Test Blu-ray / J’ai le droit de vivre, réalisé par Fritz Lang

J’AI LE DROIT DE VIVRE (You Only Live Once) réalisé par Fritz Lang, disponible en Combo Blu-ray + DVD le 29 mars 2023 chez Studiocanal.

Acteurs : Sylvia Sidney, Henry Fonda, Barton MacLane, Jean Dixon, William Gargan, Jerome Cowan, Charles ‘Chic’ Sale, Margaret Hamilton, Warren Hymer, Guinn ‘Big Boy’ Williams, John Wray, Walter De Palma…

Scénario : Gene Towne & C. Graham Baker

Photographie : Leon Shamroy

Musique : Alfred Newman

Durée : 1h26

Date de sortie initiale : 1937

LE FILM

Après sa sortie de prison, Eddie Taylor ne peut profiter d’un répit. Accusé d’un braquage de banque meurtrier qu’il n’a pas commis, il est emprisonné à tort. Alors que la justice se rend compte de son erreur, Eddie Taylor s’évade. Il devient un véritable meurtrier en abattant accidentellement un aumônier. Il doit partir en cavale avec sa femme Joan et son bébé. Sa fuite éperdue se finit par sa mort, abattu par la police.

Ensemble, nous avons déjà eu l’occasion de revenir à plusieurs reprises sur les débuts et la carrière de Fritz Lang en Allemagne à travers nos chroniques sur Les Trois Lumières, Le Testament du Dr. Mabuse et M Le Maudit, ainsi que sur son passage aux États-Unis après avoir fui le nazisme, pour les sorties en Blu-ray des Pionniers de la Western Union, Espions sur la Tamise et Les Bourreaux meurent aussi. 1936, sort FurieFury, pamphlet sur le lynchage produit par Joseph L. Mankiewicz pour le compte de la MGM. Sur cette lancée, Fritz Lang se lance dans J’ai le droit de vivre You Only Live Once, qui déboule sur les écrans dès l’année suivante, dans lequel le réalisateur dirige à nouveau la magnifique Sylvia Sidney, qui tenait l’affiche de son précédent long-métrage. Considéré comme le second volet d’une trilogie dite judiciaire voulue « réaliste et sociale » à laquelle viendra se greffer Casier judiciaireYou and Me, toujours avec la même comédienne, J’ai le droit de vivre est une tragédie centrée sur un couple pourchassé par la police, qui serait inspirée par l’histoire de Bonnie et Clyde. Pas étonnant que Fritz Lang donne cette impression d’inventer « le Nouvel Hollywood » trente ans avant, surtout durant la dernière partie et la violence inédite de son dénouement. Ce serait un cliché de dire que « tout Fritz Lang se trouve » dans J’ai le droit de vivre, mais puisque c’est le cas…le thème du faux coupable ou plutôt de la culpabilité est le noyau central de You Only Live Once, merveilleux film porté par un casting exceptionnel mené par le couple Henry Fonda-Sylvia Sidney, le tout sublimement photographié par Leon Shamroy, chef opérateur de Bravados d’Henry King et de La Planète des singes de Franklin J. Schaffner. Un monument intemporel.

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Test Blu-ray / Agent 077 : Operation Sexy, réalisé par Jess Franco

AGENT 077 : OPÉRATION SEXY (La Muerte silba un blues) réalisé par Jess Franco, disponible en Combo Blu-ray + DVD le 7 mars 2023 chez Artus Films.

Acteurs : Conrado San Martín, Danik Patisson, Perla Cristal, Georges Rollin, Manuel Alexandre, María Silva, Adriano Domínguez, Marta Reves…

Scénario : Jess Franco & Luis de Diego

Photographie : Juan Mariné

Musique : Antón García Abril

Durée : 1h18

Date de sortie initiale : 1964

LE FILM

En Amérique du Sud, le trompettiste Julius et son ami Castro passent en fraude un chargement d’armes pour le compte de Bekell. Alors que Castro est abattu par une patrouille, Smith va en prison. Quinze ans plus tard, il est enfin libéré et découvre que la veuve de son ami, Lina, est désormais mariée à Bekell. Julius devient gênant pour ce dernier. Se sentant menacé, il balance toute l’histoire au commissaire Fenton.

Quand on regarde le début de la carrière de Jess Franco, on se rend compte qu’il était déjà difficile de découvrir quel film avait été fait avant l’autre, certaines sources donnant des dates de sortie différentes, parfois à un ou deux ans près, souvent plus. En l’état, Agent 077, opération Jamaïque, ou Agent 077 : Opération Sexy, auquel on préférera le titre original ô combien plus approprié et par ailleurs poétique, La Muerte silba un blues se situe entre Le Sadique Baron Von KlausLa Mano de un hombre muerto et Les Maîtresses du Docteur JekyllEl Secreto del Dr. Orloff et s’avère un nouveau film noir pour le cinéaste. Comme ce sera le cas plus tard, cet opus apparaît quasiment comme un film miroir à Chasse à la mafia, puisqu’on y retrouve pour ainsi dire exactement les mêmes ingrédients, la même ambiance, l’atmosphère enfumée d’un night-club où officient bien sûr un orchestre de jazz et une chanteuse à la voix enivrante, mais aussi où se (dé)font certaines affaires louches. Plus maîtrisé que Rififí en la ciudad,La Muerte silba un blues est un solide polar, sur lequel plane encore l’ombre d’Orson Welles, mais avec lequel Jess Franco s’affranchit de plus en plus de ses références, peaufine sa direction d’acteurs, tout en livrant un formidable divertissement aux spectateurs.

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Test Blu-ray / Chasse à la mafia, réalisé par Jess Franco

CHASSE À LA MAFIA (Rififí en la ciudad) réalisé par Jess Franco, disponible en Combo Blu-ray + DVD le 7 mars 2023 chez Artus Films.

Acteurs : Fernando Fernán Gómez, Jean Servais, Laura Granados, Antonio Prieto, Robert Manuel, Maria Vincent, Dina Loy, Agustín González…

Scénario : Jess Franco, Gonzalo Sebastián de Erice & Juan Cobos, d’après le roman de Charles Exbrayat

Photographie : Godofredo Pacheco

Musique : Daniel J. White

Durée : 1h40

Date de sortie initiale : 1963

LE FILM

L’indicateur de l’Inspecteur Miguel Ruiz, Paco, barman au Stardust, a été assassiné avant d’avoir eu le temps de le renseigner sur un armateur puissant, qui est aussi un politicien influent, Leprince. De plus son chef n’est pas d’accord pour qu’il continue à enquêter sur Leprince, ayant peur des conséquences ! Peu après, un inconnu poignarde tous les participants à ce meurtre. Mais cela ne va pas arrêter Ruiz…

Quand il tourne Chasse à la mafia, Jesús Franco Manera, ou Jess Franco, en est encore au début de sa (très) longue et (très) prolifique carrière, ayant signé son premier long-métrage Tenemos 18 años (1959) que quatre ans années auparavant. Cinq autres opus se succéderont tout de suite après, révélant l’éclectisme et l’efficacité du bonhomme derrière la caméra. Le film noir se distingue bel et bien dans la première partie de l’oeuvre de Jess Franco avec Opération Lèvres RougesLabios rojos ou ce Chasse à la MafiaRififí en la ciudad qui nous intéresse aujourd’hui. I s’agit de l’adaptation du roman Vous souvenez-vous de Paco ? de Charles Exbrayat, publié en 1958, transposé dans un pays imaginaire d’Amérique Centrale, où l’on retrouve un casting franco-espagnol (coproduction oblige), sur lequel trône le suintant et impérial Jean Servais (L’Homme de Rio, Au service du diable, La Fièvre monte à El Pao, La Roue). Le titre original renvoie directement à Du rififi chez les hommes, chef d’oeuvre de Jules Dassin (1958), interprété par Jean Servais, qui avait manifestement marqué le cinéphile Jess Franco. Chasse à la mafia est un brillant exercice de style(s), où le réalisateur se fait plaisir en jouant avec les angles de prises de vue, qui rappellent bien sûr le travail d’Orson Welles, que ce dernier remarquera au point de contacter Jess Franco pour lui confier la direction de la seconde équipe de Chimes at midnight Falstaff. Mais pour l’heure, Rififí en la ciudad enchaîne les allers-retours dans un night-club où le jazz ne s’arrête jamais et où le champagne coule à flots, tandis que s’affrontent en coulisses des sbires à la mine patibulaire sur fond de disparition d’un indic séducteur et charismatique. Un « petit » Jess Franco, mais bourré de charme.

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Test Blu-ray / Les Criminels, réalisé par Joseph Losey

LES CRIMINELS (THE CRIMINAL) réalisé par Joseph Losey, disponible en combo Blu-ray+DVD le 31 août 2022 chez Studiocanal

Acteurs : Stanley Baker, Margit Saad, Sam Wanamaker, Jill Bennett, Patrick Magee, Grégoire Aslan…

Scénario : Alun Owen

Photographie : Robert Krasker

Musique : Johnny Dankworth

Durée : 1h38

Date de sortie initiale : 1960

LE FILM

Prisonnier au long cours, Johnny Bannion a profité de son dernier séjour derrière les barreaux pour organiser, en collaboration avec ses complices habituels et grâce au réseau de caïds et de gardiens corrompus de l’établissement pénitentiaire, le casse d’un champ de courses. À sa sortie de prison, les ennuis commencent avec son ex-petite amie qui fait un esclandre lors d’une soirée organisée en son honneur par ses associés. Puis ce sont lesdits associés qui, au grand étonnement de Johnny, ne semblent plus vouloir jouer le jeu selon les anciennes règles…

C’est toujours un bonheur de voir revenir chez plusieurs éditeurs toute une filmographie par petites touches, lorsqu’il s’agit d’un cinéaste aussi énorme et aussi peu considéré que Joseph Losey. Fleuron de sa période anglaise que l’on pourrait qualifier d’intermédiaire, The Criminal (le pluriel du titre français change tout !) est une œuvre extrêmement curieuse, qui pourrait paraître bancale si l’on décidait de ne la regarder que comme un film de genre régi par les motifs et les codes consacrés. Mais elle ne surprendra aucunement de la part de celui qui fut en son temps le plus européen des cinéastes américains, et dont le moins qu’on puisse dire est que le compromis esthétique n’a jamais été son fort ! Quand tel ou tel aspect d’un script n’intéresse pas Losey, on s’en rend compte très vite : ses trajectoires ont souvent de quoi surprendre, mais elles sont toujours franches, on ne peut que s’en féliciter.

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Test Blu-ray / Des filles disparaissent, réalisé par Douglas Sirk

DES FILLES DISPARAISSENT (LURED) réalisé par Douglas Sirk, disponible en combo Blu-ray+DVD le 31 août 2022 chez Studiocanal

Acteurs : Lucille Ball, Charles Coburn, George Sanders, Sir Cedric Hardwicke, Boris Karloff…

Scénario : Leo Rosten, d’après une histoire de Jacques Companéez, Ernest Neuville et Simon Gantillon

Photographie : William H. Daniels

Musique : Michel Michelet

Durée : 1h43

Date de sortie initiale : 1947

LE FILM

Attirant ses proies féminines en publiant des petites annonces, un tueur en série sévit dans le Londres des années 1940, signant chacun de ses meurtres par un poème aux accents romantiques qu’il poste le soir même à la police pour annoncer le prochain forfait. Sandra Carpenter, entraîneuse dans un dancing, voit justement l’une de ses collègues disparaître après avoir répondu à une petite annonce. De témoin volontaire, la séduisante jeune femme devient un appât de choix quand l’inspecteur chargé de l’enquête estime que son profil pourrait attirer, à son tour, le mystérieux criminel.

Il serait malhonnête d’affirmer que le style de Douglas Sirk, véritable canon esthétique des années 1950, éclate déjà dans ce Lured (brillant titre original !) si peu représentatif de ce que l’immense cinéaste aura laissé comme héritage au septième art. Le film n’en est pas moins époustouflant de maîtrise, dès l’ouverture qui saisit en quelques secondes elliptiques la lecture d’une petite annonce par la future victime prenant son bus de nuit, puis son rendez-vous avec le tueur insaisissable – silhouette anonyme filmée soit en contre-jour, soit via un détail de son corps ou son ombre portée sur les murs et les pavés de la chaussée –, enfin le poème que ce dernier compose sur sa machine à écrire et qui sera dépouillé dans les locaux de Scotland Yard, lançant le récit proprement dit.

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Test Blu-ray / Le Coup de l’escalier, réalisé par Robert Wise

LE COUP DE L’ESCALIER (Odds Against Tomorrow) réalisé par Robert Wise, disponible en Combo Blu-ray + DVD le 20 septembre 2022 chez Rimini Editions.

Acteurs : Harry Belafonte, Robert Ryan, Shelley Winters, Ed Begley, Gloria Grahame, Will Kuluva, Kim Hamilton, Mae Barnes…

Scénario : John O. Killens & Nelson Gidding, d’après le roman de William P. McGivern

Photographie : Joseph C. Brun

Musique : John Lewis

Durée : 1h33

Date de sortie initiale : 1959

LE FILM

Dave Burke, ancien policier licencié injustement, décide de préparer un cambriolage dont le plan semble facilement réalisable. Pour cela, il a besoin d’Earle Slater, un ancien soldat ne réussissant pas à retrouver sa place dans la société, et de Johnny Ingram, un chanteur noir criblé de dettes. Mais Slater est un raciste et Ingram est réticent à l’idée de sombrer dans la criminalité…

Ce n’est pas tous les jours que nous pouvons parler de Robert Wise (1914-2005), qui avec Richard Fleischer reste probablement l’un des plus grands artisans éclectiques et prolifiques de l’histoire du cinéma hollywoodien. Plus de soixante-cinq ans de carrière, dix ans au banc de montage, cinquante-cinq passés derrière la caméra, plus de quarante films au compteur. Quelques titres emblématiques ? Est-ce vraiment nécessaire ? D’accord, rien que pour le plaisir de les nommer et histoire de convoquer quelques extraits dans les mémoires : La Malédiction des hommes-chats, Le Récupérateur de cadavres, Né pour tuer, Nous avons gagné ce soir, Le Jour où la Terre s’arrêta…, Je veux vivre !, West Side Story, La Maison du diable, La Mélodie du bonheur, La Canonnière du Yang-Tsé, Le Mystère Andromède, L’Odyssée du Hinderburg, Audrey Rose, Star Trek, le film…Prenez un petit moment pour savourer ces réminiscences…C’est bon ? Si la liste ne saurait être exhaustive, il y en a un que l’on ne saurait omettre quand on évoque Robert Wise. Il s’agit d’Odds Against Tomorrow, plus connu en France sous le titre Le Coup de l’escalier, le dernier opus du cinéaste mis en scène dans les années 1950, son dix-huitième long-métrage de la décennie, emballé juste avant West Side Story, qu’il signera d’ailleurs avec Jerome Robbins. S’il n’atteint peut-être pas la puissance dramatique de Quand la ville dort The Asphalt Jungle (1950) de John Huston, Le Coup de l’escalier, souvent cité comme le chant du cygne du film noir américain avec L’Ultime Razzia The Killing de Stanley Kubrick, est une référence intemporelle du genre, où des personnages au bout du rouleau participent à un braquage, même s’ils n’y croient pas ou plus, avant même de s’être lancés. À l’instar de John Huston, Robert Wise s’avère plus intéressé par les protagonistes eux-mêmes et leurs motivations, plutôt que par le casse proprement dit. Comme son confrère, il les ancre dans une réalité crépusculaire (magnifique photo) marquée par l’échec. Le Coup de l’escalier est un film noir à part, centré sur un afro-américain interprété par Harry Belafonte (à l’origine du projet) et traitant ouvertement de la ségrégation et de la discrimination. Le film sera récompensé par un Golden Globe spécial pour sa « promotion de la compréhension internationale ». Pamphlet antiraciste, Le Coup de l’escalier se clôt sur la morale irréfutable : blancs ou noirs, les hommes sont tous égaux face à la mort et chacun retournera à l’état de poussière. Vous avez dit chef d’oeuvre ?

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Test Blu-ray / Si j’étais un espion, réalisé par Bertrand Blier

SI J’ÉTAIS UN ESPION réalisé par Bertrand Blier, disponible en Édition Collector Blu-ray + DVD le 20 juillet 2022 chez Pathé.

Acteurs : Bernard Blier, Bruno Cremer, Patricia Scott, Claude Piéplu, Pierre Le Rumeur, Jacques Sempey, Francis Lax, Jacques Rispal, Suzanne Flon…

Scénario : Jacques Cousseau, Jean-Pierre Simonot, Philippe Adrien & Bertrand Blier

Photographie : Jean-Louis Picavet

Musique : Serge Gainsbourg

Durée : 1h34

Année de sortie : 1967

LE FILM

Un docteur s’attire des problèmes à cause de l’un de ses patients. En effet, cet homme dépressif semble recherché par une bande de mafieux. Ceux-ci menacent alors le médecin de s’en prendre à sa fille s’il ne les aide pas… Il va alors tout faire pour sortir de cette situation très dangereuse pour lui et sa famille.

Bertrand Blier Begins ! Il y a eu un avant et un après Les Valseuses, c’est évident. Où en était la carrière du réalisateur avant cette année 1974 centrale ? Né en 1939, le fils de Bernard Blier passe derrière la caméra à l’âge de 24 ans pour un formidable documentaire intitulé Hitler, connais pas, une enquête sur la jeunesse de l’époque, qui passe complètement inaperçu avec seulement 40.000 entrées. Parallèlement, il poursuit sa fonction d’assistant-réalisateur auprès de Georges Lautner (Arrêtez les tambours, En plein cirage, Le Monocle noir, Le Septième juré), dans lesquels joue son père. En 1966, il signe son unique court-métrage, La Grimace, avec Jacques Perrin et Bernard Haller. L’année d’après, Bertrand Blier livre son premier long-métrage de fiction, Si j’étais un espion (sous-titré « Breakdown »), un film d’espionnage qu’il coécrit avec Jacques Cousseau, Jean-Pierre Simonot et Philippe Adrien (Cocktail Molotov de Diane Kurys), d’après une histoire d’Antoine Tudal (Cybèle ou les dimanches de Ville d’Avray). Rétrospectivement, Si j’étais un espion détonne dans la filmographie conséquente de son auteur, car peu d’humour, le ton y est premier degré et il s’agit au passage de son seul opus en N&B (très belle photo de Jean-Louis Picavet, Mille milliards de dollars, I…comme Icare, La Mort de Belle). Bertrand Blier y dirige son père Bernard, qu’il retrouvera pour Calmos (1976) et Buffet froid (1979), et bien sûr le comédien y est cette fois encore prodigieux. En l’état, même s’il n’annonce pas véritablement le « style » Blier à venir, Si j’étais un espion demeure forcément une grande curiosité, que les cinéphiles ne manqueront sûrement pas.

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Test Blu-ray / Une âme perdue, réalisé par Lewis Allen

UNE ÂME PERDUE (So Evil My Love) réalisé Lewis Allen, disponible en Combo Blu-ray + DVD le 5 juillet 2022 chez Rimini Editions.

Acteurs : Ray Milland, Ann Todd, Geraldine Fitzgerald, Leo G. Carroll, Raymond Huntley, Raymond Lovell, Martita Hunt, Moira Lister…

Scénario : Ronald Millar & Leonard Spigelgass, d’après le roman de Joseph Shearing

Photographie : Mutz Greenbaum

Musique : William Alwyn

Durée : 1h45

Date de sortie initiale : 1948

LE FILM

Londres, à la fin du XIXè siècle. Une jeune veuve naïve, Olivia Harwood, rencontre le charmant Mark Bellis, artiste de son état, qui ne tarde pas à louer une chambre dans la pension de famille que vient d’ouvrir la jeune femme. Très vite, ils deviennent amants. Mais Mark est un escroc qui pourrait l’entraîner sur la voie du chantage et du meurtre.

Est-ce que le nom de Lewis Allen (1905-2000) interpelle les cinéphiles ? Sans doute et ce en raison de La Falaise mystérieuse (1944), également connu sous son titre original The Uninvited, qui a marqué une étape importante dans le genre fantastique. Le metteur en scène du célèbre Je dois tuer Suddenly (1954) avec Frank Sinatra, signait alors des premiers longs métrages centrés sur une histoire de fantômes, en abordant les revenants avec «réalisme». Loin des comédies à la Scooby-Doo qui prenaient souvent comme cadre une maison hantée avec quelques comiques de l’époque qui s’enfuyaient en grimaçant et en levant les bras à chaque apparition d’un fantôme au drap blanc percé, The Uninvited plongeait les spectateurs dans un environnement concret, renforçant ainsi les effets d’épouvante. Sorti en 1948, Une âme perdue So Evil My Love est la troisième collaboration de Lewis Allen avec le comédien Ray Milland, après La Falaise mystérieuse, Suprême aveu The Imperfect Lady (1947) et juste avant Sealed Verdict. Tout va pour le mieux pour l’acteur britannique, tout juste auréolé de l’Oscar et du prix d’interprétation à Cannes pour Le Poison The Lost Weekend de Billy Wilder. Les réalisateurs de renom l’emploient à tour de rôle, de Fritz Lang (Espions sur la Tamise Ministry of Fear) à Frank Borzage (Voyage sans retour Till We Meet Again), en passant par John Farrow (Californie terre promise California). Inspiré par un fait divers, Une âme perdue est un étonnant mélange des genres, un drame victorien, un thriller psychologique, une romance contrariée, des ingrédients qui peuvent paraître hétérogènes, mais qui contre toute attente se mixent parfaitement, pour notre plus grand plaisir.

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Test Blu-ray / Le Salaire du Diable, réalisé par Jack Arnold

LE SALAIRE DU DIABLE (Man In the Shadow) réalisé Jack Arnold, disponible en Combo Blu-ray + DVD le 15 février 2022 chez Rimini Editions.

Acteurs : Jeff Chandler, Orson Welles, Colleen Miller, Ben Alexander, Barbara Lawrence, John Larch, James Gleason, Royal Dano…

Scénario : Gene L. Coon

Photographie : Arthur E. Arling

Musique : Hans J. Salter & Herman Stein

Durée : 1h17

Date de sortie initiale : 1957

LE FILM

Ben Sadler est le shérif d’une petite ville, cernée de terres appartenant au puissant Virgil Renchler, propriétaire d’un ranch florissant où travaillent de très nombreux clandestins mexicains. Un soir, le contremaître du ranch tue l’un des employés. Renchler va tout mettre en oeuvre pour empêcher le shérif de mener l’enquête.

Spécialiste des séries B, John Arnold Waks alias Jack Arnold (1916-1992) n’en est pas moins un immense réalisateur. Bien que disposant de budgets très modestes, le cinéaste a toujours su transcender son postulat de départ minimaliste…pour aller vers le gigantisme. Prolifique, Jack Arnold prend son envol dans les années 1950 où il enchaîne les films qui sont depuis devenus de grands classiques : Le Météore de la nuit (1953), L’Etrange Créature du lac noir (1954), La Revanche de la créature (1955), Tarantula (1955), L’Homme qui rétrécit (1957) d’après l’oeuvre de Richard Matheson, sans oublier La Souris qui rugissait (1959). Au total, près d’une vingtaine de longs-métrages tournés à la suite, toujours marqués par le professionnalisme et le talent de son auteur, combinant à la fois les effets spéciaux alors à la pointe de la technologie, des personnages ordinaires et attachants, plongés malgré eux dans une histoire extraordinaire. Le film qui nous intéresse aujourd’hui est Le Salaire du diable, tout de suite mis en scène par Jack Arnold après L’Homme qui rétrécit et se révèle être une passerelle dressée entre le western et le film noir. Le cinéaste avait d’ailleurs déjà abordé les deux genres, avec Tornade sur la ville The Man from Bitter Ridge et Crépuscule sanglant Red Sundown d’un côté (il y reviendra avec le formidable Une balle signée X No Name on the Bullet, un des meilleurs films avec Audie Murphy), et Le Crime de la semaine The Glass Web de l’autre. Avec Le Salaire du diable Man In The Shadow, Jack Arnold revient à une épure après son merveilleux film fantastique. Il en résulte un polar rural bluffant de maîtrise, sec et brutal, qui annonce les romans de James Lee Burke, dans lequel le génial Jeff Chandler crève l’écran une fois de plus en shérif droit et intègre, prêt à se mettre la ville à dos pour que justice soit faite. Un immanquable pour les cinéphiles.

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Test Blu-ray / Reminiscence, réalisé par Lisa Joy

REMINISCENCE réalisé par Lisa Joy, disponible en DVD, Blu-ray et 4K UHD le 23 décembre 2021 chez Warner Bros.

Acteurs : Hugh Jackman, Rebecca Ferguson, Thandiwe Newton, Cliff Curtis, Marina de Tavira, Daniel Wu, Mojean Aria, Brett Cullen…

Scénario : Lisa Joy

Photographie : Paul Cameron

Musique : Ramin Djawadi

Durée : 1h56

Date de sortie initiale : 2021

LE FILM

Dans un futur proche, Miami a été submergé par les flots, suite aux effets du changement climatique. Un enquêteur privé, Nick Bannister, est engagé par des clients afin de retrouver leurs précieux souvenirs. Au cours de sa dernière affaire, il tombe éperdument amoureux de sa cliente. A sa disparition, le détective est désemparé et se lance à sa recherche. Il se retrouve alors perdu dans une boucle temporelle et découvre des aspects de sa personnalité qu’il ne connaissait pas auparavant.

Une bande-annonce, un concept et même une affiche qui fait bougrement penser à Inception…et quand on creuse, on se rend compte que Reminiscence est le premier long-métrage de Lisa Joy, qui n’est autre qu’une des créatrices, scénaristes et réalisatrices de la série HBO Westworld et la compagne de Jonathan Nolan, le frère de celui dont on ne doit pas prononcer le nom sur Homepopcorn. Et on est conquis. Pas de style boursouflé à la Christopher Nolan (ah zut, on l’a dit), aucun ennui non plus, rien de prétentieux, Reminiscence est un film de science-fiction néo-noir qui repose sur un scénario très intelligent, qui comblera à la fois les amateurs de SF sophistiquée, mais aussi les cinéphiles nourris de références au cinéma américain des années 1940-50. Porté par un casting quatre étoiles, avec Hugh Jackman en tête, Reminiscence s’est mangé un sacré bide au box-office, ne rapportant que 15 millions de dollars dans le monde entier, pour une mise de départ (hors promotion) de 70 millions. Pourtant, il s’agit de ce qu’on a vu de plus enthousiasmant ces derniers mois dans le genre, d’autant plus que Reminiscence mise sur ce qui a systématiquement fait défaut dans la famille Nolan, l’émotion. Une bien belle découverte.

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