Chronique du Blu-ray / Le Flic ricanant, réalisé par Stuart Rosenberg

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LE FLIC RICANANT (The Laughing Policeman) réalisé par Stuart Rosenberg, disponible en Blu-ray et DVD le 21 septembre 2016 chez Rimini Editions

Acteurs : Walter Matthau, Bruce Dern, Louis Gossett Jr., Albert Paulsen, Joanna Cassidy, Anthony Zerbe…

Scénario : Thomas Rickman, d’après le roman de Maj Sjöwall et Per Wahlöö

Photographie : David M. Walsh

Musique : Charles Fox

Durée : 1h50

Date de sortie initiale : 1973

LE FILM

San Francisco, années 1970. Un inconnu pénètre dans un bus nocturne et en mitraille les passagers. Bilan : huit morts, dont un inspecteur de police. Son ami et partenaire, le cynique Jake Martin, mène l’enquête selon des méthodes très personnelles, secondé par une jeune recrue, l’arrogant Leo Larsen. L’oeuvre d’un fou, d’un serial killer ? Plutôt que de suivre la piste officielle, Martin obéit à son instinct, convaincu que le carnage trouve son origine dans une vieille affaire…

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Un polar des années 1970 dont l’intrigue se déroule à San Francisco, avec Walter Matthau et Bruce Dern dans les rôles principaux ? En disant cela, le cinéphile est directement conquis et Le Flic ricanant tient toutes ses promesses. Le réalisateur Stuart Rosenberg (1927-2007), célèbre pour Luke la main froide avec Paul Newman et Folies d’avril avec Catherine Deneuve et Jack Lemmon, adapte le roman Le Policier qui rit, écrit par le couple suédois Maj Sjöwall et Per Wahlöö. L’histoire est évidemment délocalisée aux Etats-Unis et le nom du protagoniste, Martin Beck, personnage principal de cette série d’enquêtes publiées de 1965 à 1975, n’est repris que partiellement puisqu’il se nomme ici Jake Martin.

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Le film démarre très fort avec une tension installée dès les premiers plans. 23h05, dans une gare routière, un homme semble être suivi par un autre. L’agitation du jour s’est dispersée, le lieu est quasi-désert. Un bus arrive. L’homme suivi, stressé, y monte. C’est au tour de l’autre de s’y engouffrer in extremis avant que le bus démarre. A l’intérieur une dizaine de personnes. Quelques arrêts plus loin, le bus stoppe et prend un passager vêtu d’un imperméable, mais dont nous ne verrons pas le visage. Il s’installe à l’arrière. Ses mains gantées s’affairent et montent un fusil-mitrailleur. Alors que le bus poursuit sa route, l’homme se lève et tire sur tous les passagers et le chauffeur. Le bus termine sa course accidentellement, le criminel prend la fuite. Peu de temps après, la police arrive sur les lieux, suivie de l’équipe scientifique. Il semble y avoir un survivant, mais son état reste critique. Le flic Jake Martin (Walter Matthau), la cinquantaine, 1m90, bougon, visage buriné, la mâchoire occupée par un chewing-gum. Il observe le travail de ses collègues et se rend compte qu’une des victimes, en l’occurrence l’homme qui suivait l’autre, est son collègue qu’il croyait en congé maladie. Cela devient une affaire personnelle. On lui adjoint les services de l’inspecteur Leo Larsen (Bruce Dern), chien fou et impulsif. Martin est persuadé que cet acte terroriste possède un lien avec une affaire qui lui a échappé deux ans auparavant. Malgré les réticences de Larsen, Martin préfère se fier à son instinct. L’enquête est ouverte, mais Martin décide de la mener à sa façon, loin des règles habituelles prônées par Larsen.

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Après cette ouverture dantesque et très violente, suivie d’une séquence quasi-documentaire montrant l’équipe scientifique au travail au milieu des cadavres, Le Flic ricanant adopte un rythme hérité du film noir. Les décors urbains tiennent une place importante dans l’intrigue, le réalisateur mène le spectateur dans certaines communautés et dans des coins alors peu montrés de San Francisco au cinéma. Alors que l’enquête avance, à petits pas, le quotidien des flics n’est pas oublié et l’on suit Martin dans sa famille. Ses enfants le voient à peine, tout comme sa femme qui se demande chaque soir s’il va pouvoir passer la nuit chez eux. « C’est un sale boulot » comme il le dit, mais c’est le sien et ce job est toute sa vie. Larsen, plus jeune, aime son travail à la criminelle, pas seulement à cause de la paye, mais parce qu’il le trouve passionnant. Deux écoles s’affrontent, deux générations s’observent, même s’il y a fort à parier que Larsen deviendra un Martin avec les années. Le déroulement de l’enquête est souvent captivant, bien que certains spectateurs risquent de perdre le fil tant les éléments peuvent paefois se disperser. Même si la mise en scène de Stuart Rosenberg n’égale pas celle de Don Siegel, Sidney Lumet et William Friedkin, Le Flic ricanant demeure un formidable polar, digne des meilleurs fleurons du genre dans cette extraordinaire décennie de cinéma.

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LE BLU-RAY

Jusqu’alors inédit en France, Le Flic ricanant est enfin disponible en DVD et en Blu-ray dans nos contrées. C’est à l’éditeur Rimini Editions que l’on doit cette sortie attendue par les amateurs de polars des années 1970. Le Blu-ray repose dans un boîtier classique de couleur noire. Le menu principal est animé sur la musique du film.

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Afin d’en savoir un peu plus sur Le Flic ricanant, l’éditeur nous livre un formidable entretien avec François Guérif, critique de cinéma, éditeur et directeur de la collection Rivages/Noir (22’). Avec sa passion toujours contagieuse pour le polar et le film policier, Guérif profite de la sortie du Flic ricanant en Blu-ray et DVD, pour nous présenter les livres engagés du couple scandinave Maj Sjöwall et Per Wahlöö, et plus particulièrement la saga des enquêtes de l’inspecteur Martin Beck, dix romans publiés entre 1965 et 1975. Les thèmes et les personnages de cette saga de livres sont alors passés en revue (le crime de la société capitaliste et ultralibérale contre les travailleurs, l’envers du décor du « modèle suédois ») par cet expert. François Guérif revient sur la radiographie du pays réalisée au fil des livres, dresse le portrait des deux écrivains, indique ce qui fait la préciosité de leur collaboration et la rareté de voir adapter un roman suédois à Hollywood. En revanche, François Guérif n’aborde jamais la transposition à l’écran et évoque à peine le film de Stuart Rosenberg. Les premières traductions françaises des Martin Beck sont parues aux éditions Planète, puis chez 10/18 dans la collection Grands Détectives. Les traductions révisées et intégrales sont maintenant publiées dans la collection Rivages/Noir.

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En plus de la bande-annonce du Flic ricanant (non sous-titrée), un petit module centré sur la restauration (2’) oppose les images avant/après le nettoyage numérique. C’est malheureusement ici que la disparition du grain original se fait le plus remarquer.

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L’Image et le son

Le Blu-ray du Flic ricanant est au format 1080i. Comme l’atteste un module dans les suppléments, une restauration a eu lieu. Mais alors, où est passé le grain original ? Certes, ce master HD présente une propreté quasi-irréprochable (rares sont les rayures et les points blancs), mais était-il nécessaire de gommer ce qui fait l’essence des photographies de cette époque bénie du cinéma ? Les décors dépouillés sont omniprésents et les personnages se détachent sans mal devant des fonds unis, souvent froids, les gros plans étant bien restitués avec de beaux détails, en particulier sur la tronche burinée de Walter Matthau, malgré des visages un peu roses à notre goût. Les noirs paraissent tantôt concis tantôt poreux et dénaturent quelque peu le piqué. Signalons également quelques fourmillements, mais dans l’ensemble la définition s’avère correcte.

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Les mixages anglais et français DTS-HD Master Audio 2.0 sont propres et distillent parfaitement la musique du film. La piste anglaise manque peut-être un peu d’ardeur, mais se révèle nettement suffisante. Au jeu des différences, la version française (au doublage excellent) se focalise trop sur les dialogues au détriment de certaines ambiances et effets annexes, mais le rendu musical est élevé. Aucun souffle constaté sur les deux pistes.

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Crédits images : © Rimini Editions / Captures Bonus : Franck Brissard

 

Chronique du Blu-ray / Mr. Majestyk, réalisé par Richard Fleischer

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Mr. Majestyk réalisé par Richard Fleischer, disponible en Édition Collector Blu-ray + DVD + Livre le 5 octobre 2016 chez Wild Sild Vidéo.

Acteurs : Charles Bronson, Al Lettieri, Linda Cristal, Lee Purcell, Paul Koslo, Taylor Lacher

Scénario : Elmore Leonard

Photographie : Richard H. Kline

Musique : Charles Bernstein

Durée : 1h45

Date de sortie initiale : 1974

LE FILM

Vétéran du Vietnam, Vince Majestyk n’aspire aujourd’hui qu’à une seule chose : mener une existence paisible en dirigeant son exploitation de pastèques. Sa rencontre avec Bobby Kopas, crapule locale, va provoquer une redoutable réaction en chaîne et placer en travers de sa route Frank Renda, tueur à gages des plus sadiques… L’heure de l’affrontement a sonné. La lutte sera acharnée…

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Fils du pionnier de l’animation Max Fleischer (producteur de Popeye et de Betty Boop), Richard Fleischer (1916-2006) tente d’abord de devenir comédien mais se retrouve rapidement dans la salle de montage pour s’occuper des films d’actualités pour la RKO. Après quelques courts-métrages remarqués en tant que réalisateur, Richard Fleischer se voit confier quelques séries B. C’est le cas d’Assassin sans visage, remarquable film noir d’une heure montre en main tourné en seulement dix jours en 1949. Jalon de l’histoire du film criminel, l’oeuvre de Richard Fleischer repose sur une mise en scène virtuose et stylisée et demeure l’un des premiers films à traiter de manière réaliste de la figure du serial killer.

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Sous contrat avec la RKO, Richard O. Fleischer, signe plus tard Bodyguard, un petit polar à l’intrigue banale et même sans surprise, qu’il parvient à élever grâce à une mise en scène inspirée et dynamique, une direction d’acteurs parfaite (parfait Lawrence Tierney et dernière apparition de l’adorable Priscilla Lane) et même quelques touches d’humour qui font mouche. Bodyguard fait partie des premiers longs-métrages du réalisateur, qui en profite ici pour se faire la main en expérimentant sur le cadre, le rythme et le montage. Série B vive et dynamique, particulièrement intéressante sur le plan visuel et faisant fi d’un budget somme toute restreint, bourrée d’idées (la scène finale dans l’abattoir) et de trouvailles sympathiques (un gros plan sur un oeil), Bodyguard, ce quatrième long-métrage de Richard Fleischer, se voit encore aujourd’hui comme une belle curiosité annonçant par bribes, les plus grands films du cinéaste.

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Tous ces « petits longs métrages » vont permettre à Richard Fleischer de révéler son savoir-faire. Sa spécialité ? Les polars secs et nerveux à l’instar du Pigeon d’argile grâce auquel le cinéaste transcende une fois de plus un postulat de départ classique pour s’amuser avec les outils techniques mis à sa disposition. Dès 1952 avec L’Enigme du Chicago Express, le réalisateur est reconnu dans le monde entier comme étant un nouveau maître du cinéma. Cette ascension fulgurante lui ouvrira les portes des principaux studios Hollywoodiens où il démontrera son immense talent et son goût pour un éclectisme peu commun : Vingt Mille lieues sous les mers (1954), La Fille sur la balançoire (1955), Les Inconnus dans la ville (1955), Les Vikings (1958), Le Voyage fantastique (1966), L’Etrangleur de Boston (1968), Soleil vert (1973). Pour beaucoup de cinéphiles, Mr. Majestyk, réalisé en 1973, est un de ses meilleurs films.

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Richard Fleischer, réalisateur prolifique, est assurément l’un des plus grands metteurs en scène et raconteur d’histoires de l’industrie hollywoodienne. Dans Mr. Majestyk, comme il n’a eu de cesse de le prouver tout au long de sa longue carrière (60 films en 45 ans), Le cinéaste s’entoure de formidables comédiens et confie le rôle principal à Charles Bronson. Tout auréolé de son nouveau statut de star après un détour par le cinéma européen qui lui a fait prendre du galon, l’acteur alors âgé de 52 ans est de retour aux Etats-Unis et commence sa véritable carrière en tant que tête d’affiche. Entre le polar et le thriller d’aventures, Mr. Majestyk repose sur un scénario en béton écrit par l’immense écrivain Elmore Leonard (1925-2013), spécialisé dans les romans de western. Il n’est donc pas étonnant de retrouver de nombreux codes du genre dans le film de Richard Fleischer avec les affrontements nerveux et violents et les courses-poursuites dantesques où les voitures remplacent les chevaux sur des chemins impraticables. Les personnages apparaissent comme de vrais cowboys du XXe siècle.

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Vince Majestyk dirige une exploitation de pastèques dans un coin paumé du Colorado. Homme solitaire, il ne pensait pas être ennuyé par Bobby Kopas (Paul Koslo), une petite frappe de la petite bourgade du coin, qui voudrait l’obliger à engager de la main-d’oeuvre « du pays » plutôt que des saisonniers mexicains comme il a l’habitude de le faire, parmi lesquels Nancy Chavez (Linda Cristal), à qui Majestyk est venu en aide lors de son arrivée en ville. Mais c’était sans compter sur Vince Majestyk qui a plus d’un tour dans son sac, ou plutôt qui ne garde pas ses poings – gros comme des gants de baseball – serrés dans ses poches. Cette petite « anicroche » va alors le précipiter en prison, le mettre au contact du tueur Frank Renda (Al Lettieri), arrêté une dizaine de fois mais systématiquement relâché faute de preuves. Cette fois pourrait être la bonne. Mais lors du convoi des prisonniers vers le tribunal, une attaque destinée à libérer Renda a lieu en plein centre-ville. Les victimes tombent des deux côtés et finalement Majestyk s’empare du bus de la police et s’enfuit avec Renda, toujours menotté. Majestyk pense alors livrer Renda aux autorités en échange de sa propre libération, pour ainsi aller récolter ses pastèques qui l’attendent sur son terrain de 65 hectares. Mais son plan ne se déroule pas comme prévu.

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Soutenu par un montage vif de Ralph E. Winters (Ben-Hur, La Panthère rose), une photo élégante du chef opérateur Richard H. Kline (Soleil vert, Le Mystère Andromède, L’Etrangleur de Boston) et l’entêtante musique de Charles Bernstein (Les Griffes de la nuit, Cujo), Richard Fleischer déroule son récit avec une virtuosité unique et un art jamais démenti de la conduite dramaturgique. Charles Bronson, corps de reptile et regard de félin, n’a que « peu à faire » pour s’imposer et semble prendre beaucoup de plaisir à incarner Vince Majestyk, ennuyé dans son quotidien par quelques sbires mal intentionnés. Ces derniers étaient loin d’imaginer que ce propriétaire terrien avait passé trois ans dans l’armée, avait été instructeur de rangers à Fort Benning, capturé puis évadé d’un camp au Viet Nam et avait été décoré de la Silver Star. Autrement dit, ils auraient dû y réfléchir à deux fois avant de lui chercher des noises. Bronson, sourire en coin et la bonne répartie prête à fuser, est parfait dans un rôle à l’origine écrit pour Steve McQueen. Il prend la pétoire et n’allait quasiment plus la lâcher jusqu’à la fin de sa carrière en enchaînant directement avec Un justicier dans la ville, qui sera suivi par de nombreuses suites au cinéma et à la télévision pendant 25 ans. Bronson fait face à Al Lettieri, dont la carrière fut courte en raison de sa mort prématurée, mais son visage et son imposante carrure demeurent dans la mémoire des cinéphiles grâce à ses participations au Parrain de Francis Ford Coppola et Guet-Apens de Sam Peckinpah.

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Divertissement sévèrement burné qui fait parfois penser au Prime Cut Carnage de Michael Ritchie, Mr Majestyk est encore un joyau issu de la filmographie de Richard Fleischer.

LE BLU-RAY

Le Blu-ray de Mr. Majestyk, disponible chez Wild Side, a été réalisé sur un check-disc. Cette édition se compose du Blu-ray et du DVD du film, ainsi que d’un livret exclusif de 86 pages sur le film et sa genèse, écrit par Frédéric Albert Lévy (journaliste de cinéma et cofondateur de la revue Starfix), illustré de magnifiques photos et de documents d’archives rares. Le menu principal est animé et musical.

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Pour cette édition, deux interviews sont proposées :

Colorado cool (14′) : Le directeur de la photographie Richard H. Kline, né en 1926, partage ses souvenirs liés au tournage de Mr. Majestyk, y compris sur ses diverses collaborations avec Richard Fleischer sur L’Étrangleur de Boston, Soleil vert et Don Angelo est mort. Les deux hommes travailleront ensemble une dernière fois en 1975 sur Mandingo. Le chef opérateur parle également de Charles Bronson, l’homme et le comédien, tout en partageant quelques anecdotes de tournage. Mais dans l’ensemble et bien que le bonhomme soit très sympathique, nous ne tirons pas grand-chose de cette interview, d’autant plus que Richard H. Kline passe plus ou moins son temps à raconter l’histoire du film.

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Colorado chic (28′) : Dans Mr. Majestyk, la comédienne Lee Purcell interprète Wiley, le contact de Frank Renda. A l’instar de Richard H. Kline, peu de choses sont à retenir de cet entretien. Lee Purcell nous parle de son arrivée sur le film, s’avère aujourd’hui surprise que Mr. Majestyk soit considéré comme une œuvre culte pour beaucoup de cinéphiles. Après, cela devient typique de l’entretien « américain » où tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil. On ne doute pas de la sincérité de ces propos, mais il y avait sûrement plus d’éléments à raconter sur le film de Richard Fleischer.

L’Image et le son

Ce nouveau master restauré HD de Mr. Majestyk brille souvent de mille feux et s’impose comme une grande réussite technique à ajouter au palmarès de l’éditeur. En effet, en dépit de quelques petites poussières subsistantes, l’image bénéficie d’un traitement de faveur qui participe à la (re)découverte du film de Richard Fleischer. Le cadre offre une profondeur de champ très plaisante, le piqué est acéré, la stabilité jamais démentie, les contrastes soignés. Si les noirs manquent parfois de stabilité et la définition vacille quelque peu sur les séquences sombres, la colorimétrie retrouve un éclat et une chaleur bienvenus sur les scènes diurnes. Les gros plans sont souvent épatants, les détails abondent et la gestion du grain est épatante. C’est beau, c’est carré, c’est élégant.

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Les mixages anglais et français DTS-HD Master Audio 2.0 Surround sont propres et distillent parfaitement la musique de Charles Bernstein. La piste anglaise (avec les sous-titres français imposés) est la plus équilibrée du lot avec une homogénéité entre les dialogues et les bruitages. Au jeu des différences, la version française (au doublage excellent avec Claude Bertrand et Georges Aminel) s’avère plus chuintante et couverte, avec certaines ambiances et d’autres effets annexes qui peinent à se faire entendre quand on compare avec la piste anglaise. Le changement de langue est impossible à la volée et nécessite le retour au menu contextuel.

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Crédits images : © Wild Side Vidéo

Chronique du Blu-ray / La Vengeance de l’Homme invisible, réalisé par Ford Beebe

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LA VENGEANCE DE L’HOMME INVISIBLE (The Invisible Man’s Revenge) réalisé par Ford Beebe, disponible en combo Blu-ray/DVD le 21 septembre 2016 chez Elephant Films.

Acteurs : Jon Hall, Leon Errol, John Carradine, Alan Curtis, Evelyn Ankers, Gale Sondergaard

Scénario : Bertram Millhauser

Photographie : Milton R. Krasner

Musique : Hans J. Salter

Durée : 1h17

Date de sortie initiale : 1944

LE FILM

Robert Griffin a été dupé et laissé pour mort en Afrique par certains collègues il y a plusieurs années. Ayant survécu, le revanchard Griffin retourne en Angleterre où il rencontre un génial scientifique espérant tester une nouvelle formule spéciale. Sa vengeance est bientôt à portée de main. La folle injection du Docteur rend Robert invisible, lui permettant ainsi d’approcher discrètement ceux qui jadis l’avaient trahis. Griffin détruit systématiquement ses ennemis grâce à cette nouvelle faculté d’invisibilité, mais découvre que ses nouveaux pouvoirs ne peuvent pas être utilisés aussi facilement. Les effets secondaires commencent à se faire ressentir…

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Nous avions laissé notre Homme invisible s’échapper de Berlin dans L’Agent invisible contre la gestapo. Qu’allait-il lui arriver dans ses prochaines aventures ? Il faudra attendre deux ans pour que La Vengeance de l’Homme invisible The Invisible Man’s Revenge débarque sur les écrans américains en août 1944. Nous avons affaire à un nouvel Homme invisible, mais quelle est donc cette vengeance qui l’anime et qui donne son titre à ce cinquième opus de la franchise ? Dans ce formidable film noir fantastique, le protagoniste principal, devenu invisible grâce à un sérum révolutionnaire, va utiliser ce pouvoir pour se venger de quelques individus qui l’ont laissé pour mort au Tanganyika en le détroussant d’une fortune en diamants qui lui revenait de droit. Frappé à la tête et ayant souffert d’amnésie, désormais guéri et de retour d’Afrique dans son pays après avoir voyagé comme passager clandestin, rien ni personne n’arrêtera désormais Griffin dans sa quête de vengeance.

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Réalisé par un certain Ford Beebe (1888-1978), La Vengeance de l’Homme invisible poursuit la saga Universal Monsters – Invisible Man, tout en l’emmenant sur une nouvelle voie. Après la comédie, le film d’espionnage, le film de guerre, l’Homme invisible devient un véritable Edmond Dantès. Cet épisode emprunte au Comte de Monte-Cristo d’Alexandre Dumas et s’avère passionnant dans son mélange des genres. Curt Siodmak laisse cette fois sa place au scénariste Bertram Millhauser, auteur d’un Sherlock Holmes à Washington en 1943 ou du Caïd avec Humphrey Bogart en 1942. Le ton revient à celui des deux premiers films. En dehors de la scène très réussie des fléchettes, dans lequel l’Homme invisible aide un complice bien imbibé à remporter un tournoi, l’humour y est beaucoup moins présent que dans les précédents volets. Après L’Agent invisible contre la gestapo, Jon Hall est de retour dans le rôle principal, même si le personnage est totalement différent. Plus froid dans son interprétation, le comédien campe un Robert Griffin – référence au protagoniste original même si sans aucun lien – inquiétant, manipulateur et déterminé à se venger de ceux qui l’ont doublé. C’est alors qu’il croise la route du Docteur Drury, incarné par l’immense John Carradine, qui l’utilise alors comme cobaye dans ses expériences visant l’invisibilité. Après avoir rendu un perroquet et deux chiens invisibles, il est temps pour lui de tenter de rendre un être humain invisible.

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Les effets spéciaux n’ont eu de cesse de s’améliorer de film en film, ce qui est encore le cas pour cet opus. La « présence » suggérée de l’Homme invisible reste réellement bluffante pour l’époque – à l’instar de la main dans l’aquarium ou le visage recouvert de farine – et ravit toujours les yeux aujourd’hui. L’intrigue est rondement menée, souvent passionnante. Mais il s’agit du dernier baroud d’honneur de cet Homme invisible chez Universal et il faudra attendre le début des années 1950 pour « revoir » cet être dématérialisé sur le grand écran aux côtés…d’Abbott et Costello dans Deux nigauds contre l’homme invisible.

LE BLU-RAY

Le test du Blu-ray de La Vengeance de l’Homme invisible, disponible chez Elephant Films dans la désormais impressionnante et indispensable collection Cinéma Monster Club, a été réalisé à partir d’un check-disc. L’édition HD est accompagnée du DVD dans un combo élégamment présenté. Le menu principal est animé et musical.

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Dans la section des suppléments, nous trouvons tout d’abord une présentation du film (6’) par le journaliste Jean-Pierre Dionnet. Comme à son habitude, ce dernier revient particulièrement sur le réalisateur, les scénaristes et le casting, ainsi que sur l’orientation originale de ce nouvel opus.

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On retrouve également un module où Dionnet expose le thème de l’Homme Invisible (13′), décliné à travers les arts, de la littérature (H.G. Wells bien sûr) et au cinéma, du film de James Whale en 1933, ses suites qui suivront dans les années 1940, tout en passant rapidement sur les films de John Carpenter et de Paul Verhoeven. Jean-Pierre Dionnet évoque également les effets spéciaux miraculeux de John P. Fulton.

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L’interactivité se clôt sur une galerie de photos, les credits du disque ainsi que les nombreuses bandes-annonces des films disponibles dans la même collection. Toutefois, ne figure pas celle de La Vengeance de l’Homme invisible !

L’Image et le son

Si l’on excepte quelques griffures, décrochages sur les fondus enchaînés et divers fourmillements sur les images composites des séquences comprenant des effets spéciaux, alors il n’y a rien à redire sur le master HD de La Vengeance de l’Homme invisible. Le N&B est riche, les noirs denses et les blancs lumineux, la copie affiche une stabilité enthousiasmante et les contrastes sont à l’avenant. Ce Blu-ray au format 1080p ravit les yeux et participe à la redécouverte de cette excellente franchise. Merci Elephant Films !

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La bande-son a également été restaurée en version originale, seule piste disponible sur cette édition, en DTS HD Dual Mono Mono 2.0. Les dialogues, tout comme la musique, demeurent propres et distincts. Le confort acoustique est très appréciable, sans souffle parasite ni craquements intempestifs.

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Crédits images : © Elephant Films

Chronique du Blu-ray / En cavale, réalisé par Peter Billingsley

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EN CAVALE (Term Life) réalisé par Peter Billingsley, disponible en Blu-ray/DVD le 20 juillet 2016 chez Metropolitan Vidéo

Acteurs : Vince Vaughn, Hailee Steinfeld, Bill Paxton, Jon Favreau, Taraji P. Henson, Terrence Howard, Mike Epps, Cécile de France, Annabeth Gish

Scénario : Andy Lieberman

Photographie : Roberto Schaefer

Musique : Dave Porter

Durée : 1h33

Date de sortie initiale : 2016

LE FILM

Tout le monde veut voir Nick mort : des trafiquants, des chasseurs de prime et des flics ripoux. Organisateur d’un casse qui a mal tourné, Nick doit prendre la fuite avec sa fille qu’il n’a pas vue depuis des années. Et comme si cela ne suffisait pas à ses problèmes, l’adolescente est en révolte contre l’autorité parentale et le considère comme le dernier des ringards… La vie de gangster n’est décidément pas facile tous les jours !

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Comédien, mais surtout producteur des films de son complice Vince Vaughn (La Rupture, Tout…sauf en famille), Peter Billingsley passe à la mise en scène en 2009 avec Thérapie de couples, pour lequel Jon Favreau signe le scénario avec…Vince Vaughn ! Le comédien tenait alors le premier rôle aux côtés de Malin Akerman et Jason Bateman. Les deux amis se retrouvent pour En cavaleTerm life. Adapté du roman graphique d’Andy Lieberman, ce film policier teinté d’humour permet à Vince Vaughn de renouer avec un genre plus dramatique, même si son rôle n’est pas aussi sombre que celui qu’il tenait dans la deuxième saison de True Detecttive. S’il ne rate pas l’occasion de balancer quelques vannes, Vince Vaughn s’avère parfait dans le rôle de Nick, un quadra dont le talent rare est d’organiser des casses et qui propose ses services au plus offrant.

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Préférant vivre seul et sans attache, Nick regarde sa fille Cate, âgée de seize ans, grandir au jour le jour, en restant caché. Un jour, un des vols qu’il a mis au point tourne mal. La bande responsable du larcin se fait doubler et tuer par des rivaux. Parmi les victimes se trouve le fils d’un important chef de cartel. Ce dernier souhaite venger la mort de son rejeton en s’en prenant à Nick, qu’il tient pour responsable. La vie de la fille de Nick est aussi rapidement mise en danger. Pour la première fois, Nick affronte sa fille et les deux vont bien être obligés d’apprendre à se connaître si ils veulent s’en sortir indemnes. Ils prennent donc la poudre d’escampette pour échapper à la mafia et à une bande de flics pourris. Sur ce canevas classique et sans réelles surprises, En cavale divertit sans se forcer grâce à la solide interprétation de Vince Vaughn donc, mais aussi de l’excellente et prometteuse Hailee Steinfeld, la grande révélation de True Grit des frères Coen en 2010, sans oublier Bill Paxton, Jonathan Banks, Jordi Mollà et Terrence Howard, ainsi qu’un petit cameo de Jon Favreau.

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L’intrigue policière est finalement prétexte pour voir un père et sa fille réunis et faire équipe, et de ce point de vue-là les deux acteurs principaux assurent du début à la fin. En cavale pèche néanmoins par son intrigue lambda et passe-partout, dont la résolution s’avère expéditive. Ce qui n’empêche pas le film d’être très sympa.

LE BLU-RAY

Le test du Blu-ray d’En cavale, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est fixe et muet. Une pure sortie technique pour ce DTV.

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L’éditeur ne propose que la bande-annonce du film en guise d’interactivité. Rien de plus.

En cavale débarque chez nous directement en DVD et Blu-ray. Comme d’habitude, l’éditeur soigne son master HD qui se révèle quasi-exemplaire. Les contrastes sont d’une densité rarement démentie, à part peut-être durant les séquences sombres où l’image paraît plus douce. Le reste du temps, la clarté demeure frappante, le piqué est affûté, les gros plans détaillés et la colorimétrie saturée, vive et chaude. Les détails sont légion aux quatre coins du cadre large.

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Bien que le film soit étonnamment avare en scènes « agitées », les mixages anglais et français DTS-HD Master Audio 5.1 assurent pour instaurer un confort acoustique ample et plaisant. La musique composée par Dave Porter (Breaking Bad) est systématiquement spatialisée grâce au soutien énergique des latérales. Si les dialogues auraient mérité d’être un peu plus relevés sur la centrale en version originale, ils sont heureusement toujours nets et précis, la balance frontale est puissante et le caisson de basses utilisé à bon escient, sans esbroufe. A titre de comparaison, la piste française se révèle quand même moins riche et naturelle que son homologue.

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Crédits images : © Metropolitan Vidéo

Chronique du Blu-ray / Plus fort que le diable, réalisé par John Huston

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PLUS FORT QUE LE DIABLE (Beat the Devil) réalisé par John Huston, disponible en combo Blu-ray/DVD le 14 juin 2016 chez Rimini Editions..

Acteurs : Humphrey Bogart, Jennifer Jones, Gina Lollobrigida, Robert Morley, Peter Lorre, Edward Underdown, Ivor Barnard…

Scénario : Truman Capote, John Huston

Photographie : Oswald Morris

Musique : Franco Mannino

Durée : 1h29

Date de sortie initiale : 1953

LE FILM

Quatre aventuriers cherchent à s’approprier un gisement d’uranium. Billy Dannreuther, cinquième larron de la bande, attend ses associés en compagnie de son épouse Maria dans un petit port italien : c’est là que tous devront embarquer sur un bateau à destination de l’ Afrique. En attendant le départ, chacun essaie de tuer le temps. Billy et Maria font la connaissance de Harry Chelm et de son épouse. Chelm est un escroc notoire, et les associés de Billy s’imaginent qu’ils sont en train de se faire rouler.

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En 1953, John Huston et Humphrey Bogart ont envie de s’amuser. C’est ce qu’on se dit en voyant Plus fort que le diable, Beat the Devil, tourné entre Moulin Rouge et Moby Dick. Dernière collaboration entre le cinéaste et le comédien après Le Faucon maltais (1941), Griffes jaunes (1942), Le Trésor de la Sierra Madre (1948), Key Largo (1948) et L’Odyssée de l’African Queen (1951, Oscar du meilleur acteur pour Bogey), Plus fort que le diable est une comédie aussi délirante qu’élégante écrite par John Huston et Truman Capote, d’après le roman de James Helvick.

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Bogart donne la réplique à Jennifer Jones (Madame Bovary dans le film éponyme de Vincente Minnelli), Gina Lollobrigida (juste avant Pain, amour et fantaisie de Luigi Comencini), Robert Morley et Peter Lorre qui interprètent des escrocs bouffons à la petite semaine, qui se réunissent en Italie pour un coup fumant autour de mines africaines d’uranium. Soyons honnêtes, tout est ici prétexte pour réunir quelques excellents comédiens et amis dans le but de prendre du bon temps dans de merveilleux paysages naturels. Rétrospectivement, Plus fort que le diable est sans doute un des films mineurs de l’immense carrière de John Huston. S’il était excellent romancier, Truman Capote n’était pas fait pour le cinéma en raison d’une surabondance de dialogues qui peuvent vraiment plomber l’histoire, quelque peu confuse, comme ce sera le cas également pour Diamants sur canapé en 1961. Le film paraît souvent étouffant et il n’est pas rare de perdre le fil. Mais comme c’était déjà le cas avec Le Faucon maltais, ce qui intéresse le plus John Huston (et donc les spectateurs) est l’énergie que déploient les comédiens, l’atmosphère, les sentiments des personnages, le jeu du chat et de la souris, les retournements de situation, les coups bas, la valse des sentiments (et des genres entre film noir, comédie, aventures), le burlesque du quotidien, la cupidité et la stupidité des hommes dont l’ambition va les mener à l’échec.

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Même s’il n’en a pas tourné beaucoup, Humphrey Bogart était un sublime comédien comique (Echec à la Gestapo, Sabrina) et force est de constater qu’il se délecte ici d’un rôle taillé sur mesure, d’autant plus qu’il est également producteur non crédité et que c’est l’acteur lui-même, sur les conseils de John Huston, qui possédait les droits du roman de James Helvick. Pince sans rire, l’oeil pétillant et rictus toujours affiché, il est irrésistible ici dans Plus fort que le diable. Ses partenaires ne sont pas en reste et affichent tous une énergie revigorante, visiblement heureux de faire partie de cette entreprise récréative.

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Alors certes, le rythme est inégal, parfois poussif, certaines séquences paraissent souvent bien trop longues en raison de dialogues encombrants bien que merveilleusement cyniques (la marque de fabrique de Truman Capote), mais il serait dommage de se priver de cette bouffée d’air frais quasi-inclassable dans la carrière de John Huston habituellement marquée par la mort et la noirceur de l’âme humaine.

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LE BLU-RAY

Le combo Blu-ray-DVD de Plus fort que le diable, édité chez Rimini Editions, repose dans un boîtier classique de couleur bleue, glissé dans un surétui cartonné du plus bel effet. La jaquette saura attirer les fans de Bogey et des classiques des années 1950. Le menu principal est élégant, animé et musical.

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A l’instar de ses formidables éditions en Blu-ray de La Main gauche du Seigneur, Bas les masques et Quelque part dans la nuit, Rimini Editions a mis les petits plats dans les grands pour la sortie de Plus fort que le diable en Haute-Définition.

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On commence par une formidable présentation du film de John Huston par le grand Patrick Brion (35’). L’historien du cinéma, auteur d’un ouvrage sur le réalisateur de Quand la ville dort, replace tout d’abord Plus fort que le diable dans la carrière du cinéaste américain avant d’en venir à la genèse, puis à la production du film qui nous intéresse ici. Patrick Brion évoque le roman de James Helvick, le tournage en Italie, le casting, l’ambiance sur le plateau, la collaboration Huston-Capote, tout en donnant son propre avis sur ce film pour lequel il a beaucoup d’affection.

On continue sur cette lancée avec un module rétrospectif sur la vie et la carrière du mythique John Huston (46’), réalisé en 2012. Ce documentaire se compose d’extraits et de bandes-annonces, mais aussi de photos, d’images de tournage et surtout de commentaires informatifs sur les grandes étapes de la carrière du cinéaste. Curtice Taylor (photographe), Ian Nathan (critique), Barry Navici (producteur), Oswald Morris (chef opérateur sur huit films de John Huston), Eli Wallach (comédien dans Les Désaxés) évoquent à la fois le metteur en scène et l’homme qu’était John Huston, son rapport avec les femmes, ses enfants, Humphrey Bogart, Marilyn Monroe, son amour pour le Mexique, sa face sombre et ses colères sur les plateaux.

L’Image et le son

C’est vers cette édition qu’il faudra vous tourner si vous désirez revoir le film de John Huston dans les meilleures conditions techniques possibles. Fort d’un master au format 1.33 respecté (16/9 compatible 4/3) et d’une compression solide comme un roc, ce Blu-ray au format 1080p s’avère lumineux. La définition est très belle et la restauration numérique HD se révèle étincelante. Les contrastes sont denses, les noirs profonds et le grain original heureusement préservé, sans lissage excessif. En dehors d’une ou deux séquences peut-être moins définies, ainsi que des rayures verticales, points et autres poussières qui subsistent parfois, les séquences sombres sont tout aussi soignées que les scènes plus claires, le piqué est aussi tranchant qu’inédit, la stabilité de mise, les détails étonnent par leur précision.

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L’unique version anglaise est proposée en DTS-HD Master Audio Mono 2.0. Point de remixage superflu à l’horizon, l’écoute demeure fort appréciable en version originale (avec sous-titres français non imposés), avec une excellente restitution de la musique, des effets annexes et des voix très fluides et aérées, sans aucun souffle.

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Crédits images : © Rimini Editions


Chronique du Blu-ray / The End, réalisé par Guillaume Nicloux

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THE END réalisé par Guillaume Nicloux, disponible en DVD et Blu-ray le 5 juillet 2016 chez TF1 Vidéo.

Acteurs : Gérard Depardieu, Audrey Bonnet, Swann Arlaud, Xavier Beauvois, Didier Abot

Scénario : Guillaume Nicloux

Photographie : Christophe Offenstein

Musique : Éric Demarsan

Durée : 1h25

Date de sortie initiale : 2016

LE FILM

Un homme part chasser dans une forêt qu’il croyait connaître. Mais son chien s’enfuit puis son fusil disparaît. Alors qu’il se perd, une atmosphère hostile et étrange s’installe…

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Il n’aura pas fallu longtemps pour que Gérard Depardieu retrouve le réalisateur Guillaume Nicloux après le très beau Valley of Love. Fiers de leur première expérience en commun, les deux hommes ont rapidement mis en boîte The End, sorti directement en e-Cinéma. En un temps-record, le film a été écrit spécialement pour Gérard Depardieu, produit pour 430.000 euros, tourné et mis en ligne en téléchargement légal en avril 2016, ce qui en fait le premier projet français pensé et produit uniquement dans cette optique de distribution.

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Intégralement tourné dans la forêt de Fontainebleau, The End est une véritable expérience cinématographique. Notre Gégé national est quasi-seul en scène, de tous les plans et bouffe l’écran tel un ogre tout droit sorti d’un conte (pour adultes), qu’il est d’ailleurs devenu. Un Bon Gros Géant qui se lève un matin, prend son petit-déjeuner avec son chien Yoshi à ses côtés. Puis ils partent tous les deux en forêt pour aller chasser. Très vite, son chien se fait la malle et « l’homme » a beau l’appeler, le chien a visiblement disparu. Non seulement ça, « l’homme » se perd et ne reconnaît plus le sentier habituel. La nuit tombe, il doit alors se réfugier dans une petite caverne et y faire du feu, tout en rationnant ce qu’il lui reste à boire et à manger. Le lendemain matin il découvre avec stupeur que son fusil a disparu. Il recommence à chercher son chemin pour rentrer, mais semble s’enfoncer encore et toujours dans cette partie de la forêt qu’il ne reconnaît pas et qui s’avère de plus en plus labyrinthique, d’autant plus que des scorpions font même leur apparition.

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Guillaume Nicloux, fasciné par son comédien (comme l’auteur de ces mots), le filme de près, enregistre sa respiration hésitante, ses essoufflements, ses râles, sa voix désespérée quand son personnage appelle son chien, mais filme aussi son corps. De près comme de loin, Depardieu n’a qu’à être là pour s’imposer et remplir le cadre. Inspiré d’un rêve du cinéaste, The End est un film métaphorique sur un homme écrasé par la vie et la solitude, une introspection, un homme qui fait le bilan sur son existence. Avec une ambiance quasi-fantastique, Guillaume Nicloux parvient avec une économie de moyens à dresser le portrait d’un homme brisé et seul à l’automne de sa vie. Le cinéaste a l’intelligence de ne pas donner toutes les clés aux spectateurs, afin de les laisser libres de leurs propres interprétations, comme on est en droit d’imaginer que le film peut également se voir comme une parabole du comédien Gérard Depardieu perdu dans le cinéma français contemporain. The End est un film troublant et radical qui n’a pas fini de trotter en tête !

LE BLU-RAY

Le test du Blu-ray de The End, disponible chez TF1 Vidéo, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est animé et musical, très sobre.

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La section Interactivité propose tout d’abord une présentation de The End à la 66e Berlinale, en compagnie de Gérard Depardieu et de Guillaume Nicloux (9’30). Les deux hommes parlent de leur collaboration, des thèmes abordés, des conditions de tournage. Gérard Depardieu en profite pour dire ce qu’il pense du Festival de Cannes, et ça fait du bien !

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Cette fois en compagnie de la productrice Sylvie Pialat, Guillaume Nicloux revient cette fois encore sur The End (18’). Si certains propos font redondance avec ce qui a déjà été entendu dans le segment précédent, le cinéaste aborde plus longuement son processus créatif et l’évolution de son art cinématographique. Il s’en dégage également un véritable amour pour Gérard Depardieu, que Guillaume Nicloux regrette de ne pas avoir rencontré avant Valley of love. C’est entre autres pour cette raison que le réalisateur a voulu enchaîner rapidement sur The End, conçu exprès pour le comédien. Les deux hommes se retrouveront d’ailleurs pour un troisième projet.

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L’interactivité se clôt sur la bande-annonce du film, réalisée par Gaspar Noé, dont on reconnaît la griffe.

L’Image et le son

Jusqu’alors disponible uniquement en e-Cinéma, The End débarque en Blu-ray chez TF1 Vidéo, dans un transfert très élégant. Cependant, si les contrastes affichent une densité impressionnante, le piqué n’est pas aussi ciselé sur les scènes sombres et certaines séquences apparaissent un peu douces. En dehors de cela, la profondeur de champ demeure fort appréciable avec de superbes scènes en forêt, les détails se renforcent et abondent en extérieur jour, le cadre large est idéalement exploité et la colorimétrie est très bien rendue. La définition est quasi-optimale et restitue avec élégance les partis pris de la photographie signée Christophe Offenstein, chef opérateur de Ne le dis à personne, Valley of love et Les Petits mouchoirs.

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L’unique mixage DTS-HD Master Audio 5.1 est réellement bluffant. Le spectateur est happé dans cette étrange forêt aux côtés de Gégé, grâce au soutien constant des enceintes latérales qui environnent l’audience avec de multiples ambiances naturelles. Les voix sont solidement ancrées sur la centrale, la balance frontale est dynamique. D’une précision sans faille, dense, dynamique, le confort acoustique est largement assuré. Les sous-titres français pour les spectateurs sourds et malentendants sont également disponibles.

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Crédits images : © TF1 Vidéo

Chronique du Blu-ray / Grimsby – Agent trop spécial, réalisé par Louis Leterrier

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GRIMSBY – AGENT TROP SPECIAL (Grimsby) réalisé par Louis Leterrier, disponible en Blu-ray et DVD le 24 août 2016 chez Sony Pictures

Acteurs : Sacha Baron Cohen, Mark Strong, Isla Fisher, Rebel Wilson, Gabourey Sidibe, Penélope Cruz, Annabelle Wallis, Ian McShane

Scénario : Sacha Baron Cohen, Phil Johnston, Peter Baynham

Photographie : Oliver Wood

Musique : David Buckley, Erran Baron Cohen

Durée : 1h23

Date de sortie initiale : 2016

LE FILM

Nobby Butcher n’a pas de boulot, mais cela ne l’empêche pas d’être heureux. Il a tout ce dont il peut rêver dans la vie : le foot, une petite amie géniale… et neuf gamins. Pour que son bonheur soit complet, il ne lui manque que son petit frère, Sebastian, dont il a été séparé quand ils étaient enfants.
Après trente ans de recherches, Nobby retrouve finalement la trace de Sebastian à Londres. Il ignore que celui-ci est devenu le meilleur agent du MI6…
Leurs retrouvailles tournent à la catastrophe, et voilà les deux frères en cavale. C’est alors qu’ils découvrent un complot visant à détruire le monde…
Pour sauver l’humanité – et son frère – Nobby va devoir se lancer dans sa plus grande aventure. Pourra-t-il passer de l’état de bouffon niais à celui d’agent secret ultrasophistiqué sans faire trop de dégâts ?

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Le réalisateur français Louis Leterrier (Le Transporteur et sa suite, Danny the Dog, L’Incroyable Hulk) est aussi « insaisissable » que le titre de son dernier carton au box-office mondial et son plus grand succès en France. Sur le tournage d’Insaisissables, il rencontre Sacha Baron Cohen, venu rendre une petite visite à sa femme, la délicieuse Isla Fisher. Il lui propose de mettre en scène le scénario qu’il a coécrit avec Phil Johnston (Zootopie, Les Mondes de Ralph) et Peter Baynham (Hôtel Transylvanie), celui de Grimsby, comédie d’espionnage nécessitant le savoir-faire d’un réalisateur spécialisé dans les scènes d’action. Louis Leterrier accepte. Il ne pouvait pas mieux tomber que sur Sacha Baron Cohen pour l’emmener sur de nouveaux territoires !

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L’acteur, scénariste et humoriste découvert dans les années 1990 dans la peau du personnage Ali G, qui aura d’ailleurs son propre film en 2002, mais qui a véritablement explosé en 2006 avec Borat : Leçons culturelles sur l’Amérique au profit glorieuse nation Kazakhstan, a ensuite confirmé son goût (et son talent) pour camper des personnages controversés et haut en couleur comme Brüno en 2009 et The Dictator en 2012. Dix ans après Borat, Sacha Baron Cohen débarque avec une sorte de parodie de James Bond qui semble vouloir repousser toutes les limites. Grimbsy – Agent trop spécial va à fond dans le vulgaire et n’a pas peur d’y aller ou même de s’y vautrer. Au contraire, le sperme (d’éléphant), les testicules (où s’est plantée une fléchette empoisonnée et dont il faut sucer le venin), un étron (long comme un anaconda, mais que nous ne verrons pas à l’écran ceci dit), l’anus (dans lequel on plante des fusées de feu d’artifice) tiennent autant de place dans l’intrigue que les retrouvailles de deux frères fusionnels, séparés pendant leur enfance. Si Nobby (SBC) est resté dans la ville ouvrière paumée de Grimsby dans l’est de l’Angleterre, son frère Sebastian (Mark Strong, qui s’amuse encore plus que dans Kingsman : Services secrets), dont il n’a pas de nouvelles depuis près de 30 ans, est devenu un des meilleurs agents du MI6. Nobby vit avec ses neuf enfants et sa compagne (Rebel Wilson en mode Sharon Stone dans Basic Instinct) et passe sa journée à boire avec ses potes hooligans au pub au lieu de chercher du boulot. Sebastian est seul et ne vit que pour son boulot, qui de toute façon lui laisse peu de temps pour construire une famille. Par un concours de circonstances, les deux frères se retrouvent au cours d’une mission périlleuse de Sebastian. Alors que ce dernier tente de prendre la fuite, Nobby est cette fois bien décidé à ne plus perdre de vue son petit frère qui lui a tant manqué.

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Et c’est parti pour 1h20 de quiproquos hallucinants. On y croise un sosie de Daniel Radcliffe qui se fait accidentellement contaminer par le sang d’un jeune malade du SIDA, qui contaminera à son tour un homme politique américain à perruque en passe d’accéder à la Maison-Blanche. Le studio Sony aurait d’ailleurs tenté de saborder la promotion du film aux Etats-Unis en raison de cette scène. Mais ce n’est pas la séquence la plus dingue (euphémisme) de Grimbsy – Agent trop spécial. Celle que l’on retiendra longtemps c’est celle où les deux frangins, poursuivis en Afrique du Sud par une bande de tueurs implacables, trouvent refuge…dans l’utérus d’une femelle éléphant. Oui. Bien cachés, ils attendent patiemment que les tueurs s’en aillent. C’est alors qu’un troupeau d’éléphants en rut s’amène, tous bien décidés à féconder cette femelle en question. Les deux frères se retrouvent pris au piège et ne peuvent que subir…non, mieux vaut arrêter là, puisque de toute façon cette scène est à voir pour le croire. C’est d’ailleurs tout le film qu’il faut visionner impérativement tant ces 80 minutes donnent la patate et musclent les abdominaux.

Initialement prévu dans les salles françaises et américaines en juillet 2015, Grimbsy – Agent trop spécial s’est vu décalé en mars 2016 aux USA et en avril 2016 chez nous. Sorti en catimini, le film s’est soldé par un échec aussi cuisant qu’injuste au box-office avec seulement 6 millions de dollars de recette sur le sol américaine et 16 millions dans le reste du monde. Le premier bide pour Louis Leterrier, qui de son côté livre pourtant de formidables scènes d’action, notamment celle qui introduit le personnage de Sebastian dans ses œuvres filmées en caméra subjective.

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Dommage pour ce rejet du public et de la critique, car nous aurions aimé une suite déjantée à l’instar d’Austin Powers et retrouver les frangins de Grimsby dans de nouvelles aventures hilarantes et trash.

LE BLU-RAY

Le Blu-ray de Grimsby – Agent trop spécial repose dans un boîtier classique de couleur bleue, glissé dans un surétui cartonné. Le visuel de la jaquette diffère de l’affiche française, en se concentrant uniquement sur les deux frères. Le menu principal est quant à lui fixe et musical.

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L’essentiel de l’interactivité de ce Blu-ray repose sur les scènes supprimées (2’), coupées (9’) et étendues (9’).

Dans le premier cas, il s’agit essentiellement d’improvisations de Sacha Baron Cohen, qui essaye diverses répliques.

En ce qui concerne les 3 scènes coupées, précipitez-vous sur l’entretien d’embauche de Nobby, qui tente de faire bonne figure devant l’employé de l’agence pour l’emploi, ou bien celle hilarante mettant en scène un membre de l’équipe scientifique qui aime goûter les substances non-identifiées récoltées sur le terrain. Autant dire qu’il contracte un bel herpès en savourant les « traces » laissées par Nobby.

Les séquences étendues valent surtout pour celle déjà culte de l’éléphant. Si vous croyiez avoir tout vu au cinéma, détrompez-vous. Les deux compères allaient encore plus loin, au point d’être littéralement noyés dans…vous savez. La scène où Nobby apprend à Sebastian à devenir un vrai hooligan est aussi géniale.

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Le making of (12’) remplit efficacement son contrat avec de nombreux propos du réalisateur Louis Leterrier, des comédiens et des producteurs. Les images de tournage abondent et montrent l’ambiance qui régnait sur le plateau, surtout lors des prises de vues de la « cachette » dans l’éléphant, avec un réalisateur vêtu d’une combi de plongée et aussi noyé que ses acteurs. Ce qui ne manque pas de déplaire à Sacha Baron Cohen.

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Evidemment, la séquence de l’éléphant possède son module à part (4’) avec les mêmes intervenants et d’autres images de tournage, aussi poilantes que la séquence finale. Mention spéciale à l’équipe technique qui a procédé à différents tests afin d’obtenir la bonne texture pour le sperme de l’éléphant.

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L’interactivité se clôt sur un bêtisier (2’) et un lot de bandes-annonces.

L’image et le son

Comme d’habitude, l’éditeur Sony soigne son master HD qui se révèle exemplaire. Les contrastes sont d’une densité rarement démentie, à part peut-être durant les séquences sombres où l’image paraît plus douce et moins affûtée, mais cela demeure franchement anecdotique. La clarté demeure frappante, le piqué est affûté, les gros plans détaillés, les contrastes denses et la colorimétrie reste chatoyante. Les détails sont légion aux quatre coins du cadre large et la copie restitue les partis pris esthétiques, des décors aux costumes. Ce Blu-ray offre de formidables conditions pour découvrir cette comédie survoltée et profiter de la belle photographie signée Oliver Wood, chef-opérateur talentueux de Volte/face, U-571 et les trois premiers Jason Bourne.

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Dans les séquences d’action et même dans celles où Nobby fait la fête avec ses amis, l’ensemble des enceintes des pistes anglaise et française DTS-HD Master Audio 5.1 est mis à contribution aux quatre coins cardinaux. Les ambiances fusent, la musique bénéficie d’un traitement de faveur avec une large ouverture. Les dialogues ne sont jamais pris en défaut et demeurent solidement plantés sur la centrale tandis que les effets ne cessent d’être balancés de gauche à droite, et des enceintes avant vers les arrières, à l’instar de la scène finale dans le stade, de l’explosion de la chambre et des diverses bastons. N’oublions pas le caisson de basses, qui se mêle souvent à ce spectacle acoustique.

grimsby-agent-trop-special3Crédits images : © Sony Pictures

 

Chronique du Blu-ray / Le Retour de l’Homme Invisible, réalisé par Joe May

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Réalisation : Joe May
Acteurs : Cedric Hardwicke, Vincent Price, Nan Grey, John Sutton, Cecil Kellaway, Alan Napier, Forrester Harvey
Scénario : Lester Cole, Curt Siodmak, d’après les personnages et le roman créés par H.G. Wells
Musique : Hans J. Salter, Frank Skinner

Combo Blu-ray/DVD disponible chez Elephant Films le 21 septembre 2016.

LE FILM

Condamné à mort pour un crime qu’il n’a pas commis, Sir Geoffrey Radcliffe reçoit la visite du docteur Frank Griffin – le frère de l’homme invisible. Persuadé de l’innocence de Radcliffe, Griffin lui fournit le sérum d’invisibilité, lui permettant ainsi de s’échapper, et de se lancer sur les traces du coupable…

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Réalisé par Joe May, cinéaste allemand né Julius Otto Mandl (1880-1954), Le Retour de l’Homme invisibleThe Invisible Man Returns, est comme son titre l’indique la suite directe du chef d’oeuvre de James Whale mis en scène en 1933 et inspiré du roman de H.G. Wells publié en 1897. Ce second opus de la franchise Universal Monsters – Invisible Man s’avère tout à fait digne du premier et saura relancer une franchise qui comptera au final cinq films, six si l’on compte l’épisode parodique avec Abbott et Costello, Deux nigauds contre l’homme invisible, réalisé au début des années 1950. Le scénario de ce très attendu Retour, est confié aux scénaristes Lester Cole et Curt Siodmak. Si le premier demeure malheureusement plus connu pour avoir été une des victimes du maccarthysme et inscrit sur la Liste noire à Hollywood, le second, frère du cinéaste Robert Siodmak, deviendra un habitué du genre fantastique. Il sera l’auteur du Loup-Garou (1941), Frankenstein rencontre le Loup-Garou (1942), Le Fils de Dracula (1943) et La Maison de Frankenstein (1944). A partir d’un petit bijou de scénario, Joe May livre un vrai chef d’oeuvre du genre, qui parvient à respecter l’oeuvre originale, le plus grand succès des studios Universal en 1933, tout en offrant quelque chose de frais et de nouveau aux spectateurs.

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Si Le Retour de l’Homme invisible est moins sombre que le film de James Whale, il n’en demeure pas moins que l’aventure est au rendez-vous du début à la fin. Même si les effets visuels étaient déjà épatants en 1933, ils se sont encore améliorés en sept années et certaines séquences restent encore bluffantes aujourd’hui grâce encore une fois au travail du pionnier en la matière, John P. Fulton. La magie fonctionne, tout comme l’enquête policière et les changements de ton. A ce titre, le sérum permettant l’invisibilité change progressivement la mentalité et les desseins de celui qui se l’est fait injecté. Du coup, un homme, accusé à tort d’un meurtre, parvient à s’évader de prison juste avant d’être exécuté, grâce à l’aide inespérée du frère de Dr. Jack Griffin, (anti)héros du premier film (dont les faits se déroulent 9 ans avant), qui détient la formule tant convoitée. Menant son enquête grâce à ce nouveau don, Geoffrey Radcliffe va découvrir ce pouvoir et surtout ce qu’il est désormais capable d’accomplir. Devant la femme qui l’aime et celui qui l’a aidé à s’en sortir, il commence à avoir des rêves de grandeur, à devenir cynique, violent et menaçant. Ce personnage est incarné par l’immense Vincent Price, dans une de ses premières apparitions au cinéma. Même s’il « n’apparaît » que de manière subliminale à l’écran, le comédien possède autant si ce n’est une plus grande présence que son prédécesseur Claude Rains, déjà immense dans le rôle-titre. Doté d’une des plus grandes voix de l’histoire du cinéma, Vincent Price crève l’écran, même quand « n’apparaît pas » à l’écran. Il est assurément un si ce n’est le plus grand Homme invisible de l’Histoire du cinéma.

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Avec quelques touches d’humour, des rebondissements rythmés, une mise en scène énergique (la séquence des fumigènes est un sommet), des effets visuels étonnants (nommés pour un Oscar en 1941), une interprétation au diapason, Le Retour de l’Homme invisible s’impose comme une des plus belles, une des plus grandes réussites fantastiques des Studios Universal des années 1940.

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LE BLU-RAY

Le test du Blu-ray du Retour de l’Homme invisible, disponible chez Elephant Films dans la désormais impressionnante et indispensable collection Cinéma Monster Club, a été réalisé à partir d’un check-disc. L’édition HD est accompagnée du DVD dans un combo élégamment présenté. Le menu principal est animé et musical.

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Du point de vue bonus, le journaliste Jean-Pierre Dionnet nous livre une présentation du film (12′) et revient particulièrement sur le réalisateur, les scénaristes et le casting.

On retrouve également un module où Dionnet expose le thème de l’Homme Invisible (13′), décliné à travers les arts, de la littérature (H.G. Wells bien sûr) et au cinéma, du film de James Whale en 1933, ses suites qui suivront dans les années 1940, tout en passant rapidement sur les films de John Carpenter et de Paul Verhoeven. Jean-Pierre Dionnet évoque également les effets spéciaux miraculeux de John P. Fulton.

L’interactivité se clôt sur une galerie de photos, les credits du disque ainsi que les nombreuses bandes-annonces des films disponibles dans la même collection.

L’Image et le son

Ce Blu-ray au format 1080p proposée par Elephant Films contient une version restaurée du Retour de l’Homme invisible. La copie – dans son format original 1.33 – est vraiment très belle, même si quelques points et petites scories se font encore voir, mais cela demeure anecdotique. Des fondus enchaînés décrochent légèrement et un bruit vidéo est notable sur les séquences à effets spéciaux, mais l’encodage AVC reste solide. Le noir et blanc est ferme, la luminosité des séquences diurnes fait plaisir. Certaines scènes parviennent à sortir du lot grâce à un relief impressionnant, tandis que les contrastes sont assurés. Le grain cinéma est évidemment conservé avec un véritable équilibre.

La bande-son a été restaurée en version originale, seule piste disponible sur cette édition, en DTS HD Dual Mono Mono 2.0. Les dialogues, tout comme la musique, demeurent propres et distincts. Le confort acoustique est très appréciable et les craquements, inhérents à l’âge du film, ne sont pas du tout gênants.

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Critique et Chronique du Blu-ray / L’Homme qui venait d’ailleurs, réalisé par Nicolas Roeg

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Réalisation : Nicolas Roeg
Acteurs : David Bowie, Rip Torn, Candy Clark, Buck Henry, Bernie Casey, Jackson D. Kane
Scénario : Paul Mayersberg d’après le roman de Walter Tevis
Musique : John Phillips, Stomu Yamashta

Blu-ray disponible chez Potemkine Films le 9 juin 2016.

LE FILM

Thomas Jérôme Newton semble avoir survécu à un crash aérien au Nouveau Mexique. Il se dit britannique et apporte avec lui 9 brevets scientifiques révolutionnaires. Propulsé à la tête d’un empire financier colossal, il manifeste très vite un comportement étrange qui trahira ses véritables origines.

David Bowie, un alien de la musique…et au cinéma

En 1975, David Bowie arrive dans sa période soul/funk. Accro à la cocaïne, il sombre dans la paranoïa et les délires mystiques. Incapable de contrôler son image publique, il change à nouveau de « peau » pour se diriger vers un autre courant musical. C’est dans ces conditions que la rockstar tourne L’Homme qui venait d’ailleurs (The Man Who Fell to Earth), réalisé par Nicolas Roeg en 1975. Le cinéaste de Ne vous retournez pas et de Walkabout va alors contribuer au mythe de David Bowie en se servant de son aura, de son physique, de sa présence, et l’imprimer sur pellicule pour ce qui s’avère être son film le plus étrange. Bowie y incarne un alien échoué sur Terre afin de trouver de l’eau pour lutter contre la sécheresse qui dévaste sa planète. Il y a laissé sa femme et ses enfants, qui apparaissent sous forme de rêves et de flash-backs. Ayant pris forme humaine et sous l’identité du brinnatique Thomas Jérôme Newton, il parvient à bâtir un empire industriel en déposant neuf brevets scientifiques révolutionnaires, notamment dans le domaine des films à développement instantané. Cette maîtrise de technologies futuristes et les secrets autour de son identité attirent la curiosité de personnes mal intentionnées. Devenu milliardaire, il fait construire un vaisseau spatial par une de ses sociétés, afin de pouvoir regagner sa planète. Il rencontre alors Mary-Lou, qui vient alors bouleverser l’ordre des choses.

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Un conte philosophique de science-fiction

Les questions existentielles, les rapports entre l’homme et la femme, de l’homme à la nature (ici une catastrophe écologique qui ravage une autre planète) sont cette fois encore au centre du quatrième long métrage de Nicolas Roeg, même s’il s’agit ici d’un récit de science-fiction. Les chanteurs ont toujours inspiré le réalisateur. Après Mick Jagger dans Performance (co-réalisé avec Donald Cammell) en 1970 et avant Art Garfunkel dans Enquête sur une passion en 1980, c’est donc au tour de David Bowie d’être dirigé par Nicolas Roeg, dans son premier vrai rôle au cinéma. Enfin dirigé est un bien grand mot tant la rockstar a semble t-il envoûté le réalisateur qui se contente essentiellement de le filmer sous tous les angles. Comme s’il cherchait lui-même à percer le mystère qui entourait alors cet être hors-du-commun. Film singulier, qui ne ressemble à aucun autre, qui déconcerte, agace, ennuie, subjugue et hypnotise par son récit éclaté, L’Homme qui venait d’ailleurs, librement adapté du roman L’Homme tombé du ciel de l’écrivain américain Walter Stone Tevis publié en 1963, est un pur film de Nicolas Roeg. Un kaléidoscope d’images, de séquences qui s’opposent et qui se répondent à la fois, une expérience sensorielle, qui ne livrera jamais toutes ses clés même au fil de nombreux visionnages. Le charisme androgyne unique de David Bowie est immense. Ce rôle lui va évidemment comme un gant, d’autant plus que son personnage finit par devenir une rock-star en sortant un album sous le nom de The Visitor à la fin du film. Un album réalisé dans l’espoir que la femme qu’il aime et qui l’attend, puisse l’entendre à la radio. Un vecteur de communication, comme Bowie lui-même avec ses fans à travers le monde.

THE MAN WHO FELL TO EARTH

La légende Bowie

Roeg s’amuse à jouer avec les frontières entre Bowie et son personnage, et participe donc à sa légende. A la mort de l’artiste en 2016, une grande partie de la presse a titré « Mort de l’Homme qui venait d’ailleurs ». La boucle est bouclée. Enfin presque, puisque le film a connu une suite au théâtre, imaginée par David Bowie himself. La comédie musicale Lazarus s’est jouée à Broadway fin 2015 avec l’excellent Michael C. Hall dans le rôle principal, quelques jours seulement avant la disparition de Bowie en janvier 2016.

En plus d’être un film de science-fiction important des années 70, L’Homme qui venait d’ailleurs a largement contribué au mythe David Bowie. Quasiment de tous les plans, ce dernier semble traverser le film en lévitation avec son charisme extraordinaire imprimé pour toujours par l’immense réalisateur Nicolas Roeg.

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LE BLU-RAY

Le visuel concocté par Potemkine pour la sortie de L’Homme qui venait d’ailleurs en Haute-Définition est très beau et reprend celui du DVD édité en 2015 par le même éditeur. Il en est de même pour le menu principal, animé et musical. La version intégrale Director’s cut du film (139′) est proposée ici, les séquences érotiques coupées pour son exploitation ayant été réintégrées.

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Peu de bonus à se mettre sous la dent !

Jusqu’à présent en France, L’Homme qui venait d’ailleurs bénéficiait d’une édition collector en DVD, disponible uniquement en occasion maintenant et souvent à plus de 100 euros ! Cette édition deux DVD disposait des deux versions du film, d’un documentaire Watching the Alien (24′) et un autre intitulé Songes d’une nuit d’un E.T. (16′), ainsi que d’une galerie photos, une plaquette publicitaire et le script dialogué.

Le seul supplément disponible sur ce Blu-ray Potemkine est un entretien croisé (25′) avec Jean-Marc Lalanne, rédacteur en chef des Inrockuptibles, et Linda Lorin, animatrice à Radio Nova. Les deux intervenants replacent tout d’abord L’Homme qui venait d’ailleurs dans la carrière de David Bowie, en insistant particulièrement sur son look. N’attendez pas une analyse du film, mais plutôt un portrait du David Bowie comédien, de L’Homme qui venait d’ailleurs à Furyo, en passant par Le Prestige, Les Prédateurs, La Dernière tentation du Christ et Twin Peaks: Fire Walk with Me.

L’Image et le son

Potemkine livre un très beau master HD restauré qui permet de redécouvrir le film de Nicolas Roeg sous toutes ses coutures. Les splendides partis pris esthétiques du directeur de la photographie Anthony B. Richmond (One + One, Ne vous retournez pas, The Indian Runner) trouvent en Blu-ray (1080p) un nouvel écrin et se voient entièrement respectés. Point ou peu de réducteur de bruit à l’horizon, le grain est présent tout en étant discret (exit les poussières, scories, griffures et tâches en tous genres), la photo est savamment restituée, la colorimétrie retrouve un éclat inédit et le piqué est probant. Le magnifique cadre large est conservé, la profondeur de champ fort appréciable et seuls quelques plans flous, mouvements de caméra entraînant quelques pertes de la définition et des visages légèrement rosés empêchent d’attribuer la note maximale. Néanmoins, l’encodage AVC demeure solide, la gestion des noirs impeccable, la propreté exceptionnelle et le niveau de détails impressionnant. L’Homme qui venait d’ailleurs qui affiche déjà quarante ans au compteur peut se targuer d’un lifting de premier ordre et d’un transfert d’une folle élégance.

L’encodage DTS-HD Master Audio Stéréo anglais, seule piste disponible sur cette édition, donne un nouveau coffre à la bande originale. Les voix sont claires, les ambiances annexes dynamiques et le confort acoustique largement assuré. Ce mixage est propre et aucun souffle n’est constaté. Les sous-titres français ne sont pas imposés.

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Crédits images : Potemkine Films