 et Voyage en Italie est Où est la liberté…? – Dov’è la libertà…? (1954). C’est le metteur en scène qui en a l’idée, qu’il confie ensuite à ses scénaristes Vitaliano Brancati (Don Cesare di Bazan de Riccardo Freda et auteur du Bel Antonio), Ennio Flaiano (Le Cheik Blanc et La Dolce Vita de Federico Fellini), Antonio Pietrangeli (Les Amants diaboliques de Luchino Visconti) et Vincenzo Talarico (Moi, moi, moi et les autres d’Alessandro Blasetti). Écrit spécialement pour le mythique Totò (1898-1967), Où est la liberté…? apparaît étrangement comme une œuvre hybride, et pour cause…Emballé par son sujet au début du tournage, Roberto Rossellini s’en désintéresse progressivement. S’il maîtrise parfaitement l’humour ou le côté décalé de certaines situations, ce qui a déjà pu être constaté dans quelques-uns de ses films précédents, le cinéaste lorgnait en réalité sur son opus suivant, Voyage en Italie. Après trois mois de prises de vues, le tournage est arrêté et ne reprendra qu’un an plus tard sous la direction de Mario Monicelli, alors en charge de la seconde équipe et qui avait déjà dirigé Totò avec Steno, dans Totò cherche un appartement (1949), Gendarmes et voleurs (1951), Totò e il re di Roma (1951) et Totò et les femmes (1952). Rétrospectivement, il est plus aisé d’attribuer les scènes de pure comédie à Mario Monicelli, autrement dit tout ce qui est lié au procès, et celles réalisées par Roberto Rossellini, qui s’inscrivent encore et toujours dans le néoréalisme, qui montrent le personnage Totò redécouvrir la ville après plus de vingt années d’emprisonnement. Il en résulte un film en demi-teinte, qui souffre d’un manque de rythme certain, mais qui demeure une vraie curiosité, aussi bien dans la filmographie de Roberto Rossellini, que dans celle de l’une des plus grandes stars du cinéma italien de tous les temps.

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Test Blu-ray / Songbird, réalisé par Adam Mason

SONGBIRD réalisé par Adam Mason, disponible en DVD et Blu-ray le 15 avril 2021 chez Metropolitan Films.

Acteurs : K.J. Apa, Sofia Carson, Craig Robinson, Bradley Whitford, Alexandra Daddario, Peter Stormare, Paul Walter Hauser, Demi Moore…

Scénario : Adam Mason & Simon Boyes

Photographie : Jacques Jouffret

Musique : Lorne Balfe

Durée : 1h25

Date de sortie initiale : 2020

LE FILM

Cela fait maintenant quatre ans que le monde vit en confinement. Désormais, les personnes infectées du Covid-23 sont envoyées de force en quarantaine dans des camps devenus peu à peu d’inquiétants ghettos. A Los Angeles, Nico est un coursier immunisé au virus qui arpente la ville lors de ses livraisons. C’est ainsi qu’il fait la connaissance de Sara, une jeune femme confinée chez elle. Malgré les impératifs sanitaires qui les empêchent de s’approcher, Sara et Nico tombent amoureux. Mais lorsque Sara est suspectée d’être contaminée, elle est contrainte de rejoindre les camps de quarantaine. Nico tente alors l’impossible pour la sauver.

On l’attendait ce film ! Non pas pour son intérêt, mais parce qu’il était certain que quelques producteurs opportunistes allaient profiter de la situation extraordinaire vécue par tous les habitants de la planète depuis mars 2020, pour mettre en route un film qui s’en inspirerait. Voici donc Songbird, réalisé par Adam Mason, obscur metteur en scène d’une dizaine de longs-métrages tout aussi inconnus, y compris un certain Manipulations qui réunissait tout de même Anthony Hopkins, Al Pacino et Josh Duhamel. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que ce n’est pas encore avec Songbird, qu’il a coécrit avec son complice Simon Boyes, qu’il risque de se faire une renommée. Cette dystopie – mais en est-ce vraiment une ? – a tout simplement été tournée dans les rues désertes de Los Angeles, alors que ses habitants étaient cloîtrés chez eux, profitant ainsi d’un décor quasi-fantastique, sans avoir recours aux effets spéciaux ! Il est pas con le Michael Bay, producteur de ce…thriller ? Drame fantastique ? Comédie involontaire ? On ne sait pas trop en fait, car Songbird ne raconte rien ou pas grand-chose, si ce n’est une histoire d’amour évidemment contrariée entre deux jeunes tourtereaux, séparés par le contexte sanitaire et dont on apprend même qu’ils n’ont pas eu le temps de se toucher avant d’être forcés de rester a casa. A côté de ça, Adam Mason se concentre sur d’autres personnages, jamais intéressants, essentiellement des individus qui ont trouvé le bon truc pour se faire du fric, d’autres qui essayent de survivre en se la pétant sur les réseaux sociaux (Alexandra Daddario qui comme d’habitude a acheté de la lingerie trop petite), d’autres en profitant des personnes immunisées contre le COVID-23 (oui oui) en les utilisant comme coursiers. Ajoutez à cela un responsable de la sécurité sanitaire complètement fou (Peter Stormare en roues libres), un ancien soldat revenu paralysé et traumatisé d’Afghanistan qui joue avec ses drones, sans oublier la caution mexicaine avec une jeune héroïne aux sourcils épilés comme une vedette de télé-réalité et vous obtenez…bah rien en fait, ou pas grand-chose, surtout pas de quoi faire un film…

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Test Blu-ray / Europe 51, réalisé par Roberto Rossellini

EUROPE 51 (Europa ’51) réalisé par Roberto Rossellini, disponible en Combo Blu-ray + DVD le 10 mars 2021 chez Tamasa Diffusion.

Acteurs : Ingrid Bergman, Alexander Knox, Ettore Giannini, Giulietta Masina, Teresa Pellati, Marcella Rovena, Tina Perna, Sandro Franchina…

Scénario : Roberto Rossellini, Sandro De Feo, Mario Pannunzio, Ivo Perilli & Brunello Rondi

Photographie : Aldo Tonti

Musique : Renzo Rossellini

Durée : 1h54

Date de sortie initiale : 1952

LE FILM

Une jeune femme riche et futile est bouleversée par le suicide de son enfant, dont elle se sent responsable. Son drame personnel lui fait découvrir la misère et les souffrances des autres, à qui elle se dévouera désormais.

Alors qu’il vit la période de sa vie la plus mouvementée (divorce difficile, attente d’un enfant), Roberto Rossellini signe en 1950 son film le plus paisible, Les 11 Fioretti de François d’Assise – Francesco, giullare di Dio, qui délivre un véritable message de paix, d’amour et d’entraide tout en repoussant les limites du néoréalisme en mettant en scène de véritables moines franciscains. Lorsqu’il évoque Les 11 Fioretti de François d’Assise, Martin Scorsese déclare « Je n’ai jamais vu de film qui lui soit vraiment comparable et je ne m’attends pas à en voir un de toute ma vie », tandis que François Truffaut disait qu’il s’agissait du « plus beau film du monde ». Inspiré de courts récits évoquant les nombreux épisodes de la vie de François d’Assise (les « fioretti »), le film de Roberto Rossellini renouvelle le néoréalisme et laisse une grande place à la vie quotidienne de ces moines refusant tout matérialisme et profitant du plus beau cadeau accordé par Dieu : la vie et l’aide aux plus démunis en leur enseignant que la souffrance mène à la plénitude et à la joie. Tout miracle est donc banni du film de Roberto Rossellini qui préfère montrer des hommes bâtissant leur petite chapelle de leurs mains, priant, venant en aide aux pauvres, mangeant ou marchant avec allégresse dans la campagne environnante, le tout ponctué avec humour et poésie. Dans le film, François est un homme comme les autres, qui se démarque à peine du reste de ses fidèles. Les personnages effleurent la terre et semblent peu soumis aux lois de la gravité mais demeurent des hommes « terrestres » prêchant l’Evangile. Oeuvre de l’innocence et de l’épure, ce film est un tournant dans l’oeuvre et dans l’existence de son auteur, puisque dans un climat personnel quelque peu chaotique, le cinéaste va réaliser son film le plus apaisé et le plus fantaisiste de toute sa carrière. C’est de ce film que découlera tout simplement Europe 51 – Europa ’51, la seconde de ses cinq collaborations avec celle qui partage désormais sa vie, Ingrid Bergman. Deux ans après Stromboli – Stromboli terra di Dio et deux ans avant Voyage en Italie – Viaggio in Italia, la trilogie dite de la « solitude », Roberto Rossellini et la comédienne présentent une radiographie implacable de l’Italie post-Deuxième Guerre mondiale, doublée du portrait d’une femme bourgeoise qui décide de changer de vie après le suicide de son fils. Si Europe 51 n’est sans doute pas le film le plus célèbre de son auteur, du moins celui auquel on pense d’emblée en évoquant sa grande filmographie, il demeure en revanche l’un des plus riches, aussi bien sur le fond que sur la forme et s’avère peut-être le chef d’oeuvre caché de Roberto Rossellini.

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Test Blu-ray / L’Homme sans visage, réalisé par Mel Gibson

L’HOMME SANS VISAGE (The Man Without a Face) réalisé par Mel Gibson, disponible en DVD et Blu-ray le 15 avril 2021 chez Metropolitan Films.

Acteurs : Mel Gibson, Nick Stahl, Margaret Whitton, Fay Masterson, Gaby Hoffmann, Geoffrey Lewis, Richard Masur, Michael DeLuise, Ethan Phillips…

Scénario : Malcolm MacRury, d’après le roman d’Isabelle Holland

Photographie : Donald McAlpine

Musique : James Horner

Durée : 1h50

Date de sortie initiale : 1993

LE FILM

L’amitié de deux êtres rejetés par le monde qui les entoure. L’un, Justin McLeod, était un brillant professeur défiguré dans un terrible accident. L’autre, Chuck Norstadt, est un adolescent, lui aussi outsider au sein de sa propre famille. Chuck va demander à McLeod de l’aider à préparer en secret l’examen d’entrée à l’académie militaire.

Au début des années 1990, tout va pour le mieux pour Mel Gibson. L’Arme fatale 2 et Comme un oiseau sur la branche ont été de gros cartons au box-office, mais le comédien souhaite montrer une autre facette de son talent. Si Air America de Roger Spottiswoode contente ses fans de comédie d’action en 1990, le comédien se retrouve la même année en haut de l’affiche du Hamlet de Franco Zeffirelli. Deux ans plus tard, L’Arme fatale 3 déboule sur les écrans, suivi de près par la romance de Steve Miner, Forever Young. Mel Gibson le sait, il est arrivé à un carrefour de sa vie et de son métier. Fatigué qu’on le résume souvent à sa belle gueule et ce malgré quelques performances qui ont été saluées par la critique, il décide de passer à la mise en scène en 1993 en adaptant le roman The Man Without a Face d’Isabelle Holland, publié en 1972. A travers le personnage défiguré de Justin McLeod, il prouve ici à ses détracteurs, ainsi qu’aux spectateurs, qu’il ne saurait être considéré uniquement que pour son physique. L’Homme sans visage débarque dans les cinémas américains en août 1993 et se voit couronner d’un petit succès d’estime et d’une critique positive. Ce drame psychologique pose les bases du martyr qui parcourra la filmographie de Mel Gibson, même si L’Homme sans visage est avant tout son seul film « familial », sur lequel plane l’ombre du Fantôme de l’Opéra. En vrai antihéros tragique, Mel Gibson crève l’écran une fois de plus, dans un rôle qu’il envisageait au départ pour Jeff Bridges ou William Hurt. Toutefois, sa présence magnétique et puissante n’éclipse jamais celle de son jeune acteur et partenaire, Nick Stahl, magnifique et très impressionnant dans son tout premier rôle au cinéma. L’Homme sans visage est la plupart du temps éclipsé dans la carrière de metteur en scène de Mel Gibson, dissimulé par les mastodontes que sont Braveheart et La Passion du Christ, ainsi que par les percutants Apocalypto et Tu ne tueras point. Pourtant, il n’en demeure pas moins superbe et n’a eu de cesse d’être réévalué à sa juste valeur, une ode merveilleuse à la tolérance, à la transmission, à l’enseignement, au droit à la différence, au partage et à la rédemption.

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Test Blu-ray / La Ruée des Vikings, réalisé par Mario Bava

LA RUÉE DES VIKINGS (Gli Invasori) réalisé par Mario Bava, disponible en Blu-ray chez Le Chat qui fume.

Acteurs : Cameron Mitchell, George Ardisson, Ellen Kessler, Alice Kessler, Françoise Christophe, Andrea Checchi, Folco Lulli, Franco Giacobini, Raf Baldassarre…

Scénario : Oreste Biancoli, Piero Pierotti & Mario Bava

Photographie : Mario Bava

Musique : Roberto Nicolosi

Durée : 1h30

Date de sortie initiale : 1961

LE FILM

Au Xe siècle, le baron Ruthford et ses hommes exterminent des vikings installés sur les côtes anglaises et dont le chef, Harald, est tué. Mais un jour, Ruthford ranime la haine. Iron, fils d’Harald, se bat à son tour contre les Anglais tout en s’opposant à son frère Erik, qui se trouve dans le camp opposé.

En 1958, le triomphe international des VikingsThe Vikings de l’immense Richard Fleischer, donne évidemment envie à certains producteurs, en particulier italiens, de surfer sur ce nouvel engouement des spectateurs pour la vie de ces pirates Scandinaves qui ont écumé les mers du VIIe au XIe siècle. L’un de ces premiers ersatz est Le Dernier des Vikings – L’Ultimo dei Vikinghi, réalisé par Giacomo Gentilomo, mais aussi et surtout par Mario Bava, même si ce dernier n’est pas crédité à la mise en scène. En revanche, la même année sort La Ruée des Vikings – Gli Invasori, officiellement le second long-métrage de Mario Bava (autrement dit, pour lequel il se retrouve seul aux manettes), un an après Le Masque du démon – La Maschera del demono. A l’instar d’Hercule contre les vampires – Ercole al centro della terra, qu’il coréalisera avec Franco Prosperi et qui sortira aussi en 1961, Mario Bava prend son envol avec La Ruée des Vikings, dans lequel son art pictural éclate aux yeux des spectateurs, puisqu’en plus du scénario coécrit avec Oreste Biancoli (Le Voleur de bicyclette, Le Petit monde de Don Camillo) et Piero Pierotti (Maciste en enfer, Super 7 appelle le Sphinx), il en signe également la sublime photographie, où l’on reconnaît immédiatement sa griffe. Certes, La Ruée des Vikings a souvent du mal à rivaliser avec son modèle américain, au budget beaucoup plus conséquent, mais Mario Bava s’acquitte fort honorablement des moyens mis à sa disposition. Tourné essentiellement en studio et dans la périphérie de Rome pour les scènes en bord de mer, le film bénéficie aussi de costumes soignés, d’une reconstitution très honnête et surtout de l’oeil de l’artiste, Mario Bava lui-même, dont la première vocation était la peinture (il avait d’ailleurs fait les Beaux Arts), qui concocte des plans crépusculaires à se damner de beauté, tout en jouant déjà avec ses couleurs de prédilection, qui feront sa marque de fabrique et participeront à sa légende. La Ruée des Vikings possède encore un charme fou et la rigueur de Mario Bava lui a permis de traverser la deuxième moitié du XXè siècle sans trop d’encombre. Le divertissement est en tout cas toujours au rendez-vous !

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