Test Blu-ray / Les Yeux de Laura Mars, réalisé par Irvin Kershner

LES YEUX DE LAURA MARS (Eyes of Laura Mars) réalisé par Irvin Kershner, disponible en Édition Digibook Collector, Combo Blu-ray + DVD + Livret le 19 mars 2020 chez Sidonis Calysta.

Acteurs : Faye Dunaway, Tommy Lee Jones, Brad Dourif, René Auberjonois, Raul Julia, Frank Adonis, Lisa Taylor, Darlanne Fluegel…

Scénario : John Carpenter, David Zelag Goodman

Photographie : Victor J. Kemper

Musique : Artie Kane

Durée : 1h43

Date de sortie initiale : 1978

LE FILM

Photographe de mode engagée contre la guerre et le sexisme, Laura Mars mène une brillante carrière. Aucune ombre au tableau de ses spectaculaires compositions, du moins jusqu’au jour où, par la pensée, elle capte les agissements d’un tueur en série, vivant en direct le meurtre qu’il commet. Un cauchemar qui se répète et dont elle pourrait bien être l’une des prochaines victimes…

Quand elle tourne Les Yeux de Laura MarsEyes of Laura Mars en 1978, Faye Dunaway est au sommet de sa carrière et fait partie des plus grandes actrices du monde. C’est bien simple, en huit ans, la comédienne aura enchaîné Little Big Man (1970) d’Arthur Penn, Portrait d’une enfant déchue Puzzle of a Downfall Child (1970) de Jerry Schatzberg, La Maison sous les arbres (1971) de René Clément, L’Or noir de l’Oklahoma Oklahoma Crude (1973) de Stanley Kramer, le diptyque Les trois Mousquetaires / On l’appelait Milady (1973-1974) de Richard Lester, Chinatown (1974) de Roman Polanski, La Tour infernaleThe Towering Inferno (1974) de John Guillermin et Irwin Allen, Les Trois Jours du CondorThree Days of the Condor (1975) de Sydney Pollack et Network, main basse sur la télévisionNetwork (1976) de Sidney Lumet qui lui vaut l’Oscar de la meilleur actrice en 1977. Une des filmographies les plus impressionnantes du cinéma. Les Yeux de Laura Mars est coécrit par un jeune scénariste d’à peine trente ans, un certain John Carpenter, remarqué avec son premier long métrage en tant que réalisateur, Assaut. Largement influencé par le giallo dont on retrouve la plupart des codes, Eyes of Laura Mars est un thriller teinté de fantastique prenant, brillamment mis en scène, excellemment interprété, dont le final, très culotté et dont on peut difficilement parler sans en dévoiler la teneur pour celles et ceux qui ne l’auraient pas vu, divise encore beaucoup de cinéphiles plus de quarante ans après sa sortie. Cela n’empêche pas Les Yeux de Laura Mars d’être un polar – situé dans le milieu de mode – très réussi, avec sa magnifique patine seventies et emmené par l’immense talent de sa comédienne principale.

Laura Mars est une photographe américaine plébiscitée et mal-aimée car ses photos éloquentes dénoncent le monde violent, cupide et sexiste qui nous entoure. Laura est pourtant heureuse jusqu’au jour où d’étranges visions s’imposent à ses yeux. Elle voit un psychopathe assassiner un à un ses proches et intimes. L’ennui est que ces visions sont simultanées, Laura Mars voit les crimes à l’instant même où ils sont perpétrés… Un inspecteur séduisant tente de l’épauler…

Revoir Les Yeux de Laura Mars en 2020, c’est admirer l’une des comédiennes phares des années 1970. Faye Dunaway est absolument parfaite dans ce rôle étonnant de photographe, dont la réussite est troublée par d’éprouvantes visions lui décrivant en détail les meurtres de ses modèles et amis, surtout quand elles deviennent réalité. Si elle doit son succès dans le monde entier pour ses photos érotiques osées, de modèles posant dans des vêtements transparents sur un fond de violentes scènes de rue, Laura est désemparée quand ses modèles sont retrouvés morts l’un après l’autre, dans la même position que lors de ses séances de photo. Laura est témoin de chaque meurtre car ils se déroulent aussi dans sa tête, comme si elle regardait au travers d’une caméra. Ces expériences sont si terrifiantes qu’elles l’obligent à collaborer avec l’inspecteur de la brigade criminelle John Neville, lequel, au cours de l’élucidation du mystère, est confronté à plusieurs choses choquantes. John Carpenter ne pouvait évidemment pas signer un scénario sans une touche fantastique. Et ce mélange des genres fonctionne, d’autant plus qu’aucune explication ne sera donnée sur la raison de ces visions. Un élément dramatique d’autant plus troublant que Laura ne peut pas interagir, mais seulement être témoin des assassinats, en adoptant le point de vue du meurtrier, en direct.

Isadore Kershner alias Irvin Kershner (1923-2010) a déjà vingt ans de carrière quand il entreprend Les Yeux de Laura Mars, qui marquera en fait les débuts de grands films cultes à venir, puisqu’il enchaînera avec Star Wars, épisode V : L’Empire contre-attaque (1980), le James Bond hors-série Jamais plus jamais (1983) et la suite mal aimée à sa sortie et bien réhabilitée depuis, RoboCop 2 (1990). Sa mise en scène est particulièrement efficace sur Les Yeux de Laura Mars, film sur lequel il expérimente au moment des visions de son héroïne avec quelques scènes bien oppressantes, et où il démontre une fois de plus sa solide direction d’acteurs après avoir fait tourner d’autres pointures comme Sean Connery, Joanne Woodward et Jean Seberg dans L’Homme à la tête fêléeA Fine Madness (1966), George Segal, Eva Marie Saint et Sterling Hayden dans Loving (1970), Donald Sutherland et Elliott Gould dans Les ‘S’ Pions (1974) et Richard Harris dans La Revanche d’un homme nommé Cheval (1976). Dans Eyes of Laura Mars, celui qui tire évidemment son épingle du jeu aux côtés de Faye Dunaway est Tommy Lee Jones, encore méconnu et qui sortait du formidable Légitime Violence Rolling Thunder de John Flynn. Son charisme singulier explose réellement pour la première fois à l’écran. Les cinéphiles reconnaîtront aussi les excellents (et légendaires) Brad Dourif (déjà vu dans Vol au-dessus d’un nid de coucouOne Flew Over the Cuckoo’s Nest de Miloš Forman) et Raúl Juliá, dans un de leurs premiers vrais rôles au cinéma.

Même s’il n’a connu qu’un succès critique et commercial mitigé (bien qu’il remporte près de trois fois sa mise), Les Yeux de Laura Mars est rapidement devenu un film culte, pour lequel les spectateurs conservent – à juste titre – une grande affection.

LE BLU-RAY

Coup-double pour Sidonis Calysta, qui sort le même jour que Krull, une Édition Digibook Collector, Combo Blu-ray + DVD + Livret des Yeux de Laura Mars ! Le livret de présentation du film écrit par Marc Toullec contient 24 pages. En dehors des filmographies, Sidonis reprend l’intégralité des suppléments anciennement disponibles sur le DVD édité par Columbia-Sony il y a déjà vingt ans. Le menu principal est animé et musical.

Démarrez les bonus par le commentaire audio d’Irvin Kershner, présenté en version originale sous-titrée en français. Très à l’aise dans l’exercice, le réalisateur, disparu en 2010, revient sur tous les aspects du film : les lieux et les conditions de tournage, les thèmes, le casting, les partis pris, la musique d’Artie Kane, la photo de Victor J. Kemper, le montage. Irvin Kershner partage de nombreux souvenirs et indique que Les Yeux de Laura Mars est un des films les plus difficiles qu’il a tournés.

Nous retrouvons également la large galerie de photos, commentée par Laurent Bouzereau, à l’époque producteur de l’édition spéciale du DVD des Yeux de Laura Mars. L’intéressé évoque entre autres les différentes versions non retenues du scénario.

Le making of d’époque (7’) donne un bref aperçu des prises de vue, avec quelques propos de Faye Dunaway et des mannequins vus dans le film, lors du tournage de la scène au Columbus Circle à New York.

L’Image et le son

La qualité de ce nouveau master restauré HD impressionne souvent et le film d’Irvin Kershner connaît vraiment une deuxième vie. Les contrastes affichent d’emblée une densité inédite, la copie est d’une propreté quasi-immaculée, le piqué est fort impressionnant sur les gros plans (moins sur les éclairages tamisés où tout est plus grumeleux) et les détails fourmillent surtout sur les plans diurnes en extérieur qui sont souvent à couper le souffle. Alors certes, tout n’est pas parfait, quelques flous sporadiques font leur apparition, une ou deux séquences sont plus altérées et la définition a tendance à flancher, mais ces menus accrocs sont anecdotiques compte tenu de la clarté éblouissante, des noirs concis, du grain cinéma respecté, de la colorimétrie vive et du relief inattendu pour un film affichant déjà plus de quarante ans au compteur. Enfin, l’ensemble est consolidé par une compression AVC de haute tenue.

Les versions originale et française bénéficient d’un mixage DTS-HD Master Audio 2.0 d’origine. Pour la première option acoustique, l’espace phonique se révèle probant et dynamique, le confort est indéniable, et les dialogues sont clairs, nets, précis. De son côté, la version française apparaît sensiblement plus feutrée. Que vous ayez opté pour la langue de Shakespeare (largement conseillée) ou celle de Molière (Pierre Arditi double Tommy Lee Jones), aucun souffle ne vient parasiter votre projection et l’ensemble reste propre.

Crédits images : © Sidonis Calysta / Columbia Pictures / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

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