Test Blu-ray / Le Bazaar de l’épouvante, réalisé par Fraser C. Heston

LE BAZAAR DE L’ÉPOUVANTE (Needful Things) réalisé par Fraser C. Heston, disponible en Édition Collector Blu-ray + DVD + Livret le 22 novembre 2021 chez Rimini Editions.

Acteurs : Max von Sydow, Ed Harris, Bonnie Bedelia, Amanda Plummer, J.T. Walsh, Ray McKinnon, Duncan Fraser, Valri Bromfield…

Scénario : W.D. Richter, d’après le roman de Stephen King

Photographie : Tony Westman

Musique : Patrick Doyle

Durée : 2h + version longue TV 3h

Année de sortie : 1994

LE FILM

Dans l’échoppe de l’aimable Leland Gaunt, chacun peut y trouver ce dont il a toujours rêvé pour un prix dérisoire. Mais ces acquisitions sont empoisonnées et réveillent haines et jalousies. Les conflits insignifiants tournent au meurtre, à l’apocalypse. Seul le shérif Pangborn échappe aux ruses de celui qui pourrait bien être le Diable…

S’il n’est définitivement pas le meilleur film adapté d’une œuvre de Stephen King, Le Bazaar de l’épouvante Needful Things n’en reste pas moins très aimé des fans du maître de l’horreur. Produit par la société Castle Rock Entertainment, créée en 1987 entre autres par Rob Reiner, cet opus tiré du roman du même nom publié en 1991 s’en tire fort honorablement, ce qui n’était pas une mince affaire compte tenu de la densité conséquente de l’ouvrage original. Mais comment transposer près de 700 pages en deux heures de film ? Le scénariste W. D. Richter, réalisateur du légendaire Les aventures de Buckaroo Banzaï à travers la 8e dimension (1984), également l’auteur de Nickelodeon (1976) de Peter Bogdanovich, de L’Invasion des profanateurs (1978) de Philip Kaufman, du Dracula (1979) de John Badham, mais aussi l’un des créateurs des Aventures de Jack Burton dans les griffes du Mandarin (1986) de John Carpenter s’en est admirablement bien tiré et parvient à restituer l’âme du roman, malgré quelques inévitables coupes drastiques. Alors que les adaptations des livres de Stephen King se multipliaient dans les années 1980-1990, Le Bazaar de l’épouvante, situé entre La Part des ténèbres The Dark Half de George A. Romero et Les Évadés The Shawshank Redemption de Frank Darabont parvient à tirer son épingle du jeu. La preuve en est que le premier long-métrage mis en scène Fraser Clarke Heston (fils du grand Charlton) est devenu un petit film culte près de trente ans après sa sortie.

Leland Gaunt arrive dans la petite ville de Castle Rock, située dans le Maine, dans une voiture noire pour y ouvrir un magasin d’antiquités. Dans son échoppe (« Une boutique d’un genre nouveau ! »), chacun peut trouver ce dont il a toujours rêvé pour un prix dérisoire, mais Gaunt exige un coût supplémentaire sous la forme de petites faveurs. Le premier client de Gaunt est un garçon nommé Brian Rusk qui achète une carte de baseball rare en échange d’une farce. Brian doit jeter de la boue sur les draps blancs suspendus aux cordes à linge de la maison de Wilma Jerzyck. De retour chez elle, Wilma suppose que c’est l’œuvre de son ennemie de longue date Nettie Cobb. Elle l’accuse bruyamment de cela sur le lieu de travail de Nettie, le diner de Castle Rock qui appartient à Polly Chalmers, la fiancée du shérif Alan Pangborn. Gaunt fait bonne impression sur les habitants de la ville. Il vend à Danforth Keeton, un conseiller municipal corrompu qui a d’importantes dettes de jeu, un jouet qui prédit le résultat de n’importe quelle course de chevaux. Gaunt apprend ensuite la rivalité entre le prêtre catholique, le père Meehan, et le pasteur baptiste, le révérend Willie Rose. Il informe ensuite Brian qu’il n’a pas entièrement remboursé sa dette. Brian retourne alors à la maison de Wilma Jerzyck pour briser toutes les fenêtres. En échange d’un objet vendu à Nettie, Gaunt lui fait placer des post-it chez Keeton, censés être du shérif adjoint Norris Ridgewick, l’accusant de plusieurs délits. Gaunt demande aussi à Hugh Priest de tuer le chien de Nettie, en échange d’une veste semblable à celle qu’il portait à l’université…et ainsi de suite.

« Oh Jésus… »

« Le jeune charpentier de Nazareth ? Je l’ai bien connu ! Un jeune homme prometteur. Il a eu une triste mort… »

Bienvenue à Castle Rock ! Cette petite ville fictive du Maine qui apparaît ou qui est évoquée dans plusieurs romans et nouvelles de Stephen King, comme Dead Zone, Cujo, Misery et bien d’autres. Une bourgade paisible digne d’un paradis sur Terre. Mais l’arrivée d’un certain Leland Gaunt va tout bouleverser. Ce dernier est interprété par le grand, par l’immense Max von Sydow, qui alors entre Les Meilleures Intentions Den Goda Viljan de Bille August et Judge Dredd de Danny Cannon prend un malin plaisir à interpréter rien de moins que le diable en personne. Quasiment trente ans après avoir incarné Jésus dans La Plus Grande Histoire jamais contée The Greatest Story Ever Told de George Stevens, le comédien suédois passe donc du « côté obscur » de la force « spirituelle ». Son élégance naturelle, sa longue silhouette longiligne d’1m93, son regard bleu perçant, sa virtuosité pour manier différentes langues, participent à la fabuleuse création du personnage de Leland Gaunt, assurément l’un des plus marquants de toute l’oeuvre de Stephen King. Max von Sydow est impérial et trône sur un casting également solide, constitué d’Ed Harris (comme d’habitude parfait), de la très rare (et sexy) Bonnie Bedelia (éternelle Holly McClane) et de l’impressionnante Amanda Plummer dans le rôle de la fragile Nettie Cobb, l’une des premières « cibles » de l’étrange antiquaire qui saura exploiter les faiblesses, la haine, la cupidité, les préjugés et les craintes des habitants de Castle Rock.

Le Bazaar de l’épouvante est l’exemple quasi-parfait de la mécanique propre à Stephen King, puisque son roman et donc le film résultent d’une réaction en chaîne savamment élaborée par un être diabolique, destinée à créer de mini-apocalypses sur la planète. Ces « récréations » lui sont comme qui dirait autorisées par son « adversaire », puisque l’un sait qu’il ne pourrait exister sans l’autre. Et comme il faut de la place pour tout le monde…Après avoir créé divers cataclysmes, provoqué des tueries à droite à gauche et d’autres réjouissances, notre Leland Gaunt sort son petit calepin dans lequel il écrit les noms de ceux qu’il rencontre, des pions qu’il dispose progressivement sur son échiquier mortel, en attendant que ceux-ci s’affrontent, alors qu’ils n’avaient rien en commun ou n’étaient pas disposés à se rencontrer. Avec ses griffes jaunies par le temps et ses dents pourries qui soulignent son sourire carnassier, Max von Sydow n’a que peu à faire pour être inquiétant. Pas étonnant que les petites gens du quartier se laissent embobiner par ce monsieur d’un âge respectable, doux en apparence, qui va apporter un peu de bonheur dans leur vie (trop) tranquille.

A ce titre, la version de trois heures réalisée spécialement pour la télévision, qui n’est pas un Director’s Cut, mais un montage « étendu » à l’instar d’une mini-série en deux parties de 90 minutes, en dit bien plus long (et mieux) sur le stratagème de Leland Gault, tout en étendant l’éventail de ses victimes. C’est le cas du personnage de Cora Rusk, la mère du jeune Brian, totalement évincée du montage cinéma, qui réapparaît dans la version TV, ou quand une fan inconditionnelle d’Elvis Presley trouve chez Gault un buste avec lequel elle dort…On comprend mieux que Brian se retrouve sans appui de la part de sa famille, entre un père qui a pris la poudre d’escampette et une mère perdue dans ses fantasmes avec le King. Si la version sortie dans les salles se tient bien, ceux qui auront lu le roman noteront évidemment plus que les autres les raccourcis, les changements, voire les suppressions réalisées pour que l’ensemble se tienne sur deux heures. Fraser C. Heston aurait bien voulu réaliser « SA » version en prolongeant le montage cinéma de vingt bonnes minutes, ce qui aurait suffit selon lui, indiquant de ce fait que la version TV est juste un plus, mais ne correspond pas à sa vision. Toutefois, il n’est pas interdit de préférer ce montage de 3 heures, qui développe bien plus les personnages principaux.

Le Bazaar de l’épouvante remplit son contrat, la substantifique moelle du roman est là, la critique du matérialisme et des dangers du capitalisme aussi, les comédiens sont impeccables, les rebondissements multiples, le sang sans doute moins présent que dans d’autres opus tirés de Stephen King, mais la psychologie sans doute plus appuyée et recherchée que d’habitude. En l’état, Needful Things demeure un divertissement soigné et on ne peut plus sympathique.

LE COMBO BLU-RAY + DVD

Nous fêtons aujourd’hui le quinzième titre de la collection fantastique/horreur ! Le Bazaar de l’épouvante rejoint ainsi Le Survivant d’un monde parallèle, Le Métro de la mort, Magic, Mother’s Day, Incubus, Hell Night, Trauma, Mutations, Le Bal de l’horreur, Happy Birthday To Me, Terror Train – Le Monstre du train, Harlequin, Les Griffes de la peur et Patrick, ce qui commence à peser sur notre étagère et nous en sommes ravis ! L’objet prend la forme d’un Digipack à trois volets, glissé dans un fourreau cartonné du plus bel effet et au visuel très attractif. Le menu principal est animé et musical. Cette édition se compose du DVD du film « version cinéma », d’un deuxième DVD « version longue TV », du Blu-ray comprenant les deux versions et du livret de 20 pages rédigé par Marc Toullec.

Nous trouvons un petit making-of promotionnel de 6 minutes environ (aux sous-titres français incrustés), constitué d’images de plateau et surtout des propos de l’équipe du film (Ed Harris, Bonnie Bedelia, Fraser Clarke Heston). Chacun revient sur l’histoire du film, sur les personnages et les conditions de tournage.

En plus de la bande-annonce (VF et VO), Rimini Editions propose la version longue TV du Bazaar de l’épouvante (en basse définition et format 1.33), pour la première fois en France. Une heure supplémentaire, durant laquelle, comme nous l’indiquons dans la critique, moult personnages sont développés. Cette version démarre également par une poursuite en voiture entre la Mercedes noire de 1955 (conduite par Leland Gaunt) et le shérif Alan Pangborn, qui conduit à l’explosion du premier véhicule. Dans les flammes, Pangborn croit apercevoir une silhouette qui l’observe, avant de disparaître. D’autres belles surprises viennent se greffer de façon fluide au montage cinéma que nous connaissions et lui donne une réelle plus-value.

Enfin, cette édition dispose du commentaire audio du réalisateur Fraser Clarke Heston (sur la version cinéma), conduit par son ami Walter Hudson. Visiblement enregistré à l’occasion de la sortie du Blu-ray aux Etats-Unis, qui coïncidait avec le vingtième anniversaire du film, ce commentaire n’est pas déplaisant et mérite qu’on y consacre deux heures. Certes, les deux intervenants n’évitent pas la redite et même la paraphrase avec ce qui se déroule à l’écran, mais on y apprend pas mal de choses, comme le fait que Peter Yates, le réalisateur de Bullitt, La Guerre de Murphy, Krull et L’Oeil du témoin avait été longtemps pressenti, avant de jeter l’éponge. Le metteur en scène revient sur les choix, les ajouts ou les sacrifices nécessaires à l’adaptation du roman de Stephen King, évoque son équipe technique, sa collaboration avec les comédiens, ainsi que les lieux de tournage (au Canada). Mais il aborde aussi la version longue diffusée à la télévision deux ans après la sortie du film sur les écrans, un montage qui n’est pas un Director’s Cut contrairement à ce que beaucoup de spectateurs peuvent penser, mais une sorte de mini-série en deux parties de 90 minutes.

L’Image et le son

Soyons honnêtes, Le Bazaar de l’épouvante ne brille pas par sa mise en scène et sa photographie, toutes les deux étant quelque peu discrètes et qui font même penser à un téléfilm de luxe. Néanmoins, l’apport HD sur ce titre n’est pas inutile et redonne même un beau coup de fouet aux partis-pris du chef opérateur (Alaska de Fraser Clarke Heston, la série Les 4400). Le grain argentique est doux et présent, les contrastes raffermis (hormis des noirs parfois déséquilibrés), le piqué agréable, les détails éloquents (les gros plans, les textures), les couleurs ravivées. Du point de vue propreté c’est aussi pas mal du tout, même si diverses poussières, des points et rayures minimes subsistent. Ce Blu-ray au format 1080p ne déçoit pas et s’avère même une bonne surprise. Un petit mot aussi sur la version longue, uniquement disponible en SD et format 4/3, qui s’en sort aussi très bien avec une belle clarté et une palette chromatique satisfaisante.

Les deux pistes DTS-HD Master Audio 5.1 anglaise et française proposent un confort acoustique très dynamique et immersif. Ces deux mixages parviennent sans mal à créer une spatialisation digne de ce nom avec des dialogues exsudés avec force, des effets et ambiances annexes riches, amples et variés. Nul besoin de monter le volume pour profiter pleinement de la bande-son. Les pistes Stéréo sont aussi de fort bon acabit. Les sous-titres français ne sont pas imposés et le doublage de qualité.

Crédits images : © Rimini Editions / Castle Rock Entertainment / MGM / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

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