Test DVD / Le Tableau volé, réalisé par Pascal Bonitzer

LE TABLEAU VOLÉ réalisé par Pascal Bonitzer, disponible en DVD & Blu-ray le 3 septembre 2024 chez Pyramide Vidéo.

Acteurs : Alex Lutz, Léa Drucker, Nora Hamzawi, Louise Chevillotte, Arcadi Radeff, Laurence Côte, Alain Chamfort, Céline Karter…

Scénario : Pascal Bonitzer

Photographie : Pierre Milon

Musique : Alexei Aigui

Durée : 1h28

Date de sortie initiale : 2024

LE FILM

André Masson, commissaire-priseur dans la célèbre maison de ventes Scottie’s, reçoit un jour un courrier selon lequel une toile d’Egon Schiele aurait été découverte à Mulhouse chez un jeune ouvrier. Très sceptique, il se rend sur place et doit se rendre à l’évidence : le tableau est authentique, un chef-d’œuvre disparu depuis 1939, spolié par les nazis. André voit dans cet événement le sommet de sa carrière, mais c’est aussi le début d’un combat qui pourrait la mettre en péril. Heureusement, il va être aidé par son ex-épouse et collègue Bertina, et par sa fantasque stagiaire Aurore…

Quasiment dix ans après Tout de suite maintenant, Pascal Bonitzer aborde un nouvel « univers », celui du marché de l’art, autre monde peuplé de requins, comme celui de la finance. Désireux de saisir l’esprit d’une époque dans chacun de ses films, le réalisateur et prolifique scénariste (chez Raoul Ruiz, André Téchiné, Barbet Schroeder, Jacques Rivette, Chantal Akerman, Benoît Jacquot, Jacques Deray, Anne Fontaine et Pascal Thomas), s’il s’était permis une petite parenthèse quasi-inclassable dans sa filmographie avec le superbe Les Envoûtés en 2019, dirige de formidables comédiens et s’inspire cette fois d’une histoire vraie. Celle liée aux Tournesols fanés, oeuvre réalisée par Egon Schiele en 1914 et inspirée des Tournesols de Vincent van Gogh (que le peintre avait découvert en 1906), tableau disparu en 1942, qui a miraculeusement fait sa réapparition en 2003 dans le pavillon d’un jeune ouvrier chimiste de la banlieue de Mulhouse. Celui-ci devait être ensuite vendu en 2005 pour la coquette somme de 17 millions d’euros. Cependant, si le sujet est forcément passionnant, Le Tableau volé n’a pas le même charme que le précédent, et encore moins de Cherchez Hortense (2012) et de Tout de suite maintenant (2015). En éclatant sa distribution, le cinéaste part un peu dans tous les sens et les fils ont parfois du mal à se rejoindre, quand bien même les personnages sont tous bien écrits et dépeints. Mais Pascal Bonitzer n’a cette fois pas bénéficié du concours d’Agnès de Sacy au scénario, contrairement à ses trois derniers longs-métrages, et cela se ressent à plusieurs reprises. Comme en cuisine, il manque à l’ensemble un « appareil » pour consolider le tout, assez lâche, même si les ingrédients sont quand même bon en bouche. Le cinéma de Pascal Bonitzer demeure une valeur sûre.

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Test DVD / 14 jours pour aller mieux, réalisé par Édouard Pluvieux

14 JOURS POUR ALLER MIEUX réalisé par Édouard Pluvieux, disponible en DVD le 10 juillet 2024 chez Wild Side Vidéo.

Acteurs : Maxime Gasteuil, Romain Lancry, Lionel Abelanski, Estéban, Michel Boujenah, Nader Boussandel, Zabou Breitman, Chantal Lauby…

Scénario : Édouard Pluvieux, Lionel Dutemple & Maxime Gasteuil, d’après une histoire originale de Maxime Gasteuil & Benjamin Demay

Photographie : Laurent Brunet

Musique : Olivier Coursier & Audrey Ismaely

Durée : 1h32

Date de sortie initiale : 2024

LE FILM

Maxime, cadre ambitieux et cartésien, ne pense qu’à sa carrière et à son futur mariage avec Nadège, la fille de son patron. Au bord du burn-out, seul à ne pas s’en rendre compte, il se retrouve embarqué par son futur beau-frère Romain au beau milieu de son pire cauchemar… Un stage de bien-être encadré par Clara et Luc, un couple de « clairvoyants », avec des stagiaires plus lunaires les uns que les autres. 14 jours pour aller mieux, au cours desquels ses principes et préjugés vont être soumis au régime zénitude et bienveillance !

L’auteur de ces mots ne connaissait pour ainsi dire pas Maxime Gasteuil, humoriste avoisinant le million de followers sur Instagram et dont il avait eu vent tout de même d’un sketch (réussi) sur les prénoms que les bobos parisiens donnent à leurs enfants. Il accède ici au haut de l’affiche, après avoir fait quelques panouilles au cinéma dans Love Addict de Frank Bellocq, Mon bébé de Lisa Azuelos, Andy de Julien Weill, La Vie pour de vrai de Dany Boon ou bien encore Les SEGPA au ski d’Ali et Hakim Bougheraba. Maxime Gasteuil est un nom qui tourne, dont on entend parler. Après la télévision (La Petite histoire de France, D’argent et de sang), le voilà qu’il débarque sur grand écran, avec un projet monté sur ses épaules, dont il a eu l’idée et pour lequel il a coécrit le scénario avec Lionel Dutemple (Les Cadors, Brillantissime), Olivier Ducray (Et plus si affinités, Jumeaux mais pas trop), sans oublier Edouard Pluvieux, ce dernier signant également la mise en scène de 14 jours pour aller mieux. Complice de Kev Adams, dont il a réalisé Amis publics et la série Super High (ainsi que divers spectacles), Edouard Pluvieux livre un travail honnête derrière la caméra, même s’il se contente de suivre efficacement l’abattage de son épatante troupe de comédiens, menés par le dit Maxime Gasteuil. Si ce dernier manque indéniablement de charisme, il reste amusant, sympathique et attachant dans le rôle principal de 14 jours pour aller mieux, mais se laisse systématiquement voler la vedette par ses camarades de jeu, en premier lieu Zabou Breitman, explosive en clairvoyante à qui on ne le fait pas (et pour cause, puisqu’elle devine tout), et Romain Lancry, visage récurrent aux côtés du Palmashow, vu dans Taxi 5, Demi-sœurs, Les Crevettes pailletées (et sa suite) et 10 jours encore sans maman, hilarant dans le rôle du futur beau-frère de Maxime. Les scénaristes prennent pour cible les stages de bien-être et de développement personnel, cible ô combien facile et qui sont des blagues à part entière. Pourtant, 14 jours pour aller mieux s’inspire de ce que les auteurs ont pu vivre ou connaître en se rendant à ce genre de rencontres. Le film part alors dans tous les sens, enchaîne les petits numéros sans véritable rythme, mais avec un sens du joyeux bordel généralisé où Maxime Gasteuil a cette élégance de ne jamais tirer la couverture. Quelques bons mots, des moments drôles aussi bien sûr, mais typiquement le genre de comédie qui s’autodétruit instantanément après visionnage.

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Test DVD / Et plus si affinités, réalisé par Olivier Ducray & Wilfried Méance

ET PLUS SI AFFINITÉS réalisé par Olivier Ducray & Wilfried Méance, disponible en DVD le 7 août 2024 chez Wild Side Video.

Acteurs : Isabelle Carré, Bernard Campan, Pablo Pauly, Julia Faure…

Scénario : Olivier Ducray, Wilfried Méance & Jean-Paul Bathany, d’après le scénario original de Cesc Gay

Photographie : Stéphan Méance

Musique : Alexis Rault

Durée : 1h13

Date de sortie initiale: 2024

LE FILM

Usé par vingt-cinq ans de vie commune, le couple formé par Xavier et Sophie semble à bout de souffle. Et le moins que l’on puisse dire c’est que l’idée de Sophie d’inviter à dîner leurs voisins, Adèle et Alban, n’enchante pas Xavier. Il reproche à ce couple, visiblement très amoureux, son manque de discrétion, surtout la nuit ! Au contact de ces voisins aux mœurs débridées, Xavier et Sophie vont devoir se confronter à leur réalité, avant d’être poussés dans leur retranchement par une proposition quelque peu… indécente.

Indiquer sur une affiche de cinéma qu’un film a été « le coup de coeur du Festival international du film de comédie de l’Alpe d’Huez » n’est certainement pas vendeur auprès du public. Ainsi, après le four monumental rencontré par 38°5 quai des Orfèvres de Benjamin Lehrer, Et plus si affinités d’Olivier Ducray et Wilfried Meance n’a guère traîné les spectateurs dans les salles à sa sortie et ce malgré le double prix d’interprétation remporté au festival en question, sans oublier le Prix du public et le Prix spécial du jury. Il faut dire que cette comédie, par ailleurs remake de Sentimental, film espagnol réalisé par Cesc Gay, ne fonctionne absolument pas, en raison de personnages détestables, méprisants, sectaires et mesquins, nullement sympathiques et qui apparaissent d’emblée antipathiques. Les acteurs font ce qu’ils peuvent, en premier lieu Isabelle Carré et Bernard Campan, dans leur troisième collaboration après Se souvenir des belles choses de Zabou Breitman et La Dégustation d’Ivan Calbérac (qu’ils avaient aussi joué sur scène), mais rien n’y fait, on se désintéresse quasiment instantanément du sort de Xavier et de Sophie, petits bourgeois enfermés dans leur petite vie et leur 100m² (au bas mot) dans un beau quartier de la capitale. Mais c’était sans compter sur la rencontre avec un couple de voisins chauds comme la b(r)aise, devant lesquels ils vont enfin se rendre à l’évidence, ils s’ennuient à fond, chacun de leur côté et ils ne sont plus que l’ombre de ce qu’ils étaient. Olivier Ducray et Wilfried Méance, en collaboration avec Jean-Paul Bathany présentent un homme et une femme dont l’aigreur a eu raison de leurs rêves, espoirs, fantasmes, qui vivent cloîtrés entre quatre murs, en apnée. Et plus si affinités est un huis clos qui ne laisse justement jamais respirer ses protagonistes et encore moins les spectateurs (un ou deux plans en extérieur, le même d’ailleurs, histoire d’aérer un peu), qui trouvent le temps long malgré la très courte durée du film (73 minutes, générique de fin compris) et qui n’a de cesse de s’enliser au fil d’un récit extrêmement maladroit et surtout mal écrit.

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Test DVD / N’avoue jamais, réalisé par Ivan Calbérac

N’AVOUE JAMAIS réalisé par Ivan Calbérac, disponible en DVD le 28 août 2024 chez Wild Side Video.

Acteurs : André Dussollier, Sabine Azéma, Thierry Lhermitte, Joséphine de Meaux, Sébastien Chassagne, Gaël Giraudeau, Michel Boujenah, Céline Esperin, Frédéric Deleersnyder

Scénario : Ivan Calbérac

Photographie : Philippe Guilbert

Musique : Laurent Aknin

Durée : 1h31

Date de sortie initiale: 2024

LE FILM

Après 50 ans de mariage, François Marsault, général à la retraite, est encore fou amoureux d’Annie, sa femme. Lorsqu’il découvre qu’elle l’a trompé 40 ans plus tôt, son sang ne fait qu’un tour. Afin de laver son honneur, une seule solution : la quitter et partir manu militari retrouver Boris, l’ancien amant, pour lui casser la figure. Mais à son âge, l’affaire n’est pas si simple…

Ils forment l’un des couples (ou tandems) les plus connus du cinéma français, à l’écran si cela est nécessaire de le préciser. Au cours de ces quarante dernières années, André Dussollier et Sabine Azéma ont partagé la même affiche plus de dix fois, de Tanguy (et sa suite mal aimée) aux Herbes folles, en passant par La Chambre des Officiers, Coeurs, Aimer, boire et chanter…Avec N’avoue jamais, nous ne sommes sûrement pas chez Alain Resnais, qui les a souvent réunis à l’écran, mais cela n’empêche pas les deux comédiens de s’amuser à fond dans ce vaudeville réalisé par Ivan Calbérac (lauréat du Molière de la meilleure comédie 2019 avec La Dégustation), comédie de boulevard que l’on pourrait très bien imaginer être jouée sur une scène, mais qui bénéficie ici de superbes décors naturels et donc d’une respiration bienvenue. Le duo est évidemment parfait, leur alchimie fait le sel de N’avoue jamais, même s’ils sont excellemment entourés par une distribution aux petits oignons. Tout le monde (y compris le public, heureusement) se délectent de dialogues vachards, finement ciselés à leur attention et quand bien même on pourrait critiquer de grandes et grosses facilités d’écriture, on passe un très bon moment devant ce spectacle très frais, bourré d’énergie (contagieuse), qui a su attirer près de 600.000 spectateurs à sa sortie.

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Test DVD / Quelques jours pas plus, réalisé par Julie Navarro

QUELQUES JOURS PAS PLUS réalisé par Julie Navarro, disponible en DVD le 7 août 2024 chez M6 Vidéo.

Acteurs : Benjamin Biolay, Camille Cottin, Amrullah Safi, Makita Samba, Saadia Bentaïeb, Loula Bartilla Besse, Olivier Charasson, Andranic Manet, Hippolyte Girardot…

Scénario :Julie Navarro et Marc Salbert, d’après le roman de ce dernier, De l’influence du lancer de minibar sur l’engagement humanitaire

Photographie : Sylvestre Dedise

Musique : Arnaud Rebotini

Durée : 1h39

Date de sortie initiale : 2024

LE FILM

Arthur Berthier, critique rock relégué aux informations générales après avoir saccagé une chambre d’hôtel, découvre que le journalisme est un sport de combat. Envoyé à l’hôpital par un CRS en couvrant l’évacuation d’un camp de migrants, il tombe sous le charme de Mathilde, la responsable de l’association Solidarité Exilés et accepte, pour quelques jours croit-il, d’héberger Daoud, un jeune Afghan.

Oui bon d’accord, le cinéma français bien-pensant blabla, les bobos de cinquante piges, les écouteurs vissés sur les oreilles en train d’écouter The Kinks ou The Zombies, confortablement installés dans leur 50m² à Barbès (car ils aiment le melting-pot), en train de découvrir le monde (les migrants quoi), qui se découvrent une âme de militant (par hasard, après avoir reçu un coup sur la tronche ici) et qui décident (malgré eux) de recueillir un demandeur d’asile. C’est Quelques jours pas plus, premier long-métrage écrit et réalisé par Julie Navarro, ancienne assistante de Véra Belmont, Jean-François Davy, Jean-Marc Vallée et ancienne directrice de la distribution (sur La Science des rêves, Mariage à Mendoza, Hippocrate, Médecin de campagne…). Cependant, si le pitch peut effectivement faire peur, Quelques jours pas plus est une première œuvre extrêmement attachante et contre toute attente, on suit le cheminement de son protagoniste, critique musical qui commence à avoir de la bouteille et qui semble revenu de tout, qui se retrouve embringué dans le quotidien d’une association caritative, spécialisée dans l’accueil des migrants et réfugiés à Paris. Ce dernier est en outre interprété par Benjamin Biolay, qui mine de rien s’est construit une vraie filmographie depuis une quinzaine d’années. Depuis ses débuts devant la caméra de Vincent Dietschy (dans Didine), l’interprète multi-récompensé de Comment est ta peine ? n’a eu de cesse d’enchaîner les rôles (une bonne cinquantaine désormais), en prenant petit à petit une véritable épaisseur et un charisme qui s’est encore plus sculpté avec les années. Après Pourquoi tu pleures ? de Katia Lewkowicz, Personal Shopper d’Olivier Assayas, Irréprochable de Sébastien Marnier, Les Apparences de Marc Fitoussi (pour ne citer que ceux-là), Benjamin Biolay trouve incontestablement l’un de ses meilleurs personnages dans Quelques jours pas plus (adaptation du roman de Marc Salbert, compagnon de la metteuse en scène, dénommé De l’Influence du lancer de minibar sur l’engagement humanitaire publié en 2015 sous Le Dilettante), dans lequel il est criant de vérité. Un joli film sincère, émouvant, drôle aussi, à la frontière du documentaire, qui ne tombe pas dans le piège du message enfoncé à coups de marteau dans le crâne des spectateurs, mais qui lui expose des faits, sans en rajouter. Une belle découverte.

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Test Blu-ray / Boulevard, réalisé par Julien Duvivier

BOULEVARD réalisé par Julien Duvivier, disponible en Combo Blu-ray + DVD Edition limitée le 26 juin 2024 chez Pathé.

Acteurs : Jean-Pierre Léaud, Monique Brienne, Magali Noël, Pierre Mondy, Jacques Duby, Robert Pizani, Julien Verdier, Georges Adet…

Scénario : Julien Duvivier & René Barjavel, d’après le roman de Robert Sabatier

Photographie : Roger Dormoy

Musique : Jean Yatove

Durée : 1h37

Date de sortie initiale : 1960

LE FILM

Jojo a été abandonné par son père qui a refait sa vie avec une mégère abusive. II habite tout seul dans une chambre du 6e étage et s’efforce, vis-à-vis des voisins, de ne pas avoir l’air abandonné. Pour cela, il joue au dur, méprise la gentille Marietta dont les parents le reçoivent souvent pour compléter sa maigre pitance, et préfère son autre voisin, l’artiste, ou bien la danseuse de strip-tease Jenny, qu’il épie par le trou de la serrure et voudrait bien approcher de plus près. Plusieurs tentatives pour gagner sa vie lui confirmeront que le monde des adultes n’est pas tendre. Il parvient à se faire un peu d’argent en vendant des illustrés et prépare une petite fête en rapportant quelques bouteilles chez Jenny. Celle-ci le traitera plutôt maternellement, réservant ses faveurs au boxeur Dicky qu’elle entretient aveuglément.

À l’occasion de la sortie en Blu-ray de Marie-Octobre, du Diable et les 10 commandements et de La Femme et le Pantin, nous sommes déjà revenus longuement sur la longue, prolifique et éclatante carrière de Julien Duvivier (1896-1967). Pour y situer Boulevard, disons qu’il s’agit d’un de ses derniers films, puisque le réalisateur ne signera plus que quatre longs-métrages après celui-ci. Boulevard, c’est comme qui dirait la rencontre entre le cinéma classique et le septième art moderne représenté par l’arrivée mouvementée de la Nouvelle vague. Ou quand un cinéaste estimé (dont les œuvres ont attiré pas loin de 60 millions de spectateurs dans les salles) dirige la star des Quatre Cents Coups de François Truffaut, Jean-Pierre Léaud, alors âgé de 16 ans. Le jeune comédien apporte avec lui une vérité (24 images par seconde) et Boulevard n’est d’ailleurs pas dépourvu d’une réalité documentaire, notamment quand Julien Duvivier rend compte du Paris de l’époque, en posant sa caméra entre Pigalle et la place de Clichy, pas loin de Montmartre. S’il reconstitue admirablement un immeuble en studio grâce au savoir-faire du décorateur Robert Bouladoux (Le Monocle rit jaune, 125 rue Montmartre, Le Sang à la tête), pour des facilités de tournage, nombreuses sont les images capturées dans la rue qui restent en mémoire après le visionnage, où l’on aperçoit des cinémas disparus depuis belle lurette (avec à l’affiche Recours en grâce de László Benedek ou L’Amérique insolite de François Reichenbach, ce qui date les prises de vue autour de mai-juin 1960), des night-clubs devenus des sex-shops ou des peep-shows, des primeurs ayant laissé place à des Monoprix, ou des pharmacies…qui le sont encore aujourd’hui. Au-delà de ce témoignage d’un présent qui s’est volatilisé et dont plus rien ou presque ne subsiste, Boulevard est le portrait dressé d’un adolescent pour ainsi dire comme les autres, car si les époques changent, les êtres humains demeurent les mêmes et le film de Julien Duvivier rend compte de ce premier carrefour d’une existence, quand un adolescent se retrouve bloqué entre l’enfance et le monde adulte. Un sujet ô combien éternel et universel.

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Test DVD / Daaaaaalí !, réalisé par Quentin Dupieux

DAAAAAALÍ! réalisé par Quentin Dupieux, disponible en DVD et Blu-ray le 18 juin 2024 chez Diaphana.

Acteurs : Anaïs Demoustier, Edouard Baer, Jonathan Cohen, Pio Marmaï, Gilles Lellouche, Didier Flamand, Romain Duris, Agnès Hurstel…

Scénario : Quentin Dupieux

Photographie : Quentin Dupieux

Musique : Thomas Bangalter

Durée : 1h14

Date de sortie initiale : 2024

LE FILM

Une journaliste française rencontre Salvador Dali à plusieurs reprises pour un projet de documentaire.

Daaaaaalí !, avec six o s’il vous plaît, c’est important car il y en a autant que d’interprètes qui incarnent Salvador Dalí (1904-1989) à l’écran dans le douzième long-métrage du prolifique Quentin Dupieux. Six mois après le succès de Yannick (deux fois nommé aux César) et trois mois avant celui du Deuxième acte (pour l’instant son plus gros hit au box-office), le réalisateur présentait Daaaaaalí !, qui avait connu une avant-première à la Mostra de Venise l’année précédente, avant sa sortie en salles début 2024 où il allait lui aussi rencontrer un large public avec plus de 480.000 spectateurs. Un personnage qui revenait de droit à Quentin Dupieux, c’est ce qu’on se dit après les 75 minutes de ce film complètement fou, bourré d’imagination, qui va au bout de son concept et propose surtout aux spectateurs une expérience unique comme seul le cinéma peut offrir. Jouant avec l’espace et le temps, le réel et l’imaginaire, en imbriquant les arts, le cinéaste jongle avec toutes les possibilités, ne se refuse rien, essaye, tente, fonce, réussit les trois quarts du temps ce qu’il entreprend, avec une virtuosité de chaque instant et tout cela en livrant un fabuleux portrait du peintre, sculpteur, graveur, scénariste et écrivain espagnol, représentant du surréalisme et fou chocolat Lanvin. L’un des indispensables de 2024.

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Test DVD / Les SEGPA au ski, réalisé par Ali & Hakim Bougheraba

LES SEGPA AU SKI par Ali & Hakim Bougheraba , disponible en DVD le 1er mai 2024 chez Apollo Films.

Acteurs : Moussa Maaskri, Fauve Hautot, Redouane Bougheraba, Ichem Bougheraba, Maxime Gasteuil, Camille Damour, Issa Doumbia, Emma Smet…

Scénario : Ali Bougheraba, Hakim Boughéraba & Ichem Bougheraba

Photographie : Lubomir Bakchev & Fabrice Sébille

Musique : Maxime Desprez & Michaël Tordjman

Durée : 1h37

Date de sortie initiale : 2023

LE FILM

Les Segpa se retrouvent pour une nouvelle année scolaire riche en aventures, propulsés directement en Terminale. Deux challenges majeurs les attendent : la réussite de leur bac et leur participation soudaine aux Olympiades d’hiver inter-lycées.

Attendez une minute…c’est quoi une classe SEGPA ? Selon le site Service-Public.fr, « Segpa : Section d’enseignement général et professionnel adapté, qui accueille les jeunes de la 6e à la 3e présentant des difficultés scolaires importantes. Il s’agit de difficultés ne pouvant pas être résolues par des actions d’aide scolaire et de soutien. La classe est intégrée dans un collège. Elle regroupe un petit groupe d’élèves (16 maximum) pour individualiser le parcours de chacun. La Segpa doit permettre à votre enfant d’accéder à une formation professionnelle diplômante ou à la poursuite de ses études après la 3». Pour les autres, encore mieux informés, Les SEGPA est à la base une web-série à succès créée en 2016 par Hakim Bougheraba et Ichem Boogy et disponible sur Youtube. 2022, l’équipe décide de décliner leur univers au cinéma, le tout produit (entre autres) par Cyril Hanouna, qui a eu du pif (et pas que pour sniffer cette fois). Résultat des courses, plus de 700.000 spectateurs (peut-être 699.999 entrées à Marseille et une à Paris, Hanouna sans doute) et un très bon bouche-à-oreille, ce qui forcément donné envie de mettre très vite une suite en chantier après ce succès. Rebelote, non seulement Les SEGPA au ski a connu le même engouement, mais ce second opus a même doublé le score du premier ! Une affaire on ne peut plus lucrative. Disons-le d’emblée, c’est une surprise. Nous sommes loin des deux immondes Déguns, qui avaient connu la même trajectoire (adaptation d’une web-série sur grand écran, un succès, encore plus pour le second), Marseille en toile de fond) et la mise en scène est ici plus soignée. Ensuite, la bande d’acteurs est on ne peut plus sympathique et l’on s’étonne de vouloir les suivre dans leurs aventures qui lorgne plus du côté des Sous-doués de Claude Zidi que des Profs de Pierre-François Martin-Laval. Entre le naturel d’Ichem Bougheraba et la fraîcheur d’Emma Smet (petite-fille de Johnny et fille de David), le bagou de la troupe, les quelques caméos dispersés tout du long et des seconds personnages très amusants, Les SEGPA donnait envie de les retrouver et c’est là qu’apparaît Les SEGPA au ski. Si celui-ci est moins réussi que le précédent, pas mal de gags fonctionnent malgré tout et cette suite directe ne se moque pas des spectateurs en leur offrant tout ce qui leur avait plu dans l’autre chapitre. Et pourquoi pas un troisième volet ?

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Test Blu-ray / Un été en Louisiane, réalisé par Robert Mulligan

UN ÉTÉ EN LOUISIANE (The Man in the Moon) réalisé par Robert Mulligan, disponible en Combo Blu-ray + DVD le 4 juin 2024 chez Rimini Editions.

Acteurs : Sam Waterston, Tess Harper, Reese Witherspoon, Emily Warfield, Jason London, Gail Strickland, Bentley Mitchum, Ernie Lively…

Scénario : Jenny Wingfield

Photographie : Freddie Francis

Musique : James Newton Howard

Durée : 1h39

Année de sortie : 1991

LE FILM

La Louisiane dans les années cinquante. Dani Trant, quatorze ans, connaît ses premiers émois amoureux et s’enferme des heures entières en compagnie de son disque favori Loving you du King. C’est alors qu’un beau jeune homme de dix-sept ans arrive dans la propriété voisine. Dani commence par le dédaigner puis en tombe amoureuse. Mais il y a Maureen, sa grande soeur, coqueluche des garçons du pays, qui ne laisse pas le jeune homme indifférent.

Un été en LousianeThe Man in the Moon est le dernier long-métrage de Robert Mulligan (1925-2008), réalisateur ô combien estimé des cinéphiles, à qui l’on doit les légendaires Du silence et des ombres To Kill a Mockingbird (1962), trois Oscars, d’après le roman d’Harper Lee, Un été 42 Summer of ’42 (1971) et L’Autre The Other (1972). Assurément un cinéaste à réhabiliter, comme l’ont prouvé ses films ressortis ces dernières années, Le Sillage de la violence Baby the Rain Must Fall (1965) avec Steve McQueen, Le Roi des imposteurs The Great Impostor (1960), qui a largement influencé Arrête moi si tu peux Catch me if you can (2002) de Steven Spielberg, Les Rendez-vous de septembre Come Septembre (1961) et L’Homme de BornéoThe Spiral Road (1962), tous les deux avec Rock Hudson. Il clôt sa prestigieuse carrière au début des années 1990 avec un ultime portrait d’une jeune adolescente (âge souvent central dans l’oeuvre du metteur en scène), interprétée par Reese Witherspoon, dans sa première apparition au cinéma, qui obtient le premier rôle alors qu’elle envisageait juste d’apparaître comme figurante. Sur un scénario de Jenny Wingfield, inconnu au bataillon et dont la filmographie demeure obscure, Robert Mulligan signe un bijou intemporel sur les premiers émois amoureux (et les premiers baisers, après s’être exercé avec la main), l’éveil sexuel, la solitude, l’incompréhension des êtres arrivés au premier carrefour de leur existence, celui de l’entrée dans le monde adulte, l’adieu à l’enfance, les responsabilités, les échecs, les désillusions, l’injustice, la jalousie…et la première confrontation à la mort et au deuil. Éminemment solaire, à l’image de sa jeune comédienne âgée de 14 ans et qui reste d’ailleurs aujourd’hui l’une des actrices (et grande productrice) les plus pétillantes du cinéma hollywoodien, Un été en Louisiane, production Mark Rydell (The Rose, La Maison du lac), est un cadeau pour les passionnés de septième art doublé d’un film testament.

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Test Blu-ray / Sois belle et tais-toi!, réalisé par Marc Allégret

SOIS BELLE ET TAIS-TOI! réalisé par Marc Allégret, disponible en DVD & Blu-ray le 17 mai 2024 chez Coin de Mire Cinéma.

Acteurs : Mylène Demongeot, Henri Vidal, Jean-Paul Belmondo, Robert Dalban, Alain Delon, Roger Hanin, Darry Cowl…

Scénario : Marc Allégret, Gabriel Arout, William Benjamin, Odette Joyeux & Jean Marsan Roger Vadim

Photographie : Armand Thirard

Musique : Jean Wiener

Durée : 1h40

Date de sortie initiale : 1958

LE FILM

Virginie a 20 ans et une langue bien pendue. Elle est belle et en est à sa troisième évasion d’une Maison d’Éducation. Jean est un jeune inspecteur de Police, actuellement à la recherche de gangsters ayant attaqué une bijouterie de la place Vendôme. Mais le malheur fait qu’au cours de son enquête, Jean prend Virginie pour une complice de la bande, tandis que Virginie prend Jean pour un de ces prestigieux seigneurs du milieu. Et voilà la jolie délinquante éprise d’un flic.

C’est ce qui s’appelle avoir du pif. Parce-que pour réunir Mylène Demongeot, Alain Delon et Jean-Paul Belmondo dans un même film alors que ceux-ci n’avaient pas fait grand-chose, on peut dire que Marc Allégret a senti que ces trois jeunes comédiens âgés d’une vingtaine d’années étaient non seulement charismatiques, mais aussi prometteurs. Sois belle et tais-toi ! (ne vous énervez pas, il s’agit du titre) est une charmante comédie-policière qui aurait peut-être disparu des radars, si Bebel et Delon n’avaient pas été associés pour la première fois au cinéma. S’ils n’ont pas de rôles majeurs dans cette histoire, on ne peut s’empêcher d’admirer leur naturel, leur bagou, leur énergie contagieuse. Mais la « star » est ici Mylène Demongeot, que le réalisateur avait déjà fait tourner trois ans plus tôt dans Futures vedettes, dans lequel elle ne faisait d’ailleurs qu’une apparition et était même créditée Marielle Demongeot au générique. Sortant du succès des Sorcières de Salem de Raymond Rouleau, où elle était parvenue à s’imposer face à Yves Montand et Simone Signoret, l’actrice passe la vitesse supérieure et se retrouve au générique de Bonjour tristesse d’Otto Preminger et en tête d’affiche de Sois belle et tais-toi !. Si elle n’a jamais brillé par son jeu et son phrasé quelque peu monocorde, on ne pourra pas reprocher à Mylène Demongeot de crever l’écran de sa beauté diaphane dans le film de Marc Allégret, où le couple qu’elle forme avec Henri Vidal fonctionne bien, malgré leur différence d’âge. Un spectacle « gentillet », complètement inoffensif et désuet, sympathique et divertissant.

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