Test Blu-ray / Le Maître des îles, réalisé par Tom Gries

LE MAÎTRE DES ÎLES (The Hawaiians) réalisé par Tom Gries, disponible en DVD & Combo Blu-ray + DVD le 22 mars 2024 chez Sidonis Calysta.

Acteurs : Charlton Heston, Tina Chen, Geraldine Chaplin, Mako, John Phillip Law, Alec McCowen, Don Knight, Miko Mayama, Virginia Ann Lee…

Scénario : James R. Webb, d’après le roman de James A. Michener

Photographie : Lucien Ballard & Philip H. Lathrop

Musique : Henry Mancini

Durée : 2h14

Date de sortie initiale : 1970

LE FILM

L’archipel d’Hawaï dans les années 1880. Descendant d’une riche famille de planteurs, Whip Hoxworth abandonne le commerce maritime pour prendre possession des terres héritées de son grand-père. Contre vents et marées, il devient à l’issue de quelques années le plus grand propriétaire de la région grâce au travail acharné de ses ouvriers chinois dont un couple élève son fils. Sachant son activité menacée par l’indépendance des îles, il fomente une révolution de manière à ce que son territoire bénéficie du protectorat américain…

La carrière de Charlton Heston est telle que nous avons toujours cette impression de découvrir sans cesse de nouveaux films ou des pépites quasi-inédites. C’est encore le cas pour Le Maître des îles, que l’auteur de ces mots ne connaissait pas du tout et n’en avait même jamais entendu parler. Nous sommes en 1970 et la star hollywoodienne vient de connaître l’un des plus grands succès avec La Planète des singes Planet of the Apes de Franklin J. Schaffner. Voyant le vent tourné à Hollywood, Charlton Heston se réfugie dans le répertoire de William Shakespeare et tourne Jules César de Stuart Burge, tout en préparant Antoine et Cléopâtre de son côté et mettra en scène lui-même. Avant de retrouver son rôle du capitaine George Taylor pour une petite apparition dans Le Secret de la planète des singes Beneath the Planet of the Apes de Ted Post, il revient au film d’aventure historique avec Le Maître des îles The Hawaiians, qui n’est autre que la suite d’Hawaï, réalisé par George Roy Hill quatre ans plus tôt, adaptation du roman-fleuve éponyme de James Michener. Cet auteur américain avait déjà inspiré le cinéma et avait vu quelques-uns de ses livres être adaptés par Mark Robson (Retour au paradis et Les Ponts de Toko-Ri), Robert Wise (Femmes coupables) et Joshua Logan (Sayonara et South Pacific). Ancien lieutenant de l’US Navy envoyé dans le Pacifique Sud durant la Seconde Guerre mondiale, James Michener se spécialise dans le roman historique, reçoit le prix Pulitzer en 1948 pour son premier livre Tales of the South Pacific. Forcément, après le triomphe d’Hawaï, lauréat de deux Golden Globes et sept fois nommé aux Oscar, la tentation est alléchante de revenir au pavé original de l’écrivain, dont une petite partie seulement avait été transposée. Le producteur Walter Mirisch (Scorpio, Mr. Majestyk, Deux sur la balançoire, Le Shérif aux mains rouges, Fort Massacre) met donc cette séquelle en route, alors que ce genre de divertissement devient pour ainsi dire obsolète, dépassé par l’avènement du Nouvel Hollywood. Néanmoins, Le Maître des îles demeure un formidable spectacle, à la mise en scène comme d’habitude inspirée de Tom Gries (Le Solitaire de Fort Humboldt, Les 100 fusils), qui avait déjà dirigé Charlton Heston dans Will Penny, le solitaire, et sublimement photographié par deux illustres chefs opérateurs, Lucien Ballard (7 secondes en enfer, Les 4 fils de Katie Elder, Boeing Boeing, Le Tueur s’est évadé, Baïonnette au canon), tombé malade et remplacé par Philip H. Lathrop (Le Bagarreur, Tremblement de terre, Seuls sont les indomptés). Et est-ce utile de préciser que Charlton Heston est comme toujours immense ?

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Test Blu-ray / Le Diable boiteux, réalisé par Sacha Guitry

LE DIABLE BOITEUX réalisé par Sacha Guitry, disponible en Combo Blu-ray + DVD + DVD de bonus le 5 décembre 2023 chez Rimini Editions.

Acteurs : Sacha Guitry, Lana Marconi, Émile Drain, Henry Laverne, Maurice Teynac, Philippe Richard, Georges Spanelly, Renée Devillers…

Scénario : Sacha Guitry, d’après sa pièce

Photographie : Nikolai Toporkoff

Musique : Louis Beydts

Durée : 2h05

Année de sortie : 1948

LE FILM

De la fin du XVIIIè au début du XIXè, Talleyrand, homme d’État français et rusé diplomate sert six régimes successifs, parfois opposés… Avec brio, Sacha Guitry dresse le portrait de ce maître de la trahison et du changement d’allégeance, jusqu’à son triomphe final.

Avec Le Diable boiteux (« un film conçu, dialogué, réalisé et interprété par l’auteur »), biographie filmée du prince de Talleyrand, évêque d’Autun, qui servit la France de l’Ancien Régime jusqu’à la Monarchie de Juillet en passant par le Directoire, le Consulat, le Premier Empire et la Restauration (« Vive le roy ! », « Vive la République ! », « Vive l’Empereur ! », « Vive le roi ! » est-il écrit sur le même mur au fil du récit), Sacha Guitry signait son retour au cinéma. Si Le Comédien allait sortir en premier, Le Diable boiteux était initialement prévu avant celui-ci, mais le réalisateur, auteur et comédien allait rencontrer quelques soucis avec la censure. Avant que le tournage soit lancé, la pièce en trois actes et neuf tableaux Talleyrand ou le Diable boiteux attirait les foules au théâtre Édouard VII en 1948. Fasciné par le personnage historique, Sacha Guitry y voyait une opportunité pour faire un parallèle avec ce qu’il venait de vivre, ayant été arrêté puis incarcéré pour son comportement avec l’occupant allemand. Adulé et pourtant détesté par certains, mis au pilori et encensé, Sacha Guitry se met à nu dans la peau de Talleyrand (« le plus grand diplomate qui ait jamais existé […] qui ne s’est jamais soucié de l’opinion d’autrui ») et livre une sublime prestation, probablement l’une de ses meilleures. Si quelques longueurs se font parfois ressentir (le film durant plus de deux heures), notamment lors de la fête organisée pour les infants d’Espagne à Valençay, Le Diable boiteux laisse pantois d’admiration par la beauté incommensurable de ses dialogues et la modernité de sa mise en scène.

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Test Blu-ray / Salon Kitty, réalisé par Tinto Brass

SALON KITTY réalisé par Tinto Brass, disponible en Blu-ray le 16 janvier 2024 chez Sidonis Calysta.

Acteurs : Helmut Berger, Ingrid Thulin, Teresa Ann Savoy, John Steiner, Sara Sperati, John Ireland, Tina Aumont, Stefano Satta Flores, Paola Senatore…

Scénario : Ennio De Concini, Maria Pia Fusco & Tinto Brass, d’après le roman de Peter Norden

Photographie : Silvano Ippoliti

Musique : Fiorenzo Carpi

Durée : 2h09

Date de sortie initiale : 1976

LE FILM

Berlin 1939. L’officier SS Wallenberg est chargé de sélectionner et de former de très jolies jeunes femmes allemandes afin de pourvoir le célèbre Salon de « Madame Kitty ». Ces nymphes nazi sont soumises aux passions et pratiques dégradantes des officiers de hauts rangs du Reich. Wallenberg constitue des dossiers sur chacun d’entre eux. Mais lorsqu’une innocente et jeune prostituée découvre les manoeuvres de Wallenberg, sa vengeance mettra le feu à cet holocauste de dépravation.

Le moins que l’on puisse dire, c’est que près de cinquante ans après sa sortie, Salon Kitty (ou Les Damnées du Troisième Reich, ou bien encore Les Nuits chaudes de Berlin, voire même aussi Madame Kitty) n’a rien perdu de sa force dévastatrice et que le neuvième long-métrage de Tinto Brass n’a pas fini d’en choquer plus d’un. Tant mieux. Spectacle grandiose déconseillé aux âmes sensibles et à ne pas mettre devant tous les yeux, Salon Kitty est le premier volet d’une trilogie du réalisateur consacrée au pouvoir. Entre Portier de nuit Il portiere di notte de Liliana Cavani (sorti deux ans auparavant), Les Damnés La caduta degli dei de Luchino Visconti (dont il reprend d’ailleurs deux des acteurs principaux, Helmut Berger et Ingrid Thullin) et Salò ou les 120 Journées de Sodome Salò o le centoventi giornate di Sodoma de Pier Paolo Pasolini, Salon Kitty met en lumière la vulgarité, la violence, la connerie, la dégénérescence, la décadence du Troisième Reich, en misant justement sur le jusqu’au-boutisme, sur le fond comme sur la forme. Sommet dans la carrière riche et prolifique de son auteur, Salon Kitty met les nerfs à rude épreuve, joue forcément avec le voyeurisme du spectateur, que le cinéaste ne caresse pas dans le sens du pubis, le place comme témoin volontaire des agissements de personnages psychotiques, débauchés et pervertis. Il s’agit non seulement d’une véritable expérience de cinéma, mais aussi et clairement d’un des plus grands films des années 1970. Ni plus ni moins.

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Test Blu-ray / Vaincre ou mourir, réalisé par Paul Mignot & Vincent Mottez

VAINCRE OU MOURIR réalisé par Paul Mignot & Vincent Mottez, disponible en DVD & Blu-ray le 25 mai 2023 chez Puy du Fou Films.

Acteurs : Hugo Becker, Rod Paradot, Gilles Cohen, Grégory Fitoussi, Constance Gay, Jean-Hugues Anglade, Francis Renaud, Dorcas Coppin…

Scénario : Vincent Mottez

Photographie : Alexandre Jamin

Musique : Nathan Stornetta

Durée : 1h39

Année de sortie : 2023

LE FILM

1793. Voilà trois ans que Charette, ancien officier de la Marine Royale, s’est retiré́ chez lui en Vendée. Dans le pays, la colère des paysans gronde : ils font appel au jeune retraité pour prendre le commandement de la rébellion. En quelques mois, le marin désœuvré devient un chef charismatique et un fin stratège, entraînant à sa suite paysans, déserteurs, femmes, vieillards et enfants, dont il fait une armée redoutable car insaisissable. Le combat pour la liberté ne fait que commencer…

On en entendu des vertes et des pas mûres sur Vaincre ou mourir, la première production cinématographique du Puy du Fou, inspirée par le spectacle Le Dernier Panache, triomphe du parc vendéen en 2016, tirée du combat de François-Athanase Charette de La Contrie, figure majeure de la guerre de Vendée. La presse de gauche s’est délectée à le traîner dans la boue, tandis que Cnews, Valeurs actuelles et consorts se pâmaient devant. Il en faut pour tous les goûts et loin de nous l’idée de nous prétendre historien pour parler oui ou non de respect des faits réels. Nous ne jugerons Vaincre ou mourir qu’en tant que long-métrage à part entière et donc comme divertissement. Et le moins que l’on puisse dire c’est que le résultat est très mauvais…Si l’on devait faire une critique rapide du style Reader’s Digest, on pourrait résumer ainsi « Félicitations à Hugo Becker, qui a réussi ses scènes a cheval malgré son balai bien enfoncé dans le fondement dans Vaincre ou mourir. Nous ne sommes pas loin de Vercingétorix avec Cri-Cri Lambert et c’est la première fois que nous avons eu l’impression de visionner un film réalisé en Audiodescription. Il s’agit d’un reportage XL France 3 région au montage épileptique avec des beaux costumes piétinés dans la boue, le tout sur fond de musique de Fort Boyard ». C’est assez clair ? On peut en parler un peu plus longuement plus bas si vous le désirez, mais l’essentiel est dit.

Vendéens, Vendéennes !

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Test Blu-ray / Salvatore Giuliano, réalisé par Francesco Rosi

SALVATORE GIULIANO réalisé par Francesco Rosi, disponible en combo Blu-ray+DVD le 31 mai 2023 chez Studiocanal.

Acteurs : Salvo Randone, Frank Wolff, Sennuccio Benelli, Giuseppe Calandra, Pietro Cammarata, Max Cartier, Nando Cicero…

Scénario : Francesco Rosi, Suso Cecchi d’Amico, Enzo Provenzale & Franco Solinas

Photographie : Gianni Di Venanzo

Musique : Piero Piccioni

Durée : 2h

Date de sortie initiale : 1962

LE FILM

Juillet 1950. Le cadavre du bandit sicilien Salvatore Giuliano est découvert dans la cour d’une maison de Castelvetrano. Un commissaire y dresse un bref constat, des journalistes recueillent quelques renseignements. Plus tard, son corps est exposé à Montelepre, sa commune natale ; la foule vient s’y recueillir, sa mère le pleure…

C’est comme qui dirait de là que tout est parti. Salvatore Giuliano est le troisième long-métrage réalisé par Francesco Rosi (1922-2015) après Le Défi La Sfida (1958) et Profession Magliari I Magliari (1959). Le cinéaste y trouvait son style, en dressant un tableau quasi-documentaire (une voix-off est aussi utilisée) sur les liens tendus entre la politique, la police et la mafia. Comme il le fera juste après pour l’exceptionnel Main basse sur la villeLe Mani sulla città (1963) et Lucky Luciano (1973), Francesco Rosi ne s’intéresse pas seulement à l’homme mais à tout ce qui l’entoure à travers des allers-retours temporels non chronologiques qui pourront rebuter le spectateur le moins conditionné. Le film de Francesco Rosi peut paraître froid, presque clinique, avec une mise en scène au scalpel qui dissèque quinze années de l’histoire de la Sicile, en faisant participer celles et ceux qui ont vécu les événements et en tournant là où ils se sont vraiment déroulés. Les scènes de confrontations, mais aussi celles montrant la vie dans les petits villages, l’effervescence quotidienne, la loi du silence, la passion, la peur qui secouaient la population demeurent d’une beauté plastique ahurissante. Furieusement moderne, passionnant (même si vous n’y connaissez rien au sujet), Salvatore Giuliano, salué depuis toujours par Martin Scorsese (qui le fait apparaître systématiquement dans son top 10) et Francis Ford Coppola, est un chef d’oeuvre immense et intemporel. Ours d’argent à la Berlinale de 1962.

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Test Blu-ray / Les Héros de Télémark, réalisé par Anthony Mann

LES HÉROS DE TÉLÉMARK (The Heroes of Telemark) réalisé par Anthony Mann, disponible en DVD et Blu-ray depuis le 21 septembre 2022 chez LCJ Editions & Productions.

Acteurs : Kirk Douglas, Richard Harris, Ulla Jacobsson, Michael Redgrave, David Weston, Sebastian Breaks, Maurice Denham, Anton Diffring…

Scénario : Ivan Moffat & Ben Barzman, d’après le roman de John Drummond (But for These Men) et le roman de Knut Haukelid (Skis Against the Atom)

Photographie : Robert Krasker

Musique : Malcolm Arnold

Durée : 2h10

Date de diffusion initiale : 1965

LE FILM

Durant la Seconde Guerre mondiale, les Allemands produisent de l’eau lourde à Télémark en Norvège dans le but de fabriquer la bombe atomique. Les forces britanniques délèguent un petit commando qui a pour mission de s’introduire dans l’usine de Télémark afin de détruire la dangereuse production ennemie.

Les Héros de TélémarkThe Heroes of Telemark est le dernier long-métrage réalisé par Anthony Mann, qui décédera en 1967 lors du tournage de Maldonne pour un espion, qui sera ensuite repris par Laurence Harvey, alors en tête d’affiche. Cette petite référence du film de guerre s’inspire une fois de plus d’une histoire vraie, un exploit qui avait d’ailleurs déjà donné naissance à La Bataille de l’eau lourde, semi-documentairede Jean Dréville et Titus Vibe-Müller, sorti en 1948. Une opération qui avait été menée en plusieurs étapes grâce à une collaboration entre français, norvégiens et anglais, ce que nous dévoile (même si tout a été revisité) Les Héros de Télémark, superproduction hollywoodienne classique, qui accuse aujourd’hui quelques baisses de rythme, mais qui n’en reste pas moins passionnant sur le fond et surtout admirable sur la forme avec l’un des meilleurs cinéastes américains à la barre. Pas rancunier, il y dirige Kirk Douglas, la star (également producteur) qui l’avait viré du plateau de Spartacus six ans auparavant, pour divergences artistiques. Anthony Mann devait alors enchaîner avec deux spectacles gigantesques, Le Cid El Cid et La Chute de l’Empire romain The Fall of the Roman Empire, qui ont pu démontrer à Kirk Douglas que le metteur en scène pouvait tenir un budget conséquent, mais aussi se montrer très l’aise dans les séquences d’action et pas seulement que dans le western, genre dans lequel on l’a trop souvent catalogué. S’il n’est pas non plus un chef d’oeuvre, il lui manque en outre un certain souffle épique pour y prétendre, Les Héros de Télémark demeure un divertissement haut de gamme, « à l’ancienne », bourré de charme et beau à regarder, plein de rebondissements et de sentiments, où le tandem Kirk Douglas – Richard Harris fait des étincelles.

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Test Blu-ray / Marie Stuart, Reine d’Écosse, réalisé par Charles Jarrott

MARIE STUART, REINE D’ÉCOSSE (Mary, Queen of Scots) réalisé par Charles Jarrott, disponible en DVD et Blu-ray le 14 mars 2023 chez Elephant Films.

Acteurs : Vanessa Redgrave, Glenda Jackson, Patrick McGoohan, Timothy Dalton, Nigel Davenport, Trevor Howard, Daniel Massey, Ian Holm…

Scénario : John Hale

Photographie : Christopher Challis

Musique : John Barry

Durée : 2h08

Date de sortie initiale: 1971

LE FILM

Au XVIè siècle, Mary Stuart, reine d’Écosse catholique, est opposée à sa cousine protestante, la reine Élisabeth Ire d’Angleterre. Pendant plusieurs décennies, les deux femmes vont mener une lutte sans merci, à l’issue dramatique…

Alors, autant être franc d’entrée de jeu, l’auteur de ces mots n’a aucune prétention de jouer à l’historien et donc, bien que connaissant les grandes lignes de l’Histoire, ne mettra pas en relief (s’il y a lieu d’ailleurs) les relectures et anachronismes. Cette critique sera entièrement et uniquement centrée sur le film en tant que tel, puisque nous considérons qu’il n’y a pas besoin de « faire ses devoirs » pour voir et pourquoi pas apprécier Marie Stuart, Reine d’ÉcosseMary, Queen of Scots, réalisé par Charles Jarrott (1927-2011) et sorti sur les écrans en 1971. Cette figure historique avait déjà fait l’objet de plusieurs longs-métrages et ce dès le cinéma muet (dont une version mise en scène par le célèbre Albert Capellani), même si la plus connue demeure sans aucun doute celle signée John Ford en 1936, avec l’immense Katharine Hepburn dans le rôle principal. En fait, le Marie Stuart, Reine d’Écosse de 1971, fait suite au succès important rencontré par Anne des mille joursAnne of the Thousand Days, déjà emballé par Charles Jarrott, qui se concentrait sur l’histoire du roi Henry VIII (Richard Burton) qui, n’ayant pas d’héritier mâle de la reine Catherine (Irène Papas), demandait au cardinal Wolsey (Anthony Quayle) de plaider auprès du pape l’annulation de son mariage, afin d’épouser Anne Boleyn (Geneviève Bujold), une suivante de la reine, dont il est amoureux. Ce triomphe critique et commercial, récompensé par un Oscar (sur neuf nominations) pour les Meilleurs costumes et 4 Golden Globes, donne envie immédiatement au producteur Hal B. Wallis de surfer sur cet engouement et charge le même réalisateur, ainsi que le même scénariste (John Hale) de miser cette fois sur le destin parallèle entre Mary Stuart et Élisabeth, reine d’Angleterre. Si l’ensemble s’avère trop académique, le rythme est maîtrisé, la violence de certaines séquences étonne encore aujourd’hui, c’est très plaisant à regarder et surtout à suivre, même si Marie Stuart, Reine d’Écosse vaut essentiellement pour la composition exceptionnelle de Vanessa Redgrave et Glenda Jackson, mais aussi du jeune Timothy Dalton dans l’un de ses premiers rôles au cinéma. Impersonnel certes, mais le spectacle est tout de même grandement assuré et les moyens se voient à l’écran.

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Test Blu-ray / Le Trône de feu, réalisé par Jess Franco

LE TRÔNE DE FEU (Il Trono di fuoco / The Bloody Judge) réalisé par Jess Franco, disponible en Combo Blu-ray + DVD le 17 mai 2022 chez Artus Films.

Acteurs : Christopher Lee, Maria Schell, Leo Genn, Hans Hass Jr., Maria Rohm, Margaret Lee, Peter Martell, Howard Vernon, Milo Quesada…

Scénario : Michael Haller, Anthony Scott Veitch, Jess Franco & Enrico Colombo, d’après une histoire originale de Peter Welbeck

Photographie : Manuel Merino

Musique : Bruno Nicolai

Durée : 1h38

Date de sortie initiale : 1970

LE FILM

À la fin du XVIIe siècle, l’Europe se livre à une véritable chasse aux sorcières. En Angleterre, un juge sadique et un peu trop zélé arrête bon nombre de femmes innocentes qu’il fait accuser « d’adoratrice du diable », les rend responsables d’actes de sorcellerie sans preuves évidentes et les brûlent publiquement. Marie vient de perdre sa sœur dans ces atroces conditions : elle est bien décidée à venger sa mémoire.

Nous avons très largement abordé la vie et la carrière de Jesús Franco Manera aka Jess Franco (1930-2013) à travers nos chroniques des Nuits brûlantes de Linda, Shining Sex, Deux espionnes avec un petit slip à fleurs, Opération Re Mida (Lucky l’intrépide), La Fille de Dracula, Les Possédées du diable et Le Journal intime d’une nymphomane. Alors autant attaquer immédiatement, en allant voir tout de suite où le film qui nous intéresse aujourd’hui, en l’occurrence Le Trône de feuThe Bloody Judge, se situe dans la filmographie conséquente et éclectique de l’ami Jess. Cet opus est tourné en 1969, année des Brûlantes ou L’Amour dans les prisons de femmes (aussi connu sous le titre 99 femmes) et de Sumuru, la cité sans hommes, tandis que certains pays peuvent déjà découvrir Justine ou les Infortunes de la vertu ou Les Deux beautés (Marquis de Sade’s Justine) avec Klaus Kinski. Jess Franco est partout dans les salles du monde entier, certains de ses longs-métrages sortent avec un, deux voire trois ans de décalage selon le territoire, la censure sévit ici ou au contraire certaines scènes pornographiques sont ajoutées au montage pour faire plaisir aux spectateurs. Le cinéaste ne sait plus où donner de la tête et où pointer sa caméra, mais tant qu’il tourne, il ne saurait être plus heureux. Bien sûr, dans cette anthologie foisonnante, le cinéphile/age trouvera forcément à boire et à manger. Le Trône de feu peut aisément être placé dans le haut du panier. L’Inquisition a inspiré le cinéma. On peut citer en vrac Capitaine de Castille (1947) de Henry King avec Tyrone Power et Cesar Romero, La Passion de Jeanne d’Arc (1928) et Jour de colère Vredens Dag (1943) de Carl Theodor Dreyer, Les Sorcières de Salem (1957) de Raymond Rouleau, Le Grand Inquisiteur (1968) de Michael Reeves et, plus proche de nous, Les Fantômes de Goya de Milos Forman. Un sujet qui inspire visiblement le réalisateur, qui signe probablement l’un de ses meilleurs films, à la fois sur le fond comme sur la forme, et qui bénéficie surtout d’un solide atout dans sa musette, en la personne de l’illustre Christopher Lee, qu’il avait déjà dirigé (Le Sang de Fu Manchu The Blood of Fu Manchu, Le Château de Fu Manchu The Castle of Fu Manchu) et qu’il retrouvera encore plus tard (Les Nuits de Dracula, Les Inassouvies Philosophy in the Boudoir, Dark Mission : Les Fleurs du mal…).

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Test 4K UHD / Eiffel, réalisé par Martin Bourboulon

EIFFEL réalisé par Martin Bourboulon, disponible en DVD, Blu-ray et Combo Blu-ray + 4K UHD le 16 février 2022 chez Pathé.

Acteurs : Romain Duris, Emma Mackey, Pierre Deladonchamps, Armande Boulanger, Bruno Raffaelli, Alexandre Steiger, Andranic Manet, Philippe Hérisson…

Scénario : Caroline Bongrand, Thomas Bidegain, Natalie Carter, Martin Bourboulon & Martin Brossollet, d’après les livres de Caroline Bongrand

Photographie : Matias Boucard

Musique : Alexandre Desplat

Durée : 1h48

Année de sortie : 2021

LE FILM

Venant tout juste de terminer sa collaboration sur la Statue de la Liberté, Gustave Eiffel est au sommet de sa carrière. Le gouvernement français veut qu’il crée quelque chose de spectaculaire pour l’Exposition universelle de 1889 à Paris, mais Eiffel ne s’intéresse qu’au projet de métropolitain. Tout bascule lorsqu’il recroise son amour de jeunesse. Leur relation interdite l’inspire à changer à jamais l’horizon de Paris.

Le cinéma a toujours été frileux à l’idée d’aborder le mythe Gustave Eiffel ou tout du moins de le faire incarner à l’écran. Ce n’est que récemment que le légendaire ingénieur est revenu sur le devant de la scène, dans A la poursuite de demain – Tomorrowland (2015) de Brad Bird, ainsi que dans Men in Black : International (2019) de F. Gary Gray, dans lequel on apprenait qu’il s’agissait d’un des tous premiers « Hommes en Noir ». Mais jusqu’à présent, aucun acteur n’avait interprété « l’homme », même si Gérard Depardieu avait failli dans les années 1990, avec Isabelle Adjani, sous la direction de Luc Besson. Pour cela, il aura donc fallu attendre 2021 et le blockbuster hexagonal sobrement intitulé Eiffel. Sous la direction de Martin Bourboulon, ancien publicitaire, ayant fait ses classes à la télévision aux Guignols de l’Info, réalisateur du gros succès de Papa ou Maman en 2015 (et de sa suite inutile), l’un des français (d’origine germanique d’ailleurs) les plus célèbres du monde prend vie et devient un personnage romanesque dans un faux biopic. Le metteur en scène ne s’en cache pas, le scénario de l’écrivaine Caroline Bongrand marche allègrement sur les pas de Titanic de James Cameron, dans un désir de concilier l’évènement historique et un récit fictif, en l’occurrence une histoire d’amour totalement inventée (ou presque diront certains), dans la perspective de toucher un large public. Doté d’un budget conséquent de plus de 23 millions d’euros, Eiffel n’aura pas connu de réel engouement en France, où le film aura eu beaucoup de peine à frôler la barre du million et demi de spectateurs. Un résultat national forcément en demi-teinte devant l’ampleur et l’ambition du projet. S’il est évident qu’Eiffel n’aura pas eu de mal à se vendre à l’étranger, comment expliquer cet accueil tiède, aussi bien de la part des spectateurs que de la critique ? Tout simplement parce que Eiffel n’est pas un bon film, ou tout du moins qu’il déçoit là où l’on fondait de solides espoirs. Car même s’il est indéniable que les effets spéciaux sont spectaculaires, cette superproduction reste froide, pour ne pas dire désincarnée du début à la fin, tandis que la romance, qui n’intéresse jamais vraiment en raison du manque flagrant d’alchimie entre les deux têtes d’affiche, prend le pas sur l’ensemble. Au final, Eiffel ne tient pas ses promesses, demeure frustrant et disons-le, ennuyant.

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Test DVD / Le Livre Noir, réalisé par Anthony Mann

LE LIVRE NOIR (The Black Book) réalisé par Anthony Mann, disponible en DVD le 7 décembre 2021 chez Artus Films.

Acteurs : Robert Cummings, Richard Basehart, Richard Hart, Arlene Dahl, Arnold Moss, Norman Lloyd…

Scénario : Aeneas MacKenzie & Philip Yordan

Photographie : John Alton

Musique : Sol Kaplan

Durée : 1h26

Date de sortie initiale : 1949

LE FILM

A Paris, en 1794, cinq ans après la Révolution française, le règne de la Terreur est instauré. Robespierre use de toutes les ficelles pour éradiquer ses rivaux et conserver les grâces de la Convention. Il consigne, dans un petit livre noir, les noms de ses ennemis, prochaines victimes de la cruauté révolutionnaire. Mais ce livre noir disparaît. Afin de confondre Robespierre et le destituer, Charles d’Aubigny est chargé de le retrouver, par tous les moyens…

Sur Homepopcorn.fr, nous avons déjà longuement parlé d’Anthony Mann, de sa virtuosité, de sa légende, de son éclectisme, de La Charge des Tuniques Bleues, en passant par Les Affameurs, Je suis un aventurier, Marché de brutes et La Brigade du suicide. Le film que nous évoquerons aujourd’hui s’intitule Le Livre Noir The Black Book et se situe entre Raw Deal et La Porte du diable Devil’s Doorway. A la fin des années 1940, le réalisateur se spécialise dans le film noir à petit budget, avec parfois quelques ingrédients issus du documentaire afin de renforcer le réalisme de l’histoire, à l’instar d’Il marchait dans la nuit He Walked by Night sorti en 1948. Le Livre Noir se démarque, car il s’agit d’un drame historique et d’aventures en costume, mais aussi un thriller d’espionnage, le tout teinté d’humour noir. Deux choses concernant ce film. Premièrement, si vous souhaitez faire connaître la période de la Terreur à l’une de vos connaissances ou à l’un de vos bambins, ne lui montrez surtout pas Le Livre Noir, qui arrange à sa sauce cette période spécifique de la Révolution française, avec moult anachronismes et rencontres improbables de personnages historiques. Deuxièmement, si vous cherchez un super divertissement, magistralement mis en scène, interprété et photographié, ponctué de poursuites en calèche, de bagarres, de faux-semblants, de trahisons, de suspense alors précipitez-vous sur The Black Book, aussi connu sous le titre Reign of Terror, merveilleux spectacle qui en met plein la vue, mené sans aucun temps mort, sans un pet de gras durant 85 minutes, une vraie leçon de cinéma et de montage. Le génie d’Anthony Mann explose à chaque plan pour le plus grand bonheur de ses très nombreux aficionados, qui se laisseront facilement emporter par le souffle de ce méconnu Livre Noir.

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