Test Blu-ray / Trapèze, réalisé par Carol Reed

TRAPÈZE (Trapeze) réalisé par Carol Reed, disponible en Combo Blu-ray + DVD le 20 septembre 2023 chez Rimini Editions.

Acteurs : Burt Lancaster, Tony Curtis, Gina Lollobrigida, Katy Jurado, Thomas Gomez, Johnny Puleo, Minor Watson, Gérard Landry…

Scénario : Liam O’Brien & James R. Webb, d’après le roman de Max Catto

Photographie : Robert Krasker

Musique : Malcolm Arnold

Durée : 1h45

Année de sortie : 1956

LE FILM

À la suite d’une chute qui aurait pu lui coûter la vie, Mike Ribble, l’unique spécialiste du triple saut au trapèze, a été contraint de renoncer à sa carrière et n’est plus qu’un simple accessoiriste. C’est alors qu’il rencontre le jeune et fringant Tino Orsini, dont le père avait été son camarade. Tino, bouillant et téméraire, demande à Mike de lui apprendre le triple saut. Tino est très doué et Mike voudrait qu’il devienne l’émérite trapéziste que lui-même était avant son accident. Mike parvient à reprendre son numéro de voltige. Lola, à la recherche d’un engagement, désire ardemment se joindre à eux.

Classique des classiques, Trapèze fait partie de ces énormes succès populaires (plus de 4 millions d’entrées en France, huitième au box-office de l’année 1956, entre La Fureur de vivre et Gervaise) ayant bénéficié de multiples diffusions à la télévision. Aujourd’hui, le film de Carol Reed demeure flamboyant sur la forme, le cinéaste parvenant sans mal à faire oublier les clichés du récit tout en offrant à ses trois interprètes de savoureuses compositions. Ancien trapéziste et acrobate de cirque, Burt Lancaster effectue la plupart de ses incroyables pirouettes et donne au film, dont il est le principal instigateur, un réalisme confondant. A ses côtés, la plantureuse Gina Lollobrigida épate par sa personnalité et Tony Curtis est resplendissant de fougue et de jeunesse. Trapèze s’impose encore et toujours comme l’un des plus grands et exaltants spectacles romanesques du cinéma hollywoodien des années 50.

Seul spécialiste du triple saut au trapèze, Mike Ribble a dû renoncer à sa carrière à la suite d’un accident. Tino Orsini, fils d’un célèbre trapéziste, réussit à convaincre Mike : Il l’entraînera et il renouvellera son exploit. Mike retrouve peu à peu sa forme passée. Lola, artiste ambitieuse, réussit à se faire accepter par eux et devient leur partenaire. Repoussée par Mike, elle devient, par dépit, la maîtresse de Tino. Elle l’amène à rompre son association avec Mike. Pour convaincre Tino qu’il est dans l’erreur, Mike devient l’amant de Lola. Une bagarre éclate entre les deux hommes. Mike est blessé en faisant rentrer dans sa cage un lion qui s’en était échappé. L’association semble désormais compromise.

Trapèze est avant toute chose un projet entièrement monté par Burt Lancaster via sa société de production, une oeuvre de commande proposée au réalisateur Carol Reed afin que ce dernier fasse passer les grosses ficelles du scénario grâce à ses idées innovantes de mise en scène. Tous les ingrédients sont réunis pour faire de Trapèze une réussite, un divertissement inoubliable où les spectateurs admirent trois légendes du cinéma. Dans les années 1950, Burt Lancaster prend son envol, comme acteur, mais aussi en tant que producteur, en passant devant la caméra de Jacques Tourneur, Richard Thorpe, Robert Siodmak, Fred Zinnemann, Daniel Mann, Robert Aldrich, puis passe lui-même derrière l’objectif (tout en se dirigeant) pour L’Homme du Kentucky The Kentuckian. Avant d’endosser le costume de Wyatt Earp dans Règlements de comptes à OK Corral, il supervise Trapèze, en produisant le film (pour lequel il obtiendra l’Ours d’argent du meilleur acteur à la Berlinale), en choisissant le metteur en scène, avant de s’en remettre totalement à ce dernier pour se concentrer uniquement sur son job d’acteur. Vedette européenne où elle est surtout connue pour sa plastique irréprochable, la superbe Gina Lollobrigida enflamme la pellicule chez Luigi Zampa, Mario Monicelli, Steno, Pietro Germi,Carlo Lizzani. 1952, le triomphe de Fanfan la Tulipe de Christian-Jaque change la donne et fait d’elle une comédienne encore plus convoitée. On la voit chez John Huston (Plus fort que le diable Beat the Devil), chez René Clair (Les Belles de nuit) et la consécration suprême arrive avec Pain, Amour et FantaisiePane, amore e fantasia de Luigi Comencini, qui attire près de 11 millions de spectateurs en Italie, tout comme sa suite l’année suivante qui réalise quasiment le même score. Alors qu’elle campe Esmeralda dans Notre-Dame de Paris de Jean Delannoy, elle est aussi en 1956 la belle Lola dans Trapèze, qui bien décidée à devenir une artiste de renom, va s’immiscer entre Mike et Tino et forcément mettre en péril leur amitié…

Tino est quant à lui incarné par le magnifique Tony Curtis, encore au début de sa carrière et dont le vedettariat n’avait de cesse de grimper depuis Le Voleur de Tanger de Rudolph Maté, No Room for the Groom de Douglas Sirk, Le Fils d’Ali Baba de Kurt neumann et Houdini le grand magicien de George Marshall. Sous contrat avec Universal, Tony Curtis passe d’un genre à l’autre avec autant d’aisance que de talent. On peut donc désormais lui confier de grosses machines, comme Ça c’est Paris So This Is Paris de Richard Quine, quand on lui propose le rôle de Tony dans Trapèze. Pour sa première production hollywoodienne, le britannique Carol Reed, auréolé par les succès retentissants de Huit Heures de sursis – Odd Man Out, Le Troisième Homme The Third Man (Grand Prix du Festival international du Film à Cannes) et L’Homme de Berlin The Man Between, apporte toute sa virtuosité à cette romance, un triangle amoureux se déroulant dans le décor atypique d’un cirque, une histoire inspirée par le roman The Killing Frost de Max Catto (La Guerre de Murphy, L’Enfer des tropiques) et d’après un scénario écrit entre autres par James R. Webb, complice de Burt Lancaster sur Bronco Apache et Vera Cruz, pour lequel ont aussi collaboré Wolf Mankowitz (Le Jour où la Terre prit feu) et Ben Hecht (Spéciale première, Le Plus grand cirque du monde, Les Enchaînés).

Une conjugaison d’experts dans leurs domaines respectifs, auxquels se joignent également le directeur de la photographie Robert Krasker (Les Héros de Telemark, La Chute de l’empire romain, Le Cid, Un américain bien tranquille), qui allait épauler Carol Reed pour son premier long-métrage en CinemaScope. Tourné dans de merveilleux décors, au Cirque d’Hiver concernant les extérieurs, tandis que intérieurs étaient capturés dans les studios de Billancourt, bénéficiant du concours de Joseph Bouglione, Jean Palacy, Achille Zavatta et d’autres immenses artistes du milieu, Trapèze reste une référence, un film doudou, un mélodrame qui fait du bien, qui réconforte, qui fait rêver aussi. Ravis de cette expérience, Burt Lancaster et Tony Curtis se retrouveront l’année suivante pour Le Grand Chantage Sweet Smell of Success d’Alexander Mackendrick, qui sera néanmoins un échec retentissant.

LE COMBO BLU-RAY + DVD

Plus de dix ans après sa première édition en DVD chez Wild Side, Trapèze refait son apparition dans les bacs, pour la première fois en Haute-Définition. Les deux galettes reposent dans un Digipack à trois volets, magnifiquement illustré, glissé dans un surétui cartonné qui reprend le visuel de l’affiche d’exploitation. À l’intérieur, vous retrouverez un formidable livret de 32 pages concocté par Rania Grifette et Stéphane Chevalier de Bubbelcom, qui autour de propos tirés des mémoires de Tony Curtis, livre un retour complet sur Trapèze, la genèse du film, sa production, la préparation des comédiens, les conditions de tournage, le casting, la sortie et la réception du film, la représentation du cirque dans Trapèze et bien d’autres éléments, le tout élégamment illustré et passionnant à lire. Le menu principal est animé et musical.

Cette édition s’accompagne d’une présentation du film par Gérald Duchaussoy, responsable de Cannes Classics (27’). Une intervention qui part un peu dans tous les sens, qui aborde à la fois le travail de Carol Reed, les conditions de prises de vues de Trapèze, la préparation des acteurs, mais aussi la psychologie et du traitement des personnages, qui pour Duchaussoy ne sont pas sans faire écho avec ce que les acteurs étaient dans la vie. Quelques interprétations s’avèrent légèrement tirées par les cheveux. Ce module contient des spoilers.

L’interactivité se clôt sur la bande-annonce.

L’Image et le son

L’éditeur annonce que le master HD présenté ici comporte quelques défauts et qu’il s’agit du seul élément disponible à ce jour. Cela étant, la copie que nous avons devant les yeux n’est absolument pas décevante et même plusieurs séquences profitent de cette promotion en Haute-Définition. Le grain cinéma est judicieusement conservé et l’ensemble quasi dépourvu de couacs. Les seuls accrocs proviennent essentiellement de rayures visibles, ainsi que du rendu du Technicolor que nous espérions plus pimpant. Les teintes demeurent cependant agréablement pastel et lumineuses, les contrastes compacts et la photographie délicatement saturée. La compression offre une définition fluide seulement altérée lors de la séquence à la fête foraine où les détails faiblissent légèrement, notamment au niveau des visages de Tony Curtis et de Gina Lollobrigida. Notons que les séquences se déroulant sous le chapiteau bénéficient d’une profondeur de champ inouïe et se révèlent plus éclatantes que celles tournées en studio. Enfin, les transparences furtives détonnent avec leurs couleurs délavées et un halo bleu peu discret entourant les comédiens.

La célèbre fanfare du cirque se déchaîne sur les deux pistes et la version originale se démarque par des ambiances plus tranchées et plus naturelles que son homologue française. Cette dernière se montre légèrement nasillarde mais le doublage est fort réussi : Burt Lancaster est doublé par le génial Claude Bertrand, voix française habituelle du comédien sur plus d’une demi-douzaine de films, tandis que l’admirable Jean-Claude Michel (la voix française récurrente de Sean Connery, Clint Eastwood) prête sa voix à Tony Curtis. Les deux mixages s’avèrent pimpants, le souffle y est inexistant, les voix sont efficaces et les ambiances multiples se déchaînent sous le chapiteau du Cirque d’Hiver.

Crédits images : © Joanna Productions / MGM / Rimini Editions / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

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