Test Blu-ray / Backtrace, réalisé par Brian A. Miller

BACKTRACE réalisé par Brian A. Miller, disponible en DVD et Blu-ray le 1er août 2019 chez Studiocanal

Acteurs : Sylvester Stallone, Ryan Guzman, Matthew Modine, Colin Egglesfield, Christopher McDonald, Meadow Williams, Swen Temmel, Jenna Willis…

Scénario : Mike Mapples

Photographie : Peter Holland

Musique : Mike Burns

Durée : 1h36

Date de sortie initiale : 2018

LE FILM

L’unique survivant d’un groupe de voleurs à main armée sort d’un établissement de haute sécurité. Durant son séjour, un médicament expérimental lui a été administré.

Sly aïe aïe…
Par le même réalisateur que Représaille.
Quand Bruce Willis et Sylvester se talonnent.

Coucou ! Revoilà Brian A. Miller ! Juste après Représaille, le réalisateur aura enchaîné directement avec Backtrace, son nouveau thriller, avec pas moins de Sylvester Stallone et Matthew Modine en haut de l’affiche. Du programme télé du moins, car comme les précédents longs métrages de Brian A. Miller, Backtrace n’a aucune autre prétention que d’aider ses acteurs à payer quelques arriérés d’impôts et les chaînes de la TNT à combler un trou entre 21h15 et 22h45. Car en dépit d’un prologue enthousiasmant, Backtrace s’enlise immédiatement après et ne parvient jamais à éveiller l’intérêt des (télé)spectateurs. On passe alors les 90 autres minutes à se demander comment de tels comédiens peuvent accepter de participer à ce genre d’inepties.

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Test Blu-ray / Le Retour du Grand Blond, réalisé par Yves Robert

LE RETOUR DU GRAND BLOND réalisé par Yves Robert, disponible en Blu-ray depuis le 4 juin 2014 chez Gaumont

Acteurs : Pierre Richard, Mireille Darc, Bernard Blier, Jean Rochefort, Jean Carmet, Michel Duchaussoy, Colette Castel, Paul Le Person…

Scénario : Yves Robert, Francis Veber

Photographie : René Mathelin

Musique : Vladimir Cosma

Durée : 1h21

Date de sortie initiale : 1974

LE FILM

Le capitaine Cambrai est certain que le colonel Toulouse a utilisé le maladroit François Perrin pour se débarrasser de Milan, son collègue. Cambrai va alors tout mettre en oeuvre pour rassembler des preuves démontrant que « Le Grand Blond » n’est pas un agent secret, mais bien un pauvre malchanceux s’étant retrouvé dans des situations au mauvais endroit, au mauvais moment… Toulouse prend donc à présent pour cible le pauvre violoniste.

Fort du succès du Grand Blond avec une chaussure noire, son plus gros hit au box-office depuis le triomphe de La Guerre des boutons en 1962, Yves Robert enchaîne avec Salut l’artiste, qui ne rencontre pas son public. Désireuse de renflouer ses caisses, la Gaumont lui commande une suite au Grand Blond qui devra sortir pour les fêtes de Noël 1974. Le cinéaste et son coscénariste-dialoguiste Francis Veber s’attellent à la tâche, une gageure puisque le premier épisode n’appelait pas forcément une séquelle. Pourtant, les deux collaborateurs parviennent à reprendre le train en marche en écrivant la suite immédiate au premier film, trois mois plus tard précisément.

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Test Blu-ray / Le Quatrième homme, réalisé par Phil Karlson

LE QUATRIÈME HOMME (Kansas City Confidential) réalisé par Phil Karlson, disponible en combo Blu-ray/DVD le 16 juillet 2019 chez Rimini Editions

Acteurs : John Payne, Coleen Gray, Preston Foster, Neville Brand, Lee Van Cleef, Jack Elam, Dona Drake, Mario Siletti…

Scénario : George Bruce, Harry Essex d’après une histoire originale de Harold R. Greene et Rowland Brown

Photographie : George E. Diskant

Musique : Paul Sawtell

Durée : 1h39

Date de sortie initiale : 1952

LE FILM

Joe Rolfe, un ancien détenu, est arrêté pour l’attaque d’un camion blindé où quatre gangsters masqués ont dérobé 1,2 millions de dollars en petites coupures. Après avoir subi un interrogatoire musclé orchestré par la police, il ressort blanchi. Mais Joe n’en reste pas là pour autant et avec l’aide de ses complices mafieux, il retrouve la trace d’un des braqueurs et usurpe son identité sans éveiller le moindre soupçon…

Réalisé par Phil Karlson (1908-1985) en 1952, Le Quatrième hommeKansas City Confidential est un film noir produit par la United Artists, qui montre le savoir-faire en la matière du metteur en scène, spécialiste des séries B, à qui l’on doit Behind the Mask (1946), L’Inexorable enquête (1952), L’Affaire de la 99ème rue (1953) ou bien encore On ne joue pas avec le crime (1955) et The Phenix City Story (1955). Phil Karlson deviendra également un spécialiste du western avec quelques titres restés célèbres comme Le Dernier passage (1961) avec Richard Widmark et La Poursuite des tuniques bleues (1967) avec Glenn Ford. Le Quatrième homme reste emblématique du genre, un film noir très prisé par les amateurs et les cinéphiles, d’autant plus que cette œuvre reste la principale source d’inspiration du braquage de L’Affaire Thomas Crown (1968) de Norman Jewison, puis d’un des éléments d’Usual Suspects de Bryan Singer (1995). Autant dire que Kansas City Confidential reste une savoureuse découverte et mérite qu’on s’y attarde.

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Test Blu-ray / Le Grand Blond avec une chaussure noire, réalisé par Yves Robert

LE GRAND BLOND AVEC UNE CHAUSSURE NOIRE réalisé par Yves Robert, disponible en Blu-ray depuis le 4 juin 2014 chez Gaumont

Acteurs : Pierre Richard, Mireille Darc, Bernard Blier, Jean Rochefort, Jean Carmet, Colette Castel, Paul Le Person…

Scénario : Yves Robert, Francis Veber

Photographie : René Mathelin

Musique : Vladimir Cosma

Durée : 1h29

Date de sortie initiale : 1972

LE FILM

François Perrin, arrive à Orly avec aux pieds une chaussure marron et l’autre noire. Une aubaine pour Perrache, adjoint du colonel Toulouse, chef d’un service secret, que ce jeune violoniste fantasque. Il le choisit, pour jouer à ses dépends, le rôle d’un redoutable espion international. Toulouse, las de défendre sa place contre son très ambitieux adjoint Milan, a décidé de s’en débarrasser une fois pour toutes, en le lançant sur une fausse piste.

Il jette du pain aux canards ? Oh merde…

Le Grand Blond avec une chaussure noire est un des plus grands classiques de la comédie française des années 1970. Jusqu’alors cantonné dans des seconds rôles (Un idiot à Paris), Pierre Richard fait une prestation remarquée dans Alexandre le bienheureux, réalisé par Yves Robert en 1968. Ce dernier repère le comique visuel de l’acteur et l’encourage à exploiter son personnage burlesque dans la lignée de ses modèles Buster Keaton et Chaplin. C’est grâce au cinéaste que Pierre Richard passe donc derrière la caméra en 1970 avec Le Distrait, produit par Yves Robert et joli succès dans les salles avec près d’1,5 million de spectateurs. S’ensuivent Les Malheurs d’Alfred, remarquable comédie, cette fois encore mise en scène et interprétée par Pierre Richard, encore un succès, et Le Grand Blond avec une chaussure noire avec lequel le comédien retrouve Yves Robert.

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Test Blu-ray / La Mafia fait la loi, réalisé par Damiano Damiani

LA MAFIA FAIT LA LOI (Il Giorno della civetta) réalisé par Damiano Damiani, disponible en combo Blu-ray/DVD le 26 juin 2019 chez Studiocanal

Acteurs : Claudia Cardinale, Franco Nero, Lee J. Cobb, Tano Cimarosa, Nehemiah Persoff, Ennio Balbo, Ugo D’Alessio, Fred Coplan…

Scénario : Ugo Pirro, Damiano Damiani d’après le roman de Leonardo Sciascia

Photographie : Tonino Delli Colli

Musique : Giovanni Fusco

Durée : 1h49

Date de sortie initiale : 1968

LE FILM

À peine arrivé dans une petite ville de Sicile, le capitaine Bellodi est chargé de mener une enquête sur l’assassinat d’un entrepreneur local en froid avec la mafia. Seule une femme, témoin du meurtre, est susceptible de l’aider.

Du silence et des ombres.

C’est dans le virage d’une route de campagne sicilienne, que le film s’ouvre. C’est quasiment un décor et une situation de western. Un lieu fort, bercé par le chant des cigales. En bord de chaussée, une présence se cache entre les arbres et les champs de chicorée, un fusil de chasse à la main. Pas de cheval à l’horizon de cette route sinueuse, sinon un camion transportant des sacs de ciment. Deux coups de feu sont tirés, le véhicule s’arrête dans la montée puis recule, agonise en dansant, avant de s’emboutir dans le talus. On voit un homme en tomber, blessé, il réussit à courir jusqu’au pont faisant la liaison entre la route montante et celle descendante, puis appelle à l’aide avant d’être abattu de deux coups de feu supplémentaires. Aux alentours, rien ou presque : Y a-t-il des yeux dans la vieille ferme en pierres, érigée sur la colline rocailleuse qui surplombe ce virage de la mort ? Il y a dans cette ouverture tout, sur un mode silencieux, de ce que sera La Mafia fait la loi – Il Giorno della civeta : Une science du cadre, un superbe sens de l’espace, une violence tranchante, le tout accompagné d’une lumière et d’une empreinte musicale déjà moins brutale, plus hétéroclite.

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Test DVD / Rendez-vous avec une ombre, réalisé par Joseph Pevney

RENDEZ-VOUS AVEC UNE OMBRE (The Midnight Story) réalisé par Joseph Pevney, disponible en DVD le 16 juillet 2019 chez ESC Editions

Acteurs : Tony Curtis, Marisa Pavan, Gilbert Roland, Jay C. Flippen, Argentina Brunetti, Ted de Corsia, Richard Monda, Kathleen Freeman, Herb Vigran, Peggy Maley…

Scénario : Edwin Blum, John Robinson

Photographie : Russell Metty

Musique : Hans J. Salter, Henry Vars

Durée : 1h26

Année de sortie : 1957

LE FILM

Un soir, le Père Tomasino, adoré de ses ouailles, est assassiné à l’arme blanche dans une sombre ruelle de San Francisco. Personne ne comprend qui pouvait lui en vouloir. Joe Platini, jeune policier, est désespéré. Orphelin, il a été recueilli par le prêtre qui lui a permis d’arriver à cette situation. Le jour de l’enterrement, Joe remarque au cimetière un homme qui se lacère la main. Intrigué, il en fait part à ses supérieurs, mais ceux-ci lui rétorquent qu’on ne peut soupçonner quelqu’un sur un simple fait. Il décide alors de démissionner pour mener sa propre enquête. Il réussit à s’introduire dans la famille de cet homme, Sylvio Malatesta, et y est très vite adopté. Face à la gentillesse de tous, il se trouve désarmé et ses soupçons commencent à s’effriter…

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Test Blu-ray / Quelques messieurs trop tranquilles, réalisé par Georges Lautner

QUELQUES MESSIEURS TROP TRANQUILLES réalisé par Georges Lautner, disponible en DVD (2009) et en Blu-ray depuis le 3 septembre 2014 chez Gaumont

Acteurs : Dani, Michel Galabru, Henri Guybet, Jean Lefebvre, André Pousse, Bruno Pradal, Paul Préboist, Renée Saint-Cyr, Charles Southwood…

Scénario : Georges Lautner, Jean-Marie Poiré d’après le roman de A.D.G.

Photographie : Maurice Fellous

Musique : Pierre Bachelet, Eddie Vartan

Durée : 1h32

Date de sortie initiale : 1973

LE FILM

Loubressac, petit village du Lot. Son château, sa comtesse, ses tracteurs, ses paisibles autochtones… Et voilà qu’arrive une colonie de hippies que la châtelaine a autorisé à bivouaquer sur son domaine. Un drôle de genre qui fait grincer bien des dents. Jusqu’au jour où l’on assassine le régisseur de la châtelaine. Les beatniks sont alors des coupables tout désignés.

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Test Blu-ray / La Grosse Caisse, réalisé par Alex Joffé

LA GROSSE CAISSE réalisé par Alex Joffé, disponible en Édition Digibook Blu-ray + DVD + Livret le 22 mai 2019 chez Coin de mire Cinéma et L’Atelier d’images

Acteurs : Bourvil, Paul Meurisse, Françoise Deldick, Daniel Ceccaldi, Bernard Fresson, Aimé de March, Tsilla Chelton, Roger Carel, Pierre Vernier, Jacques Legras, Dominique Zardi…

Scénario : Alex Joffé, Renée Asséo, Geno Gil, Luc Charpentier, Pierre Levy Cort

Photographie : Louis Page

Musique : Jean Marion

Durée : 1h46

Date de sortie initiale : 1965

LE FILM

Louis Bourdin est employé à la RATP le jour, romancier la nuit, avec une forte prédilection pour le genre policier. Un jour, il rédige un polar situé dans l’univers de la RATP, boudé par les éditeurs. Le livre parvient alors aux yeux d’une bande de criminels…

« Je fais des trous, des petits trous, encore des petits trous
Des petits trous, des petits trous, toujours des petits trous
Des trous de seconde classe
Des trous de première classe… »

1965 est une grande année pour Bourvil qui aura enchaîné Le Corniaud de Gérard Oury, Guerre secrète de Christian-Jaque, Les Grandes Gueules de Robert Enrico et La Grosse Caisse d’Alex Joffé. Près de vingt millions d’entrées sur quatre films, dont plus de la moitié pour Le Corniaud. La Grosse Caisse n’est certes pas sa comédie la plus célèbre, mais n’en demeure pas moins intéressante et surtout drôle, pour plusieurs raisons. Premièrement, Alex Joffé trouve le parfait équilibre entre l’humour, décalé voire même parfois onirique (le cauchemar du procès), et l’intrigue policière. Deuxièmement, l’histoire nous permet de jeter un œil sur le Paris d’époque, et plus particulièrement sur son métro. Enfin, La Grosse Caisse est aussi et surtout l’occasion d’admirer le face à face entre deux monstres du cinéma français, Bourvil et Paul Meurisse.

Louis Bourdin est poinçonneur au métro parisien. Piqué de romans policiers (son petit appartement de célibataire croule d’ailleurs sous les livres de Ian Fleming et les séries noires) et secrètement amoureux d’Angélique, poinçonneuse du quai d’en face, l’idée lui vient de conquérir la gloire et la fortune en écrivant un roman dont la trame est simple, efficace et bourrée de détails : profitant du lundi, jour où la recette collectée par la rame à finances de la R.A.T.P. est considérable, des gangsters particulièrement audacieux s’empareront de cette  » grosse caisse ». Mais hélas personne ne daigne publier sa prose, la jugeant « trop invraisemblable ». Il décide alors de prouver tout le contraire, d’autant plus qu’il subit de plus en plus les railleries de ses collègues. Il prend le pseudonyme de Lenormand, et intitule son roman « Rapt à la RATP ». Il décide d’en faire bénéficier, bien imprudemment, un malfaiteur notoire, Paul Filippi. Ce dernier, entouré de ses sbires, décide de suivre à la lettre l’écrit de Bourdin. Ce dernier n’imaginait pas qu’il serait aussi mis à contribution…

La carrière du réalisateur Alex Joffé tourne essentiellement autour de Bourvil, avec lequel il collaborera à six reprises : Les Hussards (1955), Fortunat (1960), Le Tracassin ou Les Plaisirs de la ville (1961), Les Culottes rouges (1962), La Grosse Caisse (1965) et Les Cracks (1968). Tous de grands succès populaires, tout comme d’ailleurs le reste de la filmographie du metteur en scène, à qui l’on doit également Les Fanatiques (1957) avec Pierre Fresnay et Du rififi chez les femmes (1959) avec Robert Hossein et Roger Hanin. Dans La Grosse Caisse, Bourvil prend visiblement beaucoup de plaisir à interpréter cet humble employé de la RATP, vantard, mais peureux, qui affronte son quotidien monotone à la station Quai de la Rapée, en pensant au roman policier qu’il est en train de terminer. Il y a tout d’abord l’humanité toujours débordante de Bourvil qui fait son effet. Même s’il se sent pousser des ailes, à tel point que ses pieds ne touchent plus le sol (au sens propre comme au figuré) en rêvant de son futur succès et de sa célébrité à venir, Louis Bourdin est un homme timide, mal dans sa peau, seul, gentil, honnête, qui se fait constamment engueuler par son chef de station (l’immense Roger Carel) et qui en pince pour la charmante Angélique (délicieuse Françoise Deldick) qui poinçonne les billets en face de son guichet en direction de la Place d’Italie.

Immense comédien, Bourvil parvient également à montrer également le feu qui anime son personnage, son désir de s’extraire de son quotidien morose et sans avenir. Le destin le rattrape finalement en le mettant face à un bandit. Tout droit sorti du Monocle rit jaune de Georges Lautner, Paul Meurisse apparaît avec son élégance coutumière et son rictus cynique, véritable aristocrate du crime. Comme son partenaire, son interprétation est constamment sur le fil entre le rire et la gravité, capable de passer d’un bon mot à un regard perçant et menaçant qui refroidit immédiatement son interlocuteur. Comme si le Michel Delassale des Diaboliques refaisait surface entre deux répliques à l’humour so british. La rencontre entre les deux acteurs fait des étincelles.

Ce petit bijou de scénario rappelle les merveilleux romans de Donald Westlake et notamment les aventures de Dortmunder. Si l’on pourra déplorer quelques longueurs, notamment durant le périple de Bourdin pour trouver le truand susceptible d’être intéressé par son affaire, La Grosse Caisse séduit à plus d’un titre. Outre le jeu phénoménal des comédiens, le décor reste original avec celui de la belle station de Quai de la Rapée (formidablement reconstituée dans les studios d’Epinay-sur-Seine) et de ses environs, dont la station Arsenal, fermée aux usagers, servant de vitrine publicitaire pour des voitures Simca (!), investie ici par les gangsters.

Témoignage d’une époque révolue et de métiers aujourd’hui disparus, le film d’Alex Joffé reste bourré de charme (très belle photo de Louis Page) et toute la séquence du fameux rapt est un grand moment d’humour et de suspense. Car même si l’on rit, on souhaite également que les bandits s’en sortent et réussissent leur larcin, tout en espérant que le livre de Bourdin soit reconnu. La Grosse Caisse est une comédie policière savoureuse, qui toutes proportions gardées, annonce Le Cerveau de Gérard Oury. D’ailleurs, le vol du train postal est même évoqué au détour d’une réplique. Etrange coïncidence…

LE DIGIBOOK

Nous terminons cette deuxième vague Coin de Mire Cinéma, par La Grosse Caisse. Comme les précédents titres de la collection « La Séance », cette édition prend la forme d’un coffret Digibook prestige numéroté et limité à 3.000 exemplaires. L’objet mesure 142 x 194 mm et comprend le Blu-ray, le DVD, ainsi qu’un superbe livret de 24 pages cousu au boîtier, reproduisant des archives sur le film, mais aussi celles de la R.A.T.P. dans les années 1960, sans oublier la reproduction de 10 photos d’exploitations cinéma sur papier glacé format 120 x 150 mm rangées dans 2 étuis cartonnés, ainsi que la reproduction de l’affiche originale en format 215 x 290 mm pliée en 4. Rappelons que chaque titre est annoncé au tarif de 32€, disponible à la vente sur internet (sur le site de l’éditeur notamment) et dans certains magasins spécialisés à l’instar de Metaluna Store tenu par le fringuant Bruno Terrier, rue Dante à Paris. Merci à Laure et Thierry Blondeau pour leur confiance ! Le menu principal du Blu-ray est fixe et musical.

On attaque cette « dernière » séance, en attendant la troisième vague Coin de Mire Cinéma avec une grande impatience, par les actualités de la 27e semaine de l’année 1965 (9’). Au programme, des images impressionnantes d’un militant viet-cong fusillé devant des spectateurs, suivi d’un attentat dans les rues de Saïgon, un record de vitesse effectué à bord d’une 404 diesel rapide, une large place accordée au résumé d’un Grand Prix remporté par Jim Clark, ainsi qu’une nouvelle collection portée par des mannequins mis dans des situations quelque peu atypiques…

Place aux réclames publicitaires (8’30) avec cette fois les nougats Coupo Santo, les esquimaux Gervais, les caramels Isicrem (avec le comédien Paul Mercey), sans oublier la nouvelle gamme de chez Frigidaire, la brosse à dents Gibbs aux poils doux, Jean Nohain qui passe faire un coucou pour vanter les chauffages Arthur Martin, tandis que Régilait propose un granulé de lait soluble instantané.

L’interactivité se clôt sur un lot de bandes-annonces.

L’Image et le son

D’emblée, la copie nous apparaît étincelante, des noirs denses côtoient des blancs immaculés et la palette de gris est largement étendue. La restauration HD (à partir du négatif original) est exceptionnelle, aucune scorie n’a survécu au nettoyage numérique et le piqué est bluffant. Seules quelques séquences nocturnes témoignent d’une sensible perte de la définition, comme lors des fondus en noir où le N&B paraît alors étrangement bleuté avec un rendu plus lisse, mais ce serait vraiment chercher la petite bête. A 1h19, les limites de la restauration sont également notables à droite de l’écran. Vous pouvez donc remiser votre ancienne édition DVD LCJ.

L’éditeur est toujours aux petits soins avec ses films. La Grosse Caisse bénéficie d’une piste DTS HD Master Audio mono. Si quelques saturations demeurent inévitables surtout sur les quelques dialogues aigus, l’écoute se révèle fluide, limpide et surtout saisissante. Aucun craquement ou souffle intempestifs ne viennent perturber l’oreille des spectateurs, l’excellente musique de Jean Marion (La Cuisine au beurre, Le Capitan) est admirablement restituée et les échanges sont clairs. Les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant sont également disponibles.


Crédits images : © TF1 Droits Audiovisuels / Coin de Mire Cinéma / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / L’Affaire Dominici, réalisé par Claude Bernard-Aubert

L’AFFAIRE DOMINICI réalisé par Claude Bernard-Aubert, disponible en Édition Digibook Blu-ray + DVD + Livret le 22 mai 2019 chez Coin de mire Cinéma

Acteurs : Jean Gabin, Victor Lanoux, Gérard Depardieu, Paul Crauchet, Geneviéve Fontanel, Henri Vilbert, Jacques Rispal, Jacques Richard, Gérard Darrieu, Daniel Ivernel, Jean-Paul Moulinot…

Scénario : Claude Bernard-Aubert, Daniel Boulanger, Louis-Emile Galey

Photographie : Ricardo Aronovitch

Musique : Alain Goraguer

Durée : 1h44

Date de sortie initiale : 1973

LE FILM

4 aout 1952, une chaude nuit en Haute Provence. Un triple meurtre  : le père, la mère, la petite fille sont sauvagement assassinés. Ces 3 anglais sont tués en pleine campagne… À 500 mètres d’une ferme qui, du jour au lendemain, devient célèbre dans le monde entier : la grand’Terre. C’est le fief de Gaston Dominici, ancien berger, qui règne tel un seigneur sur ses terres, sur ses neuf enfants et dix neuf petits enfants. Au matin qui suit la tragédie, l’enquête commence…

Alors qu’il avait déclaré penser à arrêter le cinéma, Jean Gabin, à l’aube de ses 70 ans, endosse le costume de Gaston Dominici. Accusé d’un triple meurtre, condamné à mort par la cour de justice, le vieil homme avait ensuite été gracié six ans après par le général de Gaulle et avait pu rentrer chez lui, en homme libre. L’Affaire Dominici s’évertue à reprendre les faits et prône l’évidente innocence du protagoniste. Dans le rôle-titre, Jean Gabin livre une remarquable prestation. Peut-être même l’une de ses plus grandes. Son jeu reste d’une fraîcheur rare et le comédien, qui s’est alors grandement documenté pour entrer dans les bottes de son personnage, subjugue du début à la fin. Un grand film réalisé par Claude Bernard-Aubert.

Une petite fille anglaise, accompagnée de ses parents, rencontre un vieux paysan, occupé à faire paître ses chèvres. Ces personnes sont venues en pèlerinage à cet endroit d’où leur fils parachuté lors de la dernière guerre, n’est pas revenu. Et un geste du père à sa fille en direction du ciel, n’échappe pas au vieux Dominici. Les Anglais décident de passer, au bord de la route, une nuit qui s’annonce des plus inconfortables. Des personnages motorisés arrivent à la ferme tard dans la soirée. Une fusillade éclate en pleine nuit. On retrouve, le lendemain matin, les cadavres des trois touristes. Suivent les péripéties nombreuses et embrouillées de l’enquête, puis du procès. Les fils Dominici, soupçonnés, accusent leur père du triple assassinat. Celui-ci avoue, puis se rétracte. Le cadet se rétracte à son tour. Le vieux Dominici sera finalement condamné sans qu’apparaissent les preuves formelles de sa propre culpabilité.

Etrange carrière que celle de Claude Ogrel, aka Claude Bernard-Aubert (1930-2018), qui a commencé tout d’abord comme reporter de guerre en Indochine de 1949 à 1954, avant de revenir en France et de couvrir sa première affaire, celle de Gustave Dominici. En 1957, il écrit et met scène son premier long métrage, Patrouille de choc, film sur le conflit en Indochine, qui lui vaut quelques démêlés avec la censure, en raison de son réalisme cru. S’ensuivent huit films jusqu’à L’Affaire Dominici, des œuvres engagées et animées par un besoin de comprendre, d’engager le débat et de mettre l’être humain face à son incompréhension, ou plutôt à désir de ne pas comprendre. Après le film qui nous intéresse, Claude Bernard-Aubert prendra le pseudonyme de Burd Tranbaree et réalisera moult films pornographiques, aux titres aussi fleuris que La Fessée ou les Mémoires de monsieur Léon maître-fesseur, Sarabande porno, La Grande Mouille, La Grande lèche et autres réjouissances.

Pour L’Affaire Dominici, le cinéaste déclare à la sortie du film s’être armé de tous les éléments de l’enquête et des informations de l’époque. Contrairement à la masse populaire, Claude Bernard-Aubert n’est pas arrivé à la même conclusion. Pour lui, il est évident que Gaston Dominici a été la victime d’une enquête mal faite, d’un procès mal conduit, qui ont précipité la culpabilité de l’accusé. Le réalisateur, soutenu par Jean Gabin, entend bien démontrer que le jugement a été basé sur une « conviction profonde » plutôt que sur de véritables preuves.

Cinématographiquement parlant, L’Affaire Dominici est l’exemple type, la référence du film inspiré d’une histoire vrai, du film de procès et policier. Une mise en scène sèche et implacable, parfois à la frontière du documentaire (certaines scènes ont été tournées sur les lieux du triple meurtre), une direction d’acteurs au cordeau, des dialogues ciselés de Daniel Boulanger, une maîtrise du rythme, un casting quatre étoiles. C’est peu dire que L’Affaire Dominici est une très grande réussite. Si Jean Gabin laisse pantois dans la peau de Gaston Dominici, les comédiens qui l’entourent ne sont pas en reste avec notamment Victor Lanoux, qui prouve quel immense acteur il était dans les années 1970, mais aussi Paul Crauchet, impérial dans le rôle du commissaire Sébeille, ainsi que le jeune Gérard Depardieu, 24 ans, qui venait de débuter dans le cinéma. Sans oublier les tronches de Gérard Darrieu, Jacques Rispal, Daniel Ivernel et d’autres seconds couteaux incontournables du cinéma français d’alors qui participent à cette plongée poisseuse dans une famille qui fait froid dans le dos.

L’épilogue reste troublant avec l’apparition et la plaidoirie d’Émile Pollak. L’avocat de Gaston Dominici et l’une des grandes figures du barreau français du XXᵉ siècle, s’adresse aux spectateurs face caméra en leur expliquant clairement que le film et ses auteurs prennent la défense du patriarche, après avoir mis en relief les incohérences de toute cette incroyable histoire.

A sa sortie en 1973, le film divise les français et l’accueil reste tiède avec seulement 1,3 million d’entrées. Quant à Gabin, après le puissant Deux hommes dans la ville de José Giovanni, Verdict d’André Cayatte et L’Année sainte de Jean Girault, son coeur s’arrêtera de battre en 1976, tandis qu’il laissera derrière lui l’une des plus grandes filmographies de l’histoire du cinéma français.

LE DIGIPACK

Et de quatre pour la deuxième vague « La Séance » de Coin de Mire Cinéma ! Et troisième titre avec l’immense Jean Gabin. Après une « carrière » dans les bacs chez René Chateau, puis chez TF1 Studio depuis 2017, le film de L’Affaire Dominici commence désormais une nouvelle vie en Haute-Définition et rejoint la collection créée par Thierry Blondeau en 2018. A l’instar de ses autres titres édités et chroniqués par nos soins, le coffret Digibook prestige (format 142 x 194 mm) est numéroté et limité à 3.000 exemplaires. Il comprend le Blu-ray et le DVD, ainsi qu’un 1 livret de 24 pages cousu au boîtier, comprenant la filmographie du réalisateur avec quelques propos tirés d’une interview donnée à la sortie du film, mais aussi des reproductions des archives sur le film (fac-similé des matériels publicitaires et promotionnels, de la couverture et de l’article parus dans Le Journal de la France et dans Paris-Match), la reproduction de 10 photos d’exploitations cinéma sur papier glacé format 120 x 150 mm rangées dans 2 étuis cartonnés, la reproduction de l’affiche originale en format 215 x 290 mm pliée en 4. Le menu principal est fixe et musical.

En cette dixième semaine de l’année 1973, voici un bulletin d’informations (9’) : Faites un tour sur le circuit mythique du Mans, en compagnie du Club 90 qui vous formera à la conduite. Ensuite, nous donnons la parole à un certain Michel Sardou, 26 ans, qui nous reçoit à la campagne pour évoquer ses précédents démêlés suite à ses chansons « à scandale ». Après, place au défilé Dior et à un message adressé aux spectateurs de Danièle Delorme, marraine d’une association pour les enfants handicapés.

C’est pas tout ça, mais que diriez-vous d’un esquimau Gervais ? Cela tombe bien, quelques réclames (7’) de l’année 1973 nous rappellent que les glaces sont en vente « ici dans cette salle ». La mère Denis vient faire un petit tour dans une publicité pour Vedette. A ne pas manquer également, un spot formidable pour La Samaritaine qui détourne le film King Kong, avec effets spéciaux de rigueur et frayeur des parisiens ! Un vrai petit chef d’oeuvre.

L’interactivité se clôt sur un lot de bandes-annonces.

L’Image et le son

L’affaire Dominici a été restauré à partir du négatif original. Il s’agit du premier film en couleur édité par Coin de Mire Cinéma. L’élévation HD proprement dire offre à L’Affaire Dominici une nouvelle cure de jouvence, aucune scorie n’est à déplorer, le grain cinéma est restitué et les contrastes trouvent une nouvelle densité. L’encodage AVC consolide l’ensemble, les textures sont flatteuses, le piqué est renforcé et rend hommage aux nombreux gros plans sur les tronches de Gabin (ses yeux bleus brillent de mille feux) et de ses partenaires. Signalons tout de même une colorimétrie parfois fanée, certains plans sensiblement plus altérés ainsi qu’une profondeur de champ limitée. Format 1.66 respecté.

Le mixage DTS-HD Master Audio Mono instaure un confort acoustique total. Les dialogues sont ici délivrés avec ardeur et clarté, la propreté est de mise, les effets riches et les silences denses, sans aucun souffle. L’éditeur joint les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant.


Crédits images : © TF1 Droits Audiovisuels / Coin de Mire Cinéma / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Non coupable, réalisé par Henri Decoin

NON COUPABLE réalisé par Henri Decoin, disponible en Édition Digibook Blu-ray + DVD + Livret le 22 mai 2019 chez Coin de mire Cinéma

Acteurs : Michel Simon, Jany Holt, Jean Debucourt, Jean Wall, Georges Brehat, François Joux, Robert Dalban, Charles Vissières, Henri Charrett, Pierre Juvenet, Ariane Murator, Christian Delacroix, Emile Chopitel, Max Trejean…

Scénario : Marc-Gilbert Sauvajon

Photographie : Jacques Lemare

Musique : Marcel Stern

Durée : 1h42

Date de sortie initiale : 1947

LE FILM

Installé dans une petite ville de province française, le Docteur Ancelin est un médecin raté et alcoolique. Pourtant, il sent en lui une certaine supériorité… Un soir, un stupide accident d’automobile la lui révèlera, Il sait maintenant en quoi il est plus fort que tous les autres : il porte en lui le génie de tuer. Il y résistera mais les événements et son orgueil seront plus forts que lui…

Grand sportif, il a notamment été champion de France de natation, ancien officier de cavalerie et d’aviation pendant la Première Guerre mondiale, chef d’escadrille, Henri Decoin (1890-1969) se reconvertit ensuite dans l’écriture et devient journaliste. Puis, il se tourne vers le théâtre et tout naturellement vers le cinéma, en devenant assistant-réalisateur à la fin des années 1920. Il passe ensuite derrière la caméra en 1933 pour son premier long métrage, Toboggan. Il rencontre Danielle Darrieux, qu’il épouse et qu’il suit à Hollywood à la fin des années 1930. Cette expérience lui permet d’assimiler les méthodes américaines. A son retour en France, Henri Decoin s’évertuera à appliquer ses acquis dans son propre travail, en variant les genres, passant du polar (Razzia sur la Chnouf) au film d’espionnage, en passant par les films historiques et drames psychologiques.

Non coupable fait partie de cette dernière catégorie, mais teinté cette fois de thriller. Sombre et inattendu dans la carrière d’Henri Decoin, Non coupable apparaît à mi-parcours dans la longue carrière (de 1931 à 1964) éclectique et prolifique du réalisateur des Inconnus dans la maison, Les Amoureux sont seuls au monde, Au grand balcon, La Vérité sur Bébé Donge, L’Affaire des poisons et du Masque de fer avec Jean Marais. Henri Decoin signe ici un film détonnant, qui tranche singulièrement avec le reste de sa filmographie et qui offre à Michel Simon un rôle de monstre humain à la fois empathique et pathétique. En un mot, indispensable.

Michel Ancelin est un médecin qui a plongé dans l’alcoolisme. Dans sa déchéance, plus il subit le regard moqueur des gens, plus il se hait… jusqu’à cette nuit où conduisant en état d’ivresse, il renverse et tue un motocycliste, devant les yeux effarés de Madeleine Bodin, sa jeune amie et maîtresse. Il maquille le méfait en déplaçant le cadavre et la moto puis en enlevant l’ampoule du phare, pour faire croire à un banal et malheureux accident de la route. Il efface les traces de freinage de la voiture. Tout fonctionne à merveille, et la police classe l’affaire sans suite. Un détail anodin, la perte d’une bague en or que portait Madeleine, va venir tout bousculer dans ce couple apparemment sans histoires, et une série de drames vont s’ensuivre.

Dans les années 1940, qui d’autre que Michel Simon aurait pu incarner ce médecin de province, méprisé par ses confrères et même par sa compagne (qui le trompe), qui se découvre des talents de tueur et donc une raison d’être, tout en inspirant une indéniable sympathie ? D’emblée, le spectateur est invité à suivre son quotidien, autrement dit ses soirées noyées dans l’alcool, dans le but d’oublier une vie gâchée. A la suite d’un accident qui a causé la mort d’un homme, ce docteur Ancelin (à la fois Jekyll et Hyde) va alors se créer un personnage romanesque, celui d’un tueur qui met à mal l’enquête d’un inspecteur envoyé de Paris dans cette petite bourgade d’Indre-et-Loire. Henri Decoin filme justement cette ville oubliée de province, mise sous les feux des projecteurs, en raison de la « popularité » de ce criminel que tout le monde recherche. Les journalistes du coin s’affolent, les habitants soupçonnent les voisins. Et pendant ce temps, Ancelin jubile car le tueur est considéré comme un « artiste », un « génie », qui arrive à passer à travers les mailles du filet.

En 1947, Henri Decoin et Michel Simon tourneront deux films ensemble. Les Amants du pont de Saint-Jean et ce Non coupable, œuvre charbonneuse dans lequel le cinéaste exploite à merveille la gueule incroyable du comédien. A travers un N&B fuligineux, Henri Decoin place son antihéros dans l’ombre de ses méfaits, alors que son désir premier est d’être placé dans la lumière et de briller aux yeux du monde, voulant également se prouver à lui-même qu’il n’est pas le raté décrit par tous. Fort de son impunité, il multiplie alors les assassinats, en écoutant la réaction de ses voisins et connaissances. Enquête sur un citoyen au-dessus de tout soupçon d’Elio Petri (1970) n’est pas loin !

Henri Decoin filme malgré tout l’histoire d’un perdant, qui, sans dévoiler le dénouement imparable et virtuose, parviendra même à manquer sa sortie. Michel Simon, immense, récompensé par le Prix de la meilleure interprétation masculine au Festival de Locarno, suinte l’alcool et la suffisance, mais également la tristesse et la solitude. Parmi ses partenaires, on reconnaîtra l’indispensable Robert Dalban en patron de café (un de ses rôles récurrents à l’époque) et Jean Debucourt, grand comédien de la Comédie-Française, dont la voix est passée à la postérité pour avoir été celle de Jésus dans Don Camillo. Il est ici impérial en inspecteur de police.

Il serait temps de reconsidérer l’oeuvre d’un des plus grands artisans du cinéma français de l’après-guerre. Non coupable, dont Christophe Gans voulait réaliser un remake avec Albert Dupontel, en est d’ailleurs le parfait exemple. Heureusement, Henri Decoin connaît depuis peu un regain de popularité grâce à l’édition de ses films en DVD et Blu-ray. Il n’est donc jamais trop tard.

LE DIGIBOOK

Coin de Mire Cinéma est de retour ! Pour en savoir plus sur cette collection unique, reportez-vous à notre présentation réalisée lors du premier test consacré à Archimède le clochard https://homepopcorn.fr/test-blu-ray-archimede-le-clochard-realise-par-gilles-grangier/. Pour cette nouvelle salve de la collection « La Séance », l’éditeur reprend le même principe. Non coupable d’Henri Decoin, un temps disponible en DVD chez LCJ, est le premier titre de cette vague, qui comprend également Le Cas du docteur Laurent de Jean-Paul Le Chanois (1958), Rue des prairies de Denys de La Patellière (1959), Le Train de John Frankenheimer (1964), La Grosse caisse de Alex Joffé (1965) et L’Affaire Dominici de Claude Bernard Aubert (1973). Inédits en Blu-ray, ces titres seront édités à 3000 exemplaires. Chaque titre est annoncé au tarif de 32€, disponible à la vente sur internet et dans certains magasins spécialisés à l’instar de Metaluna Store tenu par l’ami Bruno Terrier, rue Dante à Paris.

Le livret de 24 pages de cette édition contient également la filmographie de Henri Decoin avec le film qui nous intéresse mis en surbrillance afin de le distinguer des autres titres, de la reproduction en fac-similé des matériels publicitaires et promotionnels de l’époque, des photos promotionnelles françaises et italiennes, du programme illustré des cinémas Balzac Helder Scala Vivienne, d’un article de la revue Ciné-Miroir d’octobre 1947 et d’un article de Calypso. Le menu principal est fixe et musical.

Comme sur tous les titres de la collection, nous trouvons les actualités liées à la semaine de sortie du film qui nous intéresse. Ici, place aux infos de la 39e semaine de l’année 1947 (11’). Quelques images montrent l’arrivée imminente d’un ouragan tropical sur la Floride, les ravages de la guerre d’indépendance de l’Inde, une visite du général De Gaulle à Lyon où il est acclamé par 20.000 personnes sur la place Bellecour, le voyage pour les Etats-Unis des Petits Chanteurs à la croix de bois, l’exploration de l’abîme de la Henne Morte (à moins 450 mètres), etc.

Place ensuite aux réclames publicitaires de l’année 1947 (4’30) avec un tout nouveau réfrigérateur dernier cri, un shampooing à base de moelle de bœuf et la nouvelle cire de la marque Le Drapeau !

Autre supplément, nous trouvons également une fin alternative du film Non coupable (3’), restaurée à partir du négatif nitrate, présentée également à la suite de l’oeuvre d’Henri Decoin. A l’instar de La Belle équipe et Les Amoureux sont seuls au monde, un épilogue maladroit (et plus optimiste) a heureusement été rejeté et donnait une autre signification à l’histoire.

L’Image et le son

Non coupable a été restauré en 4K à partir du négatif image nitrate. Les travaux numériques et photochimiques ont été réalisés par le laboratoire Hiventy. Quelques fourmillements sont constatés sur le générique d’ouverture, ainsi que divers points, tâches et flous sporadiques. Ce master HD trouve ensuite son équilibre avec des noirs denses, une texture argentique élégante, plus appuyée sur les gros plans. Les contrastes profitent de cette promotion Haute-Définition, les détails sont très appréciables, la propreté ne déçoit pas et au final ce Blu-ray permet (re)découvrir Non coupable dans les meilleures conditions techniques.

Aucun souci acoustique constaté sur ce mixage DTS-HD Master Audio Mono 2.0. Le confort phonique de cette piste unique est indéniable, les dialogues sont clairs et nets. Si quelques saturations demeurent inévitables, la musique est joliment délivrée et aucun craquement intempestif ne vient perturber l’oreille des spectateurs. L’éditeur joint également les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant.


Crédits images : © TF1 International / TF1 Droits Audiovisuels / Coin de Mire Cinéma / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr