LA ROUE réalisé par Maurice Delbez et André Haguet, disponible en édition Digibook – Blu-ray + DVD + Livret le 18 mars 2022 chez Coin de Mire Cinéma.
Acteurs : Jean Servais, Pierre Mondy, Catherine Anouilh, Claude Laydu, François Guérin, Julien Bertheau, Georges Chamarat, Yvette Etievant, Georges Jamin, Louis Viret, Paul Peri…
Scénario : Oscar-Paul Gilbert, d’après le film d’Abel Gance, La Roue
Photographie : Pierre Petit
Musique : Louiguy
Durée : 1h39
Date de sortie initiale : 1957
LE FILM
1940. Conduit par le mécanicien Pelletier, un dernier train emporte, à travers les bombardements, les familles qui fuient le Nord de la France… Une jeune femme est tuée et laisse à ses côtés une enfant en bas âge, Norma, que Pelletier va adopter et envoyer en nourrice avec son fils de 5 ans. Les années passent. Les deux jeunes gens viennent s’installer chez leur père et découvrent sa vie de cheminot qui ne laisse de place à personne d’autre qu’à sa locomotive à vapeur…
Quasiment 35 ans après La Rose du rail (1923), connu sous le titre La Roue, André Haguet et Maurice Delbez réalisent un remake plus condensé du film fleuve d’Abel Gance (« inspiré par l’oeuvre célèbre d’Abel Gance » indique le générique), qui durait entre 4h30 et 8h suivant les montages qui se sont succédé. En à peine 100 minutes, les deux réalisateurs reprennent les grands traits du film original, ainsi que le prénom du personnage féminin principal, Norma, même si ceux-ci insistent sans doute moins sur l’étrange passion que le père ressent pour sa fille adoptive, tout en écartant l’histoire secondaire du fils qui tombe amoureux de celle qu’il croit être sa sœur. La Roue est un drame plus sobre et somme toute plus classique, qui repose sur l’impérial Jean Servais (Au service du diable, Les Centurions, L’Homme de Rio, Du rififi chez les hommes), qui incarne son personnage sur une quinzaine d’années, durant lesquelles celui-ci devra affronter la maladie, mais aussi ses tourments. Il pourra compter sur l’aide de son meilleur ami et collègue de toujours, Jean, interprété par l’immense Pierre Mondy. Mais au-delà de son récit mélodramatique, La Roue vaut aussi pour son aspect documentaire, puisque le film dissèque le boulot d’un cheminot et de son mécanicien au temps de la locomotive à vapeur.
WALDO, DÉTECTIVE PRIVÉ (Last Looks) réalisé par Tim Kirkby, disponible en DVD et Blu-ray le 17 février 2022 chez Metropolitan Video.
Acteurs : Charlie Hunnam, Mel Gibson, Morena Baccarin, Rupert Friend, Clancy Brown, Lucy Fry, Jacob Scipio, Paul Ben-Victor, Method Man…
Scénario : Howard Michael Gould, d’après son roman
Photographie : Lyle Vincent
Musique : Peter Nashel
Durée : 1h50
Année de sortie : 2021
LE FILM
Charlie Waldo s’est fait virer avec perte et fracas de la police de Los Angeles. Il mène depuis une existence paisible, loin du monde. Sa vie solitaire s’achève lorsqu’il est engagé comme détective privé pour enquêter sur le meurtre de l’épouse d’Alistair Pinch, une vedette d’une série TV judiciaire. Cette affaire tordue est, pour Waldo, un retour choc dans le monde d’Hollywood, avec ses intrigues de couloirs, ses relations sulfureuses et ses stars capricieuses.
S’il était déjà apparu dans Retour à Cold Mountain d’Anthony Minghella (2003), Hooligans – Green Street Hooligans (2005) de Lexi Alexander et Les Fils de l’homme – Children of Men (2006) d’Alfonson Cuarón, le britannique Charlie Hunnam commence réellement à faire parler de lui avec la série Sons of Anarchy dès 2008. Le cinéma lui fait les yeux doux et on le retrouve tour à tour chez Guillermo Del Toro (Pacific Rim, Crimson Peak), James Gray (The Lost City of Z) et Guy Ritchie (Le Roi Arthur : La Légende d’Excalibur, The Gentlemen), sans toutefois trouver LE rôle qui fera de lui une star. Depuis l’arrêt de Sons of Anarchy en 2014 et après sept saisons, le comédien apparaît donc ici et là, comme s’il ne savait pas où aller ou comme si les réalisateurs ne savaient pas trop quoi faire de lui. C’est ainsi qu’il tient le haut de l’affiche de Waldo, détective privé – Last Looks, mis en scène par Tim Kirkby, à qui l’on doit un Action Point (2018) avec Johnny Knoxville (qui aurait ouvert un parc d’attractions avec ses potes de Jackass), mais aussi toute une ribambelle de séries comme Look Around You, Journal d’une ado hors norme, The Alternative Comedy Experience, Grace et Frankie, Brockmire et prochainement The Pentaverate, de et avec Mike Myers. Dans cette comédie-policière, Charlie Hunnam joue un ex-flic vivant en ermite, qui va malgré lui reprendre du poil de la bête en étant mis sur une enquête se déroulant dans les coulisses d’Hollywood. S’il ne révolutionnera évidemment pas le genre, Waldo, détective privé n’en demeure pas moins un divertissement fort sympathique et de qualité, dans lequel le charisme de l’acteur fait mouche et où il donne la réplique au grand Mel Gibson, qui cachetonne à mort, mais qui le fait bien et nous fait marrer dans le rôle d’une star frappadingue de la télé. Ajoutez à cela le charme dévastateur de Morena Baccarin et vous obtenez un spectacle idéal pour passer deux heures sans vous ennuyer, même s’il restera pas grand-chose du film au final. Mais c’est déjà ça de pris.
Scénario : Franco Verucci, Alberto Silvestri & Massimo D’Avak, d’après le roman de Ludovico Dentice
Photographie : Roberto Gerardi
Musique : Fred Bongusto
Durée : 1h37
Date de sortie initiale : 1969
LE FILM
L’inspecteur Belli est mandaté par le célèbre avocat Fontana de faire expulser une cover-girl dont son fils Mino est tombé amoureux, et d’enquêter sur un certain Romanis, le directeur d’une maison de disques, qui avait promis un poste important à Mino. Il trouve ce dernier assassiné de deux balles de revolver.
Le metteur en scène Romolo Guerrieri (né en 1931), de son vrai nom Romolo Girolami, est connu des cinéphiles amateurs de Bis, pour son western Le Temps des vautours – 10.000 dollari per un massacro (1967), avec Gianni Garko, sans aucun doute un des meilleurs westerns transalpins produit, réalisé et interprété à cette époque bénie du cinéma. Dans sa filmographie, se distingue aussi et surtout L’Adorable Corps de Deborah – Il dolce corpo di Deborah, giallo de l’année 1968 avec Carroll Baker, Jean Sorel et George Hilton. Juste après ce dernier, Romolo Guerrieri adapte un roman de Ludovico Dentice (Macchie di belletto – Des taches de peinture), avec l’aide de Franco Verucci (Big Guns – Les Grands fusils de Duccio Tessari, Le Cogneur de Steno avec Bud Spencer), Alberto Silvestri (Trinita voit rouge de Mario Camus, La Prof d’éducation sexuelle de Mariano Laurenti) et Massimo D’Avak (Le Labyrinthe du sexe d’Alfonso Brescia, Si douces, si perverses d’Umberto Lenzi, Qui l’a vue mourir ? d’Aldo Lado). Il fallait au moins autant de scénaristes pour venir à bout de cette histoire tarabiscotée, qui lorgne bien évidemment sur les récits tortueux, hermétiques (pour ne pas dire chiants) de Raymond Chandler. Car si Franco Nero, ultra-classe, est aussi inattendu que formidable dans ce rôle de flic corrompu, animé par l’argent facile et mauvais comme une teigne, on finit par s’ennuyer rapidement devant Exécutions (Un detective, ou tout simplement Detective Belli aux Etats-Unis), en raison d’une multitude de personnages qui dissimulent en réalité une intrigue finalement peu emballante et trop bavarde.
LA BALANCE réalisé par Bob Swaim, disponible en Combo 4K Ultra HD + Blu-ray le 15 février 2022 chez Le Chat qui fume.
Acteurs : Philippe Léotard, Nathalie Baye, Richard Berry, Maurice Ronet, Bernard Freyd, Christophe Malavoy, Jean-Paul Comart, Albert Dray, Florent Pagny, Tchéky Karyo, Sam Karmann…
Scénario : Bob Swaim & Mathieu Fabiani
Photographie : Bernard Zitzermann
Musique : Roland Bocquet
Durée : 1h43
Date de sortie initiale : 1982
LE FILM
Mathias Palouzi, flic responsable des brigades territoriales, s’est mis en tête d’arrêter le roi de la pègre de Belleville : Roger Massina. Pour atteindre son but, un indic lui est indispensable. Quand celui qui l’informait est retrouvé assassiné, Palouzi n’a plus qu’à chercher une autre « balance ». Dédé Laffont, petit proxénète, apparaît comme le remplaçant idéal : il a un contentieux avec Massina et désire se venger.
Né en 1943 dans l’Illinois, Bob Swaim s’installe en France en 1965, où il s’inscrit à la Sorbonne, section ethnologie. Devenu un fidèle de la Cinémathèque, il commence à étudier à l’École Louis Lumière, puis devient cameraman, avant de signer trois courts-métrages, Le Journal de M. Bonnafous (1970), L’Autoportrait d’un pornographe (1972) et Vive les Jacques (1973). Il passe le cap du long-métrage en 1977 avec La Nuit de Saint-Germain-des-Prés, dans lequel Michel Galabru interprète le légendaire Nestor Burma, d’après Léo Malet, et dirige un certain Daniel Auteuil, qui faisait ses premiers pas au cinéma. Échec cinglant, le film n’attire même pas 50.000 spectateurs…1982, Bob Swaim fait son retour derrière la caméra et crée l’événement avec La Balance. Avec ses 4,2 millions d’entrées, ce polar se classe en cinquième position au box office cette année-là, derrière E.T. l’extraterrestre, L’As des as, Deux heures moins le quart avant J.C. et Le Gendarme et les Gendarmettes, et parvient à se classer devant La Boum 2, Les Misérables de Robert Hossein, Mad Max 2, le défi et Les Sous-doués en vacances. Carton plein pour La Balance, qui obtient huit nominations aux César et récolte les compressions tant convoitées de la Meilleure actrice, du Meilleur acteur et du Meilleur film. Quarante ans après son raz-de-marée, La Balance demeure une valeur sûre du film policier hexagonal. S’il reste indéniablement représentatif de son époque et si les premières minutes peuvent faire peur avec son côté nanar et kitsch, La Balance déploie ensuite un récit riche en rebondissements et déploie un éventail de personnages excellemment écrits, développés, croqués, documentés, remarquablement interprétés par Nathalie Baye, Philippe Léotard, Richard Berry, Christophe Malavoy, Jean-Paul Comart, Florent Pagny, Tchéky Karyo et bien d’autres. Si l’on a souvent loué l’importance des Ripouxde Claude Zidi, de Police de Maurice Pialat, et de L.627 de Bertrand Tavernier, sortis respectivement deux ans, trois ans et dix ans après, dans sa représentation réaliste du quotidien de la brigade des stupéfiants de Paris, La Balance posait déjà les bases, les intentions et les partis-pris. L’oeuvre de Bob Swaim était donc ce qu’on peut qualifier d’avant-gardiste, avait su saisir quelque chose d’inédit d’un genre en pleine mutation, qui allait engendrer moult ersatz, séries B et Z et même changer la donne quant aux codes des séries télévisées du genre qui reprendront le même schéma (même encore aujourd’hui) plus réaliste. La Balance est ni plus ni moins une pierre angulaire du polar français.
UN HÉROS ORDINAIRE (The Public) réalisé par Emilio Estevez, disponible en DVD le 17 février 2022 chez Metropolitan Video.
Acteurs : Alec Baldwin, Emilio Estevez, Jena Malone, Taylor Schilling, Christian Slater, Che Rhymefest Smith, Gabrielle Union, Jacob Vargas, Michael K. Williams, Jeffrey Wright…
Scénario : Emilio Estevez
Photographie : Juan Miguel Azpiroz
Musique : Tyler Bates & Joanne Higginbottom
Durée : 1h55
Année de sortie : 2018
LE FILM
Après l’arrivée soudaine d’une vague de froid, la bibliothèque publique de Cincinnati devient un refuge pour de nombreuses personnes démunies ou sans-abri, menés par un certain Jackson. Cela n’est pas sans poser quelques petits problèmes de cohabitation au sein de l’établissement d’autant plus que les SDF refusent fermement de quitter les lieux. Rapidement, leur sit-in devient un acte de désobéissance qui déclenche l’arrivée de la police antiémeute qui souhaite les expulser de ce centre de loisirs…
Tiens, il était passé où Emilio Estevez ? Si son frangin Charlie Sheen a longtemps fait les choux gras de la presse people tout en trustant la première place des acteurs les mieux payés de la télévision, Emilio n’a guère fait parler de lui depuis quand ? Un quart de siècle peut-être ? Le comédien culte (né en 1962) des années 1980 d’Oustiders de Francis Ford Coppola, de La Mort en prime – Repo Man d’Alex Cox, de The Breakfast Club de John Hughes, d’Étroite surveillance – Stakeout de John Badham, de Young Guns de Christopher Cain (et de sa suite) et même de Maximum Overdrive de Stephen King, commencera à se faire plus rare la décennie suivante. Car à part la trilogie des Petits Champions – The Mighty Ducks et à la rigueur le fendard Alarme fatale – Loaded Weapon 1 de Gene Quintano, il est difficile de se remémorer Emilio Estevez sans sa coupe mulet. C’est en fait derrière la caméra qu’il s’épanouira, aussi bien à la télévision (Le Protecteur – The Guardian, Cold Case : Affaires classées, Les Experts : Manhattan, Numb3rs) qu’au cinéma avec l’intéressant film choral Bobby (2006), ainsi que The Way, la route ensemble (2010), pour lequel il offre à son père Martin Sheen l’un de ses plus beaux rôles, tout en lui donnant la réplique. Huit ans après ce film, Emilio Estevez revient à la mise en scène et s’octroie le premier rôle dans Un héros ordinaire – The Public, où il s’entoure d’un casting soigné, d’Alec Baldwin à Jena Malone, en passant par Christian Slater et Jeffrey Wright, sans oublier l’excellente Taylor Schilling, star de la série Orange Is the New Black. Un héros ordinaire est un film indépendant qui repose essentiellement sur sa distribution impliquée, comprenez par là que chaque acteur a accepté de baisser son cachet habituel pour y apparaître, qui ne laissera évidemment pas beaucoup de souvenirs après coup car noyé dans la masse ou dans le tout-venant. Néanmoins, il se dégage une mélancolie de The Public, durant lequel on s’attache à l’ensemble des personnages et à cette petite histoire porteuse d’un message d’entraide. S’il ne se gravera assurément pas dans les mémoires, Un héros ordinaire contient quelques scènes sympathiques et mérite qu’on y accorde une projection.
ILLUSIONS PERDUES réalisé par Xavier Giannoli, disponible en DVD et Blu-ray le 30 mars 2022 chez Gaumont.
Acteurs : Benjamin Voisin, Cécile de France, Vincent Lacoste, Xavier Dolan, Salomé Dewaels, Jeanne Balibar, André Marcon, Louis-Do de Lencquesaing, Gérard Depardieu, Jean-François Stévenin…
Scénario : Xavier Giannoli & Jacques Fieschi, d’après le roman d’Honoré de Balzac
Photographie : Christophe Beaucarne
Durée : 2h30
Date de sortie initiale : 2021
LE FILM
Lucien est un jeune poète inconnu dans la France du XIXème siècle. Il a de grandes espérances et veut se forger un destin. Il quitte l’imprimerie familiale de sa province natale pour tenter sa chance à Paris, au bras de sa protectrice. Bientôt livré à lui-même dans la ville fabuleuse, le jeune homme va découvrir les coulisses d’un monde voué à la loi du profit et des faux-semblants. Une comédie humaine où tout s’achète et se vend, la littérature comme la presse, la politique comme les sentiments, les réputations comme les âmes. Il va aimer, il va souffrir, et survivre à ses illusions.
L’oeuvre dense d’Honoré de Balzac a toujours inspiré le cinéma et ce depuis les débuts du septième art. Toutefois, les adaptations réalisées pour le grand écran se faisaient rares. On peut évidemment citer La Belle Noiseuse (1991) et Ne touchez pas la hache (2007) de Jacques Rivette, Le Colonel Chabert (1994) d’Yves Angelo ou bien encore La Maison Nucingen (2008) de Raul Ruiz. Le hasard du calendrier fait que deux longs-métrages se sont récemment succédés, Eugénie Grandet de Marc Dugain et surtout Illusions perdues de Xavier Giannoli. Il faut remonter à 1966 et se tourner vers la télévision pour retrouver une transposition du roman d’apprentissage Illusions perdues, une mini-série dans laquelle Yves Rénier incarnait Lucien de Rubempré. Mais c’est tout ! Illusions perdues version 2021 part déjà sur une base aussi solide qu’excitante, avec la présence derrière la caméra de Xavier Giannoli, un de nos plus précieux auteurs, qui signe ici son huitième film en près de vingt ans. Le réalisateur des Corps impatients (2003), Une aventure (2005), Quand j’étais chanteur (2006), À l’origine (2009), Superstar (2012), Marguerite (2015) et L’Apparition (2018) s’associe avec le scénariste Jacques Fieschi pour la troisième fois de sa carrière, les deux collaborateurs s’appropriant le roman original, issu de l’ensemble dit de La Comédie humaine, qui rappelons-le avait été publié en trois parties, entre 1837 et 1843, Les Deux Poètes, Un grand homme de province de Paris (sur lequel le film se concentre essentiellement) et Les Souffrances de l’inventeur. Ce triptyque, pilier important dans l’oeuvre de Balzac, devient donc un film au souffle romanesque d’une durée colossale de 2h30, sans aucun temps mort, aux dialogues renversants, à la mise en scène virtuose et magistralement interprétée par un casting extraordinaire. Avec son quasi-million d’entrées au cinéma et son triomphe récent à la dernière cérémonie des César où il a remporté sept compressions, Illusions perdues est ce qu’on peut appeler un chef d’oeuvre instantané.
ALINE réalisé par Valérie Lemercier, disponible en DVD, Blu-ray et Édition collector limitée – Blu-ray + DVD + CD Bande originale du film le 16 mars 2022 chez Gaumont.
Acteurs : Valérie Lemercier, Sylvain Marcel, Danielle Fichaud, Roc Lafortune, Antoine Vézina, Pascale Desrochers, Jean-Noël Brouté, Victoria Sio…
Scénario : Valérie Lemercier & Brigitte Buc
Photographie : Laurent Dailland
Musique : Avec la voix de Victoria Sio
Durée : 2h05
Date de sortie initiale : 2021
LE FILM
Portée par sa famille et son grand amour, la 14ème enfant d’une famille modeste Québécoise va devenir la plus grande chanteuse planétaire.
Maintes fois reporté en raison de la pandémie, Aline a pu enfin débouler sur les écrans français le 10 novembre 2021. La critique a été très élogieuse, mais on ne peut pas dire que le public ait réellement suivi avec « seulement » 1,3 million de spectateurs en bout de course, ce qui est évidemment léger si l’on tient compte des quasi-25 millions d’euros de budget que le film a coûté. Si Aline s’est sûrement bien vendu à l’étranger (y compris aux Etats-Unis), Valérie Lemercier n’aura pas réussi à retrouver l’engouement populaire qu’elle avait connu en 2005 avec Palais Royal ! (2,8 millions d’entrées). En fait, Aline laisse une drôle d’impression. Il s’agit assurément du plus grand travail derrière la caméra de la réalisatrice, l’argent se voit à l’écran, le cadre large est superbe, la photographie est du même acabit, les comédiens sont formidables, Valérie Lemercier en tête et celle-ci n’a d’ailleurs pas démérité le César de la meilleure actrice octroyé lors de la dernière cérémonie des compressions dorées. Toutefois, on ne sait pas trop quoi en penser de son film. C’est sympa, rien à redire là-dessus, mais on finit par se demander le réel intérêt de cette entreprise. En l’état, Aline est une déclaration d’amour de Valérie Lemercier à Céline Dion, sentiment et passion qui transpirent à chaque plan pour son « vrai » sujet, et même si ce biopic sort du rang grâce à la personnalité et aux partis-pris singuliers de la cinéaste, scénariste et comédienne, l’ensemble s’apparente souvent à une illustration de la page Wikipédia de la chanteuse québécoise. Mais en même temps, le film est bien mieux que ça. Bref, on ne sait pas très bien sur quel pied danser, enfin c’est compliqué…Et je compte bien découvrir moi-même à travers cette chronique, si Aline est un bon film ou non…
À la fin des années 1960, au Québec, naît Aline (inspirée de Céline Dion), quatorzième et dernier enfant de Sylvette et Anglomard Dieu. Dans cette famille où la musique est reine, Aline se découvre un véritable talent pour le chant. Le producteur de musique Guy-Claude (inspiré par René Angélil), lorsqu’il entend cette magnifique voix, n’a plus qu’une idée en tête : faire d’Aline la plus grande chanteuse au monde. Entre le soutien de sa famille et son amour avec Guy-Claude, Aline va devenir l’une des plus grandes stars internationales de la chanson.
Valérie Lemercier a toujours été une actrice et une auteure à part dans le panorama cinématographique hexagonal. Aussi à l’aise en bourgeoise en polo Lacoste (Les Visiteurs, qui lui vaudra un César) ou en tailleur Chanel (L’Opération Corned-Beef), qu’en parisienne à fleur de peau (Vendredi soir de Claire Denis, une de ses plus grandes prestations dramatiques) ou en directrice de marketing raciste (Agathe Cléry), la comédienne aura surtout étonnamment brillé en tant que second rôle au cinéma, chez Gérard Jugnot (Casque bleu), Danièle Thompson (Fauteuils d’orchestre), Gabriel Julien-Laferrière (Neuilly sa mère! et sa suite) et les deux Petit Nicolas de Laurent Tirard. Finalement, Valérie Lemercier n’a jamais été aussi bien servi que par elle-même, puisqu’elle se sera offert le rôle principal dans chacun de ses six longs-métrages en tant que cinéaste.
Dans cette fonction, elle en a fait du chemin depuis Quadrille (1997), d’après la pièce de théâtre de Sacha Guitry, qui à l’époque n’avait coûté que quatre « petits » millions d’euros, exercice de style qui avait attiré 135.000 curieux. Aline vient couronner à la fois l’actrice et la metteuse en scène. On sent que Valérie Lemercier connaît à fond (après un an de recherches très intensives) celle dont elle a décidé de raconter la vie en s’inspirant des grands épisodes de son existence, tout en livrant une œuvre de fiction, d’où le changement des prénoms et avoir ainsi la liberté de jouer comme elle le souhaite avec ses protagonistes. Et surtout, en se focalisant sur un élément, certes attendu, mais dont on ne soupçonnait pas qu’il deviendrait le sujet principal du film, l’histoire d’amour fusionnelle entre Aline et Guy-Claude Kamar, autrement dit entre Céline Dion et René Angélil. Outre l’importance accordée à la reconstitution des événements de la vie de Cé-Al-ine (énorme boulot sur les costumes, les coiffures, les décors…), cette relation devient le moteur du récit. Face à Valérie Lemercier, on découvre l’imposant Sylvain Marcel, comédien québécois, dont la ressemblance avec son modèle est parfois troublante, dont la prestation sera accompagnée d’une nomination aux César en 2022. Au-delà de ce mimétisme, et cela est d’ailleurs valable pour l’ensemble du casting, on finit par oublier « qu’un tel est la représentation de », car les « personnages » s’avèrent immédiatement attachants, la réalisatrice ayant rassemblé des acteurs du cru exceptionnels, à l’instar de Danielle Fichaud qui incarne Sylvette, la mère d’Aline, nommée cette année elle aussi pour le César de la meilleure actrice dans un second rôle.
Aline est une comédie-dramatico-romantico-musicale canado-française dont les ellipses pourront déconcerter certains fans de Céline Dion, car après la découverte du talent hors-norme de cette petite fille de 12 ans (interprétée là aussi par Valérie Lemercier grâce à la magie des effets spéciaux), tout s’enchaîne très vite durant les 90 minutes restantes. On ne s’ennuie pas une seconde, le rythme est déchaîné, comme s’il était branché sur l’énergie de son personnage principal, la B.O. mixe à la fois les tubes de la star (chantés ici par l’incroyable Victoria Sio) et ceux issus d’un juke-box élégant et racé, c’est beau à regarder, émouvant à souhait, peut-être pas aussi drôle qu’espéré, mais là encore, la cinéaste n’a pas voulu tomber dans la caricature ou la parodie. Aline est un long-métrage ambitieux et sérieux, qui montre les hauts et les bas de l’artiste qu’il dépeint, ainsi que les joies, les peines, les doutes. Tout n’est pas rose dans cette vie faite de paillettes. Dans la dernière partie (qui rappelle celle du récent A star is born de Bradley Cooper), Aline tente de concilier à la fois sa vie de famille et le « monstre » qu’elle a créé, chantant durant près de quinze ans à Las Vegas, pour se rendre compte qu’elle n’aura eu de cesse de faire l’aller-retour entre sa villa de rêve et la salle de concert, sans rien connaître d’autre que la scène et surtout le bonheur d’être avec celui qu’elle aime et ses trois enfants. C’est sur ce dernier point qu’Aline, véritable fable sensible, tendre et bienveillante, emporte finalement l’adhésion, bien au-delà de « Valérie Lemercier qui imite Céline Dion ».
Car si l’on a toujours su qu’elle était sûrement l’une de nos plus grandes actrices de comédie, beaucoup semblent avoir découvert qu’elle était aussi tout simplement une immense comédienne. J’ai donc aimé Aline.
LE BLU-RAY
Aline débarque dans les bacs en DVD, Blu-ray et même en Édition collector limitée – Blu-ray + DVD + CD Bande originale du film, grâce aux bons soins de Gaumont. Le menu principal est animé sur le légendaire I’m Alive.
On s’attendait à plus…nous ne trouvons en effet que trois featurettes de trois minutes chacune, revenant sur la genèse du projet, l’écriture du scénario, le travail sur les décors et les costumes, la préparation physique intensive, les partis-pris et les intentions de la réalisatrice, le casting, la réinterprétation de seize chansons de Céline Dion par Victoria Sio et les effets spéciaux numériques. Aux nombreuses images de tournage, s’ajoutent les interviews de Valérie Lemercier, la chef décoratrice Emmanuelle Duplay, la chef costumière Catherine Leterrier, Victoria Sio…
L’interactivité se clôt sur la bande-annonce.
L’Image et le son
On ne saurait faire mieux. Pour son sixième long métrage, Valérie Lemercier a de nouveau jeté son dévolu sur le talentueux et éclectique chef opérateur Laurent Dailland (Marie-Francine, La Cité de la peur, Le Goût des autres). Les partis pris esthétiques originaux sont magnifiquement rendus à travers ce Blu-ray d’une folle élégance avec des couleurs saturées. Le piqué est affûté, les contrastes fabuleusement riches, les détails sont abondants aux quatre coins du cadre large comme sur les gros plans, tandis que le codec AVC consolide l’ensemble avec fermeté, y compris sur les scènes se déroulant dans la pénombre ou en intérieur.
Comme pour l’image, l’éditeur a soigné le confort acoustique et livre un mixage DTS-HD Master Audio particulièrement bluffant, surtout dans les scènes chantées, mais également dans les séquences plus calmes. En fait, toutes les scènes peuvent compter sur une balance impressionnante des frontales comme des latérales, avec des effets qui environnent le spectateur. Les effets annexes sont présents et dynamiques. De son côté, le caisson de basses souligne efficacement chacune des actions au moment opportun. La spatialisation est en parfaite adéquation avec le ton du film. Une piste 2.0 est aussi de la partie, ainsi qu’une piste Audiodescription et les sous-titres français destinés aux spectateurs sourds et malentendants.
ULTIME VIOLENCE (La Belva col mitra) réalisé par Sergio Grieco, disponible en Combo Blu-ray + DVD le 1er mars 2022 chez Artus Films.
Acteurs : Helmut Berger, Marisa Mell, Richard Harrison, Marina Giordana, Luigi Bonos, Vittorio Duse, Ezio Marano, Claudio Gora…
Scénario : Sergio Grieco
Photographie : Vittorio Bernini
Musique : Umberto Smaila
Durée : 1h35
Date de sortie initiale : 1977
LE FILM
Le tueur Nanni Vitali s’évade de prison avec trois complices. Il se lance dans une folie meurtrière, remplie de vols, viols, assassinats, et prises d’otages. L’inspecteur Giulio Santini se met à sa poursuite avec force moyens. Mais Vitali va séquestrer son père et sa soeur.
Sergio Grieco (1917-1982) fait partie de ces innombrables artisans du cinéma Bis transalpin. Si son nom reste méconnu, en France tout du moins, les titres de ses films fleurent bon l’exploitation et demeurent toujours appréciés des aficionados du genre, ou plutôt des genres, puisque le metteur en scène aura suivi les modes et surfé sur le goût des spectateurs, qui n’aura de cesse d’évoluer des années 1950 à la fin des années 1970. On peut citer pêle-mêle Le Chevalier de la violence – Giovanni dalle Bande Nere, Le Pirate de l’épervier noir – Il pirata dello sparviero nero, Les Nuits de Lucrèce Borgia – Le notti di Lucrezia Borgia, L’Esclave de Rome – La schiava di Roma, Jules César contre les pirates – Giulio Cesare contro i pirati, Mission spéciale… Lady Chaplin – Missione speciale Lady Chaplin, Superman le diabolique – Come rubare la corona d’Inghilterra, L’Homme qui défia l’Organisation – L’uomo che sfidò l’organizzazione et Une Suédoise sans culotte – La nipote del prete. L’ancien assistant de René Clément sur le sublime Au-delà des grilles (1949) aura réalisé quarante longs-métrages en près de trente ans de carrière, vouée quasiment entièrement au cinéma commercial. Il tire sa révérence à l’âge de soixante ans avec Ultime violence – La Belva col mitra, célèbre aussi sous le titre Le Fauve à la mitraillette, ainsi que Mad Dog Killer et Beast with a Gun pour son exportation internationale, thriller agressif, néo-polar et donc plus précisément poliziottesco pur et dur, à ne pas mettre devant tous les yeux en raison de certaines scènes très cruelles, dans lequel Helmut Berger s’avère complètement déchaîné. Un très bon cru.
L’ARBRE DE NOËL réalisé par Terence Young, disponible en DVD depuis le 22 novembre 2017 chez LCJ Editions & Productions.
Acteurs : William Holden, Virna Lisi, Bourvil, Madeleine Damien, Mario Feliciani, Friedrich von Ledebur…
Scénario : Terence Young, d’après le roman éponyme de Michel Bataille
Photographie : Henri Alekan
Musique : Georges Auric
Durée : 1h44
Date de sortie initiale : 1969
LE FILM
Comme chaque année, depuis qu’il a perdu sa mère, Pascal revient à Paris pour passer les vacances avec son père Laurent. Ils partent en Corse, et au cours d’une promenade en mer, un avion explose au-dessus de leur embarcation et une bombe retenue par un parachute tombe lentement dans l’eau. Laurent décide de ramener Pascal à Paris pour lui faire subir des examens médicaux qui s’avèrent négatifs. Quelques jours plus tard, Pascal revient d’une promenade avec une marque bleuâtre à la tempe.
On l’a vu maintes fois à la télé, certains jeunes spectateurs ont même été traumatisés à vie à cause de ce film, tandis que leurs parents resserraient sur eux leurs étreintes, essayant de dissimuler leurs larmes en prétextant avoir une poussière dans l’oeil. L’Arbre de Noël, librement adapté du roman de Michel Bataille, sort sur les écrans français en octobre 1969, soit près d’un an avant le décès prématuré de Bourvil, qu’un cancer emportera à l’âge de 53 ans. S’il allait trouver son dernier rôle dramatique dans Le Cercle rouge, sa prestation dans L’Arbre de Noël restera son ultime composition bouleversante. Cette coproduction franco-italienne est réalisée par Terence Young, scénariste et metteur en scène britannique, évidemment célèbre pour avoir créé le personnage de James Bond au cinéma avec James Bond 007 contre Dr No – Dr. No (1962) et contribué à élaborer l’une des franchises les plus lucratives de l’histoire du cinéma à travers Bons Baisers de Russie – From Russia with Love (1963) et Opération Tonnerre – Thunderball (1965). Installé dans le Sud de la France, Terence Young enchaîne les tournages et les années 1960 seront d’ailleurs pour lui les plus prolifiques. Après avoir passé le relais à ses confrères pour les futurs opus de 007, il signe la superproduction Opération Opium – The Poppy Is Also a Flower (1966) et réunit un casting ahurissant, de Yul Brynner à Angie Dickinson en passant par Marcello Mastroianni et Trevor Howard, très vite suivi de Peyrol le boucanier – L’Avventuriero avec Anthony Quinn et Rita Hayworth. Eclectique, il se montre tout aussi à l’aise dans le film d’aventure comme La Fantastique Histoire vraie d’Eddie Chapman – Triple Cross que dans le thriller angoissant (le fantastique Seule dans la nuit – Wait Until Dark avec Audrey Hepburn, Alan Arkin et Richard Crenna) et le drame historique (Mayerling, qui réunit rien de moins que Catherine Deneuve, Omar Sharif, James Mason et Ava Gardner). L’Arbre de Noël est un drame psychologique, sans doute l’un des films les plus connus du réalisateur, qui parvient à éviter le pathos dans lequel il aurait pu aisément se vautrer et qui repose sur le jeu de ses merveilleux comédiens, Bourvil donc, l’immense William Holden et la magnifique Virna Lisi.
L’AUTOROUTE DE L’ENFER (Highway to Hell) réalisé Ate de Jong, disponible en Édition Collector Blu-ray + DVD + Livret le 10 mars 2022 chez Rimini Editions.
Acteurs : Patrick Bergin, Adam Storke, Chad Lowe, Kristy Swanson, Pamela Gidley, Jarrett Lennon, C.J. Graham, Richard Farnsworth…
Scénario : Brian Helgeland
Photographie : Robin Vidgeon
Musique : Hidden Faces
Durée : 1h30
Date de sortie initiale : 1991
LE FILM
Décidés à se marier malgré l’opposition de leurs familles, Charlie et Rachel se rendent à Las Vegas. Ils vont croiser la route du sergent Bedlam, une sorte de flic zombie qui enlève Rachel et disparaît. Charlie découvre que pour retrouver sa fiancée, il doit aller en Enfer.
Quand on parle de Brian Helgeland, on évoque tour à tour L.A Confidential (1997) de Curtis Hanson, merveilleuse adaptation du roman éponyme de James Ellroy récompensée par deux Oscars, Mystic River (2003) de Clint Eastwood, une autre transposition, celle d’un des meilleurs livres de Dennis Lehane, film lui qui sera lui aussi lauréat de deux belles statuettes dorées, Payback (1999), même si renvoyé avant la fin du tournage, avant qu’une Directors’s Cut ne soit dévoilée en 2006. Brian Helgeland est un nom connu des cinéphiles. On oublie un peu plus facilement ce qu’il a fait par la suite, Man on fire et L’Attaque du métro 123 de Tony Scott, Green Zone de Paul Greengrass, Salt de Phillip Noyce, Robin des Bois de Ridley Scott, ainsi que ses propres mises en scène, Chevalier – A Knight’s Tale (2001), Le Purificateur – The Order (2003), ou bien Legend (2015), dans lequel Tom Hardy a cette mauvaise idée de jouer un double-rôle et donc d’être deux fois plus irritant. On connaît encore moins ses débuts, placés sous le signe du film d’épouvante. Emballés par leur collaboration sur La Ligne du diable – 976-EVIL, Robert Englund, dont il s’agissait du premier film en tant que réalisateur, et Brian Helgeland se retrouvent sur le quatrième opus de la série Freddy Krueger, Le Cauchemar de Freddy – A Nightmare on Elm Street 4: The Dream Master (1988) de Renny Harlin. Puis, après deux épisodes de la série Vendredi 13, le scénariste signe le script de L’Autoroute de l’enfer – Highway to Hell, connu aussi en France sous le titre Bienvenue en enfer. En revanche, le réalisateur néerlandais Ate de Jong demeure totalement oublié. Pourtant, en dépit d’une exploitation limitée à sa sortie, L’Autoroute de l’enfer est devenu un film chéri par les aficionados du genre. Comédie horrifique et fantastique, survoltée, menée sur un train d’enfer, interprétée par des comédiens en mode frappadingue, dans de superbes décors, avec des effets spéciaux cheap et néanmoins très réussis, Highway to Hell (ne cherchez pas, il n’y a aucun lien avec la chanson d’AC/DC ici) s’apparente à un rollercoaster déglingué, aux armatures fragiles, mais dans lequel on prend place volontiers, pour être brinquebalé de tous les côtés. Ça fait un bien fou !