Test DVD / Déclic et des claques, réalisé par Philippe Clair

DÉCLIC ET DES CLAQUES réalisé par Philippe Clair, disponible uniquement en coffret DVD Plus drôle que ça tu meurs !!! – 10 comédies cultes de Philippe Clair le 5 novembre 2024 chez Cinéfeel.

Acteurs : Annie Girardot, Mike Marshall, Philippe Clair, Georges Blaness, André Nader, Robert Gadel, Muriel Baptiste, Carla Marlier, Renée Saint-Cyr, Enrico Macias, Darry Cowl, Pierre Doris, Marthe Villalonga…

Scénario : Philippe Clair & André Nader

Photographie : Jean Malige

Musique : Raymond Lefèvre

Durée : 1h20

Date de sortie initiale : 1965

LE FILM

Des jeunes pieds noirs venus d’Alger débarquent à Paris. L’un d’eux fait la connaissance d’une jeune fille riche, qui cherche un sens à sa vie.

C’est donc ici que démarre la carrière cinématographique de Philippe Clair (1930-2020), de son vrai nom Prosper Charles Bensoussan. Comme réalisateur du moins, puisqu’il était déjà apparu dans Des gens sans importance (1956) d’Henri Verneuil, Babette s’en va-t-en guerre (1959) de Christian-Jaque, ainsi que dans une poignée de séries et téléfilms. Né au Maroc, débarquant à Paris dans les années 1950, il intègre le Conservatoire national supérieur d’art dramatique. De fil en aiguille, il joue dans des classiques du répertoire, mais monte très vite ses propres spectacles et rencontre un grand succès sur scène, notamment avec la parodie du Cid d’Edmond Brua, réalisée en argot pied-noir, d’après la pièce de Corneille écrite en vers, qui sera adaptée en 1979 par Philippe Clair lui-même sous le titre Rodriguez au pays des merguez. Ce triomphe l’amène tout naturellement au cinéma. C’est ainsi qu’en mars 1965 déboule sur les écrans Déclic et des claques, connu aussi sous le titre L’Esbrouffe, coécrit, interprété et réalisé par Philippe Clair donc, qui condense tout l’humour judéo-arabe qui a fait sa renommée au théâtre. Disons-le immédiatement, ce premier long-métrage est une sacrée bonne surprise et découverte. Accompagné de ses amis, Philippe Clair apparaît comme un typhon humain et son énergie dévastatrice est on ne peut plus étonnante dans le septième art hexagonal au mi-temps des années 1960. Considéré aujourd’hui comme étant une grande source d’inspiration pour La Vérité si je mens ! de Thomas Gilou, Déclic et des claques se permet même d’annoncer The Party de Blake Edwards au cours d’une cérémonie de mariage qui tourne à la quasi-orgie. Une longue séquence tout simplement hallucinante, où il se déroule mille choses, où beaucoup nous échappent aussi d’ailleurs, le tout mené par Philippe Clair (sur une musique endiablée du maestro Raymond Lefèvre et avec un certain Claude Zidi à la caméra), qui s’offre le luxe de diriger, de donner la réplique et de courtiser la belle et sexy Annie Girardot (entre Le Mari de la femme à barbe de Marco Ferreri et Trois Chambres à Manhattan de Marcel Carné), visiblement ravie de participer à ce délire hors-norme.

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Test Blu-ray / Une robe noire pour un tueur, réalisé par José Giovanni

UNE ROBE NOIRE POUR UN TUEUR réalisé par José Giovanni, disponible en DVD & Blu-ray le 17 mai 2024 chez Coin de Mire Cinéma.

Acteurs : Annie Girardot, Claude Brasseur, Bruno Cremer, Jacques Perrin, Catherine Allégret, Albina du Boisrouvray, Jacques Maury, François-Eric Gendron, Arielle Dombasle…

Scénario : José Giovanni & Monique Lange

Photographie : Jean-Paul Schwartz

Musique : Olivier Dassault

Durée : 1h47

Date de sortie initiale : 1981

LE FILM

À l’issue de son procès, Simon Risler est condamné à mort pour le meurtre d’un policier. Le témoignage de l’inspecteur Reynolds a fait pencher la balance en faveur d’un verdict d’autant plus sévère qu’il est parfaitement injustifié. L’inspecteur a, en effet, commis un parjure à travers son faux témoignage. Pour échapper à la peine capitale, Simon Risler prend le procureur en otage. Blessé au cours de son évasion, il parvient toutefois à se rendre au domicile de son avocate, Florence Nat. Un ami de celle-ci, Alain Rivière, accepte de « planquer » le fugitif. Pendant ce temps, Florence essaie de faire la lumière sur l’affaire qui a failli coûter la vie à son client. Comme par hasard, les témoins les plus précieux disparaissent les uns après les autres…

C’est la fin du règne d’Annie Girardot sur le cinéma français. Nous sommes en 1981 et Une robe noire pour un tueur sera l’un de ses derniers « succès » personnels au box-office après vingt ans où la comédienne ne cessait d’enchaîner les triomphes depuis Rocco et ses frères de Luchino Visconti. D’ailleurs, Cause toujours, tu m’intéresses d’Édouard Molinaro n’avait guère brillé deux ans auparavant avec 685.000 entrées. Une robe noire pour un tueur fera encore moins en cette année où cartonnent Les Aventuriers de l’arche perdue, Le Professionnel, Pour la peau d’un flic, Diva…les comédies ont la cote aussi avec La Chèvre (qui se placera sur la première place du podium), Le Maître d’école, La Soupe aux choux, Viens chez moi, j’habite chez une copine, Tais-toi quand tu parles, Les Hommes préfèrent les grosses…les goûts changent, comme les époques….C’est un revers pour José Giovanni dont Les Égouts du paradis avait encore attiré plus de 850.000 spectateurs en 1979, même si Comme un boomerang avait déçu, surtout pour un gros film porté par Alain Delon. S’il se refera avec Le Ruffian deux ans plus tard, le réalisateur, auteur, scénariste (et ancien repris de justice, par ailleurs condamné à mort, avant d’être finalement gracié) signe avec Une robe noire pour un tueur l’un des derniers opus et représentants d’un genre, avant que le polar hexagonal mute et laisse place aux thrillers d’action inspirés de ceux provenant d’outre-Atlantique, ce qui causera aussi la perte de Bebel et Delon peu de temps après également. Ce drame judiciaire patine beaucoup et le scénario peine à maintenir un intérêt du début à la fin, l’ensemble reposant essentiellement sur un casting quatre étoiles et qui à lui seul vaut largement le déplacement.

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Test Blu-ray / L’Autre femme, réalisé par François Villiers

L’AUTRE FEMME réalisé par François Villiers, disponible en Blu-ray le 13 mars 2024 chez Gaumont.

Acteurs : Annie Girardot, Francisco Rabal, Alida Valli, Richard Johnson, Hella Petri, Antonio Casas, Cándida Losada, Ana Mariscal, Sancho Gracia…

Scénario : Rémo Forlani, Paul Gégauff, Jacques Sigurd & François Villiers, d’après le roman de Luisa-María Linares

Photographie : Manuel Berenguer & Cecilio Paniagua

Musique : Georges Delerue

Durée : 1h26

Date de sortie initiale : 1964

LE FILM

Agnès, une jeune décoratrice d’intérieur, arrive dans une petite île espagnole pour réaménager la maison d’un certain Zaylor située à l’Enseralda, un village isolé. Sur le chemin, elle rencontre Daniel, un homme qui provoque l’hostilité des gens qui l’entourent.

L’Autre femme, rien à voir avec la célèbre chanson éponyme de Michel Sardou « Petit duplex au Sacré-Cœur, Et le complexe du bonheur… », mais il s’agit d’un film réalisé par François Villiers (1920-2009). Ce dernier, même si ses travaux n’ont pas vraiment marqué l’esprit des cinéphiles, aura connu son heure de gloire à la télévision avec la mythique série Les Chevaliers du ciel, pour laquelle il mettra en scène une trentaine d’épisodes, soit les trois-quarts de l’adaptation de la bande dessinée Les Aventures de Tanguy et Laverdure. Tout d’abord documentariste, François Villiers s’essaye à la fiction à la fin des années 1940 avec Hans le marin (où il dirige son frère Jean-Pierre Aumont), mais attendra une dizaine d’années pour s’y consacrer pleinement. Il enchaînera alors L’Eau vive (1958, Golden Globe du meilleur film étranger) avec Pascale Audret, La Verte moisson (1959) avec Pierre Dux et Dany Saval, Pierrot la tendresse (1960) avec Michel Simon et Claude Brasseur…L’Autre femme, son huitième long-métrage sort sur les écrans en 1964 et offre la tête d’affiche à Annie Girardot, en pleine ascension, surtout depuis sa rencontre avec Luchino Visconti, avec lequel elle collabore au théâtre (Deux sur la balançoire) et au cinéma (Rocco et ses frères). Désormais très courtisée par les cinéastes venus des deux côtés des Alpes (Alexandre Astruc, Marco Ferreri, Jean Delannoy, Denys de La Patellière, Roger Vadim, Mario Monicelli), Annie Girardot tourne donc L’Autre femme en Espagne, transposition d’un roman de Luisa-María Linares, d’après un scénario coécrit par Rémo Forlani (La Bande à Bonnot, Tintin et le mystère de la toison d’or, Tintin et les oranges bleues), Paul Gégauff (La Vallée, More, Que la bête meure, Plein soleil), Jacques Sigurd (L’Air de Paris, La Vierge du Rhin, Du mouron pour les petits oiseaux) et François Villiers lui-même. À mi-chemin entre le néoréalisme italien et la Nouvelle vague française, L’Autre femme est à la fois un drame passionnel et une série noire, où une jeune décoratrice française, qui vient de rompre avec son fiancé, débarque sur une île perdue au large de l’Espagne, où elle fera malgré-elle une enquête concernant la culpabilité (ou non) d’un homme mystérieux, accusé d’avoir tué sa compagne, même si son corps n’a jamais été retrouvé. L’Autre femme est assurément une découverte et pour ainsi dire une superbe porte d’entrée dans le cinéma de son auteur, qui donne sérieusement envie de creuser sa filmographie.

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Test Blu-ray / Ursule et Grelu, réalisé par Serge Korber

URSULE ET GRELU réalisé par Serge Korber, disponible en Blu-ray le 14 juin 2023 chez Studiocanal.

Acteurs : Annie Girardot, Bernard Fresson, Roland Dubillard, Jean Le Poulain, Marcel Dalio, Alfred Adam, Jacqueline Doyen, Patrick Préjean, Jean Carmet, Mario David…

Scénario : Michel Cournot & Serge Korber, d’après le roman de Léopold Chauveau

Photographie : Jean-Jacques Tarbès

Musique : Alain Goraguer

Durée : 1h35

Date de sortie initiale : 1974

LE FILM

Ursule, membre actif de l’Armée du Salut, rencontre lors d’un naufrage l’accordéoniste Grelu. Ils tombent amoureux, mais la vie les sépare. Lorsqu’enfin ils se retrouvent, Grelu mène une existence rangée, Ursule continue de mener une vie trépidante. Ils décident tout de même de se marier.

Vous n’aviez jamais sans doute entendu parler d’Ursule et Grelu ! L’auteur de ces mots n’avait jusqu’à présent pas eu connaissance de cette comédie sortie en 1974, mettant en scène Annie Girardot et Bernard Fresson et signée Serge Korber (1936-2022). Le réalisateur du merveilleux Un idiot à Paris (1967), adapté du roman de René Fallet, et de deux opus originaux avec Louis de Funès, L’Homme orchestre (1970) et Sur un arbre perché (1971), livre un de ses films les plus dingues, pour ne pas dire inclassables, avec Ursule et Grelu, fantaisie burlesque à la frontière de la tragédie, un OFNI presque inracontable, qui doit beaucoup à l’énergie dévastatrice de son couple vedette (qui l’étaient aussi dans la vie) et des gags souvent visuels à la limite du slapstick. En 1972, Serge Korber avait bifurqué vers le drame avec Les Feux de la Chandeleur, dans lequel il dirigeait déjà Annie Giradot. Dans Ursule et Grelu, il lui offre un personnage diamétralement opposé, dont l’immense comédienne se délecte visiblement du début à la fin. Même si son partenaire n’a rien à lui envier, on ne cesse d’admirer cette grande dame du cinéma français, qui n’avait pas son pareil pour insuffler sa gouaille personnelle à des rôles insolites, à la fois graves et farfelus. Ursule et Grelu n’est assurément pas une réussite totale, néanmoins le septième long-métrage de Serge Korber demeure une curiosité à laquelle le cinéphile saura accorder 95 minutes de son temps.

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Test Blu-ray / Meurtre à Montmartre, réalisé par Gilles Grangier

MEURTRE À MONTMARTRE réalisé par Gilles Grangier, disponible en Édition Collector Blu-ray + DVD le 30 mars 2022 chez Pathé.

Acteurs : Michel Auclair, Paul Frankeur, Giani Esposito, Annie Girardot, Lucien Nat, Gib Grossac, Franck MacDonald, Philippe Dumat…

Scénario : Gilles Grangier & René Wheeler, d’après le roman de Michel Lenoir

Photographie : Jacques Lemare

Musique : Jean Yatove

Durée : 1h32

Année de sortie : 1956

LE FILM

Le marchand d’art Marc Kelber croit faire l’affaire du siècle quand il achète un tableau de Gauguin à Jacques Lacroix, un prétendu collectionneur. Mais quand il découvre que ce dernier est un escroc qui lui a vendu un faux, Kelber est bien décidé à se venger. Il retrouve alors Lacroix et ses complices, le peintre faussaire Watroff et sa compagne et modèle Viviane. Mais plutôt que de leur faire payer leur arnaque, il décide finalement d’y prendre part…

Habitué aux gros succès populaires depuis ses débuts dans les années 1940 comme Le Cavalier noir, Jo la Romance, Amour et compagnie et Trente et quarante avec Georges Guétary, L’Aventure de Cabassou avec Fernandel, Leçon de conduite avec Odette Joyeux, Par la fenêtre avec Bourvil, Gilles Grangier va petit à petit et momentanément délaisser la comédie pour se diriger vers des films plus dramatiques. L’une des étapes les plus marquantes de son illustre carrière reste sa rencontre avec Jean Gabin, avec lequel il tourne pour la première fois en 1953 pour La Vierge du Rhin, d’après le roman de Pierre Nord. Les deux hommes collaboreront à douze reprises. Le réalisateur démontre qu’il peut alors offrir autre chose aux spectateurs qu’un film musical ou des divertissements légers du samedi soir et c’est finalement dans un registre plus grave qu’il va trouver un second souffle, mais aussi s’épanouir derrière la caméra. Entre Le Sang à la tête, merveilleuse adaptation du roman de Georges Simenon, et Le Rouge est mis, Gilles Grangier se tourne vers un autre fidèle comédien, le grand Paul Frankeur, qui l’accompagne depuis 1950 (Au p’tit Zouave) et qu’il retrouvera sur Jeunes mariés (1953), Le Sang à la tête (1956), Le Rouge est mis (1957), Le Désordre et la Nuit (1958), Archimède le clochard (1959), Le Gentleman d’Epsom (1962), Le Voyage à Biarritz (1962, même si non crédité), Maigret voit rouge (1963), sans oublier la mini-série Max le débonnaire diffusée en 1967. Paul Frankeur, c’est souvent celui dont on ne sait pas forcément le nom dans un film. C’est un mécanicien, un bonimenteur, un patron de bistrot, un cordonnier, un réparateur de lignes électriques, un inspecteur ou un commissaire, un reporter, un aubergiste, un coiffeur, un cafetier, un coiffeur, un brigadier de gendarmerie, un contrôleur SNCF, un curé…et l’on se souvient pourtant toujours de lui. Meurtre à Montmartre, précédemment sorti au cinéma sous le titre Reproduction interdite, mais qui avait été rebaptisé par une production déçue par les résultats du film au box-office (ce qui avait irrité Gilles Grangier, étant donné que l’action se déroule à Montparnasse et non pas sur la butte, ce à quoi on lui avait rétorqué que « Meurtre à Montparnasse aurait été un titre trop long ») est l’un des rares films où Paul Frankeur tient le haut de l’affiche. Si l’on peut citer aussi Premières Armes (1950) de René Wheeler et Passion (1951) de Georges Lampin, il porte sur ses épaules Meurtre à Montmartre, en étant quasiment de toutes les scènes. Et il est admirable dans cette transposition d’un roman de Michel Cade (sous le nom de Lenoir), où Gilles Grangier dresse le portrait d’un galeriste, qui va malgré-lui tombé dans le crime, pour pouvoir subsister et offrir à sa jeune épouse un train de vie confortable. S’il n’est assurément pas le film le plus célèbre du cinéaste, Reproduction interdite (puisqu’on peut l’appeler ainsi) est un vrai bijou sombre et pessimiste, qui s’offre enfin à nous en copie entièrement restaurée.

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Test Blu-ray / Maigret tend un piège, réalisé par Jean Delannoy

MAIGRET TEND UN PIÈGE réalisé par Jean Delannoy, disponible en édition Digibook – Blu-ray + DVD + Livret le 4 septembre 2020 chez Coin de Mire Cinéma.

Acteurs : Jean Gabin, Annie Girardot, Jean Desailly, Gérard Sety, André Valmy, Olivier Hussenot, Lucienne Bogaert, Lino Ventura, Jean Tissier, Jeanne Boitel, Jean Debucourt, Paulette Dubost…

Scénario : Rodolphe-Maurice Arlaud, Michel Audiard & Jean Delannoy, d’après le roman de Georges Simenon.

Photographie : Louis Page

Musique : Paul Misraki

Durée : 1h54

Date de sortie initiale : 1958

LE FILM

Paris, 1957. Une série de meurtres met la police judiciaire en échec : quatre femmes ont déjà été retrouvées poignardées, leurs vêtements lacérés. Certain de la susceptibilité du coupable, le commissaire Maigret fait croire à son arrestation pour le pousser à se manifester.

En dehors de Jean Richard et de Bruno Cremer qui ont su marquer l’esprit des téléspectateurs en l’incarnant respectivement 23 ans et 14 ans, le Commissaire divisionnaire Maigret prend immédiatement les traits de Jean Gabin dans l’inconscient collectif concernant l’adaptation cinématographique des aventures du célèbre personnage créé par Georges Simenon. Le comédien l’aura en effet interprété à trois reprises dans Maigret tend un piège (Jean Delannoy, 1958), Maigret et l’Affaire Saint-Fiacre (Jean Delannoy, 1959) et Maigret voit rouge (Gilles Grangier, 1963). Pourtant, Pierre Renoir (le premier Maigret du cinéma dans La Nuit du Carrefour de Jean Renoir, 1932), Harry Baur (La Tête d’un homme, 1932, de Julien Duvivier), Charles Laughton (L’Homme de la tour Eiffel, 1949, de Burgess Meredith) et même Michel Simon (Brelan d’as, 1952, d’Henri Verneuil), s’étaient entre autres déjà emparés de ce rôle mythique. A la fin des années 1950, Jean Gabin est la plus grande star du cinéma français depuis son retour en grâce avec Touchez pas au grisbi (1954) de Jacques Becker. Le comédien multiplie les projets et les rôles divers, de French Cancan (1955) de Jean Renoir à Razzia sur la chnouf (1955) de Henri Decoin, en passant par ses collaborations avec Gilles Grangier (Gas-oil, 1955, Le Sang à la tête, 1956, Le Rouge est mis, 1957), sans oublier les merveilleux Des gens sans importance (1956) de Henri Verneuil, Voici le temps des assassins (1956) de Julien Duvivier et La Traversée de Paris (1956) de Claude Autant-Lara. Outre les deux films qu’il tourne avec Jean-Paul Le Chanois (Le Cas du docteur Laurent, 1957 et Les Misérables, 1958), Jean Gabin retrouve Jean Delannoy avec lequel il avait déjà tourné Chiens perdus sans collier en 1955, pour interpréter cette fois le commissaire Jules Maigret dans Maigret tend un piège, le premier de ses cinq triomphes au box-office en 1958 puisque le comédien attirera plus de 22 millions de français dans les salles cette année-là.

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Test Blu-ray / Le Bateau d’Emile, réalisé par Denys de La Patellière

LE BATEAU D’EMILE réalisé par Denys de La Patellière, disponible en Édition Digibook Blu-ray + DVD + Livret le 14 octobre 2019 chez Coin de mire Cinéma

Acteurs : Lino Ventura, Annie Girardot, Michel Simon, Pierre Brasseur, Jacques Monod, Édith Scob, Roger Dutoit, Joëlle Bernard, Roger Pelletier, Etienne Bierry, André Certes, Jean Solar, Pierre Vielhescaze, Guy Humbert, Marcel Bernier, Yves Gabrielli, Jean-Louis Tristan…

Scénario : Denys de La Patellière, Albert Valentin, Michel Audiard d’après une nouvelle de Georges Simenon

Photographie : Robert Juillard

Musique : Jean Prodromidès

Durée : 1h36

Date de sortie initiale : 1962

LE FILM

De retour à La Rochelle, le débauché Charles-Edmond Larmentiel se venge de sa famille d’armateurs en léguant sa fortune à son fils Emile Bouet. François Larmentiel, le frère de Charles-Edmond, furieux de voir le capital familial entre les mains de celui qu’il considère comme un étranger, propose un arrangement à Emile. Celui-ci ne tarde pas à deviner les réelles intentions de François.

La glace conserve, mais les tropiques vous laissent le choix entre la cirrhose et la vérole ; je me suis offert les deux !

Auparavant assistant du réalisateur Maurice Labro, Denys de La Patellière (1921-2013) signe son premier long métrage Les Aristocrates en 1955, adapté du roman éponyme de Michel de Saint Pierre paru en 1954. Coup d’essai, coup de maître. Le réalisateur y racontait la fin d’une ère, d’un monde à part entière. Celle d’une aristocratie incarnée par un père de famille, veuf, qui a voulu transmettre à ses enfants les traditions qui lui ont été inculquées dès son plus jeune âge. Seulement voilà, la société a changé, le langage également. Comment cette famille peut-elle dans ce cas-là espérer communiquer alors qu’ils ne se comprennent plus ? La Seconde Guerre mondiale est encore présente dans la tête des enfants, quasiment tous adultes à présent, à l’exception de deux frères jumeaux turbulents, et chacun souhaite se libérer du carcan qui leur a été imposé. C’est ce que représente le personnage incarné par Michel Simon dans Le Bateau d’Emile, dixième film de Denys de La Patellière, réalisé en 1962. Dans cette adaptation d’une nouvelle de Georges Simenon publiée en 1945, le cinéaste s’en prend violemment à la grande bourgeoisie française, devenue une parodie, une caricature sans plus aucun fondement ni de raison d’être. Suite au triomphe du merveilleux Un taxi pour Tobrouk (près de cinq millions d’entrées), le réalisateur fait à nouveau appel à Lino Ventura et lui offre un rôle délicat, sensible et à fleur de peau, qui se démarque dans la filmographie du comédien. Il apparaît dans le récit comme le pion manipulé par « ceux de la haute », autrement dit les nantis qui règnent depuis trois générations sur le monde de la pêche, dont le PDG est incarné par l’immense Pierre Brasseur. Egalement interprété par Annie Girardot et Edith Scob, Le Bateau d’Emile est une fable cynique, douce-amère et virulente, méconnue, avec des dialogues très en verve et percutants de Michel Audiard.

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Test Blu-ray / La Mandarine, réalisé par Edouard Molinaro

LA MANDARINE réalisé par Edouard Molinaro, disponible en DVD et Blu-ray depuis le 23 mai 2018 chez LCJ Editions

Acteurs : Annie Girardot, Philippe Noiret, Madeleine Renaud, Murray Head, Marie-Hélène Breillat, Jean-Claude Dauphin, Robert Berri, Madeleine Damien, Nane Germon, Pippo Merisi…

Scénario : Christine de Rivoyre, Édouard Molinaro d’après le roman éponyme de Christine de Rivoyre

Photographie : Claude Lecomte

Musique : Claude Bolling

Durée : 1h28

Date de sortie initiale : 1972

LE FILM

Séverine et Georges dirigent un hôtel de luxe, rue de Rivoli, dont Mémé Boule, une alerte vieille dame, est propriétaire. A la mort de leurs parents, Mémé Boule a adopté Séverine et ses deux frère et soeur jumeaux, Alain et Baba. De l’un de leurs nombreux voyages, Alain et Baba ramènent un écrivain anglais qu’ils installent à demeure. Le séduisant jeune homme a tôt fait de séduire Baba, Mémé Boule et Séverine elle-même, pourtant tout d’abord réticente…

Du cinéaste Edouardo Camille Molinaro alias Edouard Molinaro (1928-2013), nous connaissons surtout ses immenses succès populaires, Oscar (plus de six millions d’entrées), La Cage aux folles (5,4 millions), Hibernatus (3,4 millions), L’Emmerdeur (3,3 millions), La Cage aux folles 2 (3 millions), Mon oncle Benjamin (2,7 millions) ou bien encore Une ravissante idiote (2,2 millions). Au cours de sa longue carrière, le réalisateur aura attiré près de 50 millions de spectateurs dans les salles françaises. Pourtant, Edouard Molinaro n’a jamais caché que les films qui lui étaient le plus cher et le plus personnel étaient ceux dissimulés dans l’ombre. Au début des années 1970, après le triomphe de Mon oncle Benjamin, le cinéaste désire s’éloigner quelque peu du cinéma commercial et retrouver une veine plus intimiste. Ce sera le cas de La Liberté en croupe (1970) et Les Aveux les plus doux (1971), deux films atypiques et résolument d’auteur, qui ne rencontrent cependant aucun succès à leur sortie. Qu’à cela ne tienne, bien décidé à continuer dans cette voie, Edouard Molinaro jette son dévolu sur un roman de Christine de Rivoyre publié en 1957, La Mandarine, qu’il adapte avec l’écrivaine elle-même. Ecrit bien avant 1968, La Mandarine annonçait alors les revendications féministes sociales et culturelles qui exploseront à l’aube des années 1970. Sa transposition à l’écran s’inscrit donc dans l’air du temps et offre au réalisateur un terrain de jeu dans lequel il aborde la liberté sexuelle, la bourgeoisie repliée sur elle-même, ainsi que la jeunesse éphémère et l’envie de bouffer la vie, à travers une histoire d’amour passionnée et avec une liberté de ton rare et insolite dans le paysage cinématographique français.

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Test Blu-ray / Mourir d’aimer, réalisé par André Cayatte

MOURIR D’AIMER réalisé par André Cayatte, disponible en combo Blu-ray+DVD depuis le 27 septembre 2017 chez LCJ Editions

Acteurs : Annie Girardot, Bruno Pradal, Claude Cerval, Jean Bouise, Jean-Paul Moulinot, Yves Barsacq, Marie-Hélène Breillat, Edith Loria, Jacques Marin, Monique Mélinand, Raymond Meunier, Maurice Nasil…

Scénario : André Cayatte, Pierre Dumayet, Albert Naud

Photographie : Maurice Fellous

Musique : Jorge Araujo Chiriboga

Durée : 1h53

Date de sortie initiale : 1971

LE FILM

Danièle Guénot, 32 ans, divorcée, deux enfants, est professeure de lettres à Rouen. Lors des événements de mai 68, elle organise chez elle des réunions de discussion et de remise en cause de la société. Un de ses élèves, Gérard Leguen, âgé de 17 ans, tombe amoureux d’elle et le lui dit. Elle le repousse d’abord mais finit par céder à cet amour qu’elle partage. Les parents de Gérard, avertis, crient au scandale et déposent plainte. Danièle est condamnée à un an de prison avec sursis pour enlèvement et détournement de mineur.

C’est une histoire forte, bouleversante. C’est aussi et surtout une histoire vraie. Celle de Gabrielle Russier, professeure agrégée de lettres, persécutée par un système judiciaire et victime d’une loi obsolètes pour avoir entretenu une liaison amoureuse avec un de ses élèves, Christian Rossi, âgé de 17 ans alors qu’elle en avait 32. Arrêtée, jetée en prison, humiliée, condamnée, Gabrielle Russier mettra fin à ses jours le 1er septembre 1969. Cette mort entraînera moult débats quant au désir et le devoir de réformer une loi, un système remontant à Napoléon, alors que la France venait d’entrer dans une nouvelle ère après mai 1968. Peut-être devrait-on établir l’âge de la majorité à 18 ans ? Il n’en fallait pas plus au réalisateur André Cayatte (1909-1989), auteur d’immenses succès populaires et critiques comme Le Passage du Rhin, Nous sommes tous des assassins, Le Miroir à deux faces et Les Risques du métier avec Jacques Brel dans son premier rôle au cinéma, pour s’attaquer de front à ce fait divers.

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