Test Blu-ray / L’Homme qui voulait savoir, réalisé par George Sluizer

L’HOMME QUI VOULAIT SAVOIR (Spoorloos) réalisé par George Sluizer, disponible en Combo Blu-ray + DVD + Livret – Édition limitée chez Sidonis Calysta le 7 juin 2024.

Avec : Bernard-Pierre Donnadieu, Gene Bervoets, Johanna Ter Steege, Gwen Eckhaus, Bernadette Le Saché, Tania Latarjet, Lucille Glenn, Roger Souza…

Scénario : Tim Krabbé & George Sluizer, d’après le roman L’Oeuf d’or de Tim Krabbé

Photographie : Toni Kuhn

Musique : Henny Vrienten

Durée : 1h56

Date de sortie initiale : 1988

LE FILM

Sur la route des vacances, Rex et Saskia s’arrêtent sur une aire d’autoroute. L’homme s’éloigne du véhicule pendant quelques minutes. À son retour, sa compagne a disparu. Fou de douleur, il renonce à sa vie professionnelle et sociale pour se consacrer exclusivement à la recherche de la disparue. Après trois années d’une quête infructueuse, il reçoit une étrange carte postale, dont l’auteur prétend connaître la vérité sur la disparition…

Film culte des années 1980, récompensé dans tous les festivals, L’Homme qui voulait savoir est une oeuvre éprouvante pour les nerfs, qui continue de hanter les mémoires bien longtemps après. Bernard-Pierre Donnadieu livre une admirable prestation tandis que la mise en scène de George Sluizer (1932-2014) dissèque le mécanisme mental et les agissements d’un esprit malade avec originalité, renvoyant à nos peurs les plus primaires et universelles. Vous connaissez peut-être le remake, La Disparue The Vanishing, avec Jeff Bridges, Sandra Bullock et Kiefer Sutherland réalisé par George Sluizer lui-même – à l’instar d’Alfred Hitchcock pour L’Homme qui en savait trop, Ole Bornedal pour Le Veilleur de nuit et Michael Haneke pour Funny Games – en 1993, mais pas forcément le film original sorti cinq ans auparavant. Alors jetez-vous immédiatement dessus, vous ne le regretterez jamais. Le cinéaste néerlandais (mais né à Paris) George Sluizer demeure encore aujourd’hui peu connu du grand public et reste un cas atypique dans le cinéma. À l’origine de L’Homme qui voulait savoir, il y a un roman, Het Gouden Ei L’Œuf d’Or, écrit par Tim Krabbé, néerlandais comme George Sluizer, qui a participé à l’adaptation de son livre avec le réalisateur, avant d’être remercié par ce dernier pour divergences artistiques. Si le remake est étonnamment plus diffusé, L’Homme qui voulait savoir est un thriller dramatique aussi sensationnel qu’insoutenable. Bernard-Pierre Donnadieu trône de façon impériale sur ce film diabolique. Sa présence est de celle qu’on ne peut oublier et qui marque à vie l’esprit des cinéphiles.

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Test Blu-ray / Navajeros, réalisé par Eloy de la Iglesia

NAVAJEROS réalisé par Eloy de la Iglesia, disponible en Combo Blu-ray + DVD le 7 mai 2024 chez Artus Films.

Acteurs : José Luis Manzano, Isela Vega, Verónica Castro, Jaime Garza, Enrique San Francisco, María Martín, José Sacristán, José Manuel Cervino…

Scénario : Eloy de la Iglesia & Gonzalo Goicoechea

Photographie : Antonio Cuevas

Musique : Burning

Durée : 1h32

Date de sortie initiale : 1980

LE FILM

José Manuel alias « El Jaro » vit avec sa bande de délinquants. Un jour, il rencontre Mercedes, une prostituée qui veut le ramener dans le droit chemin.

En septembre 2023, à l’occasion de la sortie du coffret Cinéma Quinqui de Eloy de la Iglesia chez Artus Films, qui comprenait Colegas, El Pico et El Pico 2, nous étions revenus très largement sur la carrière du réalisateur espagnol et plus particulièrement sur le genre quinqui. Vous savez donc ce qui vous reste à faire pour en savoir plus. L’éditeur a eu l’excellente idée de prolonger cette importante découverte, en éditant deux autres longs-métrages emblématiques du cinéaste, Le Député El diputado (1979) et Navajeros (1981). C’est le second que nous aborderons aujourd’hui. Dans le sillage du cinéma de son compatriote José Antonio de la Loma, qui avait comme qui dirait ouvert le bal du cinéma quinqui en 1977 avec Perros callejeros (« chiens errants ») et qui est depuis considéré comme étant le film fondateur du genre, Eloy de la Iglesia entend bien lui aussi dresser le portrait des jeunes délinquants livrés à eux-mêmes dans l’Espagne post-franquiste, où la dope était reine, où le boulot était inexistant, où les parents étaient complètement largués, comme si tout le monde se réveillait d’une immense gueule de bois. Navajeros, s’il n’atteint pas la réussite de Colegas et n’a pas la force implacable d’El Pico, n’en reste pas moins un mètre étalon du quinqui et compile tous les ingrédients de ce qui fait sa particularité. C’est aussi et surtout la première collaboration entre Eloy de la Iglesia et José Luis Manzano, sa muse, son amant et même sa pute, leur rencontre s’étant déroulée dans les milieux de la prostitution masculine du centre de Madrid, que le metteur en scène fréquentait alors assidûment. Ensemble, ils tourneront cinq films jusqu’à La Estanquera de Vallecas en 1987. Navajeros pose les bases de leurs futures associations, les motifs sont clairement exposés, sexe, drogue, violence, sang, et si cet opus s’avère au final plus sage, ou plutôt linéaire et didactique (les apartés d’un journaliste appuient d’ailleurs une dimension documentaire), ce drame à la frontière du thriller psychologique est clairement une étape.

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Test Blu-ray / Dream Scenario, réalisé par Kristoffer Borgli

DREAM SCENARIO réalisé par Kristoffer Borgli, disponible en DVD & Blu-ray le 7 juin 2024 chez Metropolitan Vidéo.

Acteurs : Nicolas Cage, Julianne Nicholson, Michael Cera, Jessica Clement, Lily Bird, Star Slade, David Klein, Kaleb Horn…

Scénario : Kristoffer Borgli

Photographie : Benjamin Loeb

Musique : Owen Pallett

Durée : 1h42

Date de sortie initiale : 2023

LE FILM

Paul Matthews, un banal professeur, voit sa vie bouleversée lorsqu’il commence à apparaître dans les rêves de millions de personnes. Paul devient alors une sorte de phénomène médiatique, mais sa toute nouvelle célébrité va rapidement prendre une tournure inattendue…

De l’avis de Nicolas Cage lui-même, Dream Scenario est aux côtés de Leaving Las Vegas, Adaptation, Arizona Junior et Embrasse-moi vampire, l’un de ses meilleurs films, pour lequel il n’a pas hésité une seconde à s’engager après avoir lu cette histoire dingue. En effet, le second long-métrage écrit et mis en scène par le réalisateur norvégien Kristoffer Borgli (né en 1985), découvert avec Sick of Myself, rappelle l’univers d’un certain Charlie Kaufman, l’auteur culte de Dans la peau de John Malkovich et Adaptation de Spike Jonze, de Confessions d’un homme dangereux de George Clooney, de Human Nature et Eternal Sunshine of the Spotless Mind de Michel Gondry, mais fait aussi étrangement écho avec un film bien de chez nous, Superstar de Xavier Giannoli, libre transposition du roman L’idole de Serge Joncour, publié en 2004, qui racontait l’étrange histoire d’un homme qui, du jour au lendemain, devenait célèbre, sans savoir pourquoi. Dans Dream Scenario (production Ari Aster, à l’origine prévu aux manettes avec Adam Sandler comme tête d’affiche), un homme dans la foule, n’importe qui, le plus anonyme possible accède à la célébrité via un phénomène paranormal, en apparaissant dans les songes d’individus à travers le monde. Ce type, Paul Matthews, ne refuse pas cette célébrité absurde et soudaine, il peut même en espérer quelques retombées, comme voir son livre être publié, tandis que les gens s’intéressent encore plus à lui. À l’instar d’un fait divers troublant et avec un sens aiguisé de l’observation, Kristoffer Borgli crée un malaise certain, excellemment rendu par un immense Nicolas Cage, qui trouvait à l’aube de ses soixante ans l’un de ses plus beaux et grands rôles. Avec un savoir-faire technique souvent ébouriffant, le cinéaste raconte une histoire qui va bien au-delà de la soudaine notoriété d’un inconnu et des dérives de la société, en s’interrogeant notamment sur le sens du monde contemporain et des icônes. Dream Scenario est un spectacle de qualité, virtuose, énergique, percutant, l’un des films indispensables de l’année 2023.

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Test Blu-ray / Le Mystère d’Edwin Drood, réalisé par Stuart Walker

LE MYSTÈRE D’EDWIN DROOD (The Mystery of Edwin Drood) réalisé par Stuart Walker, disponible en DVD et Combo Blu-ray+DVD le 26 mars 2024 chez Elephant Films.

Acteurs : Claude Rains, Douglass Montgomery, Heather Angel, David Manners, Francis L. Sullivan, Valerie Hobson, Zeffie Tilbury, Ethel Griffies…

Scénario : John L. Balderston, Gladys Unger, Leopold Atlas & Bradley King, d’après le roman de Charles Dickens

Photographie : George Robinson

Musique : Edward Ward

Durée : 1h27

Année de sortie : 1935

LE FILM

Le jeune et affable Edwin Drood, en apparence comblé par la sollicitude de son oncle John Jasper, maître de choeur à la cathédrale de Cloisterham, disparaît mystérieusement sans laisser de trace. Jasper mène tout d’abord l’enquête sur le sort de son neveu et ses soupçons se dirigent vers l’irascible Neville Landless, arrivé récemment à Cloisterham avec sa soeur Helena…

Le cinéma n’a pas tardé pour s’emparer des écrits de Charles Dickens, puisque la première adaptation d’un de ses livres, en l’occurrence Oliver Twist, remonte à 1901. Depuis, près de 500 films se sont inspirés de près ou de loin d’un des ouvrages de l’écrivain britannique. Le Mystère d’Edwin Drood est le quinzième et dernier roman de Charles Dickens, dont la première transposition date de 1909, suivie par une autre de 1914. Celle qui nous intéresse aujourd’hui est donc la troisième, celle à connaître, même si une autre mouture sera à nouveau réalisée soixante ans plus tard, ainsi que des séries télévisées. Si Le Mystère d’Edwin Drood version Stuart Walker n’est indubitablement pas un chef d’oeuvre, il possède quelques atouts non négligeables, à l’instar d’une superbe photographie signée George Robinson (La Montagne jaune, Le Rayon invisible, Tarantula!), dont le savoir-faire fera le bonheur des studios (et des cinéphiles), puisqu’il sera aussi l’un des chefs opérateurs emblématiques des Universal Monsters (Le Fils de Dracula, La Maison de Dracula, Le Fils de Frankenstein, Frankenstein rencontre le loup-garou, La Tombe de la Momie). Mention spéciale également à la prestation de Claude Rains, inquiétant à souhait et qui porte le film sur ses épaules. Un bon cru, rien de transcendant, mais qui demeure encore divertissant près d’un siècle après sa sortie.

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Test 4K UHD / Classe tous risques, réalisé par Claude Sautet

CLASSE TOUS RISQUES réalisé par Claude Sautet, disponible en DVD, Blu-ray & 4K Ultra HD + Blu-ray le 23 mars 2024 chez Coin de Mire Cinéma.

Acteurs : Lino Ventura, Jean-Paul Belmondo, Sandra Milo, Jean Servais, Marcel Dalio, Bernard Dheran, Michel Ardan, Michele Meritz, Claude Cerval, Jacques Dacqmine…

Scénario : Claude Sautet, José Giovanni & Pascal Jardin, d’après le roman de José Giovanni

Photographie : Ghislain Cloquet

Musique : Georges Delerue

Durée : 1h49

Date de sortie initiale : 1960

LE FILM

Gangster condamné à mort par contumace et recherché activement par la police, Abel Davos s’est réfugié depuis une douzaine d’années en Italie avec sa femme Thérèse et ses deux enfants, où il poursuit ses coupables activités. Mais après un dernier hold-up réussi avec son ami Raymond, sur le point d’être retrouvé, il doit rentrer clandestinement en France par la mer. En débarquant sur une plage déserte, deux douaniers les surprennent, provoquant une fusillade tuant Thérèse et Raymond. Resté seul avec ses enfants, Abel fait appel à ses amis Riton et Fargier, à Paris pour venir les chercher à Nice, qui ne peuvent venir eux-mêmes mais lui envoient un homme sûr, Éric Stark, avec une ambulance. Davos se lie d’amitié avec le jeune homme, qui le cache dans une chambre de bonne de son immeuble…

À la base de Classe tous risques, il y a un roman de José Giovanni, édité en 1958, qui s’inspirait des dernières années de cavale d’Abel Danos (que l’écrivain avait côtoyé à la prison de la Santé), surnommé le Bel Abel ou le « Mammouth » en raison de sa forte corpulence, malfaiteur, membre du Milieu et membre de la Gestapo française dite La Carlingue, où il était alors connu pour ses méthodes aussi expéditives que brutales. C’est Lino Ventura lui-même qui est venu se « vendre » auprès de l’écrivain et ancien gangster, en lui indiquant qu’il était fait pour le rôle et que son ami Claude Sautet désirait faire de son livre un film. À la fin des années 1950, le comédien commence à faire sa place dans le cinéma français, mais sa silhouette trapue et son charisme de dur à cuire est aussi remarquée qu’appréciée de plus en plus par les cinéastes et surtout par les spectateurs, depuis sa découverte dans Touchez pas au grisbi, triomphe de 1954 qui avait replacé Jean Gabin sur son trône. Lino Ventura apparaît dans autant de films que de succès, de Razzia sur la chnouf à 125 rue Montmartre, en passant par Un témoin dans la ville, Marie-Octobre, Ces dames préfèrent le mambo…petit à petit, le nom de l’acteur se hisse en haut de l’affiche. Le Gorille vous salue bien de Bernard Borderie et Le Fauve est lâché de Maurice Labro (sur lequel Ventura rencontre Sautet) prouvent que des productions peuvent enfin se monter sur son charisme, son talent et sa carrure. Avec Classe tous risques, Lino Ventura passe la vitesse supérieure et son personnage anticipe déjà celui qu’il tiendra dans Le Deuxième souffle de Jean-Pierre Melville, autre transposition d’un ouvrage de José Giovanni. Merveilleusement mis en scène par un Claude Sautet enfin en possession de ses moyens après un premier long-métrage Bonjour sourire, qu’il reniera très rapidement et pour lequel il officiait uniquement comme « technicien » (alors assistant, mais remplaçant surtout au pied levé Robert Dhéry, qui devait le réaliser et s’est finalement désisté au dernier moment), ce polar sombre et brutal est aussi une superbe histoire d’amitié, magnifiquement interprétée par le tandem Ventura-Belmondo.

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Test Blu-ray / Les Boys de la compagnie C, réalisé par Sidney J. Furie

LES BOYS DE LA COMPAGNIE C (The Boys in Company C) réalisé par Sidney J. Furie, disponible en Combo Blu-ray + 2 DVD le 12 avril 2024 chez Rimini Editions.

Acteurs : Stan Shaw, Andrew Stevens, James Canning, Michael Lembeck, Craig Wasson, Scott Hylands, James Whitmore Jr., Noble Willingham, R. Lee Ermey…

Scénario : Rick Natkin & Sidney J. Furie

Photographie : Godfrey A. Godar

Musique : Jaime Mendoza-Nava

Durée : 2h01

Année de sortie : 1978

LE FILM

1967. Cinq jeunes Marines, engagés volontaires, intègrent un camp militaire où ils seront formés, avant d’être envoyés au Vietnam. Ils découvrent alors l’horreur de la guerre et une plongée en enfer à laquelle personne ne les avait préparés…

Quand on parle de la guerre du Vietnam au cinéma, on pense immédiatement à Apocalypse Now de Francis Ford Coppola, Platoon d’Oliver Stone, Voyage au bout de l’enfer de Michael Cimino, Rambo de Ted Kotcheff, Good Morning, Vietnam de Barry Levinson, Outrages de Brian De Palma et Full Metal Jacket de Stanley Kubrick. Ce ne sont pas les exemples qui manquent. Mais avant cela, le cinéma hollywoodien s’était déjà intéressé à ce conflit, comme média de propagande à l’instar des Bérets verts The Green Berets, co-réalisé en 1968 par Ray Kellogg et John Wayne. Dix ans plus tard, Sidney J. Furie coécrit avec son complice Rick Natkin et réalise Les Boys de la compagnie C The Boys un Company C, film qui n’est sans doute pas passé à la postérité, mais qui demeure néanmoins important rétrospectivement, puisqu’il s’avère être la matrice de l’oeuvre susmentionnée de Stanley Kubrick. En effet, impossible de ne pas penser à Full Metal Jacket, pourtant sorti dix ans plus tard, surtout durant l’entraînement de la future unité de Marines (durant lequel apparaît le même R. Lee Ermey, légendaire sergent-instructeur Hartman, ici quasiment dans le même rôle), destinée à être envoyée au Vietnam où chaque membre servira essentiellement de chair à canon. Mais Sidney J. Furie ne s’intéresse pas seulement à la formation de ces soldats spéciaux, d’ailleurs, contrairement à Full Metal Jacket où cet acte dure quasiment la moitié du métrage celui-ci ne représente qu’un quart dans Les Boys de la compagnie C, le cinéaste désire montrer comment cela se passait réellement sur le terrain. Certes, comparer la virtuosité quasi-chirurgicale et symétrique de Stanley Kubrick au style plus passe-partout de Sidney J. Furie serait inutile. Toutefois, il serait fort dommage de ne pas réévaluer Les Boys de la compagnie C, qui au-delà de son côté précurseur, reste un formidable divertissement mené sans aucun temps mort.

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Test Blu-ray / Le Coeur battant, réalisé par Jacques Doniol-Valcroze

LE COEUR BATTANT réalisé par Jacques Doniol-Valcroze, disponible en Blu-ray le 14 décembre 2023 chez Le Chat qui fume.

Acteurs : Françoise Brion, Jean-Louis Trintignant, Pénélope Portrait, Marc Eyraud, Suvath Phoeun, Borany Kassano, Raymond Gérôme…

Scénario : Jacques Doniol-Valcroze

Photographie : Christian Matras

Musique : Michel Legrand

Durée : 1h24

Date de sortie initiale : 1960

LE FILM

Un jeune peintre, François, aime Dominique qui lui préfère Juan, diplomate chilien avec lequel elle a eu une liaison l’année précédente. Elle doit retrouver ce dernier sur une île de la Méditerranée ; elle demande à François de l’accompagner, lequel va s’efforcer de la séduire en attendant l’arrivée de Juan.

On connaît le dénommé Jacques Doniol-Valcroze (1920-1989) comme étant le père fondateur (et le premier rédacteur en chef) de la mythique revue Les Cahiers du cinéma, aux côtés d’André Bazin, Joseph-Marie Lo Duca et Léonide Keigel. Une référence, une légende pourrait-on dire, qui reste célèbre pour ses combats, son élégance, sa passion contagieuse pour le septième art (il était avant tout journaliste et critique), mais aussi pour ses qualités humaines qui ont toujours fait l’unanimité et qui ont laissé des traces indélébiles chez celles et ceux qui l’ont côtoyé. On connaît moins son travail comme metteur en scène, étant passé lui-même derrière la caméra assez tardivement, vers l’âge de 40 ans. Après trois courts-métrages, L’Oeil du maître (1957), Les Surmenés (1958) avec Jean-Claude Brialy et Jean-Pierre Cassel et Bonjour, Monsieur La Bruyère (1958) avec Michel Bouquet, Jacques Doniol-Valcroze passe le cap du grand format avec L’Eau à la bouche, succès critique et commercial, qui demeure essentiellement connu pour la chanson éponyme de Serge Gainsbourg. Il enchaîne très vite avec Le Coeur battant, qu’il écrit seul et pour lequel il dirige pour la seconde fois son épouse Françoise Brion. Cette comédie dramatico-romantique surfe bien entendu sur le phénomène de la Nouvelle vague, à laquelle il a contribué indirectement pourrait-on dire puisque ses poulains des Cahiers du cinéma comme François Truffaut, Jean-Luc Godard, Claude Chabrol et consorts s’étaient déjà lancés dans la réalisation, mais s’en écarte et s’avère moins expérimental sur la forme. Néanmoins, cet aspect classique n’entame en rien le plaisir que procure Le Coeur battant, où les personnages solidement campés par Françoise Brion et Jean-Louis Trintignant, marchent tels des funambules entre légèreté et gravité.

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Test Blu-ray / Otalia de Bahia, réalisé par Marcel Camus

OTALIA DE BAHIA réalisé par Marcel Camus, disponible en Blu-ray le 14 décembre 2023 chez Le Chat qui fume.

Acteurs : Mira Fonseca, Maria Viana, Antonio Pitanga, Jofre Soares, Zeni Pereira, Djalma Correa, Mãe Massu, Emmanuel Cavalcanti…

Scénario : Marcel Camus & Jorge Amado, d’après le roman de ce dernier, Les Pâtres de la nuit

Photographie : André Domage

Musique : Walter Queiroz, Antônio Carlos & Jocáfi

Durée : 2h01

Date de sortie initiale : 1976

LE FILM

Années 1970 – Dans les quartiers pauvres de Salvador, sur les hauteurs de Bahia, vit une communauté composée de personnages pittoresques et chaleureux. Ils ont pour nom Coq Fou, Ygrec, Massu, Rosa Moustache… et Otalia. Cette dernière, prostituée au service de Dona Tiberia, est amoureuse du caporal Martim. Cette bande de joyeux drilles partage une passion commune pour la musique, la danse et l’amour. Mais leur pauvreté les confronte aussi régulièrement à la police.

Ancien assistant de Jacques Becker (Antoine et Antoinette, Édouard et Caroline, Casque d’Or), de Marc Allégret (La Demoiselle et son revenant), d’Henri Verneuil (L’Ennemi public numéro un) et même de Luis Buñuel (Cela s’appelle l’aurore), Marcel Camus (1912-1982) passe à son tour derrière la caméra en 1957 avec Mort en fraude, drame qui fait frémir les critiques et qui écope d’une interdiction dans les territoires français d’outre-mer en raison de son sujet, la politique française en Indochine. La consécration internationale vient très rapidement, puisqu’en 1959, Marcel Camus signe Orfeu Negro, 3,7 millions d’entrées en France et lauréat de la Palme d’or au Festival de Cannes, ainsi que de l’Oscar du meilleur film étranger. Suivront encore sept longs-métrages, parmi lesquels Le Chant du monde (1965) avec Catherine Deneuve et Charles Vanel, d’après le roman de Jean Giono, ainsi que Le Mur de l’Atlantique, son plus grand succès commercial, sorti juste après la mort prématurée de Bourvil. Otalia de Bahia (1975) est son dernier opus signé pour le cinéma et sans doute l’un des plus représentatifs de la carrière du réalisateur. Cette adaptation du roman de Jorge Amado, Os pastores da noiteLes Pâtres de la nuit, permet au metteur en scène de célébrer le Brésil, pays qu’il affectionnait tout particulièrement et dont ses deux compagnes, Marpessa Dawn et Lourdes de Oliveira, vedettes d’Orfeu Negro, étaient d’ailleurs originaires. Festival de couleurs et de danses, où sont célébrées les traditions, les superstitions et la jouissance de vivre, Otalia de Bahia se place sur le fil tendu entre la fiction et le documentaire, dresse le portrait de plusieurs personnages originaux, composantes essentielles d’un groupe soudé, sur lequel trône la femme, la mère, l’amante et la putain, sans qui l’homme ne serait qu’un minable des rues. Une étonnante découverte doublée d’un plaisir visuel de chaque instant.

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Test Blu-ray / Gueules noires, réalisé par Mathieu Turi

GUEULES NOIRES réalisé par Mathieu Turi, disponible en DVD & Blu-ray le 20 mars 2024 chez Blaq Out.

Acteurs : Samuel Le Bihan, Amir El Kacem, Thomas Solivérès, Jean-Hugues Anglade, Carl Laforêt, Diego Martín, Marc Riso, Bruno Sanches…

Scénario : Mathieu Turi

Photographie : Alain Duplantier

Musique : Olivier Derivière

Durée : 1h43

Année de sortie : 2023

LE FILM

1956, dans le nord de la France. Une bande de mineurs de fond se voit obligée de conduire un professeur faire des prélèvements à mille mètres sous terre. Après un éboulement qui les empêche de remonter, ils découvrent une crypte d’un autre temps, et réveillent sans le savoir quelque chose qui aurait dû rester endormi…

À l’occasion de la sortie du formidable Méandre en DVD et Blu-ray en septembre 2021, nous étions revenus sur le travail du réalisateur Mathieu Turi. Deux ans après, le revoilà avec son troisième long-métrage, Gueules noires, nouveau film de genre, qui comme qui dirait compile les éléments des deux opus précédents de Mathieu Turi, Hostile et Méandre, qui confronte une équipe de mineurs de fond avec une créature tout droit héritée des écrits de H.P. Lovecraft. Mais là où Méandre brillait par le talent, l’implication et le charisme de Gaia Weiss, on ne peut pas en dire autant pour Gueules noires avec sa bande de comédiens où peu parviennent à se distinguer, à part sans doute Bruno Sanches (comparse d’Alex Lutz dans Catherine et Liliane, qui cartonne dans la série HPI aux côtés d’Audrey Fleurot) et l’imposant Marc Riso (Divorce Club, Jumeaux mais pas trop, Veuillez nous excuser pour la gêne occasionnée), quant au reste…Samuel Le Bihan n’a jamais vraiment convaincu par ses qualités d’acteurs, toutefois il s’en sort étonnamment mieux que Jean-Hugues Anglade, aussi improbable que foncièrement mauvais ici dans le rôle du professeur Berthier, auquel on ne croit pas une seconde. Même chose pour l’irritant Thomas Solivérès (découvert dans Intouchables) qui passe son temps à rouler les yeux pour montrer que son personnage est frappadingue, Amir El Kacem (Inséparables, Jalouse) dont pas une réplique ne tombe juste, ainsi que l’espagnol Diego Martín (Nouveau départ, Rec 3 Génesis) complètement transparent. Le bât blesse au niveau de la direction d’acteurs, qui non seulement ont peu à défendre, mais qui le font aussi très mal du début à la fin, quand bien même Gueules noires démarre pourtant très bien et s’avère même prometteur…jusqu’à l’apparition du monstre enfoui sous la terre nordique. Et là, c’est le drame comme on dit. Néanmoins, on ne peut s’empêcher d’avoir beaucoup d’affection pour Gueules noires, car Mathieu Turi croit à fond dans son projet et cela se ressent. Le metteur en scène en a sérieusement sous le capot et même si son troisième film est un semi-ratage, voilà du cinéma français de genre qui ose, qui n’a pas peur et qui n’a pas à rougir de proposer une alternative aux spectateurs hexagonaux après Le Règne animal de Thomas Cailley, Acide de Just Philippot, Vermines de Sébastien Vaniček, Vincent doit mourir de Stephan Castang et La Gravité de Cédric Ido.

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Test DVD / Avant que les flammes ne s’éteignent, réalisé par Mehdi Fikri

AVANT QUE LES FLAMMES NE S’ÉTEIGNENT réalisé par Mehdi Fikri, disponible en DVD le 17 avril 2024 chez Blaq Out.

Acteurs : Camélia Jordana, Sofiane Zermani, Sofian Khammes, Sonia Faidi, Louise Coldefy, Makita Samba, Hammou Graïa, Abdelmalik Yahyaoui…

Scénario : Mehdi Fikri, Claude Le Pape & Aude Thuries

Photographie : Romain Carcanade

Musique : Andrea Boccadoro

Durée : 1h34

Année de sortie : 2023

LE FILM

Suite à la mort de son petit frère lors d’une interpellation de police, Malika se lance dans un combat judiciaire afin qu’un procès ait lieu. Mais sa quête de vérité met en péril l’équilibre de sa famille.

Quand ce n’est pas la gauche qui tire à boulets rouges sur un film comme Sound of Freedom ou Vaincre ou mourir, c’est l’extrême-droite qui s’en charge pour Avant que les flammes ne s’éteignent. C’est du moins ce qu’on essaye de nous faire croire pour justifier le bide rencontré par ces trois films dans nos contrées. Non, si ces trois longs-métrages se sont plantés, c’est tout simplement parce qu’ils sont très mauvais et que le bouche-à-oreille n’a pas fonctionné. À moins que certains spécialistes et adeptes du complot se soient mis en tête que les spectateurs étaient tellement dépourvus de sens critique qu’ils s’étaient laissés berner par les pseudo-critiques, au point de ne pas aller au cinéma afin de se faire leur propre opinion. Avant que les flammes ne s’éteignent surfe sur un sujet brûlant, les bavures policières, colportées par un parti – devenu nauséabond – anti-flics, pour lequel le réalisateur Mehdi Fikri se serait inspiré de plusieurs affaires, celles d’Amine Bentounsi en 2012, de Lamine Dieng en 2007, d’Ali Ziri en 2009, de Wissam El-Yamni en 2012 et bien sûr de Adama Traoré en 2016. Pourquoi bien sûr pour ce dernier ? Car Camélia Jordana, si le personnage qu’elle incarne dans Avant que les flammes ne s’éteignent s’appelle Malika, interprète plus ou moins Assa Traoré. Évidemment, forcément, le premier long-métrage de Mehdi Fikri n’allait pas passer inaperçu dans les médias, bien qu’il le fera dans les salles avec seulement 23.000 entrées, et donnera autant de grain à moudre chez Yann Barthès et Mouloud Achour que chez Cyril Hanouna et Pascal Praud. Tout cela pour dire qu’Avant les flammes ne s’éteignent est en l’état d’une rare médiocrité, mis en scène à la va-comme-je-te-pousse, avec des protagonistes détestables et mollement campés par des acteurs peu aidés par une écriture scolaire, pourtant cosignée Claude Le Pape (Reprise en main, Petit paysan, Les Combattants).

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