Test Blu-ray / Flics en jeans, réalisé par Bruno Corbucci

FLICS EN JEANS (Squadra Antiscippo) réalisé par Bruno Corbucci, disponible en Combo Blu-ray + DVD le 7 septembre 2021 chez Artus Films.

Acteurs : Tomas Milian, Jack Palance, Maria Rosaria Omaggio, Guido Mannari, Jack La Cayenne, Raf Luca, Benito Stefanelli, Toni Ucci…

Scénario : Mario Amendola & Bruno Corbucci

Photographie : Sebastiano Celeste

Musique : Guido & Maurizio De Angelis

Durée : 1h29

Date de sortie initiale : 1976

LE FILM

Mal rasé et mal fringué, l’inspecteur Nico Giraldi, à la tête de son équipe de motards, fait la chasse aux truands de la ville en employant des méthodes peu orthodoxes. Alors qu’il est sur le point d’arrêter un voyou, celui-ci dérobe une mallette pleine d’argent à un gangster américain. Les voyous se font alors éliminer l’un après l’autre, ce qui va mener Giraldi à s’occuper de l’affaire.

Nous avons déjà longuement parlé du mythe Tomás Milián (1933-2017) à travers nos chroniques sur Les Tueurs de l’Ouest El precio de un hombre (1966) d’Eugenio Martín, Tire encore si tu peux Se sei vivo, spara (1967) de Giulio Questi, Liens d’amour et de sang Beatrice Cenci (1969) et La Longue nuit de l’exorcisme Non si sevizia un paperino (1972) de Lucio Fulci, Le Conseiller Il Consigliori (1973) d’Alberto De Martino, Folle à tuer (1975) d’Yves Boisset, Le Cynique, l’Infâme et le Violent Il Cinico, l’infame, il violento (1977) d’Umberto Lenzi et Les Magnats du pouvoir Winter Kills (1979) de William Richert. Un phénomène international, l’acteur se prêtant alors à tous les genres et voyageant dans tous les pays du monde. En 1975, alors qu’il est bien installé en Italie, le comédien interprète pour la première fois le rôle le plus emblématique de toute sa carrière, Nico Giraldi, un ancien voleur devenu flic, plus précisément maréchal des logis de la Brigade anti-fauche (il deviendra inspecteur au début des années 1980), officiant à Rome. Fils d’une prostituée, il décide de se ranger après plusieurs arrestations et d’utiliser ses connaissances du milieu romain et du terrain, qu’il explore avec sa bécane. Très largement inspiré par le Serpico de Sidney Lumet, dont l’affiche et les photos d’exploitation ornent d’ailleurs l’habitation du personnage et qui possède un rat baptisé du même nom, Nico Giraldi arbore un vieux bonnet de laine élimé (aux couleurs du drapeau italien), une barbe pouilleuse, les cheveux longs et gras, plusieurs pulls rongés par les mites, des pantalons crasseux et des chaussettes montantes aux couleurs de l’arc-en-ciel. Cette apparence peut faire rire, mais les résultats sont là, Giraldi est le policier le plus efficace de la capitale transalpine. Au total, Tomás Milián incarnera ce personnage à onze reprises au cours de sa prolifique et éclectique carrière, autrement dit dans Flics en jeans Squadra antiscippo (1976), Un flic très spécial Squadra antifurto (1977), Nico l’arnaqueur Squadra antitruffa (1977), Brigade antimafia Squadra antimafia (1978), Brigade antigang Squadra antigangsters (1979), Meurtre sur le Tibre Assassinio sul Tevere (1979), Crime à Milan Delitto a Porta Romana (1980), Delitto al ristorante cinese (1981), Delitto sull’autostrada (1982), Crime en Formule 1 Delitto in Formula Uno (1984) et Pas folle, le flic Delitto al Blue Gay (1985). Les épisodes de cette saga de néo-polars sont tous mis en scène par Bruno Corbucci (Tire, Django, tire !) et écrits par le scénariste Mario Amendola (Furie au Missouri, Pair & impair, Salut l’ami, adieu le trésor !). Tout ce beau petit monde a donc trouvé une recette qui marche, qu’ils n’auront de cesse d’épuiser au fil des épisodes et durant une dizaine d’années. Dans Flics en jeans, nous faisons connaissance avec ce fameux Nico Giraldi, auquel l’acteur cubain prête ses traits, tandis que Ferruccio Amendola, qui doublait habituellement Tomás Milián, participe également à la création du personnage avec ce dialecte romain si particulier. Rétrospectivement, Squadra antiscippo (ou The Cop in Blue Jeans pour son exploitation internationale) est un opus bien sage de la franchise, mais vaut assurément pour la folie et l’énergie contagieuses de Tomás Milián, qui mine de rien crée un personnage iconique, ainsi que pour la participation inattendue de Jack Palance.

L’oeil vif, vêtu d’un jean délavé, coiffé d’un bonnet bariolé, Nico est un inspecteur qui ressemble plus à un voyou qu’à un policier. Pourtant, il fait des merveilles, mettant la main sur tous les criminels qui hantent les rues de Rome. Après avoir délivré une jeune femme dépouillée de ses bijoux, il se retrouve sur la piste de Baronetti, un escroc qu’il rêve de mettre derrière les barreaux. Il demande à sa nouvelle associée de s’habiller en prostituée pendant qu’il endosse le rôle d’un proxénète. Ainsi introduit dans le milieu, le duo rassemble des informations sur Baronetti…

Avis aux petits délinquants, faites attention, Nico Giraldi est dans les parages et même si vous trouvez refuge dans un immeuble, le maréchal enfourchera sa moto (aussi miraculeuse que celle de Chuck Norris dans Delta Force) pour vous poursuivre dans la cage d’escalier ! On accueille les bras ouverts cet étrange agent de l’équipe « antivol » (antiscipppo en italien), lancé ici à la recherche d’un certain Baronetti (Guido Mannari, vu dans Le Décaméron de Pier Paolo Pasolini et dans le superbe Un peu de soleil dans l’eau froide de Jacques Deray), un voleur qui parvient à échapper à la prison grâce à un alibi de fer (des troubles rénaux qui l’obligent à être hospitalisé), élaboré avec la complicité d’un cousin ambulancier. Un jour, ce Baronetti s’empare d’une mallette qui contient cinq millions de dollars. Alors qu’il décide de garder ce butin inattendu, l’un de ses compagnons est battu à mort dans un tripot. De son côté, Giraldi se concentre sur ce qui s’avère être une affaire de blanchiment d’argent menée par un diplomate américain…l’homme qui a justement été volé par Baronetti. Pas bête, notre flic habillé comme un clochard décide d’utiliser Baronetti comme appât, sachant que le propriétaire de cette importante somme d’argent voudra certainement la récupérer.

Cet individu en question est interprété par le légendaire Jack Palance (1919-2006), qui après L’Or noir de l’Oklahoma Oklahoma Crude de Stanley Kramer avait décidé de prendre le large en Europe et de s’installer en Italie. Ainsi, entre Africa Express de Michele Lupo et Voluptueuse Laura Eva nera de Joe D’Amato, l’américain tourne ce Flics en jeans, dans lequel on ne le voit que cinq minutes (à peine) durant la première heure, avant de revenir un quart d’heure avant la fin, pour finalement être doublé par un cascadeur au volant de sa voiture, puis de participer au dénouement du film. Si on ne le voit que dix minutes à tout casser dans Squadra antiscippo, sa présence au générique demeure l’un des points forts du film. De l’autre côté, le charisme animal de Tomás Milián fonctionne à plein régime. On se délecte de ses répliques fleuries du style « Toi tu dois avoir 18 ans ! » « Comment vous le savez ? » «Parce-que le fils d’un ami en a 9 et il est à moitié con », ou bien encore « Comment s’appelle ce con ? » « Il est américain ! » « Il n’y a pas de cons en Amérique ? » et bien d’autres dialogues bien sentis et déclamés avec une décontraction rafraîchissante.

Bien bourrin avec ses bastons aux bruitages qui claquent, ses poursuites (au tournage non autorisé) dans les rues de Rome et ses décors en balsa dans lesquels les petites frappes sont expédiés à coup de poing ou à coup de pied dans le fondement par un Tomás Milián déchaîné, drôle, bien rythmé et crasseux comme il le faut, Flics en jeans remplit son contrat et contentera encore largement aujourd’hui les spectateurs friands de poliziotteschi.

LE COMBO BLU-RAY + DVD

C’est la rentrée pour Artus Films et à cette occasion, le premier titre de cette vague de septembre 2021 que nous passons en revue est Flics en jeans de Bruno Corbucci. Comme à son habitude, l’éditeur nous propose ce film sous la forme d’un superbe combo Blu-ray + DVD, bien ancrés dans un Digipack à deux volets merveilleusement illustré et glissé dans un fourreau cartonné au visuel très attractif et estampillé Polar. Le menu principal est fixe et musical.

En ce qui concerne les suppléments, outre quatre bandes-annonces, dont celle de Flics en jeans, ainsi qu’un Diaporama, nous trouvons une large et efficace présentation du film qui nous intéresse aujourd’hui, par le fidèle Curd Ridel (33’). Ce dernier passera ainsi en revue la carrière de Bruno Corbucci, qui a connu de très grands succès, mais qui reste néanmoins beaucoup moins connu que son frère Sergio. Dans un second temps, l’auteur de bande dessinée et amateur de cinéma Bis évoque la genèse, les origines du personnage (et son évolution au fil des épisodes), l’histoire et le succès de la franchise Nico Giraldi, en parlant des onze films qui la composent. Puis, Curd Ridel parle de la création du personnage par Tomás Milián (sur lequel il revient aussi en énumérant plusieurs de ses films célèbres, en égratignant au passage La Luna de Bernardo Bertolucci et Identification d’une femme de Michelangelo Antonioni), auquel il a apporté ses propres vêtements (on remarquera que l’acteur arbore dans le film un chapeau sur lequel est écrit son nom), avant de se pencher sur la participation de Jack Palance et celle de Guido Mannari.

L’Image et le son

Flics en jeans est présenté dans sa version intégrale. Le film de Bruno Corbucci a été restauré en 2K. Ce nouveau lifting tente de donner une fraîcheur inédite à la photo de Sebastiano Celeste. Mais bon, soyons honnêtes, celle-ci n’a jamais été reluisante et les couleurs demeurent souvent ternes, malgré des teintes vertes qui sortent du lot. La propreté est de mise, le cadre stable, le piqué est aléatoire, quelques plans flous sont visibles et la définition chancelle à plusieurs reprises, mais ces défauts sont inhérents aux conditions de prises de vue et n’auraient pu être rectifiés. La texture argentique est préservée.

Durant le générique d’ouverture, le score (omniprésent, pour ne pas dire barbant) des frères De Angelis paraît bien sourd sur la piste française, et beaucoup plus clair (euphémisme) en version originale. Pendant le film, si l’on compare les deux options acoustiques, la VF se focalise bien trop sur les dialogues (on frôle même parfois la saturation dans les aigus) et l’on perd évidemment en naturel. En italien, même si tout a été repris en postsynchronisation, l’équilibre est plus évident entre la musique, les voix et les effets annexes. Les sous-titres français ne sont pas imposés. Notons que les deux pistes sont présentées en LPCM 2.0. et s’avèrent très propres.

Crédits images : © Artus Films / Captures DVD : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

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