Test Blu-ray / Les Parents terribles, réalisé par Jean Cocteau

LES PARENTS TERRIBLES réalisé par Jean Cocteau, disponible en Combo Blu-ray + DVD depuis le 16 septembre 2025 chez Rimini Éditions.

Acteurs : Jean Marais, Josette Day, Yvonne de Bray, Marcel André & Gabrielle Dorziat

Scénario : Jean Cocteau, d’après sa pièce

Photographie : Michel Kelber

Musique : Georges Auric

Durée : 1h36

Date de sortie initiale : 1948

LE FILM

Michel vit chez ses parents, Yvonne et Georges. Sa mère est possessive et jalouse. Au cours d’une nuit passée hors du domicile familial, le jeune homme fait la connaissance de Madeleine, dont il tombe amoureux. Yvonne est bien décidée à s’opposer à cette liaison.

À la base des Parents terribles, il y a bien sûr une pièce de théâtre, créée par Jean Cocteau lui-même dès novembre 1938 au Théâtre des Ambassadeurs à Paris. Un succès public monstre, mais un accueil froid, ou plutôt incendiaire de la part d’une grande partie de la critique, qui s’en prenait avant tout à l’auteur lui-même, qui selon ses dires, s’était beaucoup amusé à écrire une pièce de boulevard. Accompagnée d’un parfum de scandale, la pièce fut finalement interdite sous l’Occupation, sous prétexte qu’elle véhiculait une image immorale de la famille. Dix ans plus tard, après le triomphe international de La Belle et la Bête (4,2 millions d’entrées rien qu’en France) et le succès (moindre) de L’Aigle à deux têtes, Jean Cocteau décide de revenir à ses fameux Parents terribles et décide d’adapter sa pièce au cinéma, en reprenant quasiment le même casting. S’il faut accepter le fait que Jean Marais est désormais âgé de 35 ans, ce qui n’est guère réaliste pour incarner un jeune homme de 22 printemps, Les Parents terribles version grand écran ne s’enferme pas dans le piège du simple théâtre filmé, malgré l’ouverture montrant un rideau baissé et qui se met en mouvement après les fameux trois coups frappés. Jean Cocteau s’éloigne du simple champ-contrechamp et le réalisateur, très à l’aise avec la grammaire cinématographique, use du gros plan, du hors-champ, tout en livrant une vraie leçon de montage, épaulé pour cela par l’experte en la matière, Jacqueline Sadoul (Échec au porteur, La Femme et le pantin, Meurtre à Montmartre). Loin, très loin de ce que les détracteurs habituels de Jean Cocteau ont souvent fustigé, Les Parents terribles n’a rien de poussiéreux dans sa thématique. Certes, le jeu très emphatique de certains comédiens a pris du plomb dans l’aile, celui de Jean Marais surtout, mais l’histoire demeure foncièrement moderne, culottée, étonnante, bouleversante et teintée d’un humour noir à la fois provocateur et revigorant. Assurément l’un des meilleurs films de l’illustre Jean Cocteau et l’un de ses plus faciles d’accès.

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Test Blu-ray / Martin Roumagnac, réalisé par Georges Lacombe

MARTIN ROUMAGNAC réalisé par Georges Lacombe, disponible en édition Digibook – Blu-ray + DVD + Livret le 28 octobre 2022 chez Coin de Mire Cinéma.

Acteurs : Marlene Dietrich, Jean Gabin, Daniel Gélin, Lucien Nat, Jean Darcante, Henri Poupon, Marcel André, Margo Lion, Marcel Herrand, Jean d’Yd, Marcel Peres, Paul Amiot, Camille Guerini…

Scénario : Pierre Véry et Georges Lacombe, d’après le roman de Pierre-René Wolf

Photographie : Roger Hubert

Musique : Marcel Mirouze

Durée : 1h43

Date de sortie initiale : 1946

LE FILM

Dans une petite ville de province, Blanche Ferrand espère épouser un riche consul, Monsieur de Laubry, dont la femme est gravement malade. Un soir, elle rencontre Martin Roumagnac, entrepreneur en maçonnerie, qui tombe éperdument amoureux d’elle. C’est le début d’une liaison passionnée, à laquelle Blanche se prête d’abord par fantaisie puis par amour. À la mort de la femme du consul, celui-ci somme Blanche de faire un choix.

« Le seul film du couple mythique Dietrich/Gabin » annonçait l’affiche de la ressortie de Martin Roumagnac en mai 2022. À l’origine, celui-ci devait être Les Portes de la nuit, sous la direction de Marcel Carné, mais Marlene Dietrich refusant d’interpréter la fille d’un collaborateur, décline cette opportunité. Possédant les droits du livre Martin Roumagnac de Pierre-René Wolf depuis quelques années (avant même la Seconde Guerre mondiale), Jean Gabin rebondit immédiatement et propose l’adaptation (refusée au préalable par Marcel Carné et Jacques Prévert) au réalisateur Georges Lacombe (1902-1990). Ce sera le retour du comédien sur le sol français après un court exil à Hollywood et son engagement (sous son vrai nom) au sein des Forces françaises combattantes, mais aussi le premier long-métrage de celle qui est alors sa compagne, dans la langue de Molière, dans laquelle elle s’exprime divinement bien. Joli succès dans les salles avec 2,5 millions de spectateurs réunis dans les salles en décembre 1946, la critique n’est cependant guère au rendez-vous. De plus, la fin du tournage a été marquée par la rupture consommée entre les deux stars, Marlene Dietrich voulant retourner sur le sol de l’Oncle Sam, tandis que Jean Gabin désire rester définitivement en France pour relancer sa carrière et pour fonder une famille. Martin Roumagnac demeure donc fondamentalement imprégné par cet événement, mais reste surtout un drame sentimental poignant, merveilleusement incarné par les deux têtes d’affiche, dont la tension sexuelle est par ailleurs fort présente pour un film des années 1940 et qui fera grincer la censure américaine, qui n’hésitera pas à couper pas moins d’une demi-heure pour son exploitation aux États-Unis. Assurément méconnu, Martin Roumagnac offre à Jean Gabin un rôle étonnant, qui rappelle parfois celui qu’il campait dans La Belle équipe de Julien Duvivier dix ans auparavant et qu’il interprétera dix ans plus tard dans Le Sang à la tête de Gilles Grangier. Un colosse aux pieds d’argile, dont la silhouette trapue contraste avec une voix légère et insouciante, face à sa partenaire qui dissimule au contraire une fragilité et un manque d’assurance derrière un masque de femme sûre d’elle et séductrice. La rencontre à l’écran des deux monstres fait bien sûr des étincelles.

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