Test Blu-ray / Échec au gang, réalisé par Umberto Lenzi

ÉCHEC AU GANG (La Banda del Gobbo) réalisé par Umberto Lenzi, disponible en Blu-ray le 14 décembre 2023 chez Le Chat qui fume.

Acteurs : Tomas Milian, Pino Colizzi, Isa Danieli, Guido Leontini, Solvi Stubing, Luciano Catenacci, Carlo Gaddi, Alessandra Cardini, Sal Borgese…

Scénario : Umberto Lenzi

Photographie : Federico Zanni

Musique : Franco Micalizzi

Durée : 1h38

Date de sortie initiale : 1978

LE FILM

Le criminel italien surnommé le Bossu retourne à Rome après son emprisonnement en Corse. Avec son jeune frère et d’autres complices, il envisage un raid sur un camion blindé. Mais les choses tournent mal.

Outre Nico Giraldi, personnage de flic à la Serpico qu’il a incarné près d’une douzaine de fois de 1976 à 1985, de Flics en jeans Squadra antiscippo à Pas folle, le flic Delitto al Blue Gay, tous réalisés par Bruno Corbucci, l’autre rôle récurrent ayant largement contribué à la renommée de Tomás Milián en Italie demeure « Poubelle ». Le comédien aura interprété « Er Monnezza » à trois reprises, dans La Mort en sursis Il trucido e lo sbirro (1976) et Échec au gang La Banda del Gobbo (1978) d’Umberto Lenzi et L’Exécuteur vous salue bienLa Banda del trucido (1977) de Stelvio Massi et reste aujourd’hui iconique avec sa chevelure bouclée (la même perruque qu’Alain Delon dans Le Gang sans doute), des yeux surlignés d’eyeliner, ses Adidas claires et sa dégaine de prolo romain, tandis que l’acteur Ferruccio Amendola (également la voix de Robert De Niro, Al Pacino, Sylvester Stallone…) lui apportait son accent et son phrasé inimitables. Échec au gang apparaît comme un caprice, ou comment Tomás Milián surfait encore sur ses succès précédents, tout en tâchant d’innover autant que faire se peut ici en campant un double-rôle, deux frères, notre Sergio Marazzi, alias Poubelle donc, mais aussi cette fois-ci son frangin, le Bossu, déjà apparu dans Brigade spéciale Roma a mano armata en 1976…même s’il ne s’appelait pas Vincenzo Marazzi, mais Vincenzo Moretto. Allez comprendre. Ces deux frères jumeaux sont réunis grâce à la magie des effets spéciaux rudimentaires (rien d’exceptionnel, Louis Jouvet se dédoublait de la même façon trente ans avant dans Copie conforme), en gros l’écran a été divisé en deux parties pour ainsi permettre à Tomás Milián d’apparaître en même temps, dans le même cadre, à la fois dans la peau de Vincenzo et dans celle de Sergio, pour un dernier baroud d’honneur, y compris pour le tandem Lenzi-Milián, après six collaborations. Il en résulte une comédie-policière certes sympathique, mais nullement indispensable, à moins d’être un fou furieux du cubain protéiforme, dont le cabotinage de génie annonçait alors celui d’un Nicolas Cage sous substances. Divertissant, Échec au gang vaut essentiellement pour cette double prestation, plutôt que son histoire qui peine à convaincre sur la durée.

Rome, années 1970 – Tandis que Sergio Morazzi, dit Monnezza, vit de petits larcins et de boulots précaires, son frère jumeau, Vincenzo, surnommé le Bossu, est un bandit de grande envergure, revenant dans la capitale après un séjour en prison, en Corse. Vincenzo envisage de braquer un fourgon blindé, avec l’aide de complices parmi lesquels Milo Dragovic et Perrone. Mais ces derniers décident d’éliminer le Bossu une fois le braquage achevé. Les gangsters pensent avoir réussi, mais Vincenzo parvient à s’échapper par les égouts. Il n’a, dès lors, qu’une seule idée en tête : se venger !

Si le scénariste Dardano Sacchetti (Killer Crocodile, Blastfighter, l’exécuteur, La Maison de la terreur, L’Éventreur de New York) et Umberto Lenzi ont créé Monnezza sur le papier, Tomás Milián n’a pas traîné pour se l’approprier, improviser des dialogues (même s’il était systématiquement post-synchronisé donc), emmener le personnage là où ses auteurs étaient loin de l’imaginer. Échec au gang est un « petit » Umberto Lenzi, dans le sens où il ne se passe pas non plus grand-chose, mais repose avant tout sur sa tête d’affiche, qui pour le coup assure le show du début à la fin, en fait des caisses, éructe et bave, écarquille les yeux, entre en hyperventilation, chante, joue de la gâchette bien sûr, le tout avec la complicité du spectateur qui en redemande. Le réalisateur, entre La Grande batailleIl Grande attacco et De l’enfer à la victoire Contro 4 bandiere, arrivait à bout du poliziottesco et allait entamer les années 1980 en misant sur l’épouvante et le film d’aventure. On le sent un peu en pilotage automatique, ne surprend guère voire jamais, les rares poursuites sont molles et il est ici totalement au service de Tomás Milián.

Ce dernier est néanmoins très bien entouré, Pino Colizzi (Metello, Chronique d’un homicide), Isa Danieli (Cinema Paradiso, Vers un destin insolite, sur les flots bleus de l’été), Guido Leontini (Brigade volante), sans oublier les tronches inoubliables de Luciano Catenacci (Pair & impair, Deux Super-flics, Opération peur) et Salvatore Borgese (le Borgne dans La Folie des grandeurs, souvent tête à baffes dans les films de Terence Hill et Bud Spencer) complétant parfaitement le casting.

Cette « Banda del Gobbo » est un pur produit de cinéma d’exploitation, qui ne cherche en rien à révolutionner quoi que ce soit, qui est correctement produit, honnêtement photographié, où l’humour bon enfant peut d’un coup laisser la place à une violence sèche et brutale, mais qui ne se distingue pas du tout-venant du thriller d’action et film de gangsters en vogue. L’émotion peut-être en plus il est vrai…

LE BLU-RAY

Le Chat qui fume continue d’explorer le cinéma d’exploitation transalpin et livre cette fois l’édition HD d’Échec au gang, jusqu’alors inédit en France en support physique. Une nouvelle galette solidement harnachée dans un Digipack à trois volets, classiquement illustré et faisant honneur aux deux frangins Marazzi. Le tout est glissé dans un solide fourreau cartonné, où apparaît Tomás Milián dans la peau de Monnezza. Le menu principal est animé et musical.

On commence les festivités par un entretien avec le réalisateur Umberto Lenzi (11’35). Ce dernier, mort en 2017, connu pour son franc-parler, revenait sur son processus d’écriture (« souvent seul »), indiquant que s’il est l’auteur du scénario d’Échec au gang, Tomás Milián était celui de ses propres dialogues. De l’acteur, il en est longtemps question dans cette interview, le cinéaste abordant leurs différentes associations, jusqu’à Échec au gang, leur dernière collaboration, les deux hommes ne se supportant plus. Umberto Lenzi indique aussi qu’il permettait à sa vedette d’improviser (« mais pas trop non plus »), mais que les problèmes d’alcool et les colères de Milián (« qui a continué à faire des films vulgaires avec Bruno Corbucci, mais ça plaisait ») ont eu raison de leur zizanie.

On passe à l’entrevue avec Eugenio Alabiso, monteur de son état (Les Barbarians, Les Évadées du camp d’amour, Les Tortionnaires du camp d’amour, Spasmo, Les Rendez-vous de Satan), qui durant vingt minutes fait le tour de son illustre carrière, avant d’évoquer son travail avec Umberto Lenzi, « un réalisateur cher à mon coeur, qui a toujours contrôlé ses films et le budget qu’on lui confiait ». Au fil de ce bonus, on apprend qu’Eugenio Alabiso a donné l’idée à Sergio Leone du dernier plan du Bon, la Brute et le Truand, en superposant le thème musical sur la dernière réplique de Tuco. Il se dit très flatté du revival de ces films d’exploitation, « sur lesquels les critiques s’acharnaient ».

Le supplément suivant est un face-à-face détendu avec le compositeur Franco Micalizzi (19’30). L’auteur des bandes originales d’Attention les dégâts, Quand faut y aller, faut y aller, Les Héros de l’apocalypse, Le Cynique, l’infâme, le violent et On l’appelle Trinita aborde son travail sur Échec au gang et plus particulièrement sur sa relation professionnelle (« très efficace, même s’il n’était pas très expansif ») avec Umberto Lenzi.

On termine cette série d’entretiens avec celui d’Antonelli Venditti (19’), interprète et compositeur des chansons Sora Rosa et Roma capoccia, entendues dans Échec au gang. Le musicien et chanteur se souvient de l’écriture de ces deux morceaux, « représentatives du jeune homme que j’étais, qui avait un idéal de justice et qui était empreint de mysticisme et à une grande solitude ». Antonelli Venditti se confie sur son enfance difficile (« une mère qui me mettait plus bas que terre »), puis sur l’importance de Tomás Milián (qu’il a pu rencontrer en 2001) pour la représentation de la ville de Rome à travers son personnage de Monnezza, tout en rendant hommage au comédien Ferrucio Amendola, qui a contribué à la renommée de l’acteur en lui prêtant sa voix et son accent.

L’interactivité se clôt sur la bande-annonce « Brothers still we die ».

L’Image et le son

Échec au gang est présenté dans sa version intégrale. Le film d’Umberto Lenzi a été restauré, vraisemblablement en 2K. Ce nouveau lifting donne une fraîcheur inédite à la photo de Federico Zanni, aux couleurs claires et aux contrastes bien pesés. La propreté est de mise, le cadre stable, le piqué est aléatoire, quelques plans flous sont visibles et la définition chancelle sensiblement, mais ces défauts sont indéniablement inhérents aux conditions de prises de vue et n’auraient pu être rectifiés. La texture argentique est préservée.

Propre et dynamique, le mixage italien DTS HD Master Audio Mono 2.0 ne fait pas d’esbroufe et restitue parfaitement les dialogues, ainsi que la musique de Franco Micalizzi. A titre de comparaison avec la VF (la plus rentre-dedans et parfois grinçante), elle demeure la plus dynamique et la plus riche du lot. Les sous-titres français sont disponibles. Signalons que les scènes en langue albanaise font apparaître des sous-titres italiens incrustés.

Crédits images : © Le Chat qui fume / Mediawan / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

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