LA VOLEUSE réalisé par Jean Chapot, disponible en DVD le 29 mai 2020 chez Doriane Films.
Acteurs : Romy Schneider, Michel Piccoli, Hans Christian Blech, Sonja Schwarz, Mario Huth…
Scénario : Jean Chapot, Marguerite Duras
Photographie : Jean Penzer
Musique : Antoine Duhamel
Durée : 1h24
Date de sortie initiale : 1966
LE FILM
Julia avoue à son mari qu’elle a un fils de six ans. L’enfant n’était qu’un nourrisson lorsqu’elle l’a confié à un couple à qui elle veut, coûte que coûte, le reprendre aujourd’hui. Un drame se noue, opposant au père nourricier cette mère prête à tout pour se délivrer de ses remords et de sa folie.
Quelques années avant de former un couple magnifique devant la caméra de Claude Sautet dans Les Choses de la vie en 1970, Romy Schneider et Michel Piccoli partageaient déjà l’affiche d’un film aujourd’hui un peu oublié : La Voleuse. Il s’agit du premier long-métrage du réalisateur Jean Chapot qui ne mettra en scène qu’un second film, Les Granges brûlées, dont le tournage chaotique l’éloignera définitivement du cinéma. Jean Chapot poursuivra sa carrière principalement en tant que scénariste et metteur en scène pour la télévision.
POURSUITE DANS LA NUIT (Nightfall) réalisé par Jacques Tourneur, disponible en Combo Blu-ray + DVD le 19 août 2020 chez Rimini Editions.
Acteurs : Aldo Ray, Brian Keith, Anne Bancroft, Jocelyn Brando, James Gregory, Frank Albertson, Rudy Bond, Steve Carruthers…
Scénario : Stirling Silliphant d’après le roman de David Goodis
Photographie : Burnett Guffey
Musique : George Duning
Durée : 1h19
Date de sortie initiale : 1956
LE FILM
James Vanning est un homme simple et tranquille. Mais l’argent d’un casse a disparu et deux malfrats extrêmement dangereux pensent qu’il est en sa possession. Vanning devient un homme en fuite, traqué par ces malfrats, filé par l’enquêteur de la compagnie d’assurance. Marie Gardner, un mannequin qu’il rencontre par hasard, s’embarque bientôt avec lui dans cette aventure qui les emmènera dans les montagnes enneigées du Wyoming…
Dans les années 1950, les studios hollywoodiens évoluent et les cinéastes sont de plus en plus nombreux à produire leurs propres films. Metteur en scène depuis les années 30, Jacques Thomas alias Jacques Tourneur (1904-1977) ne se considère pas comme un homme d’affaires mais comme un artisan, un menuisier plus précisément, et n’a que faire de ces maisons de production qui fleurissent un peu partout en Californie. A la recherche d’un projet susceptible de l’intéresser, il se voit proposer l’adaptation d’un roman de David Goodis, Nightfall ou Convicted, ou bien encore The Dark Chase, publié en 1950 en France sous le titre La nuit tombe, sur un scénario de Stirling Silliphant (Dans la chaleur de la nuit, Les Flics ne dorment pas la nuit, La Tour infernale) qui dormait depuis dix ans dans les tiroirs de la Columbia. Si la grande époque du film noir est révolue, Jacques Tourneur, après avoir signé quelques westerns, y voit de quoi innover et décide de remplacer le noir par le blanc immaculé des neiges du Wyoming, partis pris qui inspireront probablement les frères Coen pour l’exceptionnel Fargo (1996). La même année que Rendez-vous avec la peur – Night of the Demon, Jacques Tourneur signe donc Nightfall. Et c’est magnifique.
QUELQU’UN DERRIÈRE LA PORTE réalisé par Nicolas Gessner, disponible en Combo Blu-ray + DVD le 8 juillet 2020 chez Studiocanal.
Acteurs : Charles Bronson, Anthony Perkins, Jill Ireland, Henri Garcin, Adriano Magistretti, Agathe Natanson, Viviane Everly, André Penvern…
Scénario : Jacques Robert, Marc Behm, Nicolas Gessner d’après le roman de Jacques Robert
Photographie : Pierre Lhomme
Musique : Georges Garvarentz
Durée : 1h30
Date de sortie initiale : 1971
LE FILM
Un chirurgien de grande renommée spécialisé dans le cerveau accueille chez lui un homme amnésique, recherché pour viol. Il veut en faire l’instrument qui le vengera de sa femme infidèle.
Quelqu’un derrière la porte n’est assurément pas le film le plus connu de la carrière européenne de Charles Bronson. Pourtant, ce drame psychologique qui flirte avec le thriller est probablement celui où le comédien a le plus d’éléments dramatiques à défendre, ainsi que les dialogues les plus abondants de toute sa filmographie réunie. Réalisé par le méconnu Nicolas Gessner, Quelqu’un derrière la porte est un quasi-huis clos très prenant, singulier et tordu, qui repose également sur l’interprétation morbide du grand Anthony Perkins. A connaître absolument.
MES MEILLEURS COPAINS réalisé par Jean-Marie Poiré, disponible en Blu-ray le 27 mai 2020 chez Studiocanal.
Acteurs : Gérard Lanvin, Christian Clavier, Jean-Pierre Bacri, Philippe Khorsand, Louise Portal, Jean-Pierre Darroussin, Marie-Anne Chazel, Elisabeth Margoni, Jacques François…
Scénario : Jean-Marie Poiré, Christian Clavier
Photographie : Claude Agostini
Musique : Michel Goguelat
Durée : 1h51
Date de sortie initiale : 1989
LE FILM
Cinq copains, la quarantaine, se retrouvent le temps d’un week-end pour le passage en France de Bernadette, une vedette de rock qu’ils ont aimée autrefois. C’est l’occasion de régler quelques vieux comptes…
“Y’a
des souvenirs qui ruinent l’ambiance…”
C’est un film complètement à part dans la carrière de l’illustre Jean-Marie Poiré (né en 1945), réalisateur de moult succès et triomphes de la comédie française comme Les Visiteurs (1993), Les Couloirs du temps : Les Visiteurs 2 (1998), Les Anges gardiens (1995), Papy fait de la résistance (1983), Les Hommes préfèrent les grosses (1981), L’Opération Corned-Beef (1990), Le Père Noël est une ordure (1982) et bien d’autres, soit près de 45 millions d’entrées en une quinzaine de longs métrages. Pourtant, coincé entre Twist again à Moscou (1986) et L’Opération Corned-Beef, se cache un petit film (en apparence) intitulé Mes meilleurs copains. Passé inaperçu à sa sortie en mars 1989, cette comédie-dramatique et mélancolique n’aura attiré que 358.000 spectateurs, ce qui en fait aujourd’hui le score le plus bas réalisé pour un film de Jean-Marie Poiré. Si Mes meilleurs copains a sûrement décontenancé par la nostalgie qui s’en dégage, ce superbe long métrage a acquis depuis une vraie notoriété et demeure très prisé par de très nombreux cinéphiles qui en ont fait un film culte.
ORCA réalisé par Michael Anderson, disponible en Blu-ray le 27 mai 2020 chez Studiocanal.
Acteurs : Richard Harris, Charlotte Rampling, Will Sampson, Bo Derek, Keenan Wynn, Robert Carradine, Scott Walker, Peter Hooten…
Scénario : Luciano Vincenzoni, Sergio Donati
Photographie : J. Barry Herron, Ted Moore
Musique : Ennio Morricone
Durée : 1h32
Date de sortie initiale : 1977
LE FILM
Rachel Bedford, biologiste, se consacre à la protection du monde sous-marin. Le Capitaine Nolan veut attraper un épaulard pour toucher de l’argent. Malgré les protestations de Rachel qui le met en garde, il blesse une femelle orque. Le compagnon de l’animal n’aura de cesse de se venger de lui, et le poursuivra impitoyablement, provoquant la mort de plusieurs personnes.
Le réalisateur britannique Michael Anderson (1920-2018), solide technicien, demeure célèbre pour Tour du monde en quatre-vingts jours – Around the World in Eighty Days et de 1984, adaptés de Jules Verne et de George Orwell, tous deux réalisés en 1956, mais aussi L’Âge de cristal – Logan’s Run (1976) et Chroniques martiennes – The Martian Chronicles, minidsérie créée en 1980. Orca (1977) reste son film le plus diffusé à la télévision française. Grand succès dans l’Hexagone avec près d’1,5 million d’entrées, Orca a toujours été chéri par les spectateurs et connaît depuis quelques années un regain de reconnaissance de la part de la critique. Porté par le couple Richard Harris, animal sauvage qui cache ses blessures, et Charlotte Rampling, beauté féline et insaisissable qui foudroie par son regard électrique, Orca est un vrai classique du cinéma d’aventure doublé d’un drame passionnel dont le troisième sommet du triangle n’est autre qu’un épaulard prêt à tout pour venger la mort de celle qu’il aimait.
LA BATAILLE POUR ANZIO (ANZIO !) réalisé par Edward Dmytryk, disponible en DVD et Blu-ray le 15 juillet 2020 chez Rimini Editions.
Acteurs : Robert Mitchum, Peter Falk, Robert Ryan, Earl Holliman, Mark Damon, Arthur Kennedy, Reni Santoni, Joseph Walsh…
Scénario : Harry A.L. Craig, Frank De Felitta, Duilio Coletti, Giuseppe Mangione d’après le roman Anzio de Wynford Vaughan-Thomas
Photographie : Giuseppe Rotunno
Musique : Riz Ortolani
Durée : 1h57
Date de sortie initiale : 1968
LE FILM
Le 22 juin 1944, à Anzio, en Italie, 35 000 soldats des forces alliées débarquent de 253 navires de guerre dans le but de marcher triomphalement sur Rome. Ces soldats, américains et anglais, ont pour mission de stopper l’armée allemande menée par le Général Kesselring. Parmi eux, le caporal Dick Ennis, un correspondant de guerre cynique et désabusé, et sept de ses compagnons vont subir les conséquences des erreurs tactiques et stratégiques du responsable de l’opération, le général Leslly. Sa passivité va, en effet, permettre à Kesselring de réorganiser sa défense, et même de contre-attaquer victorieusement, menant les troupes alliées au bord de la catastrophe…
Parler du cinéaste Edward Dmytryk (1908-1999) est toujours un immense plaisir. Nous l’avons déjà fait, mais nous allons le refaire. Edward Dmytryk, sympathisant de la gauche politique américaine, adhérant au parti communiste américain, figure parmi les célèbres Dix d’Hollywood. Convoqué par la Commission des Activités Anti-Américaines, il est condamné à six mois de prison, 500 dollars d’amende, puis s’exile en Grande-Bretagne à la fin des années 1940. Il revient peu de temps après aux USA, purge sa peine de prison et à l’instar d’Elia Kazan dénonce finalement certains acteurs, réalisateurs et scénaristes afin de s’affranchir des soupçons qui pèsent sur lui. C’est un scandale, sa carrière ne s’en remettra jamais totalement. Néanmoins, le cinéaste n’aura jamais arrêté de tourner jusqu’à la fin des années 1970. Edward Dmytryk c’est pêle-mêle L’Homme à l’affût – The Sniper (1952), La Lance brisée – Broken Lance (1954), Ouragan sur le Caine – The Caine Mutiny (1954), Le Bal des maudits – The Young Lions (1958),L’Homme aux colts d’or – Warlock (1959), La Rue chaude – Walk on the Wild Side (1962), Alvarez Kelly (1966) et bien d’autres ! S’il avait déjà la moitié de sa carrière derrière lui avec près de 25 longs métrages au compteur, Edward Dmytryk signera ses plus belles et ses plus grandes œuvres dans les années 1950. La Bataille pour Anzio, ou simplement Anzio (son titre international), ou bien encore Lo Sbarco di Anzio puisqu’il s’agit d’une coproduction italo-américaine à laquelle le cinéaste transalpin Duilio Coletti participera et sera d’ailleurs mentionné comme co-réalisateur aux côtés d’Edward Dmytryk, vaut essentiellement aujourd’hui pour son casting qui réunit Robert Mitchum, Peter Falk, Robert Ryan, Earl Holliman, ainsi que la figure reconnaissable des acteurs du cru, Giancarlo Giannini et Venantino Venantini. Comme très souvent, Dino De Laurentiis donne tous les moyens nécessaires pour créer sur grand écran un divertissement colossal, pris en charge cette fois par un metteur en scène qui n’a plus rien à prouver et qui signe une œuvre propre, sans fioritures, formidablement interprétée, pas indispensable certes, mais qui a su conserver un charme indiscutable.
PELLE LE CONQUÉRANT (Pelle erobreren) réalisé par Bille August, disponible en DVD et Blu-ray le 25 juin 2020 chez BQHL Editions.
Acteurs : Max von Sydow, Pelle Hvenegaard, Astrid Villaume, Erik Paaske, Björn Granath…
Scénario : Bille August d’après le roman de Martin Andersen Nexös
Photographie : Jörgen Persson
Musique : Stefan Nilsson
Durée : 2h23
Date de sortie initiale : 1987
LE FILM
Suède, à la toute fin du 19ème siècle. Pour échapper à la misère, le jeune Pelle et son vieux père, Lasse, embarquent pour le Danemark où ils espèrent connaître une vie meilleure. A peine y sont-ils arrivés qu’ils prennent conscience que l’existence sera difficile là aussi, que les immigrés comme eux n’y ont aucun droit, sinon courber l’échine et travailler dans des conditions épouvantables contre quelques sous. Engagés comme vachers dans une ferme, ils subissent la violence et les humiliations d’un régisseur et de son adjoint. En dépit des épreuves, Pelle et Lasse gardent espoir.
Etrange carrière que celle du danois Bille August. Si son nom reste souvent méconnu des cinéphiles et des spectateurs, il est pourtant l’un des rares réalisateurs à avoir remporté deux fois la Palme d’or au Festival de Cannes pour Pelle le Conquérant en 1988, inspiré du livre et classique de la littérature de son compatriote Martin Andersen Nexo et Les Meilleures intentions en 1992, portrait de jeunesse des parents d’Ingmar Bergman, dont il était un ami proche. Ses plus grands succès restent La Maison aux esprits (1994) grâce à son casting international et sa version Reader’s Digest des Misérables réalisé en 1998 avec Liam Neeson dans le rôle de Jean Valjean. En dehors de cela, Bille August, ancien directeur de la photographie, n’a jamais vraiment arrêté de tourner, même si ses œuvres restent marquées par un académisme souvent ronflant. Mais ce n’est pas du tout le cas de Pelle le conquérant – Pelle erobreren, chef d’oeuvre absolu et intemporel, également récompensé par le Golden Globe et l’Oscar du meilleur film étranger, qui transcende les années et les décennies, sans prendre de rides et qui demeure entre autres célèbre pour l’immense interprétation de Max von Sydow, qui lui a valu une mention pour sa contribution exceptionnelle au Festival de Cannes, ainsi qu’une nomination à l’Oscar du meilleur acteur. Si finalement la statuette convoitée sera décernée à Dustin Hoffman pour Rain Man, le comédien sera salué par le Bodil Award (récompense cinématographique danoise) du meilleur acteur en 1988. Sensationnel film-fleuve écrit, préparé et tourné sur trois années, Pelle le conquérant est sans nul doute l’un des monuments du cinéma européen et l’un des films les plus acclamés, à juste titre, des années 1980.
POINT LIMITE (Fail-Safe) réalisé par Sidney Lumet, disponible en DVD et Blu-ray le 16 juin 2020 chez Rimini Editions.
Acteurs : Henry Fonda, Walter Matthau, Dan O’Herlihy, Frank Overton, Ed Binns, Fritz Weaver, Larry Hagman…
Scénario : Walter Bernstein d’après le roman d’Eugene Burdick et Harvey Wheeler
Photographie : Gerald Hirschfeld
Durée : 1h51
Date de sortie initiale : 1964
LE FILM
À la suite d’une erreur technique, un groupe d’avions de guerre américains est envoyé en mission avec l’ordre de bombarder Moscou. Il est désormais impossible de les arrêter. Le président des États-Unis va tout faire pour éviter une guerre nucléaire.
Point limite – Fail-Safe (1964) est le huitième film de Sidney Lumet. Le cinéaste commence sa carrière à la télévision au début des années 1950, avant de réaliser son premier long-métrage pour le cinéma en 1957, qui a pour titre Douze hommes en colère –12 Angry Men, un film de procès. D’ailleurs, sa filmographie abordera régulièrement le système judiciaire avec par exemple Le Verdict (1982). Il dirige par deux fois l’acteur Al Pacino qui se retrouve dans la peau d’un policier qui décide de dénoncer la corruption dans Serpico (1973) puis en braqueur de banque dans Un après-midi de chien – Dog Day Afternoon (1975). Avec Network : Main basse sur la télévision (1976), Sidney Lumet propose une critique cynique du monde du petit écran.
Naples, début du XVIIIe siècle. Pour que son jeune frère Carlo conserve sa voix cristalline au-delà de l’enfance, Riccardo Broschi parvient, sous prétexte d’un accident, à le priver de sa virilité. Désormais castrat, Carlo Broschi devient Farinelli, un chanteur lyrique dont la célébrité s’étend jusqu’en Angleterre. Si, en donnant de la voix dans un petit théâtre, il le sauve de la faillite, il s’attire aussi la convoitise du grand compositeur Haendel qui, en lui révélant la vérité sur la nature de son don, l’éloigne de son frère…
C’est un film culte. Farinelli : Il Castrato est le long métrage le plus célèbre du réalisateur belge Gérard Corbiau (né en 1941), également metteur en scène du Maître de musique (1988), de L’Année de l’éveil (1991) et du Roi danse (2000). Si les années n’ont pas été très douces avec le film, surtout en raison d’un doublage français calamiteux et d’un playback souvent approximatif, Farinelli : Il Castrato demeure une œuvre très soignée sur la forme avec notamment des costumes flamboyants et des décors sublimes. Récompensé par le Golden Globe 1995 du meilleur film en langue étrangère et nommé à l’Oscar du meilleur film en langue étrangère, Farinelli : Il Castrato vaut essentiellement le coup d’oeil aujourd’hui pour l’originalité de son récit, troublant, et l’interprétation sensuelle et sensible d’Elsa Zylberstein.
DARK WATERS réalisé par Todd Haynes, disponible en DVD et Blu-ray le 19 août 2020 chez Le Pacte.
Acteurs : Mark Ruffalo, Anne Hathaway, Tim Robbins, Bill Pullman, Bill Camp, Victor Garber, Mare Winningham, William Jackson Harper…
Scénario : Mario Correa, Matthew Michael Carnahan d’après l’article « The Lawyer Who Became DuPont’s Worst Nightmare » de Nathaniel Rich
Photographie : Edward Lachman
Musique : Marcelo Zarvos
Durée : 2h06
Date de sortie initiale : 2019
LE FILM
Robert Bilott est un avocat spécialisé dans la défense des industries chimiques. Interpellé par un paysan, voisin de sa grand-mère, il va découvrir que la campagne idyllique de son enfance est empoisonnée par une usine du puissant groupe chimique DuPont, premier employeur de la région. Afin de faire éclater la vérité sur la pollution mortelle due aux rejets toxiques de l’usine, il va risquer sa carrière, sa famille, et même sa propre vie…
Dès son second long métrage, Safe (1995), Todd Haynes posait les bases de ce que sera son cinéma. Sous ses allures calmes et paisibles, la banlieue américaine bourgeoise renferme des maux, un mal-être. L’existence réglée se résume à choisir la couleur du nouveau canapé, prendre des cours d’aérobic, faire les courses pour son mari ou assister aux réunions tupperware de ses voisines. Jusqu’au jour où le personnage principal contractait une maladie inexpliquée en devenant allergique à l’air respiré. Parabole sur l’épidémie du SIDA, avertissement écologique (les maladies liées aux produits chimiques), drame existentialiste, critique du matérialisme américain et de l’American Way of Life, les niveaux de lecture étaient déjà multiples dans Safe. Près de trente ans après, le cinéaste revient pour ainsi dire au film de genre, puisque Dark Waters s’avère un thriller social percutant, flirtant avec le suspense et le polar. On y retrouve les mêmes intérieurs blancs, froids, vides, cliniques, des décors qui reflètent la vie intérieure des personnages. Les thématiques du cinéma de Todd Haynes sont bel et bien présentes : la monotonie du quotidien avec un avocat qui enchaîne les affaires avec un succès constant et finalement banal, comment assumer sa solitude (ici un homme face à un géant de l’industrie), la peur du regard des autres (ou comment Bilott a su surmonter les pressions), la marginalisation (dans son propre cabinet ou chez lui), et Dark Waters s’impose naturellement dans l’immense filmographie du réalisateur. Foncièrement dérangeant, glaçant, troublant et prenant, ce huitième long métrage de Todd Haynes permet également à l’immense Mark Ruffalo, à l’origine du projet et producteur, de composer l’un des plus beaux personnages de sa carrière, pour lequel il aurait largement mérité d’être récompensé par l’Oscar du meilleur acteur.