LES LONGS JOURS DE LA VENGEANCE (I lunghi giorni della vendetta (Faccia d’angelo)) réalisé par Florestano Vancini, disponible en Combo Blu-ray + DVD le 5 septembre 2023 chez Artus Films.
Acteurs : Giuliano Gemma, Conrado San Martín, Francisco Rabal, Nieves Navarro, Gabriella Giorgelli, Manuel Muñiz, Pedro Basauri ‘Pedrucho’, Carlos Otero…
Scénario : Fernando Di Leo & Augusto Caminito
Photographie : Francisco Marín
Musique : Armando Trovajoli
Durée : 1h57
Date de sortie initiale : 1967
LE FILM
Injustement accusé de meurtre, Ted Barnett purge sa peine dans un bagne. Une nuit, il parvient à s’évader. Ils sont nombreux à trembler en apprenant la nouvelle de son évasion : le shérif Douglas, le trafiquant d’armes Cobb, et surtout sa fiancée, qui a épousé Douglas lors de la condamnation de Ted…
Que voilà un western de très grande classe ! Les Longs Jours de la vengeance ou I lunghi giorni della vendetta, un titre qui claque aussi bien en français qu’en italien, le seul film du genre mis en scène par Florestano Vancini (1926-2008). Ce dernier commence comme assistant de Mario Soldati (La Fille du fleuve – La Donna del fiume) et de Valeri Zurlini sur le somptueux Été violent – Estate violenta, avant de voler très vite lui-même de ses propres ailes. Après divers courts-métrages documentaires dans les années 1950, il réalise La Longue nuit de 43 – La lunga notte del ’43 (1960) et La Bande Casaroli (1962), dans lequel il dirige rien de moins que Renato Salvatori, Jean-Claude Brialy, Tomás Milián et Gabriele Tinti, puis deux drames La Vie ardente – La Calda vita (avec la sublime Catherine Spaak) et Les Saisons de notre amour – Le stagioni del nostro amore (Prix de la critique internationale FIPRESCI au Festival de Berlin). Puis, il accepte un projet moins personnel, en l’occurrence Les Longs Jours de la vengeance, qu’il signera d’ailleurs sous le pseudonyme de Stan Vance. Si le générique indique “une histoire originale de Mahnahén Velasco”, il s’agit en réalité d’un stratagème pour justifier la co-production italo-espagnole. Le scénario, inspiré par Le Comte de Monte-Cristo, est imputable à Augusto Caminito (futur producteur de The King of New York d’Abel Ferrara, auteur de La Victime désignée – La Vittima designata de Maurizio Lucidi) et Fernando Di Leo (Avoir vingt ans, Colère noire). Les Longs Jours de la vengeance est un divertissement haut de gamme doublé d’un très bel objet de cinéma, qui plus est très rare. Alors précipitez-vous dessus.
Camp de travaux forcés, des prisonniers cassent les cailloux sous le soleil du Texas. L’un d’eux parvient à se munir d’une mèche de canon qu’il passe à un autre, qui une fois les prisonniers enfermés dans leur cellule, et les gardes dans leur casemate, allume la mèche et pulvérise à coup de canon le mur de la prison. Les deux hommes s’échappent en prenant un chacun un cheval. Mais l’un d’eux est tué d’une balle. Très vite la nouvelle de l’évasion de Ted Barnett affole un certain Cobb et son bras droit Gomez. Ce dernier décide d’envoyer quatre assassins à la rencontre de l’évadé et lui faire la peau…
Giuliano Gemma a le vent en poupe depuis le triomphe d’Un pistolet pour Ringo – Una pistola per Ringo de Duccio Tessari. qu’il retrouvera immédiatement après pour Le Retour de Ringo – Il ritorno di Ringo et Très honorable correspondant – Kiss Kiss… Bang Bang. Les Longs Jours de la vengeance est la première de ses trois collaborations avec Florestano Vancini, avec le drame psychologique La Partenaire – Violenza al sole (1969) et La Baraonda (1981). Mais alors que le western est un genre que le comédien connaît sur le bout des doigts, il s’agira de l’unique coup d’essai du cinéaste dans le genre. Dommage, car il s’agit d’un vrai coup de maître. Metteur en scène rigoureux, pour ne pas dire intellectuel rigoriste, Florestano Vancini prend le western à bras le corps et soigne chaque scène, chaque plan comme un tableau, épaulé en cela par le directeur de la photographie Francisco Marín (Trois pour un massacre de Giulio Petroni, El Texican de Lesley Selander, Les Cent Cavaliers de Vittorio Cottafavi).
Outre Giuliano Gemma, comme d’habitude parfait, monstre de charisme (même si son visage n’apparaît qu’au bout de 25 minutes) et très impliqué dans les scènes physiques, nous retrouvons la magnifique Susan Scott, plus connue sous le nom de Nieves Navarro, qui aura marqué les passionnés du cinéma d’exploitation dans Emanuelle et les derniers cannibales de Joe d’Amato, La Mort caresse à minuit, La Mort marche en talons hauts et Photos interdites d’une bourgeoise de Luciano Ercoli (son époux et par ailleurs producteur de Les Longs Jours de la vengeance). Ce tandem est solidement soutenu par la belle Giorgelli (Les Camarades de Mario Monicelli, La ragazza di Bube de Luigi Comencini), le mythique Francisco Rabal (Sorcerer de William Friedkin, La Religieuse de Jacques Rivette, L’Éclipse de Michelangelo Antonioni) et tout un tas d’acteurs à tronches patibulaires.
Essentiellement tourné en Espagne, Les Longs Jours de la vengeance, ou Face d’ange, enchaîne les morceaux de bravoure, les poursuites, les gunfights, joue avec les nerfs des spectateurs à l’instar de cette fabuleuse séquence où Ted se fait couper les cheveux hirsutes (trois ans de bagne, ça marque) et raser la barbe, en sachant qu’il peut se faire trancher la gorge à n’importe quel moment, tandis qu’une autre menace débarque derrière lui. Florestano Vancini dilate le temps, le montage est impeccable et la tension n’a de cesse de grimper, jusqu’à l’explosion finale. Les spécialistes penseront bien sûr à la scène inaugurale de Mon nom est personne de Tonino Valerii. Autre atout majeur du film, la musique du maestro Armando Trovajoli, forcément et indéniablement inspirée par les œuvres d’Ennio Morricone, mais qui parvient à s’en démarquer et à imprimer sa marque (ce thème sera d’ailleurs réutilisé par Quentin Tarantino dans la séquence animée de Kill Bill : Volume 1) et surtout une âme au western de Florestano Vancini, désormais considéré comme l’un des meilleurs fleurons du genre.
LE COMBO BLU-RAY + DVD
Artus Films revient au Western Européen pour notre plus grand plaisir. Les deux disques sont disposés dans un Digipack à deux voltes, illustrés avec élégance, le tout glissé dans un fourreau cartonné du même style. Le menu principal est fixe et musical.
Qui dit Giuliano Gemma dit Curd Ridel ! Effectivement, Artus Films a confié à ce dernier la présentation des Longs Jours de la vengeance (24’). L’auteur d’Angèle et René, a grandi avec les films interprétés par Giuliano Gemma, qu’il voyait comme un grand frère et qu’il dessinait même (preuve à l’appui) à la fin des années 1960. Celui-ci revient donc sur la carrière de Florestano Vancini, sur le casting, la genèse du film, sa rareté et sur son accueil mitigé à sa sortie.
Nous trouvons aussi un entretien avec Sergio D’Offizi (21’), alors camera operator sur Les Longs Jours de la vengeance. Si IMDB répertorie près de 80 films à son actif comme directeur de la photographie, Sergio D’Offizi déclare avoir officié sur près de 120 films, y compris 20 comme opérateur et 21 comme assistant. Toujours est-il que cette interview regorge d’anecdotes de tournage, Sergio D’Offizi disant alors que Florestano Vancini « n’était probablement pas le réalisateur fait pour le western […] c’était un metteur en scène sérieux qui exigeait ce sérieux aux membres de son équipe de tournage […] il souffrait de l’équipe espagnole plus dissipée ». D’Offizi s’exprime ensuite sur quelques points techniques, l’utilisation de la caméra à l’épaule, le travail avec les producteurs, les acteurs et les lieux de tournage.
L’interactivité se clôt sur la bande-annonce et un Diaporama d’affiches et de photos d’exploitation.
L’Image et le son
Ce master HD restauré 2K édité par Artus Films est flatteur pour les mirettes. Tout d’abord, la colorimétrie retrouve un réel éclat, surtout sur les lumineuses séquences diurnes. La restauration est indéniable, quelques rares points et fourmillements demeurent constatables mais sont subliminaux, et même si certaines séquences sont sensiblement plus altérées, les noirs et les contrastes affichent une nouvelle densité et le piqué n’a jamais été aussi tranchant. Ajoutez à cela un grain d’origine respecté, un cadre fourmillant de détails et vous obtenez une superbe copie qui participe à la redécouverte totale de ce bijou du western. Blu-ray au format 1080p.
Seule la version originale aux sous-titres français non imposés est disponible sur cette édition. La restauration est satisfaisante, malgré un léger souffle, l’écoute est frontale, riche, dynamique et vive. Les effets annexes sont conséquents et le confort acoustique assuré.
Crédits images : © Artus Films / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr