Test Blu-ray / Magic, réalisé par Richard Attenborough

MAGIC réalisé par Richard Attenborough, disponible en Édition Collector Blu-ray + DVD + Livret le 12 février 2021 chez Rimini Editions.

Acteurs : Anthony Hopkins, Ann-Margret, Burgess Meredith, Ed Lauter, E.J. André, Jerry Houser, David Ogden Stiers, Lillian Randolph…

Scénario : William Goldman, d’après son roman

Photographie : Victor J. Kemper

Musique : Jerry Goldsmith

Durée : 1h47

Année de sortie : 1978

LE FILM

Corky est magicien et ventriloque. Il devient célèbre en faisant des tours de magie avec « Fats », la marionnette qu’il manipule sur scène et qui est à la fois son complice et un double de lui-même. « Fats » dit tout haut les pensées secrètes de Gorky et fait rire les spectateurs. A un moment critique de sa carrière, Corky fait un break et se retire à la campagne pour retrouver Peggy, l’amour de sa jeunesse. Progressivement, Fats prend l’ascendant sur son maître et lui dicte sa conduite.

Si Anthony Hopkins est devenu une star planétaire pour son rôle d’Hannibal Lecter dans Le Silence des agneaux The Silence of the Lambs (1991) de Jonathan Demme, il aurait tout aussi bien pu le devenir près de quinze ans auparavant grâce à son extraordinaire prestation dans le désormais culte Magic, réalisé en 1978 par Richard Attenborough. Le thème du lien étroit, voire fusionnel entre un marionnettiste – ventriloque et sa créature avait déjà inspiré le cinéma, à l’instar de The Unholy Three (1925) de Tod Browning, avec Lon Chaney (qui reprendra le même rôle dans un remake éponyme réalisé par Jack Conwey en 1930), The Great Gabbo (1929) avec Erich von Stroheim dans le rôle-titre (ainsi que coréalisateur non mentionné), l’un des sketches – celui mis en scène par Alberto Cavalcanti – du film collectif Au coeur de la nuit Dead of Night (1945), la comédie Un grain de folieKnock on Wood (1954) du tandem Melvin Frank et Norman Panama, avec Danny Kaye, sans oublier La Poupée diabolique Devil Doll (1964) de Lindsay Shonteff. Bien avant Dead Silence de James Wan (2007) et autres poupées meurtrières à la Puppet Master, Magic, reste encore une référence du genre épouvante, une immense réussite, génialement filmé par un Richard Attenborough (1923-2014) pourtant peu emballé au départ et qui a surtout accepté contre la promesse qu’on le laisse faire Ghandi par la suite, et magi(c)stralement interprété par Anthony Hopkins, diablement charismatique. Ce bijou parvient à rendre réaliste son pantin avec une économie de moyens, grâce à une indéniable maîtrise du cadre (gros plans remarquables) et du rythme, tout comme le sérieux avec lequel le cinéaste, qui revenait à un sujet plus intimiste après trois grosses machines (Ah Dieu ! Que la guerre est jolieOh ! What A Lovely War, Les Griffes du Lion Young Winston et Un pont trop loin A Bridge Too Far, 1969, 1972, 1977) aborde cette histoire.

Après l’échec de Charles « Corky » Withers (Anthony Hopkins) dans sa première tentative de magie professionnelle, son mentor Merlin (E. J. André) lui conseille de trouver LE truc qui le distinguera et lui permettra de percer dans le monde du spectacle. Un an plus tard, Corky revient en tant que magicien et ventriloque avec une marionnette au langage « fleuri » nommé Fats, devenant un énorme succès. Le puissant agent de Corky, Ben Greene (Burgess Meredith), est sur le point de le signer pour sa propre émission de télévision, mais Corky s’enfuit dans les Catskills, où il a grandi, prétendant avoir peur du succès. En vérité, Corky ne veut pas passer l’examen médical requis par la chaîne de télévision, de peur que les médecins découvrent qu’il souffre de graves problèmes mentaux et que même en dehors de la scène, il ne peut pas contrôler Fats, à travers lequel Corky exprime tout son refoulé. Dans les Catskills, Corky retrouve son béguin d’adolescent, Peggy Ann Snow (Ann-Margaret), coincée dans un mariage sans passion avec un ami de lycée de Corky, Duke (Ed Lauter). Corky et Peggy Ann entament une liaison, longtemps désirée par le ventriloque. Cela suscite la jalousie non seulement de Duke, mais aussi de Fats. Au milieu d’une dispute « entre » Corky et Fats, Ben Greene arrive à l’improviste et découvre la vérité sur l’état d’esprit de Corky. Ce dernier tente de se défendre en prétendant répéter son numéro. Greene le met à l’épreuve, en lui demandant de faire taire Fats pendant cinq petites minutes. Mais le ventriloque craque rapidement et tandis que Greene s’en va en lui disant qu’il l’aidera en faisant appel à quelques médecins spécialisés, Fats convainc Corky de le rattraper et de s’en débarrasser. Corky franchit le point de non-retour.

Magic est avant tout le portrait d’un homme malade, introverti et timide maladif, qui n’a jamais su ou pu s’exprimer ou trouver le moyen de le faire. Jusqu’à ce qu’il crée Fats, qui lui permet enfin de déverser, pour ne pas dire vomir, tout le mal-être qui l’habite depuis toujours. Le suspense est savamment orchestré et maintenu avec une histoire secondaire – une histoire d’amour fantasmée devient réalité et sonne comme un espoir vers la guérison pour Corky – tout à fait passionnante, surtout que ce point du récit offre à la splendide Ann-Margret (Le Kid de Cincinnati, Le Prophète, Tommy) un de ses plus beaux rôles. Arrivé à un carrefour de sa vie à l’aube de ses quarante ans, Corky doit encore lutter contre son avatar, qui semble prendre l’ascendant sur son créateur à mesure que ce dernier se rapproche de Peggy Ann. Autant Corky est gentil et effacé, autant Fats est vulgaire et agressif, et cette part de la personnalité de Corky prend petit à petit le dessus sur le reste. Chapeau bas à Anthony Hopkins, très crédible dans la peau du magicien-ventriloque (il a suivi quelques semaines de cours et d’entraînements auprès de spécialistes), mais aussi sensationnel quand il rend compte de la psyché perturbée de son personnage, qu’il rend attachant, sans jamais évincer la part d’ombre qui l’envahit et le grignote progressivement, au point de commettre l’irréparable. Le dialogue entre le pantin et son «  maître  » est ambigu, violent, sombre, comme s’ils allaient en venir… aux mains. Parfois, Fats semble ne pas avoir besoin d’être manipulé par Corky, impression renforcée au détour d’un plan où les yeux du pantin bougent alors que Corky s’est éloigné. Vraisemblablement une erreur de montage, mais on peut penser finalement que Richard Attenborough ait conservé tout de même ce plan car Magic est après tout une plongée dans l’âme perturbée de Corky, qui perçoit sa marionnette comme un être devenu indépendant, né d’un prolongement de lui-même.

Basé sur un scénario aussi intelligent que machiavélique, bouleversant et imprégné d’humour noir, cette adaptation du roman de William Goldman (qu’il transpose lui-même), oscarisé pour Butch Cassidy et le Kid de George Roy Hill, à qui l’on doit aussi – rien que ça – Marathon Man (1976) et Les Hommes du président (1976), bercé par la sublime partition – toujours teintée de mélancolie – de Jerry Goldsmith et marqué par l’impressionnante photographie de Victor J. Kemper (Husbands, Votez McKay, Un après-midi de chien, Les Yeux de Laura Mars), Magic est un très grand et immanquable classique du thriller psychologique.

LE COMBO BLU-RAY + DVD + LIVRET

Rimini Editions frappe fort une fois de plus avec cette magnifique édition collector Blu-ray + DVD + Livret de Magic, que les très nombreux fans du film attendaient depuis belle lurette en Haute-Définition ! C’est désormais chose faite avec ce Combo qui complète l’impose collection de l’éditeur consacrée au cinéma fantastique et d’épouvante. Superbe packaging à trois volets, reposant dans un fourreau cartonné au visuel démentiel. Le menu principal est animé et musical.

Le premier supplément de cette édition est une interview d’Anthony Hopkins (6’) réalisée à la sortie du film pour une chaîne de télévision espagnole, puisque le journaliste s’adresse aux téléspectateurs dans cette langue, puis traduit à la fois ses questions et les réponses du comédien. Anthony Hopkins, manipulant une pièce et faisant quelques démonstrations de ses nouveaux talents de magiciens et de ventriloque, revient sur l’histoire de Magic et sur la psychologie de son personnage.

Anthony Hopkins intervient encore une fois à travers une interview radiophonique (3’), illustrée par des images filmées sur le plateau de Magic et par des scènes ratées comme un bêtisier. L’acteur évoque son enfance difficile marquée par une timidité maladive, jusqu’à sa découverte du théâtre, qui lui a permis de s’exprimer et de se sentir mieux dans sa peau. Il y parle aussi de son travail avec Richard Attentborough (leur troisième film en commun), ainsi que de sa formation de ventriloque auprès de Dennis Alwood, professionnel et artiste reconnu, que l’on reverra un peu plus loin dans les bonus.

Place au directeur de la photographie Victor J. Kemper (2006-11’) de s’exprimer sur Magic, sur lequel il a visiblement eu beaucoup de plaisir à travailler. Dans cet entretien, le mythique chef opérateur (né en 1927) revient sur la façon dont il a éclairé certaines séquences, ainsi que sur les partis-pris qui prolongent et appuient la vision du réalisateur, à travers la création des ombres ou des éclairages spécifiques.

Un petit module d’une minute compile quelques images provenant des tests maquillages de la superbe Ann-Margret.

La bande-annonce, ainsi que des spots TV et radios complètent cette interactivité.

Uniquement disponible sur le Blu-ray, vous trouverez aussi un documentaire – vaguement teasé durant l’interview de Victor J. Kemper – consacré à l’histoire du ventriloquisme à travers les siècles, en compagnie de Dennis Alwood, ventriloque professionnel, conseiller technique sur Magic et aussi celui qui aura permis à Anthony Hopkins d’apprendre cet art quelques semaines avant le début des prises de vues (2006-27’). Dennis Alwood aborde les origines du ventriloquisme, passe en revue les artistes les plus célèbres en la matière et explique comment lui est venue cette vocation durant son enfance. Il présente ensuite son personnage, Dudley, qui prend évidemment la parole, avant d’énumérer les films mettant en scène des personnages ventriloques. Puis, Dennis Alwood en vient plus précisément à Magic, qui à l’origine devait être réalisé par Norman Jewison avec Jack Nicholson en vedette et Laurence Olivier dans le rôle de l’agent. Après le départ du cinéaste, rapidement suivi de celui du comédien, les noms d’Al Pacino, de Gene Wilder et de Chevy Chase ont circulé, avant que Richard Attenborough (qui reprenait alors le flambeau derrière la caméra en échange de la promesse qu’on le laisser réaliser Ghandi) propose Anthony Hopkins pour le rôle principal, avec lequel il avait déjà tourné à deux reprises. Enfin, le ventriloque s’empare de Fats, qui n’a pas vieilli, la marionnette s’exprimant à son tour sur le travail de et avec Anthony Hopkins.

Et n’oublions pas le livret de 24 pages concocté par Marc Toullec, cette fois encore illustré par quelques photos et affiches d’exploitation, et qui revient surtout le thème de la poupée maléfique au cinéma, ainsi que sur les étapes de la production et la sortie de Magic.

L’Image et le son

Encore une belle réussite technique que ce master HD – Blu-ray au format 1080p. Les couleurs sont rafraîchies, la copie est stable, la restauration très élégante, les contrastes denses, le piqué agréable, tout comme la patine argentique bien équilibrée (en dehors de deux ou trois plans plus grumeleux) et gérée. Certaines séquences sortent du lot, avec de nombreux détails très appréciables au niveau des décors, mais également et surtout sur les gros plans. Une définition très solide qui participe à la (re)découverte de Magic, qui trouve enfin un écrin digne de ce nom et qui lui revenait de droit. Merci Rimini !

Magic est disponible en version originale et française DTS-HD Master Audio 2.0. La première instaure un confort acoustique plaisant avec une délivrance suffisante des dialogues, des effets annexes convaincants et surtout une belle restitution de la musique de Jerry Goldsmith. La piste française est du même acabit, avec un doublage très soigné. Les deux options acoustiques sont propres et dynamiques. Les sous-titres français ne sont pas imposés.

Crédits images : © Rimini Editions / Joseph E. Levine Presents Inc. / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

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