Test Blu-ray / Le Journal intime d’une nymphomane, réalisé par Jesus Franco

LE JOURNAL INTIME D’UNE NYMPHOMANE réalisé par Jesús Franco, disponible en combo Blu-ray/DVD chez Le Chat qui fume

Acteurs :  Mona Proust, Jacqueline Laurent, Jean-Pierre Bourbon, Gaby Herman, Anne Libert, Howard Vernon, Gene Harris, Yelena Samarina, Doris Thomas, Jesús Franco…

ScénarioJesús Franco, Élisabeth Ledu de Nesle

Photographie : Gérard Brisseau

Musique : Jean-Bernard Raiteux, Vladimir Cosma

Durée : 1h27

Année de sortie : 1973

LE FILM

Ortiz est soupçonné du meurtre de Linda Vargas, stripteaseuse qu’il a rencontrée lors d’un spectacle. Rendant visite à une amie de la morte, la comtesse Anna de Monterey, Rosa, la femme d’Ortiz, apprend comment Linda est tombée dans une spirale de sexe et de drogue après avoir été agressée sur un manège de foire par Ortiz, alors qu’elle était jeune.

Ancien assistant d’Orson Welles sur Falstaff, Jesús Franco Manera dit Jess Franco (1930-2013) a réalisé près de 200 films, depuis son premier succès L’horrible docteur Orloff (1961). Agrémentant ses films d’horreur d’un érotisme aussi esthétique que sulfureux, il va enchaîner les films à un rythme infernal, adaptant Sade, Masoch, Mirbeau. Sa muse, Soledad Miranda, disparue, il trouve en Lina Romay sa nouvelle et ultime égérie, qu’il magnifiera de films en film. Bien plus qu’un simple artisan boulimique de pellicules, Jess Franco, également connu sous les pseudonymes de Clifford Brown, Adolf M. Frank, J.P. Johnson, David Khune et Jess Frank, restera un véritable auteur, un cinéaste doué et prolifique. Les titres de ses films restent très explicites : Le Sadique Baron Von Klaus (1962), Le Diabolique docteur Z (1966), Sumuru, la cité sans hommes (1969), Les Inassouvies (1970), Les Expériences érotiques de Frankenstein (1973) et bien d’autres.

Le Journal intime d’une nymphomane est l’un des neuf longs métrages réalisés par Jesús Franco en 1972. C’est aussi et surtout l’un des meilleurs films de son auteur. Certes, Le Journal intime d’une nymphomane reste complètement ancré dans son époque, mais le scénario tient la route puisqu’il s’agit d’une chronique centrée sur un trauma, la déchéance, puis la vengeance d’une jeune femme, le tout très efficacement mis en scène et marqué par des séquences érotiques aussi réussies que bandantes.

Mari volage, Ortiz est entraîné par Linda Vargas, une prostituée rencontrée dans un bar où elle officie également comme danseuse et stripteaseuse, qui après une nuit d’ivresse et de plaisirs se suicide pendant le sommeil de son client. Accusé du meurtre, Ortiz est arrêté et emprisonné. L’enquête faite par Rosa Ortiz, son épouse, retrace la vie de Linda Vargas et l’histoire de sa déchéance. Au fil de cette enquête, elle reconstitue son portrait et les raisons de son suicide mises en évidence maintiennent la thèse du désir d’accuser le suspect aux yeux de la justice.

Produit par le légendaire Robert de Nesle via sa société le Comptoir Français du Film Production, prolifique touche-à-tout qui a financé Georges Franju (Judex), José Bénazéraf (Le Cri de la chair), Riccardo Freda (Les Deux orphelines), Yves Boisset (Coplan sauve sa peau), Le Journal intime d’une nymphomane, également connu sous les titres Les Inassouvies 77, Sinner ou Diary of a Nymphomaniac, fait clairement partie du haut du panier. Les deux hommes collaboreront vingt fois (!) entre 1970 et 1977, des Cauchemars naissent la nuit à Blue Rita (Le Cabaret des filles perverses). Le film qui nous intéresse est un savoureux mélange des genres, à la fois exploitation érotique, mais aussi drame psychologique (si si) et thriller. Jesús Franco, sous le nom de Clifford Brown, attaque d’emblée en montrant deux femmes dénudées et noyées dans une lumière rouge, s’adonner à quelques caresses explicites. Puis le contrechamp montre que les deux partenaires sont en fait en pleine représentation sur la scène d’un nightclub où les consommateurs ne ratent rien du spectacle qui leur est offert. Mine de rien, Franco interroge le spectateur sur son propre voyeurisme en lui tendant son propre reflet.

Le premier rebondissement qui conduit le personnage d’Ortiz en prison, entraîne une narration sous forme de flashbacks, puisque la femme de l’accusé décide d’enquêter elle-même sur l’innocence (ou non) de son époux. Pour cela, elle rencontre quelques femmes qui ont de près ou de loin connu la jeune Linda, retrouvée égorgée dans les bras de son mari. La forme du film étonne et surtout se tient. Ce serait mentir de dire que nous ne sommes pas venus voir Le journal intime d’une nymphomane pour ses scènes de sexe, mais Jesús Franco va bien au-delà. Il suit et nous raconte le destin sombre et dramatique de sa jeune héroïne incarnée par la divine Montserrat Prous (aka Mona Proust ici au générique) dont la première expérience sexuelle, un viol quand elle avait 14 ans, va marquer sa jeune existence. Puis, le spectateur la voit se perdre dans les bras d’hommes, mais surtout de femmes, l’occasion d’admirer la beauté et les corps sensuels d’Anne Libert, Kali Hansa et Jacqueline Laurent, tomber dans la drogue et la dépendance sexuelle. Un espoir de rédemption apparaît lors de sa rencontre avec le « Docteur », interprété par Howard Vernon et sa trogne incroyable.

Sur un montage fluide et très efficace de Gérard Kikoïne, le maître ibérique livre un très beau portrait de femme, dont il prend constamment le parti. Il critique également la gent masculine avide de chair fraîche et montre des messieurs infidèles, lâches, incapables de penser autrement qu’avec leur sexe. Le Journal intime d’une nymphomane aurait très bien pu tomber dans le tout-venant, dans les abîmes du cinéma d’exploitation. C’était sans compter sur la rigueur d’un cinéaste, certes inégal, mais habile technicien (le film est d’ailleurs beau à regarder), véritable auteur, passionné par son sujet, qui avait clairement un œil pour mettre en valeur ses ravissantes comédiennes et qui n’oubliait pas de divertir les spectateurs. Le tout prenant souvent la forme d’un bad-trip mis en musique par Jean-Bernars Raiteux et un certain « W »ladimir Cosma, et marqué par des dialogues souvent très crus.

Le Journal intime d’une nymphomane apparaît donc comme un film-somme, une référence, peut-être la plus emblématique du cinéma de Jesús Franco. Et l’on peut sérieusement penser que cette œuvre ait plus tard inspiré le diptyque controversé de Lars von Trier, Nymphomaniac sorti en 2014, tant certaines séquences y font étrangement écho. C’est dire son importance et son immense réussite.

LE BLU-RAY

Le Chat qui fume souhaite la bienvenue à Jesús Franco ! Après Gaumont et Artus Films, l’un de nos éditeurs préférés rend hommage au cinéaste espagnol avec les sorties consécutives du Journal intime d’une nymphomane et Les Possédées du diable, dont le test sera également disponible très bientôt dans nos colonnes. En ce qui concerne ce Journal intime, l’édition prend la forme d’un combo Blu-ray/DVD, deux disques, un Digipack trois volets avec un étui cartonné du plus bel effet et au visuel sensuel. Les menus principaux sont animés sur la musique du film.

Le premier module proposé en guise de bonus est une présentation de l’indéboulonnable Alain Petit (41’). L’historien du cinéma ne manque pas d’infos en ce qui concerne ce film de Jesús Franco qu’il affectionne tout particulièrement. Le producteur Robert de Nesle, sa collaboration avec le réalisateur, les intentions du cinéaste, les thèmes du film et ses partis pris sont abordés. Puis, Alain Petit se penche plus particulièrement sur le casting, en évoquant surtout les actrices du Journal intime d’une nymphomane, en donnant quelques titres alléchants de leurs carrières respectives.

Ensuite, nous avons l’immense plaisir d’écouter les souvenirs du chef monteur Gérard Kikoïne (47’, alors que la jaquette indique 1h). Confortablement installé dans son canapé, l’invité du Chat partage ses souvenirs liés à ses débuts comme monteur-son dans le doublage de films chez son père Léon Kikoïne, puis comme monteur-images et son. Véritable tornade, Gérard Kikoïne passe d’une anecdote à l’autre, en évoquant la rencontre avec le producteur Robert de Nesle, son boulot sur les films de Jesús Franco évidemment, mais également sur ses propres films en tant que réalisateur, notamment sa collaboration avec Oliver Reed. Rétrospectivement, il s’agit probablement d’un des meilleurs suppléments concoctés par Le Chat qui fume. Absolument passionnant, chaleureux, drôle et blindé d’infos.

On termine sur un entretien avec Jacqueline Laurent (25’). Fille de l’acteur Jacques Auger, auquel elle rend hommage au cours de son interview, la comédienne évoque ses débuts à l’Ecole nationale du théâtre de Montréal, puis son arrivée en France où elle suit l’enseignement de Françoise Rosay au milieu des années 1960. Puis, Jacqueline Laurent parle de ses premiers pas à la télévision et au cinéma, puis du tournant de sa carrière avec ses apparitions dans des films érotiques, dont Le Journal intime d’une nymphomane et Les Possédées du diable de Jesús Franco, l’un des meilleurs directeurs d’acteurs qu’elle a pu rencontrer dans sa vie. Devenue professeur d’interprétation puis enseignante de l’art dramatique dans un collège réputé de Montréal pendant quinze ans, l’actrice indique avoir été renvoyée en 2014, après avoir été reconnue par l’un de ses élèves dans Le Journal intime d’une nymphomane.

L’Image et le son

On oublie les raccords de montage peu discrets lors des changements de bobines, d’autant plus que cela rajoute un cachet vintage qui sied bien à l’ensemble. Car la restauration est éloquente, impressionnante et redonne un sacré coup de jeune au Journal intime d’une nymphomane, tout en conservant, heureusement, son grain argentique. Les couleurs à dominante brune retrouvent également une certaine vivacité, même si les visages restent blafards et cireux. Mais les détails sont étonnants, comme des traces de doigts sur les verres des lunettes, ou bien encore la transpiration sur le visage de Jacqueline Laurent. Non, nous ne parlerons pas du rendu des toisons bien fournies des comédiennes bande de coquins ! La propreté est de mise (nous parlons de l’image hein), la copie est stable, et le tout flatte constamment les sens et les mirettes.

La version française est à privilégier, même si la piste reste parfois couverte avec des dialogues chuintants ou grinçants. La musique s’en tire mieux avec une belle délivrance et quelques pics dynamiques sur les scènes chaudes notamment. L’éditeur joint également les sous-titres anglais et une piste audio dans la même langue. C’est propre, mais un souffle demeure.

Crédits images : © Le Chat qui fume / 2018 Mangue Pistache / Captures Blu-ray et DVD : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / L’Au-delà, réalisé par Lucio Fulci

L’AU-DELÀ (L’aldilà… E tu vivrai nel terrore !) réalisé par Lucio Fulci, disponible en Édition Collector Blu-ray + DVD + Livre chez Artus Films

Acteurs :  Catriona MacColl, David Warbeck, Cinzia Monreale, Antoine Saint-John, Veronica Lazar, Larry Ray, Giovanni De Nava, Al Cliver…

ScénarioDardano Sacchetti, Lucio Fulci, Giorgio Mariuzzo

Photographie : Sergio Salvati

Musique : Fabio Frizzi

Durée : 1h27

Année de sortie : 1981

LE FILM

La Nouvelle-Orléans en 1927, le peintre Schweick se fait lyncher, dans un hôtel, par la population, pour avoir peint une fresque représentant l’Enfer. Quelques cinquante ans plus tard, Liza Merril hérite de cet hôtel et entreprend de le rénover. Mais, très vite, des événements tragiques succèdent les uns aux autres, et les ouvriers meurent dans des circonstances mystérieuses. Puis, Liza fait la connaissance d’Emily, une jeune aveugle, qui la met en garde contre ce lieu maudit : l’hôtel abriterait une des sept portes de l’Enfer dont le peintre martyr serait le gardien.

Pour faire le point sur la carrière de Lucio Fulci, nous vous invitons à (re)lire nos chroniques consacrées à La Longue nuit de l’exorcisme https://homepopcorn.fr/test-blu-ray-la-longue-nuit-de-lexorcisme-realise-par-lucio-fulci/ et L’Enfer des zombies https://homepopcorn.fr/test-blu-ray-lenfer-des-zombies-realise-par-lucio-fulci/. Pour la plupart des cinéphiles, les amateurs de films de genre et la critique, L’Au-delà, ou bien L’aldilà… E tu vivrai nel terrore ! en version originale, est le chef d’oeuvre de Lucio Fulci. Réalisé en 1981 entre Le Chat noir et La Maison près du cimetière, L’Au-delà est un film somme, baroque et onirique, mais aussi celui où le cinéaste, alors au sommet de sa carrière et de sa popularité, y met tout son talent, sa science du montage, son art de créer une véritable expérience immersive qui n’a absolument rien perdu de son pouvoir hypnotique plus de trente-cinq après sa sortie.

Résumer l’intrigue de L’Au-delà n’est pas vraiment difficile. En fait, Lucio Fulci part d’un postulat plus que d’un simple scénario classique, pour laisser libre cours à son imagination. De l’aveu-même du réalisateur, le film est volontairement épuré, principalement construit autour de visions, de sensations et de cauchemars qui s’enchaînent sur une partition étonnante de Fabio Frizzi (4 de l’apocalypse, L’Emmurée vivante) constituée de choeurs qui instaurent d’emblée un malaise palpable. Dans le prologue de 1927 (année de naissance du cinéaste au passage) aux teintes sépia, incroyablement violent et qui rappelle le lynchage de Florinda Bolkan dans La Longue nuit de l’exorcisme, suivi d’une scène de crucifixion où le sang s’écoule du corps telle une fontaine, Lucio Fulci installe le décor (une maison en Louisiane), le ton (premier degré), l’atmosphère (poisseuse, suintante) et la prophétie qui entoure tout ce beau monde.

On arrive donc en 1981 face à cette même maison où l’exécution s’est déroulée plus de cinquante ans auparavant. Très vite, le metteur en scène enchaîne les apparitions de zombies, fantômes, momies, difficile de mettre un terme exact sur les créatures qui apparaissent à l’écran. Liza, le personnage joué par la toujours divine Catriona MacColl se retrouve face aux disparitions mystérieuses de ceux qui l’entourent et se rend compte que tout est lié à cette étrange bâtisse. Elle fait alors la rencontre d’Emily (Cinzia Warbeck), aveugle, qui paraît perdue entre le monde des vivants et celui des morts. Aidée du docteur John McCabe (David Warbeck), Liza doit alors affronter les créatures qui l’entourent et qui semblent vouloir l’attirer vers les enfers.

Tourné entre La Nouvelle-Orléans et Rome, L’Au-delà se passerait bien de tous ces mots en fait puisqu’il s’agit avant tout d’une véritable immersion concoctée par l’un des plus grands spécialistes en la matière. Lucio Fulci parvient à nous faire perdre nos repères avec une économie de dialogues, en se focalisant sur les ambiances, la sublime photographie de Sergio Salvati (Les Guerriers du Bronx), les décors (ce pont suspendu au milieu de nulle-part), tout en jouant avec les genres. Référence ultime du film d’horreur et fantastique, L’Au-delà enchaîne les séquences macabres d’anthologie comme des perles sur un collier, tout en flattant les amateurs de gore avec des exécutions crues et frontales. Des visages recouverts de chaux bouillante, des tarentules voraces, des énucléations, des crânes explosés, des gorges dévorées, Lucio Fulci se lâche complètement dans les meurtres très graphiques. Et tel un jeu de pistes, les deux personnages principaux passent de niveau en niveau, combattent quelques macchabées (au maquillage très réussi) à la démarche lente et qui souhaitent leur bouffer le cerveau, pour finalement atteindre l’une des portes de l’Enfer.

Ce qui nous conduit enfin à la dernière séquence, absolument effrayante, indélébile, crépusculaire, souvent copiée et jamais égalée, redoutablement pessimiste et malgré tout extraordinaire et furieusement poétique.

LE BLU-RAY

Nous disions en mai dernier que le magnifique et luxueux Mediabook de L’Enfer des zombies, estampillé « Collection Lucio Fulci » était l’un des plus beaux objets que vous trouveriez sur le marché en 2018. C’est évidemment la même chose pour ce Mediabook de L’Au-delà. Artus Films a cette fois encore concocté un visuel clinquant et en plus doux au toucher. Cette édition se compose du Blu-ray et du DVD glissés dans des compartiments cartonnés, ainsi que d’un incroyable livre de 80 pages (La Louisiane : de Lucio Fulci à Neil Jordan, exploration d’un territoire des morts) rédigé par Lionel Grenier (rédacteur en chef du site luciofulci.fr), Gilles Vannier (Psychovision), Larry Ray (comédien et assistant), le tout supervisé par le premier. Vous y trouverez de fabuleux visuels, photos et affiches, des extraits d’entretiens, des souvenirs de tournage, un essai passionnant sur les films tournés à la Nouvelle-Orléans. Artus Films livre un vrai et grand travail éditorial et a mis toute sa passion pour le genre dans ce Mediabook, sans oublier l’incroyable beauté de la copie HD.

Spécialiste et auteur de Lucio Fulci – le poète du macabre, écrit avec Jean-François Rauger, mais aussi rédacteur en chef du site luciofulci.fr, Lionel Grenier nous propose une formidable présentation, analyse et critique de L’Au-delà (19’). Il replace le film dans la carrière du maître, évoque sa genèse, l’équipe technique, le casting, les conditions de tournage à la Nouvelle-Orléans. Dans un second temps, il se penche davantage sur le fond et les partis pris du film, en dressant un parallèle entre L’Au-delà et Le Carnaval des âmes de Herk Harvey https://homepopcorn.fr/test-dvd-le-carnaval-des-ames-realise-par-herk-harvey/.

Place à la superbe comédienne Cinzia Monreale (16’) qui interprète l’étrange Emily dans L’Au-delà. Créditée au générique sous le nom de Sarah Keller, l’actrice se souvient de sa rencontre avec Lucio Fulci à l’occasion du casting du western Sella d’argento en 1978. A l’instar des autres intervenants, elle aborde entre autres le caractère bien trempé du cinéaste, ainsi que sa direction d’acteurs. Elle se penche également sur les difficiles conditions de tournage de L’Au-delà, liées à son maquillage qui comprenait une paire de lentilles douloureuses, destinées à la faire passer pour une aveugle.

Le module suivant donne la parole à l’acteur Michele Mirabella (27’). Homme de théâtre et de radio, le comédien aborde tout d’abord les débuts de sa carrière et comment Lucio Fulci l’a repéré puis demandé de participer à L’Au-delà. La célèbre séquence des tarentules est analysée sous toutes les coutures. Michele Mirabella explique que l’équipe des effets spéciaux avait rembourré son costume de papier journal, afin de le protéger de possibles piqûres, tandis que son visage était lui séparé des bestioles par une plaque en plexiglas.

Le dernier entretien de cette interactivité est celui que l’on attendait avec impatience. La comédienne Catriona MacColl revient avec détails et sensibilité sur son travail avec Lucio Fulci (21’). Pas seulement sur L’Au-delà, mais également sur ses autres collaborations avec le maître, même si elle avoue que le film qui nous intéresse reste son préféré. Catriona MacColl passe en revue le travail avec ses partenaires, l’équipe technique, les difficultés liées au tournage de la séquence finale, et clôt cette interview par un très bel hommage à Lucio Fulci.

L’Au-delà s’ouvre sur un prologue en 1927. Lucio Fulci et son chef opérateur Sergio Salvati l’ont pensé et conçu en teintes jaunes orangées. La séquence a été tournée en couleur, au cas où les distributeurs étrangers auraient été rebutés par ces partis pris. La majorité des pays importateurs ont suivi la volonté de l’équipe artistique. Mais pas en Allemagne, qui a exploité le film avec son prologue en couleurs. Artus Films propose de découvrir cette scène dans ces conditions (8’34). Même chose, l’éditeur livre également le prologue dans sa version N&B (7’).

L’interactivité se clôt sur les bandes-annonces de la collection Lucio Fulci, ainsi qu’un diaporama d’affiches et de photos.

L’Image et le son

Artus Films nous livre la tant attendue édition HD française 2K de L’Au-delà ! Avec son magnifique grain argentique, force est de constater que le chef d’oeuvre de Lucio Fulci renaît bel et bien de ses cendres avec une édition digne de ce nom. La propreté du master est ébouriffante. Toutes les scories, poussières, griffures ont été purement et simplement éradiquées. Ce Blu-ray au format 1080p (AVC) s’avère tout autant saisissant dans son rendu des scènes diurnes que pour les séquences sombres, l’image est souvent éclatante avec un piqué inédit, une profondeur de champ impressionnante et un relief des textures que nous n’attendions pas. Les couleurs retrouvent une deuxième jeunesse, à tel point que l’on pourrait même distinguer les couches de maquillage sur les zombies. L’élévation HD pour L’Au-delà est indispensable et le lifting de premier ordre. Enfin, le film est proposé dans sa version intégrale non censurée.

Point de remixage à l’horizon, mais pas de Haute-Définition non plus en ce qui concerne le son ! Les pistes italienne (à privilégier) et française sont présentées en LPCM 2.0 et instaurent toutes deux un bon confort acoustique, sans souffle, propre, avec une très bonne délivrance des dialogues. L’excellente partition de Fabio Frizzi bénéficie d’une belle ouverture des canaux, le doublage français est réussi et les effets annexes riches. Les sous-titres français ne sont pas imposés sur la version originale.

Crédits images : © Euro Immobilfin Srl – Rome, Italy. Licenced by Variety Communications Srl – Rome, Italy. All Rights reserved. / Artus Films / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / À feu et à sang, réalisé par Budd Boetticher

À FEU ET À SANG (The Cimarron Kid) réalisé par Budd Boetticher, disponible en Édition Limitée Blu-ray + DVD le 20 août 2018 chez Sidonis Calysta

Acteurs : Audie Murphy, Beverly Tyler, James Best, Yvette Duguay, John Hudson, Leif Erickson…

Scénario : Louis Stevens

Photographie : Charles P. Boyle

Durée : 1h25

Année de sortie : 1952

LE FILM

Accusé à tort d’avoir braqué un train avec ses anciens amis les Dalton, Bill Doolin alias « The Cimarron Kid », décide de rejoindre le gang et de devenir pour de bon un bandit. Mais il est trahi par un des membres et devient fugitif…

Pour ceux qui voudraient en savoir plus sur le destin incroyable du comédien Audie Murphy (1925-1971), qu’ils se réfèrent à notre critique du formidable Une balle signée X réalisé par Jack Arnold, publiée sur le blog fin juin 2018. Le film qui nous intéresse aujourd’hui est À feu et à sangThe Cimarron Kid de Budd Boetticher (1916-2001). Après son retour du front, Audie Murphy est très vite courtisé par Hollywood et tourne son premier film dès 1948. En 1950, il signe un contrat avec les studios Universal pour lesquels il s’engage pour une durée de sept ans. Le Kid du TexasThe Kid from Texas de Kurt Neumann inaugure une longue lignée de westerns dont il sera la tête d’affiche. Mis en scène en 1951, À feu et à sang fait donc partie des premiers films du comédien. Rétrospectivement, c’est aussi l’un des westerns dans lesquels Audie Murphy apparaît le plus à l’aise et attachant, sans doute en raison de ses traits encore juvéniles. Une innocence qui sied à son personnage, pris entre son désir de rédemption et sa fidèle amitié pour ses anciens complices, le célèbre gang des Dalton.

De son vrai nom William Doolin, le hors-la-loi Cimarron Kid, vient d’être relâché pour bonne conduite et décide de se ranger. Suite à un quiproquo, il est accusé à tort d’avoir prêté main-forte aux quatre frères Dalton dans l’attaque du train qui devait l’emmener loin de tout. Pourchassé par les autorités, dont un détective coriace attaché à la société ferroviaire, il n’a pas d’autre choix que de rejoindre son ancien gang et d’en devenir l’un des principaux membres. Trahi, le Kid envisage alors de mettre fin à sa carrière de desperado et de fuir en Amérique du Sud en compagnie de la fille d’un fermier. Mais pour partir, il a besoin d’argent. La seule manière rapide de s’en procurer : un ultime hold-up.

Dans À feu et à sang, Audie Murphy ne traîne pas encore ce regard à la fois mélancolique et affûté qui contrastait alors avec son visage poupin. Ici, même si William Doolin a déjà participé à de nombreux délits, le personnage est d’emblée empathique et l’on se demande ce qui a pu le pousser à s’acoquiner aux frères Dalton. Un manque d’amour et d’affection se dégage alors de ce jeune type qui au départ souhaite absolument saisir la chance qui lui est offerte, celle de refaire sa vie loin des mauvaises fréquentations et de la violence de l’Ouest américain. Mais probablement né sous une mauvaise étoile, le sort s’acharne sur William, qui se retrouve mêlé à un hold-up commis par ses anciens complices.

Sous ses airs de petit western réalisé à la chaîne, À feu et à sang se révèle bien plus riche qu’il ne paraît. D’autant plus que le film a sacrément de la gueule avec un très beau Technicolor, des acteurs très bien dirigés par Budd Boetticher (Sept hommes à abattre, Le Déserteur de Fort Alamo), loin d’être un manchot derrière la caméra et qui ponctue son film de deux ou trois grands moments. C’est le cas du double hold-up et de la confrontation qui s’ensuit, mais aussi de l’affrontement central autour d’une rotonde ferroviaire, jusqu’au dénouement qui n’oublie jamais la psychologie des protagonistes.

Avec ses rebondissements bien amenés, son rythme nerveux, la beauté de la photographie et celle de ses actrices (qui ont des choses à défendre contrairement aux clichés de l’époque), sa rigueur formelle et l’émotion qui affleure dans les moments inattendus, The Cimarron Kid est donc une série B à placer au-dessus du panier dans l’étonnante carrière d’Audie Murphy. Budd Boetticher lui offrira d’ailleurs son dernier rôle au cinéma dans Qui tire le premier ?A Time for Dying (1969), juste avant que le comédien trouve la mort dans un accident d’avion en 1971.

LE BLU-RAY

Le test du Blu-ray d’À feu et à sang, disponible chez Sidonis Calysta, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est animé et musical. Le film de Budd Boetticher avait déjà bénéficié d’une édition DVD en 2007, qui comprenait une intervention de Bertrand Tavernier, reprise dans la réédition 2010. Chose étrange, nous ne retrouvons pas cette présentation sur cette édition HD !

Toutefois, l’éditeur joint un documentaire intitulé Les années Arruza (56’, 1996). Célèbre pour ses westerns d’anthologie, le cinéaste américain Budd Boetticher voulait primitivement affronter le taureau dans l’arène. De cette passion jamais apaisée est née son amitié pour le torero mexicain Carlos Arruza, alors rival de Manolete. De 1958 à 1967, Boetticher, alors au sommet de sa gloire, s’efforça de consacrer un film à la carrière de son ami. L’un des tournages les plus longs de l’histoire du cinéma. De nombreux obstacles l’empêchèrent de l’achever : financements ajournés, grèves inopportunes, séjour en prison puis en hôpital psychiatrique. Rien ne fut épargné à Boetticher, pas même de voir compromise son amitié pour un homme qui devait mourir tragiquement avant la fin du tournage, ainsi que sa propre carrière, sa vie de couple avec Debra Paget. Au milieu des années 90, retiré de tout, le cinéaste racontait sa passion, son amitié et son calvaire. Un documentaire étonnant et passionnant réalisé par Emilio Maillé et récompensé par le Fipa d’or au Festival de Biarritz.

L’Image et le son

Le master présenté a été restauré. La copie est stable et propre, malgré des points blancs encore visibles, mais cela reste anecdotique. Les partis pris esthétiques sont respectés, la texture argentique bien gérée. L’ensemble se tient avec notamment de très belles couleurs et des contrastes soignés y compris sur les séquences peu éclairées. La clarté est de mise et les détails ne manquent pas, surtout sur les paysages traversés par les personnages.

Que votre choix se porte sur la version originale (avec sous-titres français imposés) ou la version française, la restauration est également fort satisfaisante. Aucun souffle constaté sur les deux pistes, l’écoute est frontale et riche, dynamique et vive. Les effets annexes sont plus conséquents sur la version originale que sur la piste française, moins précise, plus étouffée, mais le confort acoustique est assuré sur les deux options. Le changement de langue est verrouillé à la volée.

Crédits images : © Universal Pictures / Sidonis Calysta Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Les Fugitifs, réalisé par Francis Veber

LES FUGITIFS réalisé par Francis Veber, disponible en DVD et Blu-ray le 26 septembre 2018 chez Gaumont

Acteurs : Gérard Depardieu, Pierre Richard, Anaïs Bret, Jean Carmet, Maurice Barrier, Jean Benguigui, Roland Blanche, Philippe Lelièvre, Yveline Ailhaud, Didier Pain…

Scénario : Francis Veber

Photographie : Luciano Tovoli

Musique : Vladimir Cosma

Durée : 1h30

Année de sortie : 1986

LE FILM

Lucas, un dangereux gangster, sort de prison et décide de devenir honnête. Pignon, au chômage depuis trois ans, décide de devenir malhonnête et attaque maladroitement une banque. Cerné par la police, il prend un otage pour se couvrir et choisit justement Lucas, qui était venu ouvrir un compte. La police reconnaît immédiatement l’ancien prisonnier et ne croit pas à son innocence. Lucas, en danger de mort, est obligé de s’enfuir avec son ravisseur.

Je suis pas en cavale, j’ai été pris en otage. Et si mon ravisseur n’est pas là dans 10 secondes, je te tire une balle dans le cul !

Avec Les Fugitifs, Francis Veber, scénariste de renom passé à la mise en scène avec Le Jouet en 1976 sur les conseils de Claude Berri, clôt en beauté sa trilogie reposant sur l’alchimie de l’immense duo Pierre Richard (François Pignon est de retour) – Gérard Depardieu, après La Chèvre (1981) et Les Compères (1983). Moins burlesque que les deux précédents films du réalisateur, Les Fugitifs se révèle beaucoup plus sensible et offre à Pierre Richard, pour sa quatrième et dernière collaboration avec le cinéaste, un de ses plus beaux rôles au cinéma, celui d’un père veuf, prêt à tout pour conserver la garde de sa fille. Le grand blond n’a jamais paru aussi fragile et cassé que dans ce film, un magnifique clown triste qui émeut autant qu’il arrache les larmes de rire. On appelle ça le génie.

Ton pantalon ! Allez vite ton pantalon connard où j’fais un trou d’dans !

Jean Lucas, ancien repris de justice pour de nombreux braquages de banques, est libéré après cinq ans de prison. Lucas est bien décidé à « se ranger » et à mener une vie honnête, ce qui ne manque pas de laisser dubitatif le commissaire Duroc. À sa sortie de prison, il vend les bijoux qui lui ont été restitués lors de sa levée d’écrou, puis se rend dans une banque pour y déposer le chèque qu’il a reçu du bijoutier. Alors qu’il fait la queue pour ouvrir un compte, un individu armé surgit pour effectuer un hold-up. Cet individu, François Pignon, peu expérimenté de l’exercice, mène très maladroitement son forfait et la banque est rapidement cernée par le commissaire Duroc et ses hommes. Contraint de sortir, Pignon prend Lucas comme otage. Le commissaire Duroc est convaincu que Lucas est en fait le braqueur. La situation surréaliste manque de tourner au drame et les deux hommes parviennent in extremis à s’échapper. Le comble est atteint pour Lucas qui reçoit une balle de revolver dans la cuisse, tirée par Pignon ! Acceptant d’être soigné par un vétérinaire ami de Pignon, Lucas découvre la petite fille de François, Jeanne. Cette dernière, très affectée par la mort de sa mère il y a plusieurs années, refuse de parler. Étant au chômage et sans revenus, Pignon était menacé par l’assistance publique de perdre la garde de Jeanne, chose inacceptable et insupportable pour lui. C’est devant cette situation sociale très difficile que Pignon s’est résigné à braquer la banque. Se sentant désormais menacé par la police et la perspective de la prison, Lucas accepte le marché de François qui, en échange de son aide pour quitter le territoire, promet de ne pas compromettre Lucas dans le braquage, son passé et sa réputation auprès du commissaire Duroc jouant en sa défaveur.

Vous me reconnaissez ?
Connard ?
C’est moi, oui ça va mieux ?

Francis Veber continue d’exploiter la relation de deux hommes que tout oppose et qui deviennent pourtant amis. Nous retrouvons les éléments qui font la griffe inimitable du cinéaste : des dialogues finement ciselés, une mécanique d’orfèvre, des seconds rôles soignés en particulier Jean Carmet, nommé pour le César du meilleur second rôle masculin, qui bouffe l’écran en vétérinaire complètement largué, auquel s’ajoutent un caméo non crédité de Michel Blanc et surtout des scènes tendres et sans aucune niaiserie avec l’étonnante petite Anaïs Bret, devant laquelle le monstre Depardieu se fait minuscule. A l’instar d’un remake de La Grande Vadrouille, Les Fugitifs emporte ses personnages et les spectateurs dans une course-poursuite d’1h30 sans aucun temps mort. Plus de trente ans après sa sortie, on est toujours aussi ému de voir ces deux grands comédiens face à cette poupée de 4 ans, surtout quand cette dernière demande au colosse en face d’elle « T’en va pas ! ».

Extraire une balle ? Il a avalé la baballe ? Il a avalé la baballe en jouant !

De son côté, Vladimir Cosma signe une de ses plus belles partitions, surtout durant le final où le trio s’éloigne vers l’Italie, probablement la plus belle séquence de tout le cinéma de Francis Veber. Parallèlement, c’est aussi la fin d’une ère. Après ce film, Pierre Richard ne retrouvera jamais les sommets du box-office, du moins en tant que tête d’affiche et ne tournera plus pour Francis Veber, tandis que ce dernier ne retrouvera Gérard Depardieu que quinze ans plus tard pour Le Placard. Même si le score est inférieur à celui de La Chèvre (7 millions d’entrées) et des Compères (4,8 millions), Les Fugitifs est tout de même un triomphe en 1986. Le film attire près de 4,5 millions de spectateurs en France, plus de 20 millions en Union Soviétique et connaîtra même un remake en 1989 intitulé Les Trois fugitifs, avec Nick Nolte et Martin Schort, réalisé par Francis Veber lui-même, alors parti à Hollywood. Le réalisateur sera également nommé aux César en 1987 pour le meilleur scénario original.

LE BLU-RAY

Un peu plus de quatre ans après sa première édition HD chez EuropaCorp et surtout après le rachat du catalogue des films de Pierre Richard, Les Fugitifs refait son apparition dans les bacs sous la houlette de Gaumont ! Nouvelle édition HD restaurée, visuel différent. Le menu principal est fixe et muet.

L’ancienne édition ne comportait aucun supplément. Faute réparée ici avec un documentaire rétrospectif (28’) donnant en fait la parole à Francis Veber, Pierre Richard et, grand surprise, Anaïs Bret qui interprétait la petite Jeanne dans le film ! Tandis que nous découvrons de superbes images et photos de tournage et des répétitions, le réalisateur explique la difficulté d’écriture du scénario des Fugitifs. De son côté Pierre Richard partage ses souvenirs liés à son complice Gérard Depardieu et à la méthode Veber. Anaïs Bret, très charmante et qui est devenue professeur, se remémore les prises de vues avec ses partenaires, comment toute l’équipe s’occupait d’elle entre les prises.

L’interactivité se clôt sur un comparatif avant/après la restauration, ainsi que la bande-annonce composée de prises alternatives.

L’Image et le son

L’ancien master HD permettait aux couleurs de retrouver un peu de peps, une clarté évidente, une stabilité ainsi qu’un nouveau relief. La propreté de la copie était indéniable, la texture argentique flatteuse et la définition fort appréciable. Quelques fourmillements s’invitaient tout de même à la partie, le piqué était souvent doux et manquait de mordant, surtout sur les séquences sombres et nocturnes, tout comme dans le cabinet du vétérinaire aux lumières vertes et jaunes peu reluisantes. La gestion du grain était également aléatoire et les visages des comédiens tiraient sur le rosé. Nous accueillons donc ce nouveau master HD restauré avec une très grande joie. Les teintes sont nettement plus naturelles que sur le Blu-ray EuropaCorp, la carnation est également plus douce et équilibrée. Ce nouveau Blu-ray permet surtout d’apprécier les éclairages plus stylisés que dans nos souvenirs, du chef opérateur Luciano Tovoli. Même chose concernant les contrastes, plus équilibrés, autant sur les séquences diurnes que nocturne. Le grain est harmonieux, les détails plus éloquents.

La piste française DTS-HD Master Audio Mono 2.0 des Fugitifs est plutôt percutante. Aucun souffle n’est à déplorer, ni aucune saturation dans les aigus. Les dialogues sont vifs, toujours bien détachés, la musique de Vladimir Cosma est délivrée avec une belle ampleur. L’ensemble est aéré, propre, fluide et dynamique. Les sous-titres anglais et français destinés au public sourd et malentendant sont également disponibles.

Crédits images : © Gaumont Pathé Archives / Collection Personnelle d’Anaïs Bret / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Bagdad Café, réalisé par Percy Adlon

BAGDAD CAFÉ (Out of Rosenheim) réalisé par Percy Adlon, disponible en Blu-ray – Edition « 30ème anniversaire – Version restaurée » le 17 juillet 2018 chez Studiocanal

Acteurs : Marianne Sägebrecht, CCH Pounder, Jack Palance, Christine Kaufmann, Monica Calhoun, Darron Flagg…

Scénario : Eleonore Adlon, Percy Adlon, Christopher Doherty

Photographie : Bernd Heinl

Musique : Bob Telson

Durée : 1h49

Année de sortie : 1987

LE FILM

Suite à une dispute avec son mari, Jasmin, une femme d’origine bavaroise, atterri dans un petit hôtel miteux situé entre Las Vegas et DisneyLand : le Bagdad Café. L’endroit, dirigée par Brenda, une jeune femme bruyante et revêche, est un repère de routiers et de personnages fantasques. C’est dans ces conditions que va naître une amitié hors du commun entre Jasmin et Brenda, deux personnalités pourtant diamétralement opposées…

C’est l’histoire d’un petit film débarqué de nulle part, distribué sans trop y croire, rapidement devenu un véritable phénomène mondial. Bagdad Café titre international d’Out of Ronseheim, aura entre autres attiré près de 2,5 millions de spectateurs en France à sa sortie en avril 1988, devenant le huitième plus grand succès de l’année, entre Crocodile Dundee II et Liaison fatale. Comme une réaction chimique, les ingrédients ont formé un précipité d’émotions, d’humour et de tendresse qui a conquis le monde entier. Aujourd’hui encore, Bagdad Café reste un véritable miracle cinématographique, une œuvre unique, intemporelle, universelle, quasiment inclassable, tandis que résonne encore et toujours la sublime chanson Calling You avec la voix aérienne de Jevetta Steele, qui a également largement contribué au triomphe ainsi qu’à la postérité du film de Percy Adlon.

Jasmine Münchgstettner, une touriste allemande de la ville de Munich, quitte son mari et échoue en plein désert avec, pour tout bagage, la valise de son époux contenant la garde-robe très bavaroise de celui-ci et un jeu de magie. Elle atterrit au Bagdad Café, un motel poussiéreux, situé non loin de Las Vegas et longeant la célèbre Route 66. Le Bagdad Café est géré par Brenda, une femme épuisée et excédée, qui élève ses enfants, dont un fan de Bach, une ado fantasque et un petit-fils, sans pouvoir compter sur son fainéant de mari qui l’a quittée. Le café est le refuge de gentils marginaux : un serveur amérindien lymphatique, un ancien peintre décorateur d’Hollywood, une tatoueuse misanthrope ainsi qu’un campeur lanceur de boomerang. Jasmine bouleverse la vie de cette petite communauté et ramène la clientèle de routiers qui désertaient ce trou sinistre, grâce à un grand coup de ménage tout germanique et à ses talents de prestidigitatrice. Chacun, y compris Jasmine, voit sa vie transformée, notamment Brenda, qui trouve une amie et sourit à nouveau.

Bagdad Café est comme qui dirait le chaînon manquant entre le cinéma de Rainer Werner Fassbinder et celui David Lynch. Percy Adlon dresse le portrait des laissés pour comptes et des oubliés du célèbre « Rêve Américain ». En adoptant le point de vue d’une étrangère, magnifiquement campée par la comédienne bavaroise et très fellinienne Marianne Sägebrecht (Zuckerbaby, La Guerre des Rose), le réalisateur signe un film hors du temps, comme suspendu, et nimbe ce repère de paumés d’une couleur dorée hypnotique, comme si le soleil venait constamment caresser les personnages qui squattent le motel pourtant cradingue de Brenda, interprétée par l’incroyable CCH Pounder. Comme une peinture de Salvador Dalí, inspiration du chef opérateur Bernd Heinl pour ce qui est de l’utilisation des filtres jaunes, mais aussi d’Edward Hopper en ce qui concerne les décors, on pense d’ailleurs à son œuvre Gas, Bagdad Café révèle les sentiments enfouis de ses personnages solitaires. Chacun se dévoile progressivement, la confiance s’installe, la peur de l’autre fait place à l’amitié la plus intense et la plus intime.

Jasmine et Brenda, mais aussi Rudy le baba-cool (sublime Jack Palance), Debbie la tatoueuse excentrique et les autres portent leurs « bagages » avec eux, une histoire personnelle qui les a conduit dans cet endroit reculé du monde, au milieu de nulle part. Il ne leur manquait qu’un soupçon de magie pour que l’étincelle de la vie renaisse chez chacun, qu’ils voient la beauté de ceux qui les entourent. Avec sa sensibilité européenne et à l’instar de son compatriote Wim Wenders, Percy Adlon parvient à rendre hommage au visage caché de l’Amérique, l’une de ses richesses, le melting-pot. Au-delà de l’apparente rudesse, se cache en fait une infinie douceur, une plénitude, la joie d’être ensemble, de profiter de l’instant présent, de donner et de partager du plaisir et de l’amour même avec ceux qui ne sont que de passage sur cette Route 66. Ou quand les âmes égarées finissent par se reconnaître entre elles.

Bagdad Café est un film d’illusionniste qui procure un immense bien-être et auquel on revient sans cesse. En un mot, un chef d’oeuvre, justement récompensé par le César du meilleur film étranger en 1989.

LE BLU-RAY

Bagdad Café avait déjà bénéficié d’une sortie en Haute-Définition dite « Version longue – Director’s Cut » en 2009. En 2018, l’édition 30ème anniversaire – Version restaurée arrive dans les bacs ! Le disque repose dans un boîtier slim Digipack, reprenant un visuel colorié de la célèbre affiche du film. Le menu principal est fixe et musical. Il s’agit bien entendu du même montage que celui proposé en 2009 et qui contient donc forcément des passages non doublés en français, qui passent directement en version originale sous-titrée.

Cette édition comprend un commentaire audio de Percy Adlon et Marianne Sägebrecht. Les deux collaborateurs et surtout amis s’expriment en allemand (sous-titré en français) et reviennent sur tous les aspects de Bagdad Café, évidemment le film qui aura marqué le plus leur carrière. Bourré d’anecdotes, ce commentaire audio se suit avec un très grand plaisir, même si les deux intervenants peuvent parfois tomber dans l’autosatisfaction. Mais on ne leur en veut pas.

S’ensuit un reportage fort sympathique (24’) où le réalisateur, accompagné de son épouse (et coscénariste) et de leurs petites-filles, reviennent sur les lieux de tournage, quelques semaines avant la présentation du film au Festival de Cannes en séance Cannes Classics. Quelques vestiges demeurent, tandis que Percy Adlon partage quelques souvenirs liés aux prises de vues.

Plus anecdotique, un montage d’une vingtaine de minutes compile quelques images et photos du film, tandis que la voix de Percy Adlon résume l’intégralité de l’intrigue de Bagdad Café.

L’interactivité se clôt sur la bande-annonce.

L’Image et le son

Bagdad Café refait surface à travers un tout nouveau master 4K ! Et le moins que l’on puisse dire, c’est que cette nouvelle copie comblera les très nombreux amateurs du film de Percy Adlon. La luminosité est éloquente, ainsi que la nouvelle tenue des contrastes, le grain argentique est sublime, tandis que l’usage des filtres colorés n’a jamais été aussi étincelant. Les gros plans regorgent de détails à l’instar de l’éclat des yeux de Marianne Sägebrecht et l’on parvient même à discerner les quelques trucs des tours de magie à la fin du film. Ce Blu-ray 30ème anniversaire est élégant, sans cesse flatteur pour les mirettes, un travail de haute qualité.

Bagdad Café est disponible en version originale et française DTS-HD Master Audio Stéréo. Même si la première est évidemment à privilégier, les deux pistes instaurent un confort acoustique plaisant avec une délivrance affûtée des dialogues, des effets annexes convaincants et surtout une belle restitution de la musique culte. Les deux options acoustiques sont propres et sans souffle. L’éditeur joint également une piste allemande. Les sous-titres français ne sont pas imposés.

Crédits images : © PELEMELE 1987 / Studiocanal / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Scorpio, réalisé par Michael Winner

SCORPIO réalisé par Michael Winner, disponible en DVD et Blu-ray le 21 août 2018 chez ESC Editions

Acteurs : Burt Lancaster, Alain Delon, Paul Scofield, John Colicos, Gayle Hunnicutt, J.D. Cannon, Joanne Linville, James Sikking…

Scénario : David W. Rintels, Gerald Wilson

Photographie : Robert Paynter

Musique : Jerry Fielding

Durée : 1h55

Année de sortie : 1973

LE FILM

Cross, un agent confirmé de la CIA, a autrefois pris sous son aile Laurier, une nouvelle recrue, et lui a tout appris au sujet de l’espionnage. Aujourd’hui coéquipiers, le vétéran ressent que ses supérieurs se montrent distants à son égard et il ne se trompe pas. En effet, ils ont chargé son ancien élève de l’éliminer ! Cross s’enfuit alors à Vienne pour retrouver un ami travaillant pour les services secrets soviétiques…

Installé aux Etats-Unis depuis le début des années 1970 après le succès des Collines de la terreurChato’s land, le cinéaste britannique Michael Winner (1935-2013) vient de connaître son premier triomphe à Hollywood avec L’Homme de la loiLawman avec Burt Lancaster. Il a alors le vent en poupe et enchaîne avec Le CorrupteurThe Nightcomers (1971) avec Marlon Brando, puis surtout Le FlingueurThe Mechanic (1972) et Le Cercle noirThe Stone killer (1973) qui installent le mythe Charles Bronson. Juste avant l’explosion d’Un justicier dans la ville, Michael Winner collabore à nouveau avec Burt Lancaster pour Scorpio, thriller d’espionnage dans lequel la star retrouve son partenaire du Guépard, Alain Delon, dix ans après l’adaptation de Giuseppe Tomasi di Lampedusa par Luchino Visconti. Scorpio est l’antithèse des épisodes de James Bond qui fleurissaient alors depuis 1962. Michael Winner refuse l’action spectaculaire au profit d’une étude psychologique de ses personnages, prisonniers malgré-eux de la conjoncture politique internationale et du changement du fonctionnement de leur institution. S’il n’est pas aussi connu que ses autres films, Michael Winner signe pourtant une de ses œuvres les plus riches et complexes.

Gerald Cross est un ancien agent expérimenté de la CIA, ayant tué durant sa carrière d’espion, qui a pris sous sa coupe le jeune Jean Laurier surnommé Scorpio, afin de le former et éventuellement le remplacer. Cross enseigne à son poulain à se protéger autant de ceux qui l’emploient que de ses adversaires. La CIA, en la personne de McLeod, soupçonne Cross de trahison, comme agent-double, au profit de l’Union Soviétique. L’occasion de se servir de Laurier, accusé de trafic de stupéfiant par un montage, permet de suivre la trace de Cross parti en Europe à la recherche de son épouse Sarah. Laurier, ambitieux, qui aimerait justement être enrôlé à la CIA, accepte de trahir son ex-mentor. Cependant, en agent expérimenté, Cross réussit à déjouer les multiples pièges tendus par Laurier et son équipe, et parvient à se réfugier à Vienne. Il découvre alors que sa femme a été assassinée.

Ça ne rigole pas dans Scorpio ! Beaucoup plus proche des romans (et de leurs transpositions au cinéma) des œuvres de John le Carré que de celles de Ian Fleming, le film de Michael Winner ne craint pas de développer ses personnages là où les spectateurs attendaient peut-être des scènes d’action et des règlements de comptes. Ce qui attire évidemment en premier lieu dans Scorpio, c’est la confrontation, mais aussi le passage de témoin entre les deux têtes d’affiche. La complicité des deux personnages (et des acteurs) est évidente dans la première partie, celle où Cross, vieux briscard sur le point de mettre un terme à ses activités, enseigne tout ce qu’il sait à son jeune protégé Laurier, alias Scorpio, sobriquet qui lui vient de sa capacité à se mouvoir très vite et à se sortir des mauvaises situations. Tout irait pour le mieux pour ces deux hommes qui ont un profond respect l’un envers l’autre, jusqu’à ce que cet organisme indépendant et tentaculaire, pour ne pas dire criminel et même mafieux qu’est la CIA les dresse au rang d’adversaires.

Parallèlement, ce sont deux écoles de cinéma, deux générations qui s’affrontent à l’écran. Agé de 60 ans au moment du tournage, Burt Lancaster démontre qu’il en a encore sérieusement sous le capot et qu’il n’est pas prêt à se laisser bouffer par le jeune loup Delon. Ce dernier, ami de Burt Lancaster dans la vie, est de son côté prêt à tout pour s’élever au rang de son aîné et apporte avec lui son bagage « melvillien ». Impossible de ne pas penser au Samouraï quand le comédien apparaît avec son imperméable, les mains dans les poches. C’est ce rapport quasi-méta qui s’installe dans Scorpio et ce qui en fait sa qualité principale.

Certains spectateurs pourront trouver le temps long, car le film est assez bavard quand il détaille les méthodes des bureaucrates et des technocrates, ainsi que leur stratégie à adopter pour mettre la main sur Cross, mais Michael Winner, en pleine possession de ses moyens, parvient à maintenir un rythme, certes languissant, mais en maintenant l’intérêt. Un jeu du chat (les félins sont d’ailleurs bien présents) et de la souris s’instaure entre Paris, Washington DC et Vienne où plane l’ombre du Troisième homme de Carol Reed, avec comme point d’orgue une phénoménale course-poursuite entre les deux personnages principaux, dans le décor du chantier du métro viennois en construction. Une longue scène d’action menée à cent à l’heure sur la sublime composition de Jerry Fielding, où les comédiens effectuent leurs impressionnantes cascades sans être doublés.

Profondément pessimiste, Scorpio est un film d’espionnage ambigu et crépusculaire, qui mérite d’être sérieusement reconsidéré.

LE BLU-RAY

Le test du Blu-ray de Scorpio, disponible chez ESC Editions, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est animé et musical.

Le premier module disponible dans la section des suppléments, est une brillante analyse de Scorpio par Olivier Père (23’). Le journaliste, critique de cinéma, directeur général d’Arte France cinéma et directeur cinéma à Arte France replace tout d’abord le film qui nous intéresse dans l’oeuvre de Michael Winner, ainsi que le parcours de ce dernier, ses succès, notamment sa collaboration avec Charles Bronson. Puis, Olivier Père revient de manière plus approfondie sur les thèmes de Scorpio, ses personnages, leurs liens, tout en évoquant le contexte historique du film, les Etats-Unis plongés en pleine paranoïa après l’assassinat de JFK et l’Affaire du Watergate. Olivier Père défend le cinéma de Michael Winner, dresse quelques parallèles entre Scorpio et Le Flingueur, sans oublier de parler des partis pris du metteur en scène.

Le second bonus donne la parole à Jean-Claude Messiaen (20’). Critique et réalisateur, ce dernier raconte qu’il était attaché de presse au début des années 1970 pour le compte des Artistes Associés. De ce fait, il avait réussi à se faire engager sur le tournage du film de Michael Winner, encore intitulé à l’époque «Danger Field », pour suivre le réalisateur à Paris, avec lequel il entretenait jusqu’à présent qu’une correspondance écrite. Jean-Claude Messiaen évoque surtout la méthode du cinéaste, sa rencontre avec Burt Lancaster, ainsi que les thèmes de Scorpio qu’il résume par « la fin des idéologies ».

L’interactivité se clôt sur la bande-annonce.

L’Image et le son

En France, le film de Michael Winner n’était disponible qu’en DVD chez MGM dans une version non restaurée. C’est donc avec un très grand plaisir que nous redécouvrons Scorpio en Haute-Définition grâce aux bons soins d’ESC Editions. Malgré un grain aléatoire, heureusement conservé ceci dit, les scènes diurnes et nocturnes sont logées à la même enseigne et formidablement rendues avec ce master nettoyé de presque toutes défectuosités. Mis à part un générique vacillant et très grumeleux, les contrastes du chef opérateur Robert Paynter (Superman II, Série noire pour une nuit blanche), retrouvent une nouvelle densité. Les nombreux points forts de cette édition demeurent la beauté des gros plans (voir les yeux bleus des deux comédiens principaux), la propreté du master (hormis quelques points blancs), les couleurs souvent ravivées et le relief des scènes en extérieur jour avec des détails plus flagrants. Quelques fléchissements de la définition, mais rien de rédhibitoire. Enfin, le film est proposé dans son format d’origine 1.85.

Les mixages anglais et français DTS-HD Master Audio 1.0 sont propres, efficaces et distillent parfaitement la musique de Jerry Fielding. La piste anglaise ne manque pas d’ardeur et s’avère la plus équilibrée du lot. Au jeu des différences, la version française apparaît plus sourde. Aucun souffle constaté sur les deux pistes.

Crédits images : © MGM / Les Artistes Associés / ESC Editions / ESC Distribution / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test DVD / Madame Hyde, réalisé par Serge Bozon

MADAME HYDE réalisé par Serge Bozon, disponible en DVD le 31 juillet 2018 chez TF1 Studio

Acteurs : Isabelle Huppert, Romain Duris, José Garcia, Adda Senani, Guillaume Verdier, Patricia Barzyk, Pierre Léon, Roxane Arnal…

Scénario : Serge Bozon, Axelle Ropert d’après le roman de Robert Louis Stevenson « L’Etrange cas du Dr Jekyll et de Mr Hyde » (« The Strange Case of Dr. Jekyll and Mister Hyde« )

Photographie : Céline Bozon

Musique : Benjamin Esdraffo

Durée : 1h31

Année de sortie : 2018

LE FILM

Mme Géquil, timide et maladroite professeure de physique dans un lycée professionnel de banlieue, est méprisée par ses élèves et ses collègues. Un jour, elle est foudroyée et sent en elle une énergie nouvelle, mystérieuse et dangereuse…

Comme dirait le héros du nanar Jaguar Force, « Mais pourquoi ? Pourquoooooooi ??!! ». C’est ce qu’on se dit durant les interminables 90 minutes de Madame Hyde, le nouveau supplice concocté par Serge Bozon (L’Amitié, Mods, La France), de retour derrière la caméra (ah bon?) cinq ans après l’abominable Tip Top. Pour son nouvel opus, il signe à nouveau le scénario avec Axelle Ropert, ce qui d’emblée n’est franchement pas rassurant. Madame Hyde se présente donc comme une libre adaptation contemporaine de l’oeuvre de Robert Louis Stevenson, L’Etrange cas du docteur Jekyll et de M. Hyde (1886). Pure arnaque, ce « film », puisqu’il faut bien le qualifier ainsi s’inscrit directement dans le top des plus mauvais de l’année et l’on se demande encore comment la grande Isabelle Huppert a pu se fourvoyer là-dedans pour la deuxième fois consécutive.

Madame Hyde est représentatif d’un cinéma élitiste, qui pense faire de l’art en se filmant le nombril et en usant de blagues pas drôles qui font se gausser les producteurs en manque de notoriété. Réalisateur, critique de cinéma aux Cahiers et comédien, Serge Bozon pense faire de l’humour, mais ne comprend rien au slapstick, ni même à la mise en scène, encore moins à la direction d’acteurs. Le pauvre José Garcia en fait les frais dans le rôle ingrat de monsieur Géquil, homme au foyer, qui se contente de faire la popote et de prendre soin de sa femme. Rien, absolument rien ne fonctionne dans Madame Hyde. A part peut-être la prestation de Romain Duris, qui a visiblement l’air de se demander ce qu’il fout là-dedans, mais qui du coup s’amuse à composer un personnage infect, un proviseur arrogant tiré à quatre épingles, très précieux avec la mèche Auteuil-Neuilly-Passy. Il est de loin la seule raison valable de se taper le film jusqu’au bout. Sans lui, visionner Madame Hyde serait vraiment une épreuve insoutenable.

La photo est laide, le rythme jamais maîtrisé, les comédiens neurasthéniques, l’ensemble sans intérêt. Le pire, c’est que le film se donne des airs pour finalement ne rien raconter. La mise en scène est impersonnelle, sans âme. On suit donc difficilement (euphémisme) les aventures de cette prof fatiguée, qui ne parvient pas à se faire respecter malgré les années d’enseignement. Suite à une expérience scientifique qui tourne mal, elle se retrouve dotée de pouvoirs et se transforme quand vient la Lune Rousse. Elle devient alors incandescente et s’en va faire respecter la loi dans la cité où s’affrontent quelques jeunes chanteurs de rap. Sinon, Serge Bozon semble se foutre de tout, de son scénario, de ses acteurs. Tout part en sucette dès les premières minutes et finalement Madame Hyde s’apparente à un épisode de l’émission E=M6 qui aurait été déprogrammé car jugé trop ennuyeux pour les spectateurs. Quand le personnage d’Isabelle Huppert entreprend d’expliquer un problème de mathématiques à l’un de ses élèves en difficulté, le réalisateur croit bon de nous faire un cours particulier en plan fixe, qui dure, et qui dure encore, et qui nous renvoie aux cours de madame Baillet au Collège Alfred de Musset de Patay. Franchement, pourquoi ?

Le hic, c’est que des trucs du même genre et aussi bavards fleurissent encore et toujours dans les salles, qu’ils squattent les cinémas et surtout des salles vides puisque même les cinéphiles les plus avertis n’hésitent plus à fuir devant l’ignominie de ce qu’on leur propose. Cinéma d’auteur d’accord, liberté de ton OK, humour loufoque soit, mais il faudrait peut-être arrêter de prendre les spectateurs pour des cons et de penser que l’on peut tenir un discours vieux de plus de vingt ans (ici sur l’éducation, la banlieue, la transmission, le racisme) sous couvert de fausse originalité. Autant revoir Le Plus beau métier du monde de Gérard Lauzier avec un immense Gérard Depardieu ou bien encore De bruit et de fureur de Jean-Claude Brisseau.

LE DVD

Le test du DVD de Madame Hyde, disponible chez TF1 Studio, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est animé et musical.

Aucun supplément sur cette édition.

L’Image et le son

Ce master (1.66) offre des conditions de visionnage banales et sans esbroufe. La colorimétrie est plutôt bien agencée, aux teintes pastel, mais la définition demeure passable, même sur les quelques plans rapprochés avec des visages très blafards. La clarté est de mise, les contrastes corrects, cependant le piqué manque de précision et certaines séquences apparaissent plus ternes que d’autres.

Madame Hyde n’est pas à proprement parler d’un film à effets, mais la piste Dolby Digital 5.1 parvient à distiller ici et là quelques ambiances. La plupart des séquences reposent sur les dialogues et le mixage se concentre souvent sur les enceintes avant. La spatialisation est essentiellement musicale, les effets latéraux sont rares. Même chose pour la piste Stéréo, amplement suffisante pour un film de cet acabit. Les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant sont également au programme, ainsi qu’une piste Audiodescription.

Crédits images : © Haut et Court / TF1 Studios / Captures DVD : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

 

Test Blu-ray / Vendetta, réalisé par Gregory Ratoff

VENDETTA (The Corsican Brothers) réalisé par Gregory Ratoff, disponible en combo Blu-ray+DVD le 21 août 2018 chez Rimini Editions

Acteurs : Douglas Fairbanks Jr., Ruth Warrick, Akim Tamiroff, J. Carrol Naish, H.B. Warner, John Emery…

Scénario : George Bruce, Howard Estabrook d’après le roman Les Frères corses d’Alexandre Dumas

Photographie : Harry Stradling Sr.

Musique : Dimitri Tiomkin

Durée : 1h51

Année de sortie : 1941

LE FILM

Au XIXè siècle, en Corse. Alors que sa femme est sur le point d’accoucher, le comte Franchi est assassiné par le baron Colonna, qui fait exécuter toute sa famille et détruire son château. Seuls survivants : les bébés siamois qui viennent de naître, et qui sont aussitôt séparés par un chirurgien hors pair, ami du comte. L’un d’eux, Mario, est envoyé à Paris pour être élevé par une riche famille. Le second, Lucien, reste en Corse et devient un bandit. Les années passent, les deux frères grandissent en ignorant l’existence l’un de l’autre.

Réalisé en 1941, VendettaThe Corsican Brothers est l’adaptation du roman Les Frères corses d’Alexandre Dumas publié en 1844. Suite au succès de L’Homme au masque de fer (1939) de James Whale et du Fils de Monte-Cristo (1940) de Rowland V. Lee, le producteur Edward Small a de la suite dans les idées et jette à nouveau son dévolu sur l’un des écrits d’Alexandre Dumas père. Alors qu’il refusait jusqu’alors les films de cape et d’épée afin de ne pas être comparé à son illustre père, Douglas Fairbanks Jr. (1909-2000) accepte le rôle principal de Vendetta, ou plutôt le double-rôle principal puisque le comédien vu dans La Patrouille de l’aube d’Howard Hawks et Le Petit César de Mervyn LeRoy incarne à l’écran deux frères jumeaux. Le film conserve un charme fou, désuet certes, mais où la magie opère grâce à l’interprétation endiablée d’un Douglas Fairbanks Jr. bourré de charisme, bondissant et magnifique dans les scènes de duel. Escrimeur émérite, l’acteur fait autant preuve de dextérité et de talent en maniant le sabre qu’en donnant une personnalité spécifique à chacun de ses personnages.

S’il demeure assez méconnu dans nos contrées, ce court roman d’Alexandre Dumas père est pourtant très prisé dans les pays anglo-saxons. Décliné au théâtre, il reste également le premier livre de l’écrivain transposé au cinéma dès 1898 et compte à ce jour près d’une quinzaine d’adaptations. Tout Dumas y est. Le scénariste George Bruce parvient à restituer les rebondissements, les enjeux et l’atmosphère du roman original, tout en respectant cette ambiance quasi-fantastique et surnaturelle qu’affectionnait particulièrement Dumas. Vendetta est d’ailleurs un film étonnant, puisqu’il demeure l’un des premiers à montrer des frères siamois à l’écran. En effet, à leur naissance les frères Franchi naissent liés par l’abdomen. Leur père décide de tenter une opération destinée à les séparer. C’est un succès. Seulement les frères restent connectés « par l’âme » et quand l’un est blessé ou ressent une vive émotion, l’autre la ressent de son côté. Séparés et élevés en ignorant l’existence de l’autre suite à l’assassinat de leur père, Lucien et Mario grandissent différemment. Le premier en devenant un bandit en Corse, le second en menant une vie de mondain à Paris. Mais ce lien télépathique unique est encore là, chacun ayant des visions de l’autre. Jusqu’au jour où le destin les réunit enfin et où ils décident de venger la mort de leur père.

Douglas Fairbanks Jr. est fabuleux dans ce double-rôle, qui a depuis inspiré moult films du genre, y compris Double Impact (1991) de Sheldon Lettich avec Jean-Claude Van Damme et Double Dragon (1992) de Tsui Hark et Ringo Lam avec Jackie Chan ! Dédoublé grâce aux effets spéciaux – comme Robert Donat en 1935 dans le succulent Fantôme à vendre de René Clair – plutôt dingues pour l’époque et qui sont encore aujourd’hui très réussis, Douglas Fairbanks Jr. crève l’écran en aventurier romantique et sensible, mais aussi fougueux et déterminé. Vendetta sera son baroud d’honneur avant de partir à la guerre. Il ne reviendra au cinéma qu’en 1947 avec Sinbad le marin de Richard Wallace. Les séquences d’affrontements s’enchaînent sur un rythme trépident, la mise en scène de Gregory Ratoff est sans cesse inventive, à l’instar du duel final et de la poursuite à cheval. Le spectacle est encore garanti !

LE BLU-RAY

Un peu plus d’un an après son édition en DVD, Vendetta est de retour chez Rimini Editions en Blu-ray avec des suppléments inédits. Ce combo Blu-ray+DVD est disponible dans un boîtier Amaray classique de couleur noire, glissé dans un surétui cartonné. La jaquette est estampillée Collection Alexandre Dumas. Le menu principal est quant à lui animé et musical.

Le premier bonus de cette édition (17’30) croise les interventions d’Odile Bordaz (docteur en Histoire de l’art), Christophe Champclaux (historien du cinéma) et Michel Olivier (maître d’armes). L’historien du cinéma se taille la part du lion en replaçant Vendetta dans la filmographie de Douglas Fairbanks Jr., tout en revenant longuement sur le roman d’Alexandre Dumas, ses thèmes et ses diverses déclinaisons au théâtre et au cinéma. La participation de Michel Olivier est un peu plus anecdotique. Odile Bordaz aborde de son côté la part fantastique de quelques œuvres de l’écrivain. Si les propos sont souvent pertinents, le montage laisse à désirer.

Le second module (6’) donne à nouveau la parole à Michel Olivier. Dans son costume d’époque, le maître d’armes présente Les Lames sur Seine, association d’Escrime Artistique et de Spectacle de Neuilly-sur-Seine, agréée Jeunesses et Sports, également une école de formation et un Centre de création de spectacles d’Escrime Artistique. L’Escrime Artistique fait revivre la pratique de l’escrime à travers toutes les époques, de l’Antiquité au début du XXème siècle, en passant par le Grand Siècle et le Siècle des Lumières. L’occasion de découvrir quelques extraits de représentations au Château de Breteuil.

L’interactivité se clôt sur une présentation des quatre visuels des éditions de la collection Alexandre Dumas disponible chez Rimini.

L’Image et le son

Il serait difficile de faire mieux. Ce nouveau master Haute-Définition (1.33) permet de découvrir ou de revoir Vendetta dans de formidables conditions techniques. La propreté est éloquente, les contrastes maîtrisés, le N&B élégant et lumineux, le piqué impressionnant et le relief indéniable. Le grain est certes parfois trop lissé, les plans où apparaissent deux Douglas Fairbanks Jr. sont sensiblement plus altérés et les fondus enchaînés entraînent divers décrochages, mais le confort de visionnage est appréciable. Une restauration et un lifting de premier ordre pour le film de Gregory Ratoff.

Privilégiez évidemment la version originale, restaurée, fluide, sans souffle et dynamique. En revanche, la piste française (absente de l’ancienne édition DVD) grésille et les dialogues sont souvent couverts.

Crédits images : © Impex Films / Rimini Editions / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test DVD / Le Jour de mon retour, réalisé par James Marsh

LE JOUR DE MON RETOUR (The Mercy) réalisé par James Marsh, disponible en DVD le10 juillet 2018 chez Studiocanal

Acteurs : Colin Firth, Rachel Weisz, David Thewlis, Ken Stott, Jonathan Bailey, Adrian Schiller, Oliver Maltman, Kit Connor…

Scénario : Scott Z. Burns

Photographie : Eric Gautier

Musique : Jóhann Jóhannsson

Durée : 1h38

Année de sortie : 2018

LE FILM

1968. Donald Crowhurst, un homme d’affaires anglais, passionné par la voile, est au bord de la faillite. Pour sauver son entreprise et vivre l’aventure dont il rêve depuis toujours, il décide de participer à la première course à la voile en solitaire pour remporter le grand prix. Soutenu par sa femme et ses enfants, il se lance alors dans cette incroyable odyssée à travers les mers du monde. Mais mal préparé et face à lui-même, Crowhurst rencontre très vite de graves difficultés…

Il y a des films qui tiennent essentiellement sur leurs têtes d’affiche. La plupart peut-être. Le Jour de mon retour The Mercy fait partie du lot. Bien que cette histoire vraie ne manque pas d’intérêt, le traitement académique finit par lasser et si le spectateur parvient à aller jusqu’au bout, c’est uniquement en raison du talent et du charisme de ses interprètes. Et dans Le Jour de mon retour nous sommes gâtés puisque le film de James Marsh réunit deux des plus grands comédiens britanniques, Colin Firth et Rachel Weisz. Le réalisateur qui compte à son actif de très grandes réussites comme le documentaire Le Funambule (2008) sur le célèbre Philippe Petit et sa traversée sur un fil tendu entre les deux tours du World Trade Center, l’exceptionnel Shadow Dancer (2012) avec Clive Owen, ou bien encore Une merveilleuse histoire du temps avec Eddie Redmayne oscarisé pour son incarnation de Stephen Hawking, peine à capter l’attention et signe une œuvre souvent redondante, même si le récit reste bouleversant.

Le Jour de mon retour se penche sur le destin de Donald Crowhurst, qui a déjà inspiré d’autres films et documentaire (Deep Water, de Louise Osmond et Jerry Rothwell, sorti en 2006) dès 1982 avec Les Quarantièmes rugissants de Christian de Chalonge avec Jacques Perrin dans le rôle principal. Déjà producteur à l’époque et en dépit de l’échec du film, ce dernier est à nouveau producteur sur Le Jour de mon retour. Ecrit par Scott Z. Burns (La Vengeance dans la peau, The Informant !, Effets secondaires), le film de James Marsh propose une réelle transposition au cinéma des derniers jours de Donald Crowhurst (1932-1969), homme d’affaires anglais, inventeur d’un radiocompas, passionné de voile en navigateur amateur, porté disparu durant la course autour du monde Sunday Times Golden Globe Race. En 1968, bien que n’ayant jamais pris la mer, il décide de laisser femme et enfants pour participer à cette épreuve en solitaire et sans escale afin de gagner le prix offert par le journal organisateur, 5000 livres sterling, pour sauver son entreprise en difficulté. Quelques semaines après son départ, Donald Crowhurst, enchaîne les incidents techniques. Il abandonne secrètement la course tout en falsifiant son livre de bord et en transmettant par radio de fausses positions pour faire croire qu’il effectue réellement le tour du monde prévu. Ne pouvant s’imaginer rentrant au pays en ayant perdu son pari, ce qui le conduirait à la ruine, il sombre petit à petit dans la démence.

Le problème du Jour de mon retour est la mise en scène académique de James Marsh, que l’on a connu nettement plus inspiré. Si l’on comprend très vite ce qui a pu l’attirer dans ce projet, à savoir la détermination d’un homme qui entreprend de réaliser le rêve de sa vie envers et contre tous, tout en étant prêt à mettre sa vie en jeu, le récit fait malheureusement du surplace. Le cinéaste se retrouve piégé dès que son personnage principal se retrouve seul en mer à bord de son trimaran en bois de 12m, le Teignmouth Electron. Si l’utilisation des flashbacks tente de faire diversion, l’émotion a du mal à prendre. Colin Firth assure évidemment du début à la fin avec l’élégance qui le caractérise. Rachel Weisz, toujours aussi resplendissante, n’a pas grand-chose à défendre, mais le fait bien et avec une immense sensibilité.

Evidemment, cette histoire vraie, bien documentée et reconstituée ne laisse pas indifférent. C’est seulement que ce drame est bien trop sage et scolaire pour réellement convaincre et emporter pleinement l’adhésion.

LE DVD

Le Jour de mon retour n’est disponible qu’en DVD chez Studiocanal. Le test a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est fixe et musical.

L’éditeur n’avait visiblement pas beaucoup d’éléments à disposition puisque seul un making of de 4 minutes (en fait divisé en deux featurettes) est proposé comme bonus. L’occasion pour l’équipe de revenir brièvement sur l’histoire et les personnages.

L’Image et le son

Ce master restitue habilement l’omniprésence des gammes bleues avec l’horizon, les costumes, les éléments du décor. Les contrastes sont légers mais très beaux, le cadre large est superbe. Si quelques baisses de la définition demeurent constatables, le piqué reste très appréciable sur les scènes diurnes, les détails sont agréables, la clarté est de mise. Un transfert très élégant.

Deux pistes Dolby Digital 5.1 qui parviennent à embarquer le spectateur à bord du trimaran. Les ambiances naturelles ne manquent pas, surtout lors des tempêtes rencontrées par Donald Crowhurst où le caisson de basses s’anime également. Les voix sont solidement plantées sur la centrale, surtout en version originale, et la spatialisation musicale est systématique. Les sous-titres français sont imposés en anglais. Une piste Audiodescription est également proposée, ainsi que les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant.

Crédits images : © Studiocanal / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Game Night, réalisé par Jonathan Goldstein & John Francis Daley

GAME NIGHT réalisé par Jonathan Goldstein & John Francis Daley, disponible en DVD et Blu-ray le 22 août 2018 chez Warner Bros.

Acteurs : Jason Bateman, Rachel McAdams, Kyle Chandler, Sharon Horgan, Billy Magnussen, Lamorne Morris, Kylie Bunbury, Jesse Plemons, Michael C. Hall…

Scénario : Mark Perez

Photographie : Barry Peterson

Musique : Cliff Martinez

Durée : 1h40

Année de sortie : 2018

LE FILM

Pour pimenter leur vie de couple, Max et Annie animent un jeu une nuit par semaine. Cette fois ils comptent sur Brooks, le frère charismatique de Max, pour organiser une super soirée à thème autour du polar, avec vrais faux malfrats et agents fédéraux ! Brooks a même prévu de se faire enlever… sauf qu’il reste introuvable. En tentant de résoudre l’énigme, nos joueurs invétérés commencent à comprendre qu’ils se sont peut-être trompés sur toute la ligne. De fausse piste en rebondissement, ils n’ont plus aucun point de repère et ne savent plus s’il s’agit encore d’un jeu… ou pas. Cette nuit risque bien d’être la plus délirante – et la plus dangereuse – de toute leur carrière de joueurs…

Cela fait plus de trente ans que Jason Bateman (né en 1969) traverse le cinéma américain, en se spécialisant notamment dans la comédie. En tant que second rôle (Allumeuses !, Starsky et Hutch, Dodegball ! Même pas mal !, La Rupture, Hancock) ou au premier plan (Une famille très moderne, Comment tuer son boss ?, Echange standard, Arnaque à la carte), l’acteur a toujours su s’imposer. Son nom reste toutefois méconnu dans nos contrées, même si son visage illuminé par ses petits yeux ronds marque souvent les spectateurs. Pour Game Night, il retrouve les scénaristes de Comment tuer son boss ? (John Francis Daley) et Comment tuer son boss ? 2 (Jonathan Goldstein), déjà passés à la mise en scène en 2015 avec Vive les vacances. Game Night est une comédie savoureuse menée à cent à l’heure, interprétée par des acteurs survoltés menés par Jason Bateman donc, mais aussi par la sublime Rachel McAdams, qui se renvoient la réplique désopilante durant 1h40. Non seulement Game Night est l’un des films les plus drôles de l’année 2018 (la scène du chien tâché de sang est même hilarante), mais il est également excellemment mis en scène (la course à l’oeuf de Fabergé tournée en – faux – plan-séquence !) et se permet même de flirter avec le thriller et le polar, en convoquant notamment le désormais classique de David Fincher, The Game. Excellent jusqu’au générique de fin, également un grand morceau de bravoure.

Des amis se réunissent régulièrement chez Max et Annie pour jouer à des jeux de société. Leur voisin tente avec insistance de se faire inviter. Un jour, Max reçoit la visite de son frère Brooks qui a financièrement réussi dans la vie. Brooks les invite à une soirée de jeux qu’ils n’oublieront pas. Arrivés sur les lieux, ils apprennent que le gagnant de la soirée sera l’heureux propriétaire d’une voiture sport des années 1960. Quelques instants plus tard, un agent du FBI entre dans la maison, leur explique que des kidnappeurs sévissent dans le quartier et qu’ils n’ont que quelques heures pour libérer une personne grâce aux indices se trouvant dans un dossier qu’il leur remet. Deux hommes masqués font irruption dans la maison et enlèvent Brooks devant les yeux des invités qui observent la situation avec insouciance, croyant qu’il s’agit d’une mise en scène. Les kidnappeurs et le frère partis, les trois couples commencent à rechercher des indices.

Quel pied ! Non seulement Game Night est une comédie très bien écrite, mais la réalisation est aussi très inventive, les metteurs en scène transformant la ville d’Atlanta et sa banlieue résidentielle en véritable plateau de jeu de société. Les quiproquos s’enchaînent sur un rythme trépidant, la photo du chef opérateur Barry Peterson (21 Jump Street, Agents presque secrets) est très élégante et les acteurs y vont à fond. Si le couple principal est aussi génial que beau à regarder (forever Rachel…), Kyle Chandler s’éclate dans un rôle à contre-emploi, mais c’est surtout Jesse Plemons qui tire son épingle du jeu et vole toutes les scènes à chaque apparition dans la peau du voisin étrange de Max et Annie. Constamment vêtu de son uniforme de la police, son petit chien dans les bras et avec son faux air de Matt Damon, Jesse Plemons, vu dernièrement dans Pentagon Papers de Steven Spielberg et The Master de Paul Thomas Anderson, crève l’écran et campe l’un des personnages les plus marquants de l’année 2018 au cinéma.

Ce véritable jeu de pistes, gros succès aux Etats-Unis, mais relativement passé inaperçu en France, mérite une seconde chance chez nous, mais on parie que ce film burlesque, à l’humour noir revigorant et absurde parviendra à se faire une petite renommée.

LE BLU-RAY

Game Night tente une nouvelle percée en France avec sa sortie en DVD et Blu-ray chez Warner Bros. L’édition HD repose dans un boîtier écolo (moins de plastique donc) et la jaquette reprend le visuel de l’affiche français d’exploitation. Le menu principal est fixe et musical.

Edition minimaliste pour Game Night. C’est dommage. Il faudra se contenter d’un pseudo making-of (4’) composé d’images de tournage et d’interviews de l’équipe. On aurait aimé en savoir plus sur la création du plan-séquence de la course à l’oeuf !

L’interactivité se clôt sur un bêtisier (7’).

L’Image et le son

L’éditeur livre un Blu-ray parfait avec son lot de détails confondants sur le cadre large 2.40. La colorimétrie est sublime, la profondeur de champ est éloquente, les blancs brillants et les gros plans, tout comme les superbes panoramas sur Atlanta, bénéficient d’un piqué pointu au relief impressionnant. Les très nombreuses séquences nocturnes sont sublimes, fluides, avec de belles ambiances tamisées, des noirs denses et une restitution des textures appliquées. C’est ce qu’on appelle un transfert élégant.

Comme pour l’image, l’éditeur a soigné le confort acoustique et livre un mixage DTS-HD Master Audio 5.1 anglais, aussi percutant dans les scènes de poursuites que dans les échanges traditionnels. Les séquences sur le tarmac ou durant la course à l’oeuf peuvent compter sur une balance impressionnante des frontales comme des latérales. Les effets annexes sont très présents et dynamiques, les voix solidement exsudées par la centrale, tandis que le caisson de basses souligne efficacement chacune des actions au moment opportun. La spatialisation est en parfaite adéquation avec le ton du film. En revanche, la piste française, proposée dans un pauvre Dolby Digital 5.1, parvient à s’en sortir, même s’il n’y a pas de comparaison possible avec la version originale.

Crédits images : ©  2018 WARNER BROS. ENTERTAINMENT INC. AND RATPAC-DUNE ENTERTAINMENT LLC / Hopper Stone / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr