Test Blu-ray / Le Maître des îles, réalisé par Tom Gries

LE MAÎTRE DES ÎLES (The Hawaiians) réalisé par Tom Gries, disponible en DVD & Combo Blu-ray + DVD le 22 mars 2024 chez Sidonis Calysta.

Acteurs : Charlton Heston, Tina Chen, Geraldine Chaplin, Mako, John Phillip Law, Alec McCowen, Don Knight, Miko Mayama, Virginia Ann Lee…

Scénario : James R. Webb, d’après le roman de James A. Michener

Photographie : Lucien Ballard & Philip H. Lathrop

Musique : Henry Mancini

Durée : 2h14

Date de sortie initiale : 1970

LE FILM

L’archipel d’Hawaï dans les années 1880. Descendant d’une riche famille de planteurs, Whip Hoxworth abandonne le commerce maritime pour prendre possession des terres héritées de son grand-père. Contre vents et marées, il devient à l’issue de quelques années le plus grand propriétaire de la région grâce au travail acharné de ses ouvriers chinois dont un couple élève son fils. Sachant son activité menacée par l’indépendance des îles, il fomente une révolution de manière à ce que son territoire bénéficie du protectorat américain…

La carrière de Charlton Heston est telle que nous avons toujours cette impression de découvrir sans cesse de nouveaux films ou des pépites quasi-inédites. C’est encore le cas pour Le Maître des îles, que l’auteur de ces mots ne connaissait pas du tout et n’en avait même jamais entendu parler. Nous sommes en 1970 et la star hollywoodienne vient de connaître l’un des plus grands succès avec La Planète des singes Planet of the Apes de Franklin J. Schaffner. Voyant le vent tourné à Hollywood, Charlton Heston se réfugie dans le répertoire de William Shakespeare et tourne Jules César de Stuart Burge, tout en préparant Antoine et Cléopâtre de son côté et mettra en scène lui-même. Avant de retrouver son rôle du capitaine George Taylor pour une petite apparition dans Le Secret de la planète des singes Beneath the Planet of the Apes de Ted Post, il revient au film d’aventure historique avec Le Maître des îles The Hawaiians, qui n’est autre que la suite d’Hawaï, réalisé par George Roy Hill quatre ans plus tôt, adaptation du roman-fleuve éponyme de James Michener. Cet auteur américain avait déjà inspiré le cinéma et avait vu quelques-uns de ses livres être adaptés par Mark Robson (Retour au paradis et Les Ponts de Toko-Ri), Robert Wise (Femmes coupables) et Joshua Logan (Sayonara et South Pacific). Ancien lieutenant de l’US Navy envoyé dans le Pacifique Sud durant la Seconde Guerre mondiale, James Michener se spécialise dans le roman historique, reçoit le prix Pulitzer en 1948 pour son premier livre Tales of the South Pacific. Forcément, après le triomphe d’Hawaï, lauréat de deux Golden Globes et sept fois nommé aux Oscar, la tentation est alléchante de revenir au pavé original de l’écrivain, dont une petite partie seulement avait été transposée. Le producteur Walter Mirisch (Scorpio, Mr. Majestyk, Deux sur la balançoire, Le Shérif aux mains rouges, Fort Massacre) met donc cette séquelle en route, alors que ce genre de divertissement devient pour ainsi dire obsolète, dépassé par l’avènement du Nouvel Hollywood. Néanmoins, Le Maître des îles demeure un formidable spectacle, à la mise en scène comme d’habitude inspirée de Tom Gries (Le Solitaire de Fort Humboldt, Les 100 fusils), qui avait déjà dirigé Charlton Heston dans Will Penny, le solitaire, et sublimement photographié par deux illustres chefs opérateurs, Lucien Ballard (7 secondes en enfer, Les 4 fils de Katie Elder, Boeing Boeing, Le Tueur s’est évadé, Baïonnette au canon), tombé malade et remplacé par Philip H. Lathrop (Le Bagarreur, Tremblement de terre, Seuls sont les indomptés). Et est-ce utile de préciser que Charlton Heston est comme toujours immense ?

Quarante ans après les événements du film Hawaï, le capitaine Whip Hoxworth revient à Oahu avec la cale du Corinthian pleine de travailleurs chinois. Déterminé à quitter la barre et à diriger la flotte maritime familiale depuis la côte, il apprend à la place que son grand-père (le capitaine Rafer Hoxworth, rôle tenu précédemment par Richard Harris) est décédé et a laissé sa fortune à la cousine de Hoxworth, Malama, et à son mari stoïque et plein de reproches, Micah Hale. Whip, considéré comme le mouton noir de sa famille pieuse et conservatrice, ne reçoit même pas le navire espéré, seulement un domaine stérile situé à Hanakai. Venue de Chine, la jolie jeune femme Hakka, Bong Nyuk Tsin, avait été découverte parmi tous les immigrants chinois. Pour déjouer un viol et la revendiquer comme sienne, le méfiant Mun Ki avait menti en disant qu’elle était sa femme. L’homme qui l’avait kidnappée dans son village pour en faire une prostituée dans un bordel d’Honolulu est tué dans des combats tribaux pendant le voyage. Sur le quai, Mun Ki et le propriétaire du bordel se disputent à propos de la femme. L’épouse de Whip, Purity, intervient et suggère aux Hoxworth d’embaucher le couple comme domestiques afin de désamorcer le conflit. Ils disposent d’une cabane en bois spartiate sur le domaine pour y vivre. Plus tard, Mun Ki emmène Bong Nyuk Tsin, enceinte, chez un sage chinois local, qui lui prédit qu’elle aura cinq fils. Cependant, selon la coutume chinoise, la véritable épouse de Mun Ki en Chine sera considérée comme la mère officielle de tous. Bong Nyuk Tsin sera rebaptisée « Tante de Wu Chow », Tante des Cinq Continents. Lorsque Mun Ki reviendra en Chine, il emmènera ses fils avec lui. Bong Nyuk Tsin sera la bienvenue pour retourner seule dans son village.

Embarquez pour 2h15 de grand cinéma ! Le générique donne le ton, un cadre large merveilleux, l’immensité de l’océan, des couleurs resplendissantes, les paysages naturels majestueux, la reconstitution en met plein la vue avec ce fier Charlton Heston (qui avait pourtant refusé Hawaï et qui a accepté cette suite contre un cachet record, doublé d’un pourcentage sur les recettes) trônant sur son rafiot blindé de main d’oeuvre chinoise. Le Maître des îles est l’adaptation des derniers chapitres du livre de James Michener, alors que le film précédent s’inspirait des trois premiers. C’est dire toute la richesse de l’ouvrage, car il se passe beaucoup de choses durant les 135 minutes du Maître des îles, dont l’intrigue se déroule sur quinze ou vingt ans. L’ami Charlton crève l’écran, mais partage l’affiche avec sa partenaire Tina Chen, vue précédemment dans Alice’s Restaurant d’Arthur Penn et que l’on reverra dans Les 3 jours du Condor de Sydney Pollack. Si sa carrière se résumera surtout à des séries télévisées, la comédienne tient la dragée haute au reste de la distribution, également composée de Geraldine Chaplin (peu aidée il est vrai par un rôle en retrait et vite expédié) et du légendaire Mako, acteur au visage reconnaissable croisé chez Robert Wise (La Canonnière du Yang-Tse), Sam Peckinpah (Tueur d’élite), John Milius (Conan le Barbare), John Schlesinger (Fenêtre sur Pacifique), Philip Kaufman (Soleil levant) et même chez Michael Bay (Pearl Harbor).

Si le reste du casting ne contient pas de stars du même calibre que Charlton Heston, on y croise tout de même John Phillip Law (Un murmure dans l’obscurité, Docteur Justice, Le Voyage Fantastique de Sinbad, Le Baron Rouge, Danger : Diabolik !), Alec McCowen (Jamais plus jamais, Frenzy, Guerre et passion), Don Knight (La Créature du marais, Blue Sunshine), du beau monde, professionnel, qui se fond dans les magnifiques décors et dont les personnages, y compris ceux campés par les acteurs principaux, sont ambigus à souhait, échappent aux clichés et sont difficilement attachants, ce qui les rend d’autant plus intéressants.

Évidemment, on ne sait pas ce qui reste imputable au livre original ou au scénariste de renom James R. Webb (Vera Cruz, Les Cheyennes, Les Rois du Soleil, Les Nerfs à vif, Trapèze), mais Le Maître des îles est une succession ininterrompue de rebondissements pour les protagonistes, pris dans la grande histoire, juste avant l’annexion des îles Hawaï par les États-Unis. Enfin, mention spéciale à la musique toujours grandiose et inspirée du maître Henry Mancini.

LE BLU-RAY

Inédit en DVD et Blu-ray, Le Maître des îles débarque en édition Standard et HD chez Sidonis Calysta. Superbe visuel. Le menu principal est animé et musical.

Sidonis Calysta reprend le long documentaire consacré à Charlton Heston réalisé en 1995 (50’), déjà proposé sur le récent Blu-ray du Seigneur de la guerre. Le comédien revient sur son parcours, les grandes étapes de sa carrière, ses rôles emblématiques (et il y en a un paquet), ainsi que sur ses grandes collaborations, tandis que sa fille, Gregory Peck, Carroll Baker, Janet Leigh, le producteur Walter Seltzer et bien d’autres s’expriment sur l’acteur et l’homme qu’ils ont côtoyé dans la vie privée. De nombreux extraits de films viennent illustrer ces très beaux propos, ainsi que des archives personnelles et des images de tournage.

Vous ne connaissez pas Le Maître des îles ? Soyez rassurés, après l’intervention d’Olivier Père, vous saurez tout ce qu’il y a à savoir sur le film de Tom Gries ! Durant 35 minutes non-stop, en fait si en raison de trop nombreux et longs extraits de The Hawaiians, le directeur d’Arte France Cinéma et directeur des acquisitions pour Arte France revient sur la source littéraire du Maître des îles, en parlant bien sûr du roman de James Michener, ainsi que de la vie et de l’oeuvre de l’écrivain prolifique. Le livre Hawaï est donc forcément et largement abordé (ainsi que le film de George Roy Hill, dont The Hawaiians est la suite). Olivier Père passe ensuite en revue le casting, les partis-pris, la dimension historique du récit…

L’interactivité se clôt sur la bande-annonce.

L’Image et le son

Qui dit Hawaï dit mer et ciel azurés. Il est évident que le master a subi un petit coup de scalpel numérique car aucune scorie, dépôt ou autre poussière ne subsistent. Rimini Editions s’arme d’une compression somme toute solide afin de restituer la belle luminosité des scènes diurnes ainsi que la densité des noirs durant les séquences nocturnes. Le rendu des matières est en plus extrêmement appréciable, le grain argentique palpable, la copie d’une stabilité à toutes épreuves, hormis peut-être durant les credits d’ouverture, mais cela reste anecdotique. Les teintes bleues, vertes bordeaux et brunes-bois sont riches et bien saturées. Le relief est omniprésent et met en valeur la richesse des images. Voilà une superbe édition HD qui nous permet de profiter de la beauté des paysages et des décors naturels, incontestablement les points forts de cette édition. Blu-ray au format 1080p.

Les versions originale et française bénéficient d’un mixage DTS-HD Master Audio Mono 2.0. Dans les deux cas, l’espace phonique se révèle probant et dynamique, le confort est indéniable, et les dialogues sont clairs, nets, précis. Sans surprise, au jeu des comparaisons, la piste anglaise s’avère plus naturelle et harmonieuse. Que vous ayez opté pour la langue de Shakespeare (conseillée) ou celle de Molière, aucun souffle ne vient parasiter votre projection et l’ensemble reste propre. Les sous-titres français ne sont pas imposés.

Crédits images : © Sidonis Calysta / MGM / Captures du Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

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