Test Blu-ray / Les Évadées du camp d’amour, réalisé par Edoardo Mulargia

LES ÉVADÉES DU CAMP D’AMOUR (Femmine infernali) réalisé par Edoardo Mulargia, disponible en Combo Blu-ray + DVD le 4 avril 2023 chez Artus Films.

Acteurs : Anthony Steffen, Ajita Wilson, Cristina Lay, Cintia Lodetti, Luciano Pigozzi, Serafino Profumo, Maite Nicote, Yael Forti…

Scénario : Sergio Chiusi, Gil Carretero & Edoardo Mulargia

Photographie : Manuel Mateos

Musique : Marcello Giombini

Durée : 1h28

Date de sortie initiale : 1980

LE FILM

Au cœur d’une forêt tropicale se trouve un camp de détention pour femmes. Isolés du monde, les gardiens en profitent pour abuser des prisonnières, leur faisant subir les pires sévices. Ne supportant plus la cruauté dont elles sont victimes, un groupe de jeunes femmes va tenter de s’évader, avec l’aide du médecin du camp.

Quand on fouine pour en savoir toujours plus sur le genre dit du Women In Prison, ou plus simplement WIP, on trouve bien sûr les liens avec le cinéma d’exploitation, dont les films qui s’y rattachent se focalisent la plupart du temps sur des prisonnières qui subissent des sévices dégradants afin d’exciter ou de dégoûter le spectateur. Comme la Nazisploitation et la Nonnesploitation, sauf que nous avons ici de splendides créatures chichement vêtues, leurs guenilles dévoilant fréquemment un sein généreux, passant du bon temps ensemble dans leur cellule étroite (il faut bien se consoler comme on peut), avant de retourner bosser (aux travaux forcés, mais pas trop pour ne pas gâcher la manucure) et de comploter en secret le moyen de se tirer. On retrouve tous ces ingrédients dans Les Évadées du camp d’amourFemmine infernali, ou Escape from Hell pour les anglo-saxons, avant-dernière réalisation d’Edoardo Mulargia (1925-2005). Cet habile artisan, dont les capacités techniques avaient pu être remarquées dans les excellents Viva Django ! (1971) et Tropique du Cancer (1972), fait ce qu’il peut pour Les Évadées du camp d’amour, qui n’est certes pas exceptionnel, euphémisme, mais qui n’en reste pas moins divertissant. Le spectateur devra cependant s’armer de patience en raison d’un grand manque de rythme qui finit par désintéresser de l’histoire à mi-parcours. Heureusement, la machine se relance dès que le groupe de nanas prend la poudre d’escampette dans la jungle hostile, où les serpents, les sangsues, les sables mouvants et autres réjouissances les attendent. Sympathique quoi.

Un camp de détention pour femmes est situé au cœur de la forêt tropicale humide. Très humide. Les gardes sadiques et un gardien de l’enfer rendent la vie presque insupportable pour les détenus, et toute infraction aux règles est traitée rapidement et sauvagement. Le médecin du camp est horrifié par ce qu’il voit se produire, et boit lourdement pour repousser l’horreur. Finalement, les délinquantes incarcérées en ont eu assez et demandent l’aide du médecin pour tenter de s’échapper loin de tous ces tyrans, de ces brutes épaisses toujours prêtes au viol, sans parler de la matrone un peu trop zélée, elle-même ancienne prisonnière.

Le film démarre sous un orage violent, où la pluie diluvienne fait coller au plus près du corps l’uniforme de fortune des détenues. Un peu plus et on se croirait dans une publicité pour un déodorant ou pour le savon Tahiti Douche. Puis, tout est prétexte pour que la bagarre se déclare entre les rivales, entraînant bien sûr les demoiselles dans la poussière ou dans la boue, les vêtements se déchirant toujours aux endroits les plus sensibles (le film est très généreux en fesses rebondies). Les belles gardent leurs jolies formes, même si elles ne se nourrissent que de racines bouillies et de serpent à la broche. Certaines en ont pour une dizaine d’années à tirer, d’autres plus, mais elles sont toutes logées à la même enseigne. Les plus fortes et volontaires complotent alors pour se faire la malle, mais pour cela, elles doivent gagner la confiance du toubib du camp, complètement défoncé à l’alcool et à la musique classique.

Ce médecin au bout du rouleau est interprété par Anthony Steffen, visage récurrent du cinéma transalpin, vu entre autres dans Les Tueurs sont nos invités de Vincenzo Rigo, L’Appel de la chair d’Emilio Miraglia et qui avait déjà tourné à plusieurs reprises pour le compte d’Edoardo Mulargia. S’il en fait parfois trop en mec imbibé du matin au soir, il s’en sort honorablement. Face à lui, Ajita Wilson, actrice transsexuelle américaine que l’on verra aussi bien dans le cinéma érotique que pornographique, chez Jess Franco comme chez Jean-Marie Pallardy, tout comme chez Lucio Fulci, tire son épingle du jeu avec sa haute silhouette. On retiendra aussi les lèvres boudeuses de Cristina Lay, la sévèrement bustée Cintia Lodetti, Luciano Pigozzi (Bianco Apache, Une hache pour la lune de miel, Devilman le diabolique) aka le sosie italien de Peter Lorre, suintant et perfide en directeur imposant une discipline de fer et aux pires humiliations à ses prisonnières en cas de manquements au réglement. Ils se sont quand même mis à trois pour pondre un scénario pareil, Edoardo Mulargia lui-même, souvent l’auteur de ses longs-métrages, avec Gil Carretero et surtout Sergio Chiusi, qui avait signé quelques années auparavant Horreurs nazies : Le camp des filles perdues de Sergio Garrone, dont on reconnaît ici la griffe.

Devant comme derrière la caméra, l’équipe est rompue à l’exercice, effectue le minimum syndical, sans se forcer, mais avec suffisamment de professionnalisme pour soulager les bas instincts (les meilleurs) des cinéphages déviants et pour maintenir éveiller son intérêt jusqu’au bout.

LE COMBO BLU-RAY + DVD

Magnifique objet que nous présente aujourd’hui Artus Films ! Les Évadées du camp d’amour, mais aussi sa fausse suite Les Tortionnaires du camp d’amour, sur lequel nous reviendrons très prochainement, sont désormais présentées dans de luxueux Digipack à deux volets, magnifiquement illustrés, le tout glissé dans des fourreaux cartonnés aux visuels somptueux. Le menu principal des Évadées du camp d’amour est fixe et musical.

En ce qui concerne les suppléments, vous trouverez une présentation forcément érudite et passionnant de l’indéboulonnable Christophe Bier. Cela faisait un bout de temps que nous ne l’avions pas écouté, depuis la sortie chez Artus Films de Des fleurs pour un espion et Opération Re Mida (Lucky l’intrépide) exactement. Le réalisateur, historien et critique de cinéma a bien préparé son intervention, divisée en plusieurs points. Vous en apprendrez encore et toujours sur le genre du Woman In prison (avec plusieurs titres chaudement recommandés par l’intervenant comme Femme en cage de John Cromwell), ses codes habituels, la carrière du réalisateur Edoardo Mulargia (« un faiseur qui a toujours fait son job, mais sans jamais d’éclats, à part El Puro, la rançon est pour toi, car il s’agit d’un western bouddhiste ») et celle d’Anthony Steffen. Insistant bien sur le fait qu’il ne fait pas « attendre grand-chose » des Évadées du camp d’amour, Christophe Bier demeure tout de même attaché à ce film et procédera également à la présentation des Tortionnaires du camp d’amour.

Le bonus suivant est une interview du directeur de la photographie Maurizio Centini (18’). Si celui-ci n’est crédité que comme caméraman, celui-ci a bel et bien officié comme chef opérateur sur Les Évadées du camp d’amour aux côtés Manuel Mateos, le seul mentionné à ce poste au générique. C’est donc l’occasion pour Maurizio Centini de revenir sur ses débuts au cinéma, sur son premier film comme directeur de la photographie (La Salamandre d’Alberto Cavallone), sur le travail avec le réalisateur Sergio Garrone (sur Horreurs nazies, le camp des filles perdues) et bien sûr Edoardo Mulargia. Quelques anecdotes de tournage sur le film qui nous intéresse aujourd’hui sont aussi au programme.

L’interactivité se clôt sur un Diaporama d’affiches et de photos d’exploitations.

L’Image et le son

On ne s’attendait pas à un résultat aussi probant ! En effet, la copie des Évadées du camp d’amour est vraiment une bonne surprise avec une restauration indéniable. Le master est très propre, les poils en bord de cadre sont rares (à part celle des diverses toisons pubiennes de ces gentes dames), tout comme les points et griffures. L’ensemble est stable, sans aucun (ou presque) fourmillement, la palette chromatique est somme toute un peu effacée, mais ces couleurs semblent d’origine. Le reste du film impressionne avec des détails flagrants, un piqué probablement inédit et un grain très bien géré. Que demander de plus ?

La version française est amusante avec un doublage aux petits oignons. En revanche, ce mixage se focalise un peu trop sur les voix au détriment des effets. La piste italienne est plus aérée avec un meilleur rend de la musique, des ambiances annexes et des dialogues.

Crédits images : © Artus Films / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

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