Test Blu-ray / Les Tueurs sont nos invités, réalisé par Vincenzo Rigo

LES TUEURS SONT NOS INVITÉS (Gli assassini sono nostri ospiti) réalisé par Vincenzo Rigo, disponible en Blu-ray depuis décembre 2022 chez Le Chat qui fume.

Acteurs : Anthony Steffen, Margaret Lee, Luigi Pistilli, Gianni Dei, Livia Cerini, Giuseppe Castellano, Sandro Pizzochero, Giovanni Brusadori…

Scénario : Renato Romano & Bruno Fontana

Photographie : Vincenzo Rigo

Musique : Roberto Rizzo

Durée : 1h30

Date de sortie initiale : 1974

LE FILM

Franco, Eliana et Mario dévalisent une bijouterie à Milan et s’enfuient. Franco, cependant, est blessé lors de la fusillade avec la police. Les trois hommes décident donc de se réfugier temporairement dans une villa isolée, où vit le Dr Malerba. Les criminels obligent Malerba, qui est médecin, à s’occuper de Franco, et entre-temps ils contactent Eddy, le chef de l’organisation. Alors que le trio attend l’arrivée d’Eddy, la tension commence à monter dans la maison.

Comment vous dites ? Vincenzo Rigo ? Connais pas…Pourtant, une chose est sûre, vous retiendrez ce nom une fois que vous aurez vu son premier long-métrage, Les Tueurs sont nos invitésGli assassini sono nostri ospiti, sorti en 1974. S’il a peu tourné, trois films seulement en l’espace de deux ans, Vincenzo Rigo signe un formidable opus du home invasion, rempli de rebondissements du début à la fin, solidement réalisé et excellemment interprété. Le metteur en scène, également monteur et directeur de la photographie, s’empare d’un scénario carré coécrit par Renato Romano, habituellement acteur (vu dans La Mort a pondu un œuf de Giulio Questi et L’Oiseau au plumage de cristal de Dario Argento) et Bruno Fontana (Violez les otages ! de Giovanni Brusadori) et passe en quelques minutes du film de casse au huis clos stressant et teinté d’érotisme, avec rigueur et élégance. Si l’on déplore un usage trop systématique et pesant de la musique redondante de Roberto Rizzo, Les Tueurs sont nos invités, qui contrairement à ce que l’on pouvait penser premièrement n’a absolument rien d’un giallo, est un joli tour de force, un thriller psychologique qui déjoue souvent les attentes des spectateurs et qui demeure particulièrement efficace. Une bien belle découverte.

Deux hommes et une femme – Mario, Franco, Eliana – braquent un bijoutier milanais, tandis que le cerveau du coup, Eddie, observe cet événement du café situé en face de la boutique. Pendant le coup, un échange de tirs. Le fils du bijoutier et un client meurent, Franco est grièvement blessé. Avec celui-ci, les bandits parviennent à s’enfuir en voiture. Ils changent de véhicule, puis atteignent la périphérie de Milan où, suivant les instructions d’Eliana, ils s’incrustent chez le docteur Guido Merenda, qu’ils obligent à opérer Franco. Ils s’installent chez lui en attendant qu’Eddie les rejoigne. Bien que vivant sous le même toit, Guido Merenda et sa femme Mara se détestent. La seconde en profite pour se rapprocher étrangement d’Eliana, tandis que Mario s’excite de plus en plus en sa présence.

L’histoire est simple, mais rudement maline et parvient à nous prendre par surprise dans la dernière partie, avec un twist, que franchement nous n’avions pas vu venir. Les Tueurs sont nos invités peut faire penser aux Chiens de pailleStraw Dogs de Sam Peckinpah, mais aussi aux VisiteursThe Visitors d’Elia Kazan, à La Dernière Maison sur la gaucheThe Last House on the Left de Wes Craven et La Maison des otagesThe Desperate Hours de William Wyler, tous sortis avant le film de Vincenzo Rigo. Si l’Italie surfera également sur les sous-genres horrifiques que sont le home invasion et le Rape & Revenge, Gli assassini sono nostri ospiti trouve son ton personnel, sans en faire trop, en créant un vrai suspense et en mettant mal à l’aise comme il le faut. Si la scène de séduction suivie d’un pelotage en bonne et due forme entre la belle – et hot – Margaret Lee (Le Trône de feu, Sais-tu ce que Staline faisait aux femmes ?, Le Soleil des voyous, Le Cirque de la peur) et l’étonnante Livia Cerini (vue dans Nous nous sommes tant aimés ! d’Ettore Scola) est aussi gratuite que plaisante, on ne peut s’empêcher de rire dès que le saxophone retentit sur les échanges de regards de b(r)aise.

Mais en dehors de ce petit bonus qui fera plaisir aux (a)mateurs de jolies nanas qui se touchent, Les Tueurs sont nos invités tient la route et repose sur une très bonne distribution sur laquelle s’impose Anthony Steffen. Après Tropique du Cancer d’Edoardo Mulargia, L’Appel de la chair et Viva Django ! d’Emilio Miraglia, avec lesquels il souhaitait s’éloigner du western qui lui a valu une renommée en Europe, le comédien joue habilement de ses airs suintants face aux deux actrices susmentionnées, mais aussi et surtout face au robuste Giuseppe Castellano. Passé à la postérité avec Le Continent des hommes poissonsL’Isola degli uomini pesce de Sergio Martino à la fin des années 1970, l’acteur aura marqué les fans de cinéma d’exploitation, en passant d’un genre à l’autre et en intégrant la célèbre rubrique « On ne sait jamais comment ils s’appellent ». Il est la bombe à retardement dans Les Tueurs sont nos invités dans le rôle de Mario, prêt à exploser dès que la tension se resserre, la main sur la pétoire, l’autre sur la braguette, surtout quand il découvre que madame Malerba a comme qui dirait le feu au cul. L’autre personnage qui reste en mémoire après le visionnage est le Commissaire Di Stefano, génialement incarné par Luigi Pistilli (Cadavres exquis de Francesco Rosi, Exorcisme tragique de Romano Scavolini, La Baie sanglante de Mario Bava, De la part des copains de Terence Young, Texas Adios de Ferdinando Baldi), qui tire son épingle du jeu avec son jeu en retenue et ses répliques cinglantes.

On ressort comblés et ravis de Gli assassini sono nostri ospiti qui accroche d’emblée l’audience grâce à un montage nerveux, pour ne plus la lâcher durant 90 minutes. Disons-le, c’est un coup de coeur.

LE BLU-RAY

Les Tueurs sont nos invités arrive dans l’escarcelle du Chat qui fume, directement en Haute-Définition. Le disque est solidement ancré dans un luxueux Digipack à trois volets, glissé dans un fourreau cartonné liseré bleu, magnifique illustré par le talentueux Frédéric Domont, qui a d’ailleurs autant de bon goût dans son travail qu’en littérature et bien sûr en septième art. Nous le saluons bien amicalement. Le menu principal est animé et musical. Édition limitée à 1000 exemplaires, version intégrale.

Un seul supplément, mais de choix, sur cette édition ! Il s’agit d’un beau et excellent moment passé en présence de Vincenzo Rigo (47’), qui revient longuement, posément et de façon passionnante sur son parcours atypique. De ses débuts au cinéma, à la genèse des Tueurs sont nos invités, en passant par ses intentions, les partis-pris, les lieux et conditions de tournage, le casting (les acteurs en prennent pour leur grade, Anthony Steffen et son jeu caricatural, Margaret Lee « charismatique, mais pas belle », Gianni Dei un « casse-couilles insipide » qui l’irritait…), les problèmes avec la censure sur la scène saphique, la musique et le triomphe du film, tout y est abordé avec franchise au cours de cet entretien. Souvent très émouvant, Vincenzo Rigo se souvient du plaisir d’avoir assisté à la projection des Tueurs sont nos invités dans la salle prestigieuse remplie de spectateurs du cinéma Odéon à Milan, « un plaisir indescriptible ».

L’Image et le son

Comme à son habitude, Le Chat qui fume présente une copie entièrement restaurée des Tueurs sont nos invités, qui demeurait jusqu’alors inédit en DVD et Blu-ray dans nos contrées. Force est de constater que le film de Vincenzo Rigo n’a probablement jamais été aussi éclatant. Les couleurs sont lumineuses (aaaah les yeux de Livia Cerini), la stabilité jamais prise en défaut, le piqué pointu sur les scènes diurnes, mais aussi (et c’est sans doute sur ce point que se voit le plus le lifting 4K) sur les séquences tamisées ou sur les séquences de nuit, où la texture argentique demeure solidement équilibrée. Il y a de quoi s’extasier devant la magnificence de ce master Haute-Définition (une première mondiale), qui offre un confort de visionnage total pour apprécier la composition des plans du réalisateur et directeur de la photographie. Blu-ray au format 1080p.

Propre, le mixage italien DTS HD Master Audio Mono 2.0 ne fait pas d’esbroufe et restitue les dialogues avec suffisamment de coffre (même si certains échanges restent étonnamment sourds), laissant une belle place à la musique.

Crédits images : © Le Chat qui fume / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

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