Test Blu-ray / Quand la Marabunta gronde, réalisé par Byron Haskin

QUAND LA MARABUNTA GRONDE (The Naked Jungle) réalisé par Byron Haskin, disponible en Blu-ray + DVD + Livret depuis le 23 août 2024 chez Sidonis Calysta.

Acteurs : Charlton Heston, Eleanor Parker, Abraham Sofaer, William Conrad, Romo Vincent, Douglas Fowley, John Dierkes, Pilar Del Rey, Bernie Gozier, Jerry Groves.…

Scénario : Ranald MacDougall, Ben Maddow & Philip Yordan, d’après une nouvelle de Carl Stephenson

Photographie : Ernest Laszlo

Musique : Daniele Amfitheatrof

Durée : 1h32

Date de sortie initiale : 1954

LE FILM

Joanna rejoint au Brésil l’homme qu’elle a épousé dans le cadre d’un mariage arrangé. Son mari se montre très distant avec elle et ne pense qu’à s’occuper de sa plantation de cacao. D’ailleurs, il apprend un jour que des millions de Marabunta, une espèce de fourmis, sont en passe d’infester et donc de détruire son exploitation. Joanna se montre alors d’un soutien sans faille afin de trouver une solution au problème.

Quand la Marabunta grondeThe Naked Jungle a laissé de beaux et bons souvenirs à de nombreux spectateurs. Charlton Heston n’hésitait pas non plus à déclarer qu’il s’agissait de l’un des meilleurs films de son début de carrière. Passant d’un genre à l’autre, du polar (La Main qui venge) au western (Le Fils de Géronimo), du film politique (Le Général invincible) à la comédie dramatique (Sous le plus grand chapiteau du monde), le comédien aborde le registre de l’aventure avec Quand la Marabunta gronde, réalisé par Byron Haskin (1899-1984), metteur en scène, directeur de la photographie (pour Frank Borzage, Michael Curtiz, Lloyd Bacon…) et technicien de renom dans le domaine des effets spéciaux, spécialité qui lui a valu d’être nommé à plusieurs reprises aux Oscars. Il se voit confier des budgets confortables de la part de Disney (pour la première adaptation entièrement en prise de vue réelle de L’Île au trésor de Robert Louis Stevenson), mais la consécration mondiale viendra avec La Guerre des mondes The War of the Worlds, produit par George Pal, adaptation du roman de H. G. Wells, film qui fera date et qui demeure encore aujourd’hui une immense référence de la science-fiction. L’année suivante, rebelote pour le producteur et Byron Haskin, qui emmènent cette fois les spectateurs en Amérique du Sud, où un « couple » (les guillemets sont indispensables puisque cet homme et cette femme sont mariés…mais ne s’étaient jamais rencontrés) en crise, va devoir s’unir pour de bon afin de contrer l’invasion de…fourmis rouges. Celles-ci forment une marée destructrice de 30 kilomètres de long sur 3 kilomètres de large, capable d’anéantir tout sur leur passage. Mais elles n’avaient pas pensé à affronter celui qui allait incarner Moïse trois ans après, mister Heston en personne. Si beaucoup trouveront le temps long en raison de la romance contrariée du couple star qui dure au bas mot une bonne heure, les autres se délecteront de la dernière demi-heure qui remplit son contrat dans le genre film catastrophe avant l’heure. On aime ce divertissement désuet, qui offre à Charlton Heston l’occasion d’interpréter un personnage peu sympathique, froid, glacial même, brutal, misogyne…mais qu’on aime détester et auquel l’acteur apporte une réelle et intéressante ambiguïté. À (re)découvrir.

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Test Blu-ray / Sac de noeuds, réalisé par Josiane Balasko

SAC DE NOEUDS réalisé par Josiane Balasko, disponible en DVD & Blu-ray le 18 mars 2025 chez Rimini Éditions.

Acteurs : Isabelle Huppert, Josiane Balasko, Farid Chopel, Jean Carmet, Coluche, Dominique Lavanant, Michel Albertini, Daniel Russo, Jean-Pierre Coffe…

Scénario : Josiane Balasko & Jacques Audiard

Photographie : François Catonné

Musique : Gérard Blanchard & Michel Goglat

Durée : 1h28

Date de sortie initiale : 1985

LE FILM

Une vamp de banlieue se réfugie chez sa voisine, une demi-clocharde plutôt laide et suicidaire. Se croyant meurtrière de son mari policier et alcoolique qu’elle vient de mettre hors d’état de nuire, elle embarque dans son échappée sa voisine ainsi qu’un délinquant en cavale presque malgré lui…

Alors que ses amis Gérard Jugnot et Michel Blanc viennent de passer avec succès à la réalisation, avec Pinot simple flic (2,4 millions d’entrées) et Marche à l’ombre (6,1 millions de spectateurs), Josiane Balasko s’y colle à son tour avec Sac de nœuds. Moins burlesque, plus sombre et sans doute moins accessible au grand public, ce premier long-métrage témoigne d’une vraie patte au niveau de son scénario et de ses dialogues (ciselés), tout en s’inspirant ouvertement de l’univers de Bertrand Blier. Sac de nœuds est comme une synthèse digérée des Valseuses, de Buffet froid et de La Femme de mon pote, en se focalisant notamment sur la fuite en avant (et vers nulle part surtout) d’un trio original, d’inadaptés, de marginaux, de paumés, qui ne s’attendaient pas à se carapater ensemble, mais que le destin a finalement décidé de réunir. Comme l’union fait la force, Anita, Rose-Marie et Rico, vont apprendre à se supporter, à s’apprécier et même à s’aimer, tout en fonçant à vive allure vers la Creuse. Sac de nœuds n’est pas une comédie comme les autres. On peut même dire qu’il s’agit souvent d’un drame, teinté de mélancolie, de crasse aussi, puisque les personnages ne sont guère reluisants, cabossés par l’existence, qui n’a guère été sympa avec eux jusqu’à présent. C’est pourquoi, même s’il a pris un coup sur la cafetière dans la forme (y compris dans la musique signée Gérard Blanchard), redécouvrir Sac de nœuds détonne, car le film emmène le spectateur là où il le soupçonnait le moins, sûrement pas dans la gaudriole. Évidemment, si l’on rit souvent, la réflexion n’est pas oubliée et l’émotion pointe à plusieurs reprises, jusqu’au final aussi inattendu que culotté.

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Test Blu-ray / Trois amies, réalisé par Emmanuel Mouret

TROIS AMIES réalisé par Emmanuel Mouret, disponible en DVD & Blu-ray le 6 mars 2025 chez Pyramide Vidéo.

Acteurs : Camille Cottin, Sara Forestier, India Hair, Damien Bonnard, Grégoire Ludig, Vincent Macaigne, Éric Caravaca, Louise Vallas…

Scénario : Emmanuel Mouret & Carmen Leroi

Photographie : Laurent Desmet

Musique : Benjamin Esdraffo

Durée : 1h57

Date de sortie initiale : 2024

LE FILM

Joan n’est plus amoureuse de Victor et souffre de se sentir malhonnête avec lui. Alice, sa meilleure amie, la rassure : elle-même n’éprouve aucune passion pour Éric et pourtant leur couple se porte à merveille ! Elle ignore qu’il a une liaison avec Rebecca, leur amie commune… Quand Joan décide finalement de quitter Victor et que celui-ci disparaît, la vie des trois amies et leurs histoires s’en trouvent bouleversées.

Il est assez rare en France, qu’un cinéaste enchaîne à ce point les réussites et ce depuis un quart de siècle. C’est bien simple, en dehors d’un gros raté (Une autre vie en 2013, avec Jamsine Trinca et JoeyStarr), les dix autres longs-métrages d’Emmanuel Mouret oscillent entre le formidable et le sublime. Dans cette seconde catégorie, il faudra désormais ajouter Trois amies, présenté en compétition officielle lors de la dernière édition de la Mostra de Venise, en septembre 2024, 12e opus (pour le cinéma) du réalisateur acclamé ces dernières années pour Mademoiselle de Joncquières (2018) et dernièrement pour Chronique d’une liaison passagère (2022). Deux ans après ce dernier, Emmanuel Mouret se penche une fois de plus sur le thème, ô combien complexe, mais passionnant, de l’amour dans tous ses états, et place ici trois sublimes comédiennes en haut de l’affiche, India Hair, Sara Forestier et Camille Cottin. Cela étant, il n’oublie pas la gent masculine et Grégoire Ludig, Vincent Macaigne (qui avait déjà collaboré avec Emmanuel Mouret), Damien Bonnard et Éric Caravaca auraient tout aussi bien pu avoir leur place aux côtés de leurs consœurs. Comme à son habitude, sans aucune redondance, avec un sens inouï du rythme et avec une élégance propre à son cinéma depuis ses débuts, le metteur en scène et scénariste livre à sa distribution une fabuleuse partition sur ce qu’on pourrait qualifier les équations de l’amour, qui possèdent un nombre incalculable d’inconnues et donc tout autant de combinaisons à essayer, ou tout du moins à vivre. Le spectateur se laisse embarquer dans cet opéra tragi-comique ou comédie teintée de drames (on vous l’a dit, les tournures sont multiples), qui rend compte de la complexité intemporelle et universelle de l’existence. Un des très grands films français de l’année 2024.

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Test 4K UHD / The Substance, réalisé par Coralie Fargeat

THE SUBSTANCE réalisé par Coralie Fargeat, disponible en DVD, Blu-ray & 4K UHD le 13 mars 2025 chez Metropolitan Film & Video.

Acteurs : Demi Moore, Margaret Qualley, Dennis Quaid, Hugo Diego Garcia, Alexandra Papoulias Barton, Oscar Lesage, Joseph Balderrama, Robin Greer…

Scénario : Coralie Fargeat

Photographie : Benjamin Kracun

Musique : Raffertie

Durée : 2h21

Date de sortie initiale : 2024

LE FILM

Évincée de l’émission d’aérobic qu’elle présente, Elisabeth Sparkle, une actrice vieillissante, accepte de payer pour un traitement novateur. Recevant un premier colis, elle y trouve une substance lui permettant de créer un double d’elle-même, plus jeune et plus parfait. Une fois l’activation et la genèse du double réalisées, celui-ci doit alors être stabilisé chaque jour avec un autre liquide prélevé dans la moelle épinière de l’être d’origine, ceci avant de permuter au bout d’une semaine en échangeant leur sang. Elle donne ainsi naissance à Sue, qui devient vite célèbre, mais qui est censée ne faire qu’une avec elle. Du coup le retour à son corps d’origine risque d’être bien frustrant…

Il est là le film de 2024 ! The Substance, le second long-métrage de Coralie Fargeat (née en 1976), sept ans après Revenge, qui avait immédiatement révélé la réalisatrice à l’aube de ses 40 ans. Il aura fallu attendre sept années, même si elle aura signé entre temps le clip À chaque vaccination, c’est la vie qui reprend (vous vous rappelez ? C’était après le confinement…), pour que Coralie Fargeat revienne sur le devant de la scène. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que l’attente est plus que très largement récompensée. The Substance est un monument, un chef d’oeuvre instantané, qui nous retourne à la fois la tête et l’estomac, au point où l’auteur de ces mots a carrément été malade toute la nuit suivant la projection du film. Pur film de mise en scène où rien n’est laissé au hasard, merveilleusement photographié par Benjamin Kracun (Promising Young Woman d’Emerald Fennell), suintant de références cinématographiques et donc cinéphiles (l’ombre de Stanley Kubrick, de David Cronenberg, de John Carpenter et de David Lynch planent sur tout le film, ainsi que Le Portrait de Dorian Gray d’Oscar Wilde, L’Étrange Cas du docteur Jekyll et de M. Hyde de Robert Louis Stevenson et même Blanche-Neige), The Substance embarque le spectateur dans un rollercoaster émotionnel et sensoriel, comme il en déboule désormais rarement dans les salles. Le grand succès international rencontré par The Substance (près de 600.000 entrées en France, 77 millions de dollars de recette mondiale, dont plus de 17 millions récoltés sur le sol américain) est donc plus que mérité, tout comme les multiples récompenses (Prix du scénario au Festival de Cannes, Oscar des Meilleurs maquillages et coiffures, Golden Globes de la Meilleure actrice pour Demi Moore) et autres nominations (dans quatre catégories pour les Oscars et les Golden Globes). Un sans-faute pour cette nouvelle étape du film de genre, qui non seulement s’avère une des plus grandes expériences de cinéma de ces 25 dernières années, mais qui en plus ne cesse de titiller l’intellect du spectateur en lui parlant de sujets entièrement contemporains. Réservé à un public averti, déconseillé aux âmes sensibles ou si vous venez de manger, mais ne ratez sous aucun prétexte.

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Test Blu-ray / Zig Zig, réalisé par László Szabó

ZIG ZIG réalisé par László Szabó, disponible en Edition limitée Blu-ray & DVD le 26 mars 2025 chez Pathé.

Acteurs : Catherine Deneuve, Bernadette Lafont, Walter Chiari, Jean-Pierre Kalfon, Yves Afonso, Georgette Anys, Stéphane Shandor, Jean-Pierre Maud…

Scénario : László Szabó

Photographie : Jean-Pierre Baux

Musique : Karl-Heinz Schäfer

Durée : 1h26

Date de sortie initiale : 1975

LE FILM

Marie et Pauline sont deux chanteuses de cabaret, qui rêvent de s’offrir un chalet à la montagne. Pour ce faire, les deux femmes se prostituent. Marie se trouve mêlée à une affaire concernant l’enlèvement de la femme d’un de ses clients. De plus, elle découvre que Pauline est dans le coup. Un policier retraité résout l’affaire.

László Szabó (né en 1936), c’est tout d’abord une tronche de cinéma croisée chez Claude Chabrol, Jean-Luc Godard, Costa-Gavras, François Truffaut, Éric Rohmer, Arnaud Desplechin, un nom souvent rattaché à la Nouvelle vague. Hongrois de naissance, arrivé en France quand il avait vingt ans, László Szabó, cinéphile fréquentant la Cinémathèque d’Henri Langlois, où il rencontre la bande des Cahiers du cinéma. Quand les membres de celle-ci se lancent dans le cinéma, ils n’hésitent pas à faire tourner leur ami, qui apparaîtra aussi bien dans À double tour que dans Pierrot le fou, dans L’Aveu et plus tard dans Le Dernier métro. C’est tout naturellement qu’il se lance également dans la mise en scène avec un court-métrage, Le Voyage du Lieutenant Le Bihan (1969), suivi de près par un premier long-métrage, Les Gants blancs du diable (1973), tous les deux interprétés par Bernadette Lafont et Yves Afonso. Ces deux œuvres imposent un ton singulier, un univers original et témoignent de la prédilection du réalisateur pour le côté sombre de l’existence. Il enchaîne avec Zig Zig, qui transforme l’essai et avec lequel László Szabó donne libre cours à sa fantaisie toujours teintée de noirceur, en se focalisant sur le monde de la nuit dans le quartier de Pigalle. Il réunit alors deux des plus grandes comédiennes du cinéma français, Catherine Deneuve et (cette fois encore) Bernadette Lafont, dont l’alchimie fait des étincelles à l’écran. Seulement voilà, au mi-temps des années 1970, le public se désintéresse de la première (son dernier grand succès remonte à Peau d’âne), tandis que la seconde est plongée dans le cinéma d’auteur depuis quelques années (Michel Drach, Jacques Rivette, Jean Eustache…). Résultat des courses, la barre des 300.000 spectateurs n’est même pas franchie pour Zig Zig, qui s’évapore immédiatement de la mémoire de ceux qui l’ont découvert dans les salles. Un demi-siècle après sa sortie, nous déterrons cet ovni du septième art hexagonal, qui rappelle étonnamment le cinéma de Rainer Werner Fassbinder, tout en convoquant le spectre des comédies musicales de Jacques Demy, avec une Catherine Deneuve qui chante et qui danse avec sa virevoltante partenaire. Quasiment inclassable, Zig Zig enchaîne les scènes comme s’il s’agissait d’une chronique du Paris interlope, en jouant avec les genres, en faisant perdre ses repères aussi bien aux personnages qu’à celui qui tente de suivre l’itinéraire de Pauline et Marie. C’est donc une sacrée curiosité, doublée d’une véritable expérience de cinéma.

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Test Blu-ray / Here – Les Plus belles années de notre vie, réalisé par Robert Zemeckis

HERE – LES PLUS BELLES ANNÉES DE NOTRE VIE (Here) réalisé par Robert Zemeckis, disponible en DVD & Blu-ray le 12 mars 2025 chez M6 Vidéo.

Acteurs : Tom Hanks, Robin Wright, Paul Bettany, Kelly Reilly, Michelle Dockery, Ophelia Lovibond, Beau Gadsdon, Nikki Amuka-Bird…

Scénario : Eric Roth & Robert Zemeckis, d’après le roman graphique de Richard McGuire

Photographie : Don Burgess

Musique : Alan Silvestri

Durée : 1h44

Date de sortie initiale : 2024

LE FILM

À travers les âges et les époques, hommes et femmes défilent dans un lieu unique, sur trois générations. En défiant le temps, ce lieu sera le témoin unique de l’évolution de l’humanité et deviendra le théâtre de vies entremêlées, d’histoires d’amour, de conflits et de découvertes…

C’est un fait, le succès échappe à Robert Zemeckis depuis Flight, sorti aux Etats-Unis en 2012, qui avait récolté plus de 160 millions dans le monde pour un budget étonnamment « dérisoire » de trente millions. Malgré leurs immenses qualités, The Walk : Rêver plus haut, Alliés et Bienvenue à Marwen se sont tous les trois plantés au box-office. Les mal-aimés (à juste titre cette fois) Sacrées sorcières The Witches et Pinocchio (adaptation live du long-métrage d’animation Disney) ont connu une exploitation limitée, dans les salles pour le premier ou sur la plateforme de Mickey pour le second et l’on attendait patiemment de revoir un film de Robert Zemeckis dans les salles. Une fois ce retour annoncé, quelle ne fut pas notre impatience de retrouver toute l’équipe de Forrest Gump (devant et derrière la caméra) réunie pour une nouvelle expérience de cinéma, propre à son auteur. La déception est de mise et Here Les Plus belles années de notre vie ne peut rivaliser avec l’ampleur des opus précédents du cinéaste…en ce qui concerne le fond du moins, car force est de constater le 22e long-métrage de Robert Zemeckis possède là encore une bonne longueur d’avance sur ses camarades. Le metteur en scène tant acclamé jadis pour sa trilogie Retour vers le futur et Qui veut la peau de Roger Rabbit, a toujours été à la pointe des effets visuels, à l’instar de la capture de mouvements initiée il y a plus de vingt ans avec Le Pôle express The Polar Express. Toujours à la recherche de nouveaux outils pour raconter ses histoires, Robert Zemeckis bénéficie ici de l’intelligence artificielle, une technologie baptisée Metaphysic Live, utilisée pour rajeunir ses comédiens (en temps réel sur le plateau), dont les personnages sont suivis de l’enfance à la vieillesse. L’occasion de redécouvrir Tom Hanks et Robin Wright comme si le premier venait de tourner Big et la seconde Princess Bride. Le résultat est bluffant et Here interpelle, passionne par son côté technique, qui laisse pantois d’admiration. Cependant, le bât blesse au niveau du récit, les protagonistes ne sont guère attachants et finalement noyés dans les effets spéciaux (omniprésents), d’autant plus que Here reste en caméra fixe durant près de 100 minutes. En fait, le film ressemble à une attraction qui aurait pu tout aussi bien avoir sa place dans un parc à thèmes (après tout, le cinéma est né dans les foires), à l’instar du Visionarium, longtemps disponible à Disneyland Paris, qui utilisait la technique Circle-Vision 360°, qui parlait aussi du thème du voyage dans le temps. C’est ce même sujet que traite Robert Zemeckis, en prenant comme point de vue celui d’une maison, d’une terre même, de la météorite responsable de l’extinction des dinosaures (si si) à l’hiver d’une poignée de personnages qui vont habiter la majeure partie de leur existence dans une bâtisse, dont le cinéaste va disséquer la mémoire des murs. Dommage que l’émotion manque à l’appel donc. Il faudra sans doute beaucoup de temps pour apprécier pleinement Here (qui nous rappelle A Ghost Story de David Lowery), qui pendant longtemps risque de demeurer un fascinant objet d’étude estimé à 50 millions de dollars (hors promo), qui n’aura rapporté que 16 millions dans le monde et attiré seulement 60.000 spectateurs en France.

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Test DVD / En tongs au pied de l’Himalaya, réalisé par John Wax

EN TONGS AU PIED DE L’HIMALAYA réalisé par John Wax, disponible en DVD le 12 mars 2025 chez Le Pacte.

Acteurs : Audrey Lamy, Nicolas Chupin, Eden Lopes, Naidra Ayadi, Benjamin Tranié, Jean-Charles Clichet, Steve Tientcheu, Stephan Wojtowicz…

Scénario : John Wax & Marie-Odile Weiss

Photographie : Vincent Mathias

Musique : Michel-Ange Merino

Durée : 1h30

Date de sortie initiale : 2024

LE FILM

Pauline, en cours de séparation, est mère d’un petit garçon autiste, Andrea, six ans et demi, en dernière année de maternelle. Entre l’emploi du temps lie à son travail et la garde alternée, malgré les outils qu’on a mis à sa disposition et la présence d’une aide, Pauline commence à se décourager…

En 2010, sort et cartonne sur les écrans Tout ce qui brille, coréalisé par Géraldine Nakache et Hervé Mimran. Si l’on a évidemment beaucoup parlé de son tandem principal, une autre actrice avait pu aussi se démarquer, au point de voler la vedette à chaque apparition, Audrey Lamy. Celle que l’on appelait alors encore « la sœur d’Alexandra Lamy » a su très vite se faire un prénom et l’actrice n’a cessé depuis d’apparaître au cinéma, devenant un second rôle récurrent, pour ne pas dire indispensable. Si Cédric Klapisch, Maïwenn, Mélanie Laurent, Marc Fitoussi, Christophe Gans et bien d’autres lui ont offert de très beaux personnages, elle accède enfin en haut de l’affiche en 2018 avec Ma reum de Frédéric Quiring, qui connaît un joli succès avec 800.000 entrées. Cependant, loin de se cantonner au registre de la comédie, Audrey Lamy a souvent apporté une gravité, une mélancolie, une profondeur à celles qu’elle a incarnées. Les Invisibles et La Brigade de Louis-Julien Petit, Rebelles d’Allan Mauduit ont dernièrement prouvé une fois de plus son talent de caméléon. À l’instar de sa frangine, Audrey Lamy a pris de la bouteille, cela lui sied à ravir et apporte un background à ses personnages. C’est le cas pour En tongs au pied de l’Himalaya, dans lequel elle trouve l’un de ses plus beaux rôles à ce jour. Cette comédie dramatique, car il n’est pas interdit de rire, comme une soupape indispensable entre deux scènes plus difficiles, se penche avec force et pudeur sur le handicap. Réalisé par John Wax, ancien photographe de plateau et directeur artistique superviseur, En tongs au pied de l’Himalaya est son premier long-métrage signé en solo (il avait auparavant mis en scène Tout simplement noir avec Jean-Pascal Zadi) et témoigne d’une vraie sensibilité, doublée d’une solide direction d’acteurs. Si le propos n’est guère inédit (on pense souvent au magnifique Les Clefs de la maisonLe Chiavi di casa de Gianni Amelio), l’émotion est présente, le pathos aux abonnés absents, l’humour fonctionne et la distribution est impeccable. Un beau moment.

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Test Blu-ray / Nightmare Concert, réalisé par Lucio Fulci

NIGHTMARE CONCERT (Un gatto nel cervello) réalisé par Lucio Fulci, disponible en Blu-ray chez Le Chat qui fume.

Acteurs : Lucio Fulci, Jeoffrey Kennedy, Malisa Longo, Paola Cozzo, Robert Egon, David L. Thompson, Shilett Angel…

Scénario : Lucio Fulci, Giovanni Simonelli & Antonio Tentori

Photographie : Alessandro Grossi

Musique : Fabio Frizzi

Durée : 1h32

Date de sortie initiale : 1990

LE FILM

Réalisateur de films d’horreur, Lucio Fulci vit un véritable cauchemar. Poursuivi par les personnages de ses films et transporté dans les scènes les plus horribles, il croit devenir fou ! Conscient de ses obsessions, il consulte un psychiatre qui pratique l’hypnose. Mais une succession de meurtres bien réels sont alors commis et il devient de plus en plus difficile de distinguer la fiction de la réalité…

Nightmare Concert, ou Un gatto nel cervello, ou littéralement Un chat dans le cerveau est l’un des derniers longs-métrages de Lucio Fulci (1927-1996). En réalité, il s’agit d’un patchwork, d’un opus composé de scènes tirées de téléfilms supervisés ou adoubés plutôt par le maître de l’horreur dans le cadre de son anthologie Lucio Fulci presenta. Ainsi outre des extraits des Fantômes de SodomeIl fantasma di Sodoma et de Soupçons de mort Quando Alice ruppe lo specchio, sortis en 1988, on reconnaît des images tirées de Bloody Psycho de Leandro Lucchetti (1989), de Hansel e Gretel de Giovanni Simonelli (1990), de Massacre d’Andrea Bianchi (1989), de Blood Moon/Death Escape d’Enzo Milioni et de The Murder SecretNon Avere Paura Della Zia Martade Mario Bianchi (1988). Là-dessus, Lucio Fulci himself sert de fil rouge, à travers une histoire « méta », où le cinéaste se retrouve à la merci de visions cauchemardesques, qui lui font perdre le sens des réalités. Le cinéaste a une vraie gueule de cinéma et s’en tire bien dans le « rôle » de Lucio Fulci et d’entrée de jeu, celui-ci est montré à l’oeuvre, en train d’écrire, d’imaginer comment une femme peut passer de vie à trépas. Tous les moyens sont bons, à coups de hache, étranglée, pendue, coupée en morceaux avec une tronçonneuse, noyée dans l’eau bouillante, égorgée par un chat sauvage, brûlée vive, enterrée vivante, torturée, les yeux percés, poignardée, sciée en deux, crucifiée, décapitée…voilà ce qui triture les méninges de Lucio Fulci, son cerveau ne le laissant pas en paix, comme si un chat lui lacérait ou lui rongeait la matière grise, ce que le générique nous dévoile d’ailleurs littéralement. Si Nightmare Concert comporte évidemment de nombreux défauts, cette plongée dans les méandres de l’esprit du cinéaste est un petit bonus sympathique pour ses très nombreux admirateurs et ce voyage n’est franchement pas déplaisant.

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Test Blu-ray / Bernie, réalisé par Richard Linklater

BERNIE réalisé par Richard Linklater, disponible en DVD le 12 mars 2025 chez Extralucid Films.

Acteurs : Jack Black, Shirley MacLaine, Matthew McConaughey, Brady Coleman, Richard Robichaux, Rick Dial, Brandon Smith, Larry Jack Dotson…

Scénario : Richard Linklater & Skip Hollandsworth

Photographie : Dick Pope

Musique : Graham Reynolds

Durée : 1h36

Année de sortie : 2011

LE FILM

À Carthage, petite bourgade du Texas, dans les années 1990, Bernie Tiede, assistant croque-mort, est aimé de tous les habitants. Véritable maître de l’embaumement et des animations d’enterrements, chanteur hors pair, Bernie va se lier d’amitié avec Marjorie Nugent, une riche veuve, à l’inverse, détestée car désagréable. Très vite, ils deviennent inséparables, voyagent à travers le monde et ne peuvent plus se passer l’un de l’autre. Mais la vieille femme possessive maintient Bernie sous son emprise…

Richard Linklater (né en 1960) rappelle Robert Wise ou Richard Fleischer. Un artisan touche-à-tout, qui a oeuvré dans moult genres, un réalisateur insaisissable, prolifique, éclectique, mais aussi et avant tout un auteur à part entière. Alors forcément, découvrir une de ses œuvres jamais sorties dans nos contrées est toujours un immense plaisir, d’autant plus que le film qui nous intéresse ici, Bernie, aura longtemps intrigué le cinéphile français. Et le résultat est jubilatoire, pour ne pas dire carrément jouissif. À la base de Bernie, il y a un fait divers réel, que Richard Linklater découvre dans les années 1990, à travers un article du magazine Texas Monthly de Skip Hollandsworth. Le cinéaste y voit très vite un sujet formidable pour un long-métrage et pense déjà à Jack Black, avec lequel il tourne finalement l’un de ses opus les plus célèbres, Rock Academy. Les années passent, Linklater attend que le comédien prenne de la bouteille et les deux hommes se retrouvent enfin en 2011 pour Bernie. À cette occasion, Jack Black rencontre le véritable Bernie Tiede en prison. Quand il se met dans la peau de ce dernier, Jack Black sort de deux échecs commerciaux sur le sol américain, Les Voyages de Gulliver de Rob Letterman et L’An 1 : Des débuts difficiles d’Harold Ramis. Cette prestation lui vaudra tous les éloges et l’acteur sera nommé dans beaucoup de festivals. Honteusement oublié aux Oscars, Bernie a pourtant tout d’un grand film sous ses apparences modestes et s’inscrit parfaitement dans la filmographie de Richard Linklater, qui à travers sa comédie dresse en réalité une radiographie implacable du Texas (où il est né), comme un faux documentaire extraordinaire. Sauf que l’histoire qui est narrée est absolument vraie, ce qui fait encore plus froid dans le dos. IN-DIS-PEN-SA-BLE.

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Test Blu-ray / Iron Man, réalisé par Joseph Pevney

IRON MAN réalisé par Joseph Pevney, disponible en DVD et Blu-ray le 25 mars 2025 chez Elephant Films.

Acteurs : Jeff Chandler, Evelyn Keyes, Stephen McNally, Rock Hudson, Joyce Holden, Jim Backus, James Arness, Steve Martin, George Baxter…

Scénario : George Zuckerman & Borden Chase, d’après le roman de William R. Burnett

Photographie : Carl E. Guthrie

Musique : Milton Rosen

Durée : 1h22

Année de sortie : 1951

LE FILM

En Pennsylvanie, un mineur, Coke Mason, veut acheter un magasin de radio et épouser Rose Warren. Son frère, lui, pense plutôt à son avenir dans la boxe, sachant que quand il se bat, on le surnomme « l’homme de fer ». Coke l’écoute mais, grisé et corrompu par le succès, il ne connaîtra la reconnaissance du public que dans la défaite…

S’il y a un nom que l’on aime retrouver au fil de nos chroniques, c’est bien celui de Joseph Pevney (1911-2008), réalisateur appliqué ayant touché à plusieurs genres, La Police était au rendez-vous Six Bridges to Cross (1955) et Rendez-vous avec une ombreThe Midnight Story (1957) avec Tony Curtis, L’Homme aux mille visages Man of a Thousand Faces (1957), formidable biopic sur Lon Chaney, avec James Cagney dans le rôle-titre, Le Château de la terreur The Strange Door (1951) avec rien de moins que Charles Laughton et Boris Karloff. Avant de se consacrer principalement à la télévision, pour laquelle il signera moult épisodes de séries cultes, notamment Star Trek, La Petite maison dans la prairie, L’Incroyable Hulk, Bonanza, Joseph Pevney se faisait un nom dans le domaine de la série B et montrait systématiquement qu’il en avait sous le capot. C’est encore le cas avec Iron Man, aka Poings d’acier dans nos contrées, son quatrième long-métrage et par ailleurs l’un de ses quatre films sortant dans les salles en cette année 1951. Iron Man est la première collaboration du cinéaste avec l’un de ses acteurs fétiches, le génial Jeff Chandler (1918-1961), avec lequel Joseph Pevney tournera plus d’une demi-douzaine de fois, pour le compte des studios Universal. Ainsi Iron Man, drame sportif, se déroule dans le milieu de la boxe et se place dans le sillage de Nous avons gagné ce soir The Set-Up de Robert Wise et Le Champion Champion de Mark Robson, sortis deux ans auparavant, mais aussi de Gentleman Jim (1942) de Raoul Walsh, qui racontait l’histoire d’un modeste employé de banque passionné par la boxe et désireux de s’élever au-dessus de sa condition, dont l’arrivisme irritait les membres du Club Olympique. Ou comment le sport devient synonyme (ou pas) d’élévation sociale et une échelle pour aider certains à connaître le tant convoité American Dream. Iron Man est un tout petit film, mais qui condense en à peine 80 minutes autant, si ce n’est plus, que certains titres contemporains qui s’étendent sur plus 2h30. C’est là l’efficacité d’un metteur en scène à réhabiliter et dont il est important de remettre l’oeuvre en avant.

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