Test Blu-ray / Tremblement de terre, réalisé par Mark Robson

TREMBLEMENT DE TERRE (Earthquake) réalisé par Mark Robson, disponible en DVD et Blu-ray, depuis le 15 juin 2021 chez BQHL Éditions.

Acteurs : Charlton Heston, Ava Gardner, George Kennedy, Lorne Greene, Geneviève Bujold, Richard Roundtree, Marjoe Gortner, Barry Sullivan, Lloyd Nolan, Victoria Principal…

Scénario : George Fox & Mario Puzo

Photographie : Philip H. Lathrop

Musique : John Williams

Durée : 2h02

Date de sortie initiale: 1974

LE FILM

Lorsque le tremblement de terre le plus ravageur de tous les temps frappe le sud de la Californie, la ville de Los Angeles est rasée et tous les habitants sont touchés…

Alors que le Nouvel Hollywood est en plein essor, en 1970 surgit sur les écrans Airport, de George Seaton, un des tout premiers succès de la vague des films catastrophe de la décennie qui vient de s’ouvrir. Devant l’engouement du public pour ces spectacles, les studios s’engouffrent dans la brèche et profitent des avancées faites dans le domaine des effets spéciaux pour renforcer le réalisme de ses histoires portées chaque fois par un casting exceptionnel. L’année 1972 est marquée par le triomphe de l’extraordinaire L’Aventure du Poséidon de Ronald Neame, qui reste encore aujourd’hui l’une des plus grandes références en la matière. Mais c’est en 1974 que les spectateurs se verront offrir pas moins de quatre longs-métrages, sortis à quelques mois, voire quelques semaines d’intervalle, qui deviendront des fleurons du genre. Terreur sur le Britannic Juggernaut de Richard Lester ouvre le bal en septembre 1974, suivi de près par 747 en péril Airport 1975 de Jack Smight au mois d’octobre. La Tour infernale The Towering Inferno de John Guillermin arrive pour les fêtes de fin d’année, Universal Pictures parvient à damer le pion à son concurrent direct en sortant Tremblement de terre Earthquake trois semaines avant. Si La Tour infernale est et restera probablement pour toujours sur la première marche du podium des films catastrophe, Tremblement de terre demeure un gigantesque divertissement qui compile tous les ingrédients du genre, autrement dit une longue exposition du décor où se déroulera l’action, suivie de la présentation successive des personnages principaux (et secondaires), leurs liens (familiaux ou professionnels), leurs boulots, leurs soucis, puis la mise en place des éléments qui conduiront à la catastrophe (incendie, éruption, tornade, déluge, apocalypse, aérienne, invasion d’aliens, virus, maritime, ferroviaire…), la grosse séquence de destruction massive (qui peut être suivie par d’autres plus rapides, avant de préparer le bouquet final, ici l’effondrement d’un barrage), pour enfin se concentrer à nouveau sur nos héros. Des protagonistes qui finissent par entrer en interaction et par s’entraider, alors que rien ne les prédisposait à se rencontrer dans une situation dite normale. Dans Tremblement de terre, Charlton Heston, déjà à l’affiche d’Alerte à la bombe Skyjacked de John Guillermin et de 747 en péril, se voit à nouveau embarqué dans une nouvelle aventure du même acabit et retrouve à cette occasion l’indispensable George Kennedy, omniprésent quand quelque chose ne tourne pas rond, puisque le comédien était lui aussi présent au générique d’Airport et Airport 1975. Ava Gardner, Lorne Greene, Geneviève Bujold, Richard Roundtree, Marjoe Gortner, Barry Sullivan, Lloyd Nolan et la sublime Victoria Principal complètent la distribution de Tremblement de terre, pierre angulaire de tout un pan du cinéma américain, qui n’aura de cesse d’inspirer moult réalisateurs, à l’instar de l’allemand Roland Emmerich, qui y puisera toute la matière pour Independence Day, Godzilla, Le Jour d’après et 2012. Toujours est-il que si vous décidez de vous faire une petite rétrospective dédiée à cette thématique, Earthquake est clairement un indispensable.

Los Angeles, une journée qui s’annonce comme les autres. Si, entre les employés d’un barrage et les scientifiques du centre local de surveillance sismique, plusieurs personnes redoutent qu’il ne se passe bientôt quelque chose de beaucoup plus sérieux que les petites secousses habituelles, la vie continue. L’ingénieur Stuart Graff qui vient de se séparer de sa femme Remy, entretient une liaison avec la veuve d’un collègue, Denise Marshall. Mais Remy tente de convaincre son père, Sam Royce (qui est également l’employeur de Stuart) de mettre fin à cette relation. Dans un autre coin de la ville le sergent de police Lew Slade est suspendu pour avoir frappé un autre policier, et Jody, tenant d’une épicerie générale, ne pense qu’à séduire Rosa, soeur de Sal, l’assistant de Miles Quade, un casse-cou de la moto. Et, soudain, depuis les entrailles de la terre, des forces d’une puissance inouïe se libèrent. Violemment, très violemment…

Certes, Tremblement de terre demeure célèbre pour ses scènes de séisme frappant de plein fouet Los Angeles à cause de la faille de San Andreas, qui sera d’ailleurs exploitée une fois de plus dans Superman de Richard Donner quatre ans plus tard. Mais ce que le public plus contemporain ne sait peut-être pas, c’est que le film a donné naissance au procédé sonore Sensurround, surtout exploité dans les salles de cinéma américaines (mais aussi en France, comme au Grand Rex à Paris), qui consistait à synchroniser à l’action, la diffusion de puissantes vibrations sonores de très basse fréquence, qui se propageaient et procuraient au spectateur certaines sensations en rapport avec le film projeté. Aujourd’hui, si ces effets spéciaux acoustiques ne sont pas rares dans les parcs d’attraction, cela demeurait inédit au cinéma. Earthquake était donc tout indiqué pour proposer à une audience une nouvelle immersion, évidemment aux moments opportuns, qui représentent un peu plus d’un quart d’heure dans le film de Mark Robson. Au-delà de cette nouveauté et avancée technique, Tremblement de terre embarque le spectateur pour un ride cinématographique on ne peut plus plaisant, qui pâtit peut-être d’un léger manque de rythme, mais cette impression se dissout aussi vite qu’elle apparaît, car la grande séquence, celle du séisme qui va raser une bonne partie de la ville de Los Angeles, arrive. Chose amusante, celui-ci se déclenche au moment où l’une des protagonistes, Rosa (Victoria Principal, à se damner même avec sa coupe afro), est au cinéma, devant L’Homme des hautes plaines de Clint Eastwood. On imagine très bien la montée d’adrénaline des spectateurs au moment du déclenchement du Sensurround dans la salle, simultanément à l’onde sismique qui secoue ceux du film.

Les spectaculaires effets visuels, réalisés à partir de maquettes et de peintures sur verre, qui conservent un charme fou et participent évidemment à la grande réussite de Tremblement de terre, ont été très justement récompensés par un Oscar, en même temps que le son. Parallèlement, on se prend d’affection pour la majeure partie des personnages, les acteurs étant particulièrement bien rodés, même si Charlton Heston a toujours déclaré qu’il ne se trouvait pas bon dans cet opus ou que Geneviève Bujold se l’est vu imposer par contrat par Universal Pictures. Ava Gardner, âgée de 52 ans paraît bien fatiguée et bouffie par l’alcool, George Kennedy vole la vedette dans la peau de l’officier de police Lew Slade, désabusé par son boulot, ayant un penchant pour la bibine, et que la situation va ranimer. Devenu une star trois ans plus tôt, grâce au rôle-titre de Shaft Les Nuits rouges de Harlem de Gordon Parks, Richard Roundtree, qui sortait de l’excellent Charley le borgne Charley One-Eye de Don Chaffey, accède ici au rang de superstar dans un blockbuster hollywoodien. Outre la présence sexy de Victoria Principal (vous l’aurez compris, cela fait trois fois qu’on en parle), on notera aussi celle plus machiavélique du flippant Marjoe Gortner (Soudain… les monstres de Bert I. Gordon, Starcrash : Le Choc des étoiles Scontri stellari oltre la terza dimensione de Luigi Cozzi) dans la peau de Jody Joad, commerçant puis militaire réserviste à qui il manque une case et qui va définitivement péter un câble après la catastrophe. Les cinéphiles reconnaîtront bien sûr la trogne inoubliable de Walter Matthau (crédité sous le nom fantaisiste Walter Matuschanskyasky), qui se contente dans le film de jouer un ivrogne, qui n’ouvre la bouche que pour picoler. Ce gag répétitif apparaît comme étant l’un des rares points négatifs de Tremblement de terre.

Earthquake peut compter sur la mise en scène comme bien souvent inspirée du canadien Mark Robson (L’Enfer au-dessous de zéro, Plus dure sera la chute, Les Centurions, Le Champion), ancien monteur de Jacques Tourneur (La Féline, Vaudou) et d’Orson Welles (La Splendeur des Amberson), qui emballe cette entreprise colossale avec tout le savoir-faire du solide artisan. Il est aussi solidement épaulé par le directeur de la photographie Philip H. Lathrop (Le Bagarreur, Seuls sont les indomptés), le décorateur Alexander Golitzen (Les Détrousseurs, Ne m’envoyez pas de fleurs, Rendez-vous avec une ombre) et le maestro John Williams à la baguette.

Produit avec un budget d’un peu plus de 7 millions de dollars, Tremblement de terre en rapporte dix fois plus rien que sur le sol de l’oncle Sam et quasiment autant dans le reste du monde. Une suite, devant se dérouler à San Francisco est alors envisagée, avant d’être annulée suite au décès de Mark Robson à l’âge de 64 ans en 1978.

LE BLU-RAY

On ne compte plus les précédentes éditions en DVD de Tremblement de terre. Depuis près de vingt ans, Universal Pictures en a proposé deux (en 2002 et 2006), avant d’atterrir chez MEP en 2009, puis chez Seven7 en 2011. En 2013, le film de Mark Robson revient à la maison-mère en 2013, pour la première fois en Haute-Définition. Huit ans plus tard, en 2021 quoi, Earthquake revient dans les bacs en DVD et en Blu-ray, cette fois chez BQHL Éditions. Le visuel de la jaquette, glissée dans un boîtier classique de couleur bleue, reprend heureusement celui de la célèbre affiche française originale. L’ensemble est glissé dans un surétui cartonné. Dans le boîtier, vous trouverez également un excellent livret de 24 pages rédigé par Marc Toullec, qui revient sur toute l’aventure de Tremblement de terre, le contexte cinématographique de l’époque, l’écriture du scénario, le tournage, le casting, les conditions de prises de vue, le procédé Sensurround, les effets spéciaux, le triomphe commercial du film et sa suite finalement avortée. Le menu principal est animé sur une séquence de séisme tirée du film.

Le premier supplément est un retour sur le Sensurround (dont nous avons parlé dans la critique), élaboré par Universal, expliqué en long en large par Ben Burtt, « designer sonore » comme un panneau le présente au début du programme. Durant un peu plus de dix minutes, le créateur de la bande son des épisodes de la saga Star Wars et des Indiana Jones, ainsi que WALL-E, lauréat de l’Oscar du Meilleur Son pour E.T. l’extra-terrestre et pour Indiana Jones et la Dernière Croisade, mais aussi de deux autres spéciaux pour Star Wars, épisode IV : Un nouvel espoir et Les Aventuriers de l’Arche Perdue, revient sur sa découverte personnelle de Tremblement de terre dans une salle équipée en Sensurround. Ben Burtt, qui était encore étudiant en cinéma à la sortie d’Earthquake, aborde aussi bien le côté technique que commercial de cette nouvelle façon de vivre le film de l’intérieur, qui allait ensuite faire développer d’autres créations acoustiques liées aux basses fréquences dans les bandes-sons cinématographiques.

Le second supplément (11’) donne la parole à Bill Taylor, matte painter ayant officié sur moult classiques du cinéma (L’Odyssée du Hindenburg, Complot de famille, Les Naufragés du 747, Les Blues Brothers, The Thing et tellement d’autres), qui parle ici de son confrère et ami Albert Whitlock (1915-1999), en charge des peintures sur verre qui ont largement contribué au succès de Tremblement de terre. Les non-initiés apprendront ce qu’est un matte painting, tandis que les autres en sauront sûrement plus sur le travail, la méthode de travail et la carrière d’Albert Whitlock, qui avant Earthquake avait travaillé sur L’Arnaque, L’Or noir de l’Oklahoma, Abattoir 5, Les Diamants sont éternels, Le Cerveau d’acier, Les Prairies de l’honneur

L’éditeur fournit aussi plus d’une demi-heure de scènes additionnelles, qui proviennent d’une version longue d’Earthquake, réalisée spécialement pour la diffusion du film sur la chaîne NBC. En effet, suite à un accord passé entre cette dernière et Universal, Tremblement de terre a été repensé comme une « mini-série » en deux parties d’1h15. A cette occasion, la production a fourni quelques séquences laissées sur le banc de montage par Mark Robson, mais a aussi procédé à quelques reshoots pour une question de durée. Ainsi, ces scènes montrent entre autres toute une partie consacrée à l’aéroport de LAX et plus particulièrement aux passagers d’un avion, un couple en fait, qui suite aux secousses sismiques se trouvent obligés d’être redirigés vers San Francisco, après un premier atterrissage qui a failli mal tourné en raison de l’effondrement de la piste ! Signalons aussi une nouvelle introduction, qui pour le coup rappelle celle d’Armageddon de Michael Bay (à laquelle Charlton Heston prêtait d’ailleurs sa voix), centrée sur la faille de San Andreas, sans oublier d’autres séquences supplémentaires avec Victoria Principal et Marjoe Gortner, ce dernier n’hésitant pas à suivre la première pour la reluquer par la fenêtre.

L’interactivité se clôt sur la bande-annonce.

L’Image et le son

La copie restaurée 2K du film de Mark Robson est livrée dans un écrin Blu-ray au format 1080p. La photo signée par le grand chef opérateur Philip H. Lathrop (Qu’as-tu fait à la guerre, papa ?, On achève bien les chevaux) est respectée avec des couleurs très affirmées, une clarté plaisante et une patine argentique appréciable, même si l’aspect grumeleux en ouverture peut tout d’abord faire peur. L’image a été savamment nettoyée, la copie est vraiment très propre, l’ensemble est stable, le cadre large ne manque pas de détails même si la carnation des personnages tire parfois sur le rosé. Le piqué doux demeure agréable pour les mirettes, les contrastes sont élégants, bien que les séquences truquées soient moins définies avec des noirs qui manquent un peu de fermeté. En dehors d’un encodage aléatoire, dans l’ensemble ce Blu-ray est très beau et surpasse le Blu-ray Universal précédemment édité.

Tremblement de terre est disponible en version originale et française LPCM 5.1. La première instaure un confort acoustique quelque peu déséquilibré, où l’on pourra reprocher un niveau vraiment très bas des dialogues, une spatialisation décevante et le score de John Williams qui se concentre souvent sur les frontales. L’excellente piste française (par son doublage) présente des voix plus assurées et une balance effets-musique-dialogues plus convaincante. Les sous-titres français ne sont pas imposés, mais certains risquent de trouver la police un poil trop petite. Les deux options acoustiques sont propres et les basses répondent heureusement à l’appel lors des scènes de secousses sismiques.

Crédits images : © BQHL Editions / Universal Pictures / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

3 réflexions sur « Test Blu-ray / Tremblement de terre, réalisé par Mark Robson »

  1. Souvenirs du sensurround.
    Film majeur du genre en effet. J’ étais employé de la société Pathé à l’ époque et travaillais en tantqu’agent d’accueil dans leur cinéma de Nancy. Ce système sonore , plutôt  » gadget » à été utilisé pour quelques autres films ( Rollercoaster, La Bataille de Mydway, Battlestar Galactica…),
    mais il n’ a pas perduré, les caissons de basses et le câblage à installer étant vraiment très très imposants et les effets de graves se faisant ressentir bien au delà de la salle équipée , voire provoquant des fissures sur certains murs ! Mais le public à momentanément apprécié le phénomène…

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