Test Blu-ray / Sherlock Junior, réalisé par Buster Keaton

SHERLOCK JUNIOR (Sherlock Jr.) réalisé par Buster Keaton, disponible le 16 juin 2020 en DVD et Combo Blu-ray+DVD chez Elephant Films.

Acteurs : Buster Keaton, Kathryn McGuire, Joe Keaton, Erwin Connelly, Ward Crane…

Scénario : Clyde Bruckman, Jean C. Havez, Joseph A. Mitchell

Photographie : Byron Houck, Elgin Lessley

Musique : Timothy Brock (2015)

Durée : 0h44

Année de sortie : 1924

LE FILM

Projectionniste dans un modeste cinéma, un homme rêve de devenir un grand détective. Un jour, tandis qu’il rend visite à la demoiselle de ses pensées pour lui offrir une bague, son rival dérobe la montre du père, la place chez un prêteur sur gages puis glisse le billet dans la poche du pauvre amoureux. Celui-ci se met à jouer les détectives amateurs. Confondu, il est chassé de la maison…

Remarqué à la fin des années 1910 dans une multitude de courts-métrages aux côtés de la star Roscoe « Fatty » Arbuckle, Joseph Frank Keaton Junior, dit Buster Keaton (1895-1966), enfant de la balle (ses parents étaient acteurs de cabaret), commence à mettre en scène et à interpréter ses propres films dès 1920. Il crée ainsi le personnage de Malec, qu’il déclinera à plusieurs reprises, y compris pour son premier long métrage Ce crétin de MalecThe Saphead, pour lequel il confie la réalisation à Herbert Blaché. Voulant conserver la mainmise sur ses films, Buster Keaton est crédité en tant que co-metteur en scène dès 1923 avec Les Trois ÂgesThe Three Ages, aux côtés d’Edward F. Cline. Même chose pour Les Lois de l’hospitalitéOur Hospitality, signé la même année, mais cette fois aux côtés de John G. Blystone. Parallèlement à ses courts-métrages, Buster Keaton souhaite néanmoins conquérir le grand écran, à l’instar de ses principaux concurrents et déjà stars, Charles Chaplin et Harold Lloyd. En 1924, il mise alors beaucoup sur Sherlock Junior Sherlock, Jr., comédie, mais aussi grand spectacle visuel qui utilise les effets spéciaux de l’époque, pour faire passer son personnage principal à travers un écran de cinéma. Bien avant La Rose pourpre du CaireThe Purple Rose of Cairo (1985) de Woody Allen et Last Action Hero (1993) de John McTiernan, Sherlock Junior jouait avec la magie du septième art en effaçant la frontière tendue entre deux mondes, celui où un protagoniste qui a du mal à joindre les deux bouts dans la réalité, peut devenir un héros quasi-invulnérable dans la fiction. Buster Keaton signe ici l’un de ses chefs d’oeuvres, qui n’a pas pris une seule ride, un modèle de comédie que l’on pourrait qualifier de fantastique, mais aussi une fantastique comédie dans laquelle le comédien-réalisateur livre une performance hors-normes, le tout ponctué par de remarquables exploits physiques et des cascades ahurissantes.

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Test Blu-ray / Phil Tippett, des rêves et des monstres, réalisé par Alexandre Poncet et Gilles Penso

PHIL TIPPETT, DES RÊVES ET DES MONSTRES réalisé par Alexandre Poncet et Gilles Penso, disponible en DVD et Blu-ray le 27 mai 2020 chez Carlotta Films.

Acteurs : Phil Tippett, Joe Dante, Jon Davison, Dennis Muren, Paul Verhoeven.…

Scénario : Gilles Penso, Alexandre Poncet

Musique : Alexandre Poncet

Durée : 1h20

Date de sortie initiale : 2019

LE FILM

Véritable héritier de Ray Harryhausen, Phil Tippett a imaginé et réalisé les créatures les plus mémorables du cinéma hollywoodien des quarante dernières années : de Jabba le Hutt et les AT-AT de Star Wars, le tyrannosaure de Jurassic Park, ED-209 de RoboCop et les insectes géants de Starship Troopers. Ses collaborations avec George Lucas, Steven Spielberg et Paul Verhoeven ont marqué à jamais le genre fantastique et l’inconscient collectif. Ce film vous invite à redécouvrir une oeuvre exceptionnelle.

Il y a quelques mois, nous vous avions longuement parlé et même disséqué le documentaire Le Complexe de Frankenstein. Pendant trois ans, de 2013 à 2015, Gilles Penso, monteur, scénariste, journaliste (L’Ecran Fantastique et Sonovision) et Alexandre Poncet, journaliste (Mad Movies, Freneticarts qu’il a co-fondé en 2008), monteur, compositeur, avaient produit et réalisé ce film sensationnel sur les créatures au cinéma, mais aussi et surtout sur ceux qui se cachaient derrière ces monstres avec lesquels chacun a grandi et développé son propre univers. Huit ans après Ray Harryhausen, le titan des effets spéciaux, écrit et réalisé par Gilles Penso, produit par Alexandre Poncet et cinq ans après Le Complexe de Frankenstein, les deux complices ont décidé de se concentrer cette fois sur une figure emblématique des effets spéciaux et du cinéma fantastique, Phil Tippett (né en 1951). Vous êtes prêts pour un nouveau voyage formidable et passionnant au pays de l’imaginaire, du génie et de la création ? Alors ne manquez pas Phil Tippett, des rêves et des monstres !

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Test Blu-ray / Les Mutinés du Téméraire, réalisé par Lewis Gilbert

LES MUTINÉS DU TÉMÉRAIRE (H.M.S. Defiant) réalisé par Lewis Gilbert, disponible en DVD et Blu-ray le 2 juin 2020 chez Rimini Editions.

Acteurs : Alec Guinness, Dirk Bogarde, Maurice Denham, Nigel Stock, Richard Carpenter, Peter Gill, David Robinson, Robin Stewart…

Scénario : Nigel Kneale, Edmund H. North d’après le roman de Frank Tilsley

Photographie : Christopher Challis

Musique : Clifton Parker

Durée : 1h41

Année de sortie : 1962

LE FILM

En 1797, pendant les guerres napoléoniennes, l’équipage du Téméraire, un navire anglais voguant en Méditerranée, se révolte, indigné par la cruauté du second, le lieutenant Paget, et, malgré les tentatives d’apaisement, se rend hors-la-loi.

Quand on évoque le nom de Lewis Gilbert (1920-2018), les cinéphiles pensent immédiatement à ses opus de la saga James Bond, On ne vit que deux foisYou Only Live Twice (1967), L’Espion qui m’aimaitThe Spy Who Loved Me (1977) et Moonraker (1979). En fait, avant d’en venir à l’agent 007, le réalisateur britannique avait déjà plus de vingt ans de carrière derrière lui et près de 25 longs métrages à son actif, ainsi que divers documentaires. Citons pêle-mêle Vainqueur du cielReach for the Sky (BAFTA du meilleur film britannique en 1957), Visa pour Hong KongFerry to Hong Kong (1959) avec Curd Jürgens et Orson Welles, ou bien le très célèbre Coulez le Bismarck !Sink the Bismarck ! (1960) avec Kenneth More. Avant On ne vit que deux fois, Lewis Gilbert avait aussi mis en scène le formidable H.M.S. Defiant, également connu sous le titre de Damn the Defiant !, soit Les Mutinés du Téméraire dans nos contrées. Adapté du roman Mutiny de Frank Tilsley, ce grand film d’aventures témoigne du solide bagage technique du réalisateur, ce qui l’a sûrement aidé plus tard pour qu’Harry Saltzman et Albert R. Broccoli décident de lui confier les trois budgets pharaoniques des épisodes de James Bond susmentionnés. Filmé comme un véritable huis clos tendu du début à la fin, Les Mutinés du Téméraire est aussi l’occasion d’admirer la confrontation de deux monstres sacrés du cinéma britannique, Alec Guinness et Dirk Bogarde, exceptionnels.

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Test Blu-ray / Hell Night, réalisé par Tom DeSimone

HELL NIGHT réalisé par Tom DeSimone, disponible en Édition Collector Blu-ray + DVD + Livret le 22 mai 2020 chez Rimini Editions.

Acteurs : Linda Blair, Vincent Van Patten, Peter Barton, Kevin Brophy, Jenny Neumann, Suki Goodwin, Jimmy Sturtevant, Hal Ralston…

Scénario : Randy Feldman

Photographie : Mac Ahlberg

Musique : Dan Wyman

Durée : 1h40

Année de sortie : 1981

LE FILM

Pour leur initiation, quatre nouveaux membres d’une association étudiante doivent passer la nuit dans un vieux manoir abandonné. Douze ans plus tôt, le propriétaire du manoir a tué sa famille avant de se donner la mort. Selon la légende, un membre de la famille aurait survécu et hanterait le manoir.

Alors que Black Christmas (1974) de Bob Clark et surtout Halloween : La Nuit des masques (1978) de John Carpenter ont entraîné moult ersatz, plagiats, copies éhontées, plus souvent pour le pire que pour le meilleur, d’autres films – hors franchises du style Vendredi 13 – ont réussi à tirer leur épingle du jeu au point de devenir cultes avec les années et de rester chéris par les cinéphiles et adeptes de séries B horrifiques. Le Bal de l’horreurProm Night de Paul Lynch et Terror TrainLe Monstre du train de Roger Spottiswoode, tous deux interprétés par Jamie Lee Curtis, Happy Birthday To Me de J. Lee Thompson et Carnage The Burning de Tony Maylam, sont encore cités aujourd’hui comme des petites références et des modèles d’un genre qui n’a eu de cesse de muter ou de s’alimenter lui-même. Alors que le genre bat son plein en 1981, débarque sur les écrans Une nuit en enfer, connu également sous le titre Une nuit infernale, bref Hell Night, réalisé par un certain Tom DeSimone (né en 1939), metteur en scène venu du milieu pornographique où il officiait alors sous le pseudonyme de Lancer Brooks. Prenant en main le film Hell Night, le cinéaste est bien décidé à montrer ce qu’il a sous le capot du point de vue technique, d’autant plus qu’il détient un atout de taille avec la présence au générique de Linda Blair, révélée huit ans auparavant dans L’Exorciste de William Friedkin. Hell Night se révèle un petit film d’épouvante très sympathique, qui parvient à faire oublier ses maladresses grâce à un indéniable savoir-faire, une très belle photographie et au charisme de sa comédienne principale, poupée de porcelaine très attachante et à laquelle on s’identifie sans aucune difficulté.

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Test Blu-ray / Emanuelle et les derniers cannibales, réalisé par Joe d’Amato

EMANUELLE ET LES DERNIERS CANNIBALES (Emanuelle e gli ultimi cannibali) réalisé par Joe d’Amato, disponible en Édition Collector Blu-ray + DVD + Livre le 7 juillet 2020 chez Artus Films.

Acteurs : Laura Gemser, Gabriele Tinti, Nieves Navarro, Donald O’Brien, Percy Hogan, Mónica Zanchi, Annamaria Clementi, Geoffrey Copleston…

Scénario : Romano Scandariato, Joe D’Amato

Photographie : Joe D’Amato

Musique : Nico Fidenco

Durée : 1h29

Année de sortie : 1977

LE FILM

Travaillant dans un hôpital psychiatrique, Emanuelle découvre un étrange signe tribal tatoué sur le ventre d’une jeune fille. Cette dernière pourrait bien avoir été en contact avec une tribu de mangeurs d’hommes, pourtant supposés disparus de la région. Intriguée, Emanuelle décide de se rendre dans la forêt amazonienne pour y percer le mystère. Elle va y découvrir que les cannibales sévissent toujours, avides de chair fraîche et de boyaux fumants…

Aaaaah Emanuelle, à ne pas confondre avec Emmanuelle (avec deux M donc) puisqu’il fallait faire attention au copyright, mais bel et bien Emanuelle ou plus précisément Black Emanuelle pour ceux qui auront entre autres connu, comme l’auteur de ces mots, la troisième partie de soirée du dimanche sur M6 dans les années 1980-1990. Petits coquins. Suite au triomphe international d’Emmanuelle en 1974, réalisé par Just Jaeckin, avec huit millions d’entrées rien qu’en France où le film restera plus de douze ans à l’affiche, certains producteurs ont de la suite dans les idées. Evidemment, le pays que ce succès affole est l’Italie. Si Erika Blanc avait été la première à interpréter le personnage dans Moi, EmmanuelleIo, Emmanuelle (1969), la comédienne l’ayant véritablement immortalisé, au point de devenir une icône érotique, demeure la sublimissime Laura Gemser. L’actrice et costumière – même si on la connaît mieux dévêtue – italienne d’origine indonésienne incarnait déjà une masseuse dans Emmanuelle l’antivierge (ou Emmanuelle 2), avant de se voir confier le rôle-titre la même année, 1975 donc, dans Black EmanuelleEmanuelle nera, ou Black Emanuelle en Afrique, de Bitto Albertini. C’est une explosion. Désormais, Mae Jordan, dite Emanuelle, reporter-photographe devient aussi célèbre que son modèle néerlandais Sylvia Kristel. Née en 1950, Laura Gemser interprétera Emanuelle dans une dizaine de longs-métrages, dont Black Emanuelle en Amérique Emanuelle in America, Black Emanuelle autour du monde Emanuelle, Perché violenza alle donne ? et Viol sous les tropiquesEmanuelle e gli ultimi cannibali, tous les trois réalisés en 1977 par Joe D’Amato. Ce dernier est sans nul doute l’un des épisodes les plus ahurissants, inclassables et étonnants de la saga Black Emanuelle. Mélange d’érotisme, forcément, et de gore avec des séquences bien dégueulasses, Emanuelle et les derniers cannibales reste une grande référence pour les amateurs de cinéma Bis, mais aussi pour certains réalisateurs comme Eli Roth qui n’a cessé de l’évoquer lors de la promotion de son génial Green Inferno (2013).

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Test Blu-ray / Vij ou le diable, réalisé par Konstantin Ershov & Georgiy Kropachyov

VIJ OU LE DIABLE (Viy) réalisé par Konstantin Ershov & Georgiy Kropachyov, disponible en Édition Collector Blu-ray + DVD + Livre le 6 juin 2020 chez Artus Films.

Acteurs : Leonid Kuravlyov, Natalya Varley, Aleksey Glazyrin, Nikolay Kutuzov, Vadim Zakharchenko, Pyotr Vesklyarov, Vladimir Salnikov, Dmitriy Kapka…

Scénario : Konstantin Ershov, Georgiy Kropachyov, Aleksandr Ptushko d’après la nouvelle de Nikolay Gogol

Photographie : Viktor Pishchalnikov, Fyodor Provorov

Musique : Karen Khachaturyan

Durée : 1h16

Année de sortie : 1967

LE FILM

Trois jeunes séminaristes quittent leur monastère pour partir en vacances. La nuit, ils se font héberger par une fermière qui se révèle être une sorcière. Khoma l’empoigne et la laisse pour morte, après qu’elle se soit transformée en jolie jeune fille. Sous la pression de la famille, le recteur oblige Khoma à passer trois nuits auprès de la défunte afin de prier pour son âme. Il va vivre trois nuits d’épouvante jusqu’à l’apparition de VIY, le démon et maître des Gnomes…

Consacrez 80 minutes de votre temps pour aller à la découverte de Vij ou le diable, ou bien encore Viy, remarquable film fantastique soviétique, adapté d’une nouvelle de Nikolay Gogol et réalisé – sur le papier – par Konstantin Ershov et Georgiy Kropachyov en 1967. En réalité, cet immense succès critique et populaire qui avait attiré plus de trente millions de spectateurs à sa sortie, est en très grande partie mise en scène par Alexandre Ptouchko (1900-1973), cinéaste (Le Conte du tsar Saltan), scénariste, producteur, dessinateur, sculpteur, marionnettiste, directeur artistique, peintre, créateur d’effets spéciaux et directeur de la photographie, ancien journaliste, décorateur de théâtre et acteur. Ce spécialiste russe de l’animation que l’on surnommait le Walt Disney soviétique, ce qui était aussi injuste que réducteur, lauréat du Lion d’Argent au Festival de Venise pour Le Tour du monde de Sadko (1953), était réputé pour son univers immensément poétique, remplit de magie, de couleurs, de féerie et de charme. Appelé en renfort durant la conception de Vij ou le diable, Alexandre Ptouchko reprend les choses en main, délaisse ce que les deux étudiants en cinéma voulaient imposer à l’écran, autrement dit un mélange d’érotisme et de mysticisme, pour se recentrer sur la nouvelle originale de Gogol, qui avait déjà inspiré Le Masque du démonLa Maschera del demonio de Mario Bava en 1960. Le résultat à l’écran est bluffant et l’on retrouve une fois de plus le monde unique d’Alexandre Ptouchko, même s’il reste crédité uniquement au scénario, aux effets visuels et à la direction artistique. Vij ou le diable demeure un merveilleux conte fantastique.

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Test Blu-ray / Doubles vies, réalisé par Olivier Assayas

DOUBLES VIES réalisé par Olivier Assayas, disponible en DVD et Blu-ray le 7 janvier 2020 chez Ad Vitam

Acteurs : Guillaume Canet, Juliette Binoche, Vincent Macaigne, Nora Hamzawi, Christa Théret, Pascal Greggory, Lionel Dray, Sigrid Bouaziz, Laurent Poitrenaux…

Scénario : Olivier Assayas

Photographie : Yorick Le Saux

Durée : 1h47

Date de sortie initiale : 2019

LE FILM

L’éditeur Alain Danielson, ami de l’écrivain Léonard Spiegel, décide de ne pas éditer son dernier livre. Pour quelle raison ? Peut-être parce que Léonard n’écrit que de l’autofiction vaguement maquillée en roman et que les personnages qui l’inspirent sont ses amis et sa maîtresse et que la maîtresse de l’un peut être la femme de l’autre…

Souvent porté par la critique, le réalisateur Olivier Assayas est habituellement représentatif d’un cinéma bourgeois, parisien, avec tous les poncifs qui l’accompagnent. S’il n’y a rien à redire sur sa sensibilité, sa mise en scène inodore-incolore-invisible ennuie la plupart du temps et donne l’impression de se regarder le nombril en attendant les éloges des Inrockuptibles. Evidemment, certains titres sortent du lot comme Clean (2004), qui avait valu à Maggie Cheung le Prix d’interprétation féminine à Cannes, sans aucun doute l’un des films les plus attachants d’Olivier Assayas, ou bien encore la mini-série Carlos (2010), percutante adaptation de la vie du terroriste. Ses deux collaborations avec Kristen Stewart, Sils Maria (2014) et Personnal Shopper (2016) ont une fois de plus irrité les allergiques à son cinéma poseur, même si le second était plus réussi et moins pédant. Nous n’attendions donc pas forcément (euphémisme) le retour du cinéaste derrière la caméra. Doubles vies est une petite surprise car il s’agit d’une comédie, intello certes, mais quand même. On a l’impression que le réalisateur âgé aujourd’hui de 65 ans, même s’il en paraît quinze de moins au bas mot, a voulu lâcher du lest et s’amuser. Toutes proportions gardées bien évidemment. Néanmoins, Doubles vies peut se voir comme la relecture d’un boulevard, un bo-bolevard pourrait-on dire, qui mixe beaucoup de choses, sans doute trop. Une réflexion sur le devenir du monde de l’édition et du livre, des tromperies à droite à gauche où les potes couchent avec la femme de l’autre pour oublier l’ennui, la communication dans le couple. Le casting est attractif, les comédiens sont qui plus est bien dirigés, les sujets de société abordés peuvent manquer de naturel mais n’en demeurent pas moins intéressants et la légèreté désirée par l’auteur fonctionne plutôt bien. En dehors de diverses longueurs et digressions, Doubles vies est étonnamment divertissant.

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Test Blu-ray / Les Feux de l’été, réalisé par Martin Ritt

LES FEUX DE L’ÉTÉ (The Long, Hot Summer) réalisé par Martin Ritt, disponible en DVD et Blu-ray le 5 mars 2020 chez BQHL Editions

Acteurs : Paul Newman, Joanne Woodward, Anthony Franciosa, Orson Welles, Lee Remick, Angela Lansbury, Richard Anderson…

Scénario : Irving Ravetch, Harriet Frank Jr. d’après William Faulkner

Photographie : Joseph LaShelle

Musique : Alex North

Durée : 1h57

Date de sortie initiale : 1958

LE FILM

Une petite ville du Sud des Etats-Unis, Frenchman’s Bend (Mississippi), est dominée par la puissante famille Varner, dont le père, Will, âgé de 61 ans, règne en patriarche despote sur sa propre famille. Son fils Jody, jeune homme faible qu’il aime humilier, et la femme de celui-ci, Eula, écervelée et sensuelle. Sa fille Clara, institutrice de 23 ans, à fort caractère, seule à lui résister. L’ordre établi va être troublé par l’arrivée dans la ville de Ben Quick, un vagabond soupçonné d’être un incendiaire. Arriviste et sans scrupules, il arrive à se faire apprécier de Will Varner qui lui offre un emploi dans son entreprise et le loge chez lui.

Sorti en 1958, Les Feux de l’étéThe Long, Hot Summer, est le film qui a fait de Paul Newman une star internationale. Agé de 32 ans, le comédien issu de l’Actors Studio de New York et ayant fait ses classes auprès de Lee Strasberg, fait tout d’abord sa carrière sur les planches au début des années 1950. Très vite repéré pour sa belle gueule et son regard bleu perçant, Paul Newman arrive sur le grand écran dans Le Calice d’argent de Victor Saville, puis enchaîne rapidement avec Marqué par la haineSomebody Up Thret Likes Me de Robert Wise en 1956. Il retrouvera d’ailleurs ce dernier l’année suivante pour Femmes coupablesUntil They Sail. Même si le studio n’en voulait pas, Martin Ritt (1914-1990), qui l’avait comme élève, parvient à l’imposer pour tenir le haut de l’affiche des Feux de l’été, adaptation du roman Le HameauThe Hamlet de William Faulkner, publié en 1940, écrite par Irving Ravetch et Harriet Frank Jr., auteurs d’A l’ombre des potencesRun for Cover (1955) de Nicholas Ray. Pour son troisième long métrage après L’Homme qui tua la peurEdge of the City avec John Cassavetes et Sidney Poitier, et Les SensuelsNo Down Payment avec Joanne Woodward, tout deux sortis en 1957, Martin Ritt suit le cahier des charges dicté par la 20th Century Fox. Son film est impeccable, superbe sur le plan visuel, le casting est aussi élégant que talentueux, la sève du roman de William Faulkner parcourt Les Feux de l’été en dépit d’énormes changements. A côté de cela, le récit est bavard et met un peu de temps à démarrer et surtout l’ensemble pâtit d’un dénouement complètement improbable, forcé par le studio, trahissant non seulement l’ouvrage original, mais aussi et surtout l’âme de son auteur. Malgré tout, Les Feux de l’été demeure un classique du cinéma hollywoodien, emblématique de la fin des années 1950, où on ne peut s’empêcher d’admirer les acteurs qui l’incarnent.

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Test Blu-ray / Vers sa destinée, réalisé par John Ford

VERS SA DESTINÉE (Young Mr. Lincoln) réalisé par John Ford, disponible en DVD et Blu-ray le 28 janvier 2020 chez BQHL Editions

Acteurs : Henry Fonda, Alice Brady, Marjorie Weaver, Arleen Whelan, Eddie Collins, Pauline Moore…

Scénario : Lamar Trotti

Photographie : Bert Glennon, Arthur C. Miller

Musique : Alfred Newman

Durée : 1h40

Date de sortie initiale : 1939

LE FILM

Sa fiancée décédée, le jeune Abraham Lincoln jure sur sa tombe faire carrière selon ce qu’elle attendait de lui. Devenu avocat, il s’installe à Springfield. A l’occasion de la fête nationale, il prend la défense des frères Clay que tout accuse du meurtre du shérif adjoint. Un procès a priori perdu d’avance tant les charges sont accablantes. Refusant que la mère des accusés envoie l’un de ses fils à potence pour sauver l’autre, Lincoln déjoue les pronostics, tirant profit de chaque détail afin d’arracher ses clients à la corde qui lui est promise…

Quel trésor ! Quelle merveille ! Pourtant, Vers sa destinéeYoung Mr. Lincoln demeure méconnu dans l’oeuvre impressionnante et prolifique de l’immense John Ford (1894-1973). Réalisé en 1939, soit entre La Chevauchée fantastiqueStagecoach et Sur la piste des Mohawks, trois films mis en scène la même année, Vers sa destinée permet au cinéaste de revenir à un personnage qu’il avait déjà abordé en 1924 dans Le Cheval de ferThe Iron Horse, mais aussi et surtout en 1936 dans Je n’ai pas tué LincolnThe Prisoner of Shark Island. Drame historique et étonnamment toujours teinté d’humour, Vers sa destinée foudroie non seulement par sujet passionnant, qui évite l’hagiographie gratuite et facile, pour l’extraordinaire interprétation de Henry Fonda, âgé de 34 ans et encore au début de sa carrière (il n’avait que cinq années de cinéma derrière lui), qui collabore pour la première fois avec John Ford, après avoir été propulsé sur le grand écran par Victor Fleming, Henry King, Henry Hathaway, Raoul Walsh, Fritz Lang, William Wyler et William Dieterle. Le réalisateur et le comédien rendent à Abraham Lincoln sa dimension humaine, montrent un jeune homme un peu gauche, dégingandé, réservé, mais bouillonnant, humaniste, sensible, épris de justice et d’égalité, à travers un récit méconnu qui inscrit Vers sa destinée dans le genre du thriller judiciaire, le tout étant évidemment véridique. Un chef d’oeuvre absolu.

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Test Blu-ray / L’Affaire Winston, réalisé par Guy Hamilton

L’AFFAIRE WINSTON (Man in the Middle) réalisé par Guy Hamilton, disponible en DVD et Blu-ray le 28 janvier 2020 chez BQHL Editions

Acteurs : Robert Mitchum, France Nuyen, Barry Sullivan, Trevor Howard, Keenan Wynn, Sam Wanamaker, Alexander Knox, Gary Cockrell…

Scénario : Keith Waterhouse, Willis Hall, d’après un roman de Howard Fast

Photographie : Wilkie Cooper

Musique : Lionel Bart

Durée : 1h34

Date de sortie initiale : 1963

LE FILM

En 1944, en garnison aux Indes, le lieutenant américain Winston abat de plusieurs balles, sans motif apparent, le sergent britannique Quinn. Un meurtre qui survient au plus mauvais moment, à la veille d’une offensive contre l’ennemi japonais. Tandis que la tension monte entre les Alliés, l’état-major américain désigne le lieutenant-colonel Adams pour défendre l’accusé devant la cour martiale. En essayant de percer le mystère de la santé mentale de Winston, Adams se heurte à des supérieurs bien décidés à cacher qu’un des leurs puisse être un psychopathe…

Ancien assistant-réalisateur de Julien Duvivier (Untel père et fils, Anna Karénine), de Carol Reed (Première Désillusion, Le Troisième Homme, Le Banni des îles) et de John Huston (L’Odyssée de l’African Queen), Guy Hamilton (1922-2016) reste surtout célèbre auprès des cinéphiles pour avoir mis en scène quatre épisodes cultes de la saga James Bond, Goldfinger (1964), Les Diamants sont éternels (1971), Vivre et laisser mourir (1973) et L’Homme au pistolet d’or (1974). Mais avant son premier opus de 007, le cinéaste britannique avait déjà signé une dizaine de longs métrages, dont le formidable L’Affaire WinstonMan in the Middle. Thriller d’investigation et de procès, ce film méconnu dans la carrière de Guy Hamilton reste pourtant d’une folle modernité et un modèle du genre, parfaitement calibré pour sa star Robert Mitchum. Passionnant, sans aucun temps mort, toujours d’actualité, remarquablement interprété et solidement mis en scène, L’Affaire Winston témoigne du solide bagage technique d’un réalisateur qui allait connaître son heure de gloire (bien méritée) dès l’année suivante.

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