Test Blu-ray / Casino Royale, réalisé par John Huston, Kenneth Hughes, Val Guest, Robert Parrish & Joe McGrath

CASINO ROYALE réalisé par John Huston, Kenneth Hughes, Val Guest, Robert Parrish & Joe McGrath, disponible en Édition Blu-ray + DVD + DVD bonus + livre – Boîtier Mediabook le 18 octobre 2023 chez Rimini Editions.

Acteurs : Peter Sellers, Ursula Andress, David Niven, Orson Welles, Joanna Pettet, Daliah Lavi, Woody Allen, Deborah Kerr, William Holden, Charles Boyer, John Huston, Kurt Kasznar, George Raft, Jean-Paul Belmondo, Terence Cooper, Barbara Bouchet, Jacqueline Bisset…

Scénario : Wolf Mankowitz, John Law & Michael Sayers

Photographie : Jack Hildyard

Musique : Burt Bacharach

Durée : 2h11

Date de sortie initiale : 1967

LE FILM

Sir James Bond se repose dans son château d’Ecosse. C’est alors que les quatre chefs secrets des grandes puissances le supplient d’accomplir une dernière mission. Pour le convaincre, ils font sauter sa demeure. Le grand Bond se décide alors à agir et à démasquer celui qui fait peser une terrible menace sur le monde.

Passer en revue le pourquoi du comment le producteur Charles K. Feldman a pu obtenir les droits d’adaptation de la première aventure de James Bond écrite par Ian Fleming sera non seulement long, voire interminable, pas obligatoirement passionnant. Mais il est important de noter que Casino Royale, édité au Royaume-Uni en 1953 – il faudra attendre 1960 pour la première traduction française, infidèle et incomplète, qui sortira sous le titre Espions, faites vos jeux – avec un succès foudroyant avait connu une première transposition, non pas au cinéma, mais pour le petit écran, dès l’année suivante sur la chaîne CBS. Dans cet épisode de la série intitulée Climax !, filmé et diffusé en direct, l’américain Barry Nelson est donc le premier à incarner James Bond, « américanisé » pour l’occasion, puisqu’il devient ici un agent de la CIA, tandis que Clarence Leiter (et non pas Felix) est lui un agent britannique au service de sa Majesté. Un téléfilm de 50 minutes, divisé en trois actes, permettant ainsi un changement de décor durant les publicités. 1962, hit inattendu de James Bond 007 contre Dr No, 1963, grand succès de Bons baisers de Russie, 1964, triomphe de Goldfinger, 1965, phénomène mondial d’Opération Tonnerre. EON Productions ne disposant pas des droits pour le cinéma de Casino Royale et refusant de s’associer avec Charles K. Feldman, ce dernier décide de faire cavalier seul et lance son projet personnel avec l’aide de Columbia Pictures. Ce sera l’un des tournages de films les plus catastrophiques avec pas moins de cinq metteurs en scène à la barre Val Guest, Kenneth Hughes, John Huston, Joseph McGrath et Robert Parrish, des comédiens qui vont et viennent, quand ils ne se volatilisent pas complètement dans la nature comme Peter Sellers, sans compter le budget qui explose en raison de cette valse de réalisateurs et d’acteurs, les retards accumulés…Cette parodie, pensée finalement ainsi afin de ne pas s’opposer au « vrai » 007 qui disposait alors de moyens pharaoniques et des meilleurs techniciens du cinéma anglais, connaîtra malgré tout un beau succès dans le monde entier durant les fêtes de Noël. Aujourd’hui, Casino Royale se regarde comme un témoignage d’une époque bien révolue, marquée sur le fond et sur la forme par un psychédélisme difficile à supporter, pas déplaisant, mais bourratif, parfois écoeurant à force de faire ingurgiter aux spectateurs tout et n’importe quoi. Casino Royale est et restera une curiosité couchée sur pellicule, dans laquelle de grands noms du cinéma s’entrecroisent avec un air crispé, trouvant visiblement le temps long, à l’exception de Woody Allen, qui comme dans Quoi de neuf, Pussycat ?, imputable au même producteur, vole la vedette à tous ses partenaires. Il est probablement le seul véritable intérêt de ce pastiche, étant pleinement dans son élément. Quant au scénario, découpé, rapiécé, trahi, agrémenté par des improvisations, réécrit, il ne faut pas en attendre beaucoup et renvoie aux innombrables problèmes rencontrés durant la confection de ce vilain petit canard.

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Test Blu-ray / One Ranger, réalisé par Jesse V. Johnson

ONE RANGER réalisé par Jesse V. Johnson, disponible en DVD & Blu-ray le 3 octobre 2023 chez Metropolitan Vidéo.

Acteurs : Thomas Jane, Dean Jagger, Dominique Tipper, Jess Liaudin, Rachel Wilde, Nick Moran, Patrick Bergin, John Malkovich…

Scénario : Jesse V. Johnson

Photographie : Simon Rowling

Musique : Sean Murray

Durée : 1h36

Date de sortie initiale : 2023

LE FILM

Alex Tyree, un ranger texan, traque un voleur de banque à travers le désert. Il est rejoint dans sa chasse par un agent britannique qui lui apprend que le criminel est un dangereux terroriste préparant une attaque à Londres. Le Texas Ranger s’envole pour la capitale britannique pour poursuivre la traque avec l’aide du MI6.

Depuis Buffy, tueuse de vampiresBuffy the Vampire Slayer de Fran Rubel Kuzui, il en a fait du chemin Thomas Jane ! Étrange carrière d’ailleurs, puisque sa filmographie mélange John Woo, Albert Pyun, Paul Thomas Anderson, Renny Harlin, Terrence Malick, Amos Gitaï, Frank Darabont, Russell Mulcahy, Lisa Azuelos (oui oui), Gregg Araki et bien d’autres. Mais depuis quelques années, le comédien semble avoir privilégié les productions sans envergure comme Slayers, Vendetta et Anti-Life (avec Bruce Willis), sur lesquels l’auteur de ces mots était revenu et vous invite à vous rendre compte de la catastrophe. Pourtant, chaque fois ou presque, Thomas Jane parvient à tirer son épingle du jeu. Son charisme n’a eu de cesse de s’accentuer avec l’âge et à l’instar d’Arnold Schwarzenegger ou The Rock, il se dégage toujours une décontraction attachante, une légèreté contagieuse, comme si lui-même n’était pas dupe de la qualité du bousin qu’il est en train de tourner. Cependant, One Ranger n’est assurément pas une daube. Il s’agit même d’une série B fort plaisante, inspirée par Un shérif à New YorkCoogan’s Bluff (1969) de Don Siegel, réalisée par Jesse V. Johnson, qui nous avait déjà assez emballé l’année dernière avec White Elephant, une des meilleures « williseries » de fin de parcours, avec un superbe Michael Rooker, John Malkovich et Olga Kurylenko. S’il n’a pas ce qu’on pourrait appeler une « griffe », le réalisateur a tout du moins un certain style, très efficace dans son genre, ce qui lui a permis de diriger des pointures de l’action comme Tony Jaa (Triple Threat), Scott Adkins (The Cash Collector) et Steve Austin (Killers Game). On ne s’ennuie pas une seconde devant One Ranger, thriller d’action marqué par quelques touches d’humour, bien interprété par un Thomas Jane en grande forme et qui a l’air de s’amuser, dont le tandem avec Dominique Tipper, également sa partenaire dans la série à succès The Expanse renvoie aux buddy-movies des années 1980. Un divertissement qui à défaut d’être original demeure éminemment sympathique.

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Test Blu-ray / La Guerre des gangs, réalisé par Umberto Lenzi

LA GUERRE DES GANGS (Milano Rovente) réalisé par Umberto Lenzi, disponible le 31 octobre 2023 en DVD et Combo Blu-ray + DVD chez Elephant Films.

Acteurs : Antonio Sabàto, Philippe Leroy, Antonio Casagrande, Carla Romanelli, Alessandro Sperli, Franco Fantasia, Tano Cimarosa, Marisa Mell…

Scénario : Franco Enna & Umberto Lenzi, d’après une histoire originale d’Ombretta Lanza

Photographie : Lamberto Caimi

Musique : Carlo Rustichelli

Durée : 1h40

Année de sortie : 1973

LE FILM

Salvatore Cangemi gère un réseau de prostitution à Milan tout en se faisant passer pour un marchand de légumes sans histoire. Quand il refuse une proposition d’un trafiquant français nommé Roger Daverty, c’est toutes les affaires de Cangemi qui risquent de s’écrouler…

Après une année 1972 plus que chargée avec pas moins de trois longs-métrages, Le Tueur à l’orchidée Sette orchidee macchiate di rosso, Au pays de l’exorcisme Il paese del sesso selvaggio et Le Couteau de glace Il coltello di ghiaccio, Umberto Lenzi ralentit un peu la cadence, mais continue dans le genre thriller avec La Guerre des gangs Milano rovente (littéralement « Milan à feu et à sang »). Le réalisateur cosigne le scénario avec Franco Enna (Cadavere per signora de Mario Mattoli, La Dernière chance de Maurizio Lucidi) et place son récit dans le chef-lieu de la Lombardie, dans ses rues froides et noires de monde (et éclairées par les néons publicitaires), dans lesquelles s’affrontent des trafiquants de drogue et un gang de proxénètes, qui ne pouvant trouver un terrain d’entente, décident de se livrer à une guerre sans fin. Excellent opus d’el signore Lenzi, La Guerre des gangs, à ne pas confondre avec le film de Lucio Fulci, Luca il contrabbandiere, baptisé de la même façon sept ans plus tard lors de sa sortie en France, bénéficie d’un casting soigné mené par Antonio Sabàto (ne pas oublier l’accent), découvert en 1966 dans Grand Prix de John Frankenheimer. Si son visage dira quelque chose aux amateurs de westerns transalpins (Aujourd’hui ma peau, demain la tienne, Deux fois traître), le comédien venait de trouver l’un de ses rôles les plus célèbres dans Le Tueur à l’orchidée, déjà mis en scène par Umberto Lenzi. Le film repose solidement sur ses épaules, ainsi que sur sa moustache (c’était alors la mode), mais aussi sur un bon antagoniste en la personne de Philippe Leroy, qui avait donné la réplique à son partenaire dans son premier film, Lo Scandalo d’Anna Gobbi, sept ans auparavant. Ils jouent cette fois à égalité et se partagent l’affiche de ce polar bourré de charme, sec, brutal. Un bon spectacle représentatif du cinéma d’exploitation italien.

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Test Blu-ray / Poker Face, réalisé par Russell Crowe

POKER FACE réalisé par Russell Crowe, disponible en DVD & Blu-ray le 11 octobre 2023 chez Wild Side Video.

Acteurs : Russell Crowe, Liam Hemsworth, RZA, Aden Young, Steve Bastoni, Daniel MacPherson, Brooke Satchwell, Paul Tassone, Elsa Pataky…

Scénario : Russell Crowe & Stephen M. Coates

Photographie : Aaron McLisky

Musique : Matteo Zingales & Antony Partos

Durée : 1h34

Date de sortie initiale: 2022

LE FILM

Dans le monde du poker à gros enjeux et de la finance internationale, un milliardaire de la technologie prend de gros risques…

Cela arrive parfois. On se dit, « tiens il devient quoi ce bon vieux Russell Crowe ? ». Le lauréat de l’Oscar du meilleur acteur pour Gladiator (2000) a pourtant toujours été présent, même si moins sur le devant de la scène ou dans des rôles plus étoffés, comme si le comédien néo-zélandais avait été obligé de prendre du ventre pour apporter une épaisseur aux personnages moins ambitieux qu’on lui offrait d’interpréter. S’il a bossé avec Ridley Scott, Paul Haggis, Tom Hooper, Zack Snyder, Darren Aronofsky et Shane Black, Russell Crowe n’a plus cette stature ou cette aura qui l’accompagnaient à la bonne époque de Révélations The Insider de Michael Mann, Master and Commander : De l’autre côté du monde Master and Commander: The Far Side of the World de Peter Weir et Un homme d’exception A Beautiful Mind de Ron Howard. Hormis l’enthousiasmant Enragé Unhinged de Derrick Borte, ce n’est pas sa minable participation au pitoyable Thor: Love and Thunder de Taika Waititi qui redorera son blason. Qu’à cela ne tienne, le sieur Crowe décide de repasser lui-même derrière la caméra, vingt ans après avoir tâté du documentaire (Texas, 60 Odd hours in Italy), avec le drame historique La Promesse d’une vie The Water Diviner (2014), dans lequel il s’octroie le rôle principal aux côtés d’Olga Kurylenko. Le film obtient de bonnes critiques, mais passe complètement inaperçu. Russell Crowe réitère l’expérience avec Poker Face, étrange thriller qu’il a coécrit avec Stephen M. Coates. Pourquoi « étrange », car Poker Face semble constamment avoir le cul entre deux chaises, autrement dit hésiter entre divers genres, sans véritablement trancher et qui paraît survoler plusieurs sujets du début à la fin, sans chercher à approfondir quoi que ce soit. Accompagné d’avis négatifs, Poker Face n’est pourtant pas déshonorant, surtout au niveau de la mise en scène, élégante et même parfois stylisée, mais le fond demeure tellement opaque que beaucoup de spectateurs risquent d’être décontenancés voire découragés d’aller à la fin. À vous de voir.

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Test Blu-ray / L’Enfer de la drogue – El Pico, réalisé par Eloy de la Iglesia

L’ENFER DE LA DROGUE (El Pico) réalisé par Eloy de la Iglesia, disponible en coffret Cinéma Quinqui de Eloy de la Iglesia – Coffret 3 films : Colegas + El Pico + El Pico 2 le 5 septembre 2023 chez Artus Films.

Acteurs : José Luis Manzano, José Manuel Cervino, Luis Iriondo, Enrique San Francisco, Andrea Albani, Queta Ariel, Marta Molins, Pedro Nieva Parola, Alfred Lucchetti, Guillermo Reinlein, Marta Pérez Ferrándiz…

Scénario : Gonzalo Goicoechea & Eloy de la Iglesia

Photographie : Hans Burmann

Musique : Luis Iriondo

Durée : 1h45

Date de sortie initiale : 1983

LE FILM

Dans le Bilbao du début des années 80, Paco et Urko, deux adolescents en rupture de ban délaissent leurs études pour les paradis artificiels, partageant tous deux la couche de Betty, une jeune prostituée qui va les initier à l’héroïne. De consommateurs, ils deviennent trafiquants, rapidement emportés dans une spirale criminelle qui va frapper de plein fouet leurs familles respectives.

Reprenons où nous en étions. Suite à l’engouement rencontré par Colegas en 1982, le réalisateur Eloy de la Iglesia continue sur sa lancée et s’apprête à connaître son plus grand succès et probablement l’opus le plus emblématique du cinéma quinqui avec El Pico, exploité en France sous le titre L’Enfer de la drogue ou Dose mortelle. L’accent est mis cette fois sur le fléau représenté par la dope qui circulait alors abondamment en Espagne et plus particulièrement dans les banlieues (mais pas que) où les jeunes étaient déjà livrés à eux-mêmes. Triomphe populaire, à tel point que le film est encore très largement diffusé à la télévision ibérique, El Pico est un drame foudroyant qui comme un panneau en introduction l’indique « est inspiré de faits réels librement transposés par l’imagination des auteurs ». Que faire de la liberté nouvellement acquise après la disparition de Franco ? « Je croyais qu’on était libres maintenant » annonce un personnage dans les premières minutes d’El Pico, qui avec une réalité quasi-documentaire dépeint la chute inexorable de deux fils à la vie diamétralement opposée, l’un étant le fils d’un commandant de gendarmerie et l’autre celui d’un député nationaliste basque, soudés par une amitié indéfectible et qui vont prendre le chemin de la seringue plantée dans le bras. « On sait se contrôler, on n’est pas des débiles » déclarent-ils quand ils veulent juste essayer au début et en prendre de temps en temps quand ils se sentent largués. Inévitablement, Paco et Urko entament sans véritablement se rendre compte, un aller simple pour l’enfer. Remarquable long-métrage d’Eloy de la Iglesia, metteur en scène et auteur à voir comme le chaînon manquant entre Pier Paolo Pasolini et Rainer Werner Fassbinder, El Pico deviendra un tel phénomène de société qu’une suite sera écrite, produite et mise en scène dès l’année suivante. Une immense (re)découverte s’impose dans nos contrées.

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Test Blu-ray / Quoi de neuf, Pussycat ?, réalisé par Clive Donner

QUOI DE NEUF, PUSSYCAT ? (What’s New, Pussycat?) réalisé par Clive Donner, disponible en combo Blu-ray + DVD le 7 novembre 2023 chez Rimini Editions.

Acteurs : Peter Sellers, Peter O’Toole, Romy Schneider, Capucine, Paula Prentiss, Woody Allen, Ursula Andress, Eddra Gale…

Scénario : Woody Allen

Photographie : Jean Badal

Musique : Burt Bacharach

Durée : 1h44

Date de sortie initiale : 1965

LE FILM

Rédacteur en chef d’une grande revue féminine parisienne, Michael James passe ses journées entouré de femmes superbes. Bien qu’il soit amoureux de la jolie Carole Werner, les autres beautés de son entourage ne le laissent pas indifférent. Pour tenter de s’amender, il consulte le psychiatre Fritz Fassenbender. Malheureusement pour James, le docteur est encore plus fou que lui et entraîne ses patients dans une spirale infernale de folie et de romance.

Peter Sellers, Romy Schneider, Capucine, Paula Prentiss, Woody Allen, Ursula Andress, ils sont tous réunis à la même affiche de Quoi de neuf, Pussycat ?What’s New, Pussycat?, comédie complètement déjantée réalisée par Clive Donner, d’après un scénario de Woody Allen. Le film étant entièrement tourné en France, au fameux Castel Henriette dans les Hauts-de-Seine, au Château de Chaumontel et à Luzarches dans le Val-d’Oise, et bien sûr à Paris (dont La Closerie des Lilas), il n’est donc pas étonnant de voir le casting anglo-saxon donner la réplique à Michel Subor, Jacques Balutin, Robert Rolis, Daniel Emilfork et même à Françoise Hardy dans la dernière scène. Quoi de neuf, Pussycat ? fait penser au buffet à volonté d’un traiteur asiatique. Le choix est vaste, immense, on blinde son assiette sur plusieurs étages, on engouffre le tout sans forcément se rendre compte du mélange hétérogène auquel on s’adonne, avant de lécher son auge et de repartir se servir pour un second service. Si l’on finit enfin par être rassasié, l’estomac en a pris un coup, le souffle est court, la fatigue nous assomme, on se sent barbouillé, mais heureux. C’est ça What’s New, Pussycat?, on en prend plein les mirettes, c’est souvent lourd et pesant, mais les ingrédients foutraques fonctionnent malgré tout et si l’ingestion pointe effectivement en fin de parcours, on ne peut s’empêcher d’aimer cette fantaisie frappadingue, qui marque les débuts au cinéma, comme scénariste et comédien d’Allan Stewart Konigsberg, plus connu sous le nom de Woody Allen.

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Test Blu-ray / Stars at Noon, réalisé par Claire Denis

STARS AT NOON réalisé par Claire Denis, disponible en DVD et Blu-ray le 17 octobre 2023 chez Ad Vitam.

Acteurs : Margaret Qualley, Joe Alwyn, Benny Safdie, Danny Ramirez, Nick Romano, Stephan Proaño, Monica Bartholomew, Carlos Bennett…

Scénario : Claire Denis, Andrew Litvack & Léa Mysius, d’après le roman de Denis Johnson « Des étoiles à midi »

Photographie : Éric Gautier

Musique : Tindersticks

Durée : 2h17

Date de sortie initiale : 2023

LE FILM

En 2020, Trish, une jeune journaliste américaine en détresse bloquée sans passeport dans un Nicaragua en pleine période électorale rencontre dans un bar d’hôtel Daniel, un voyageur anglais. Il lui semble être l’homme rêvé pour l’aider à fuir le pays. Mais elle réalise trop tard qu’au contraire, elle entre à ses côtés dans un monde plus trouble, plus dangereux.

Depuis les années 1990, Claire Denis poursuit son travail sur le même rythme, à raison de quatre longs-métrages par décennie, même s’il est évident que la réalisatrice a accéléré la cadence après le crépusculaire Les Salauds en 2013, en signant dans un espace de temps limité Un beau soleil intérieur, High Life, Avec amour et acharnement (Ours d’argent de la meilleure réalisation au Festival de Berlin) et Stars at Noon. Le dernier en date, présenté en sélection officielle au Festival de Cannes 2022 où le film a remporté le Grand Prix, est l’adaptation du roman – largement autobiographique – Des étoiles à midi (écrit en 1986 et dont l’action était située en pleine révolution sandiniste au Nicaragua) de l’écrivain américain Denis Johnson (décédé en 2017). Cela faisait longtemps que Claire Denis cherchait à transposer l’un de ses livres, ayant rencontré l’auteur, qui ne voulait pas s’impliquer dans ce projet. La mort de Denis Johnson pendant le tournage en Allemagne de High Life aura accéléré la mise en chantier de Stars at Noon. La cinéaste confie le rôle principal à la magnifique Margaret Qualley, fille de l’actrice Andie MacDowell (et ça se voit), révélée dans Palo Alto de Gia Coppola, qui a ensuite confirmé son talent dans l’indispensable série The Leftovers, avant d’enchaîner avec The Nice Guys de Shane Black et Once Upon a Time… in Hollywood de Quentin Tarantino, dans lequel Claire Denis l’a repérée, en sachant immédiatement qu’elle la voulait pour camper la nébuleuse Trish. Celle-ci s’en remet totalement à la réalisatrice, se met à nu, en sens propre comme au figuré. N’attendez pas de grandes explications sur les motivations des personnages, d’ailleurs en ont-ils vraiment, mais il est important que le spectateur sache qu’il lui sera indispensable de se laisser aller au gré de cette succession de scènes plus ou moins liées entre elles, sans véritable enjeu dramatique. Les 135 minutes pourront paraître interminables à certains, fascinantes pour d’autres, déconcertantes aussi. Stars at Noon ne laisse pas indifférent et l’on peut autant rejeter les protagonistes qu’être envoûté par un montage hypnotique et la beauté de la photographie d’Éric Gautier (Avec amour et acharnement, La Vérité, Le Jour de mon retour, Ceux qui m’aiment prendront le train, Into the Wild), sans oublier la composition du fidèle groupe Tindersticks. En l’état, Stars at Noon peut se voir uniquement pour la subjuguante Margaret et c’est déjà beaucoup.

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Test Blu-ray / Misanthrope, réalisé par Damián Szifron

MISANTHROPE (To Catch a Killer) réalisé par Damián Szifron, disponible en DVD & Blu-ray le 3 octobre 2023 chez Metropolitan Vidéo.

Acteurs : Shailene Woodley, Ben Mendelsohn, Ralph Ineson, Jovan Adepo, Rosemary Dunsmore, Michael Cram, Darcy Laurie, Christian Jadah…

Scénario : Damián Szifron & Jonathan Wakeham

Photographie : Javier Julia

Musique : Carter Burwell

Durée : 1h59

Date de sortie initiale : 2023

LE FILM

Eleanor, une jeune enquêtrice au lourd passé, est appelée sur les lieux d’un crime de masse terrible. La police et le FBI lancent une chasse à l’homme sans précédent, mais face au mode opératoire constamment imprévisible de l’assassin, l’enquête piétine. Eleanor, quant à elle se trouve de plus en plus impliquée dans l’affaire et se rend compte que ses propres démons intérieurs peuvent l’aider à cerner l’esprit de ce tueur si singulier…

En cette année cinématographique dominée par le rose fluo et les teintes acidulées de Barbie et Super Mario Bros, le film, cela fait du bien d’aller voir ce qui s’est fait de mieux dans le noir, le sombre et le poisseux. Et Misanthrope est assurément le thriller de l’année. Ne cherchez plus, vous avez entre les mains et devant les yeux le polar de 2023, celui qui va vous clouer à votre siège, vous mettre les nerfs à rude épreuve et qui vous restera un bon bout de temps en tête. Misanthrope To Catch a Killer est le premier long-métrage américain de l’excellent réalisateur argentin Damián Szifrón (né en 1975), révélé en 2014 avec Les Nouveaux SauvagesRelatos salvajes, film à sketches présenté en sélection officielle au Festival de Cannes, sélectionné pour représenter l’Argentine à l’Oscar du meilleur film en langue étrangère et primé huit fois aux prix Platino. Autant dire qu’on attendait de ses nouvelles et il aura donc fallu attendre près de dix ans pour en avoir, mais cela valait le coup. Misanthrope n’est pas adapté d’un roman, mais bel et bien issu d’un scénario original coécrit par Damián Szifrón (aussi monteur) et Jonathan Wakeham, qui situe son action à Baltimore, même si le film a entièrement été tourné au Canada, à Québec et à Montréal. De la première à la dernière scène, de la première à la dernière seconde, Misanthrope capte l’attention, hypnotise par sa mise en scène, emballe par l’intense interprétation du tandem principal, Shailene Woodley, également productrice et Ben Mendelsohn, toujours aussi fascinant. Indispensable.

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Test Blu-ray / Daniel, réalisé par Sidney Lumet

DANIEL réalisé par Sidney Lumet, disponible en combo Blu-ray + DVD le 14 octobre 2023 chez Spectrum Films.

Acteurs : Timothy Hutton, Mandy Patinkin, Lindsay Crouse, Edward Asner, Ellen Barkin, Julie Bovasso, Tovah Feldshuh, Amanda Plummer…

Scénario : E.L. Doctorow, d’après son roman Le Livre de Daniel (« The Book of Daniel »)

Photographie : Andrzej Bartkowiak

Musique : Bob James

Durée : 2h05

Date de sortie initiale : 1983

LE FILM

Au milieu des années 50, Rochelle et Paul, communistes américains, ont été accusés d’espionnage au profit de l’URSS. Quinze ans plus tard, leur fille Susan devient militante politique. Son frère Daniel cherche à oublier. Mais, suite à un événement tragique, il doit se replonger dans l’histoire familiale…

À plusieurs reprises dans son ouvrage démentiel intitulé Making Movies, Sidney Lumet (1924-2011) indique que son film préféré parmi ceux qu’il a fait demeure Daniel, sorti sur les écrans en 1983. Manque de chance pour celles et ceux qui voulaient découvrir le 31è long-métrage en question, Daniel est resté très rare, pour ne pas dire quasi-invisible pendant près de quarante ans. Il aura donc fallu attendre 2023 pour que l’auteur de ces mots, dont l’admiration n’a d’égale que la passion qu’il éprouve pour le cinéma de Sidney Lumet, puisse découvrir ce trésor caché. Effectivement, Daniel est un chef d’oeuvre incontestable, un de plus à afficher au palmarès de l’auteur de Douze hommes en colère, L’Homme à la peau de serpent, Point limite, La Colline des hommes perdus, The Offence, Serpico, Un après-midi de chien…c’est bon ou il vous en faut plus ? Les années 1980, souvent considérées (à tort) comme étant moins prestigieuses que la précédente décennie pour le réalisateur, s’ouvre sur une comédie-romantique élégante, Just Tell Me What You Want, avec Ali MacGraw, sans doute l’un de ses films les plus méconnus. Sidney Lumet enchaîne alors trois films, qui sortiront entre août 1981 et décembre 1982, Le Prince de New YorkPrince of the City, monument de sa filmographie, l’imparable Piège mortelDeathtrap, avec Christopher Reeve et Michael Caine, puis Le Verdict The Verdict, qui sera son plus grand succès commercial. N’étant pas du genre à se reposer sur les lauriers, Sidney Lumet parvient enfin à produire un film qu’il tentait de mettre en route depuis plus de dix ans, Daniel, adapté du livre d’E. L. Doctorow, qui avait déjà vu deux de ses romans être adaptés au cinéma, Frontière en flammes Welcome to Hard Times de Burt Kennedy, avec Henry Fonda, et surtout Ragtime de Miloš Forman, avec James Cagney, Mary Steenburgen et Elizabeth McGovern. Le cinéaste et l’écrivain s’associent à Burtt Harris, qui produira Sidney Lumet durant dix ans, puis avec Paramount pour mettre Daniel en chantier. Drame dont la structure rappelle parfois celle du Parrain II en croisant le passé et le présent, en suivant deux générations, Daniel est à la fois un portrait intime, l’histoire d’une époque, un plaidoyer contre la peine de mort, une fresque familiale condensée en 120 minutes. Un cadeau pour les grands amoureux du septième art.

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Test Blu-ray / Bunker Palace Hotel, réalisé par Enki Bilal

BUNKER PALACE HOTEL réalisé par Enki Bilal, disponible en combo Blu-ray + DVD + DVD de bonus le 17 octobre 2023 chez Rimini.

Acteurs : Jean-Louis Trintignant, Carole Bouquet, Jean-Pierre Léaud, Benoît Régent, Yann Collette, Maria Schneider, Roger Dumas…

Scénario : Enki Bilal & Pierre Christin

Photographie : Philippe Welt

Musique : Arnaud Devos et Philippe Eidel

Durée : 1h31

Date de sortie initiale : 1989

LE FILM

C’est la guerre. On ne sait qui se bat, ni où, ni quand. Des personnalités importantes, hauts dignitaires du régime en train de tomber, se terrent dans un bunker transformé en hôtel, et attendent le Président. Les heures passent et ce dernier n’arrive pas. Une révolutionnaire aux cheveux rouges et aux pantalons trop grands, a elle, réussi à s’infiltrer.

En 1989, Enki Bilal, 38 ans, est un nom réputé de la bande dessinée. Lauréat du grand prix du festival d’Angoulême en 1987, il a entre autres, déjà publié deux albums de sa trilogie Nikopol, La Foire aux immortels et La Femme piège. Ses dystopies érigeant en art la décrépitude et le chaos, il les façonne à la peinture grise, dont la légende raconte qu’il la mélange à la cendre de ses cigares. Grand passionné de cinéma depuis l’enfance, Enki Bilal va sans surprise, mettre en mouvement ce style si reconnaissable à la fin des années 1980 dans un premier film co-écrit avec son complice de longue date, Pierre Christin. Bunker Palace Hôtel, pourtant, n’était pas destiné à devenir un long-métrage. Le projet d’Enki Bilal était de le faire figurer dans un film à sketches mêlant les univers de divers illustrateurs de BD. Ces derniers ne suivant pas, Bilal se retrouve seul avec sur les bras, un traitement de plusieurs pages qui contre toute attente, tape dans l’oeil d’un producteur indépendant, Maurice Bernart. Il décide de financer le film d’Enki Bilal, mais uniquement sous forme de long-métrage. Cet acte de naissance, argueront les détracteurs de Bunker Palace Hôtel, expliquerait la langueur et l’aridité du film. Soit les arguments récurrents avancés par celles et ceux qui n’ont pas su voir dans ces caractéristiques ce qui précisément, en fait la valeur.

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