Test 4K UHD / La Traque, réalisé par Serge Leroy

LA TRAQUE réalisé par Serge Leroy, disponible en Combo Blu-ray / 4K UHD chez Le Chat qui fume.

Acteurs : Mimsy Farmer, Jean-Pierre Marielle, Jean-Luc Bideau, Michael Lonsdale, Michel Constantin, Philippe Léotard, Michel Robin, Paul Crauchet, Gérard Darrieu, Georges Géret…

Scénario : André-Georges Brunelin

Photographie : Claude Renoir

Musique : Giancarlo Chiaramello

Durée : 1h35

Date de sortie initiale : 1975

LE FILM

En vue de louer une propriété, Helen Wells, Anglaise trentenaire travaillant à l’Université de Caen, se rend dans un hameau situé près d’Alençon. Elle y fait la connaissance de quelques bourgeois et parvenus liés par une passion commune : la chasse. Parmi eux, les frères Danville, Albert et Paul, ferrailleurs de profession. Le cadet, Paul, tombe immédiatement sous le charme de Helen. Tandis qu’elle se promène dans la forêt, la jeune femme croise à nouveau les deux hommes, accompagnés de leur ami Chamond. Les deux frères se montrent grossiers, le ton monte jusqu’à l’altercation. Paul se jette sur Helen et la viole, sous le regard complaisant d’Albert. Mais un autre drame va bientôt survenir…

Nous ne sommes pas des gens facilement soupçonnables…

Jean-Pierre Marielle, Jean-Luc Bideau, Michael Lonsdale, Michel Constantin, Philippe Léotard, Paul Crauchet, Michel Robin, Gérard Darrieu et Georges Géret lancés dans une chasse à l’homme, ou plutôt « à la femme », en l’occurrence interprétée par Mimsy Farmer ? D’où sort ce film ? Longtemps invisible et/ou indisponible, La Traque est un thriller foudroyant, un survival magistral doublé d’un drame social virtuose, qui agit toujours comme un vrai coup de tonnerre au sein du cinéma français. Devant nos yeux horrifiés, Mimsy Farmer, beauté diaphane qui rappelle parfois Mia Farrow dans Terreur aveugle – See No Evil (1971) du maître Richard Fleischer, devient une proie poursuivie par des rapaces, comme un insecte pris au piège dans une forêt humide (magnifique photo de Claude Renoir, qui fait le lien avec La Règle du jeu de son oncle) qui s’apparenterait à une toile d’où elle essaierait de s’extraire afin d’échapper à des araignées bien déterminées à la dévorer. Comme Le Vieux fusil de Robert Enrico, sorti d’ailleurs la même année, La Traque demeure une référence aussi bien pour les cinéphiles que pour les réalisateurs français ayant abordé le genre. C’est ce qu’on appelle plus communément un uppercut, un film coup de poing, un chef d’oeuvre dont le goût métallique du sang reste longtemps dans la bouche du spectateur.

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Test Blu-ray / L’Étrange Monsieur Victor, réalisé par Jean Grémillon

L’ÉTRANGE MONSIEUR VICTOR réalisé par Jean Grémillon, disponible en combo DVD/Blu-ray le 24 mars 2021 chez Pathé.

Acteurs : Andrex, Raimu, Pierre Blanchar, Madeleine Renaud, Armand Larcher, Viviane Romance, Marcelle Géniat, Georges Flamant…

Scénario : Marcel Achard, Charles Spaak & Albert Valentin

Photographie : Werner Krien

Musique : Roland Manuel

Durée : 1h42

Année de sortie : 1938

LE FILM

Un commerçant toulonnais d’apparence honorable est en fait un receleur pour une bande de malfaiteurs. Menacé de chantage, il commet un meurtre pour lequel un innocent est condamné au bagne. Sept ans plus tard, le forçat s’évade et notre commerçant le recueille…

On imagine le choc des spectateurs en découvrant Raimu, non seulement dans la peau d’un receleur, profitant de sa situation de brocanteur honnête et travailleur pour refourguer ce que ses complices ont volé la nuit d’avant, mais aussi et surtout dans celle d’un assassin. Un peu comme si Louis de Funès en venait à éliminer froidement un type qui voulait le faire chanter pour telle ou telle raison. Et même si cela est arrivé à ce dernier dans Jo (1971) de Jean Girault, il s’agissait avant tout d’une comédie, ce qui est loin d’être le cas de L’Étrange Monsieur Victor, réalisé en 1938 par Jean Grémillon. Pourtant, le film démarre comme pourrait débuter n’importe quelle chronique provençale de Marcel Pagnol (qui la même année sortait La Femme du boulanger, avec Raimu), avec tout d’abord une belle exposition du port de Toulon, ses habitants, ses rues animées, l’accent chantant. Puis, vient la présentation successive des personnages, monsieur Victor Agardanne (Raimu), son épouse Madeleine (Madeleine Renaud, sublime) qui vient d’accoucher de leur premier enfant, ainsi que le cordonnier Bastien Robineau (Pierre Blanchar) et sa femme (Viviane Romance) dont le couple bat de l’aile. Sur un scénario coécrit par Marcel Achard, Charles Spaak et Albert Valentin, qui inspirera grandement Henri Decoin pour Le Bienfaiteur (1942), Jean Grémillon dévoile la face cachée des hommes et des femmes en apparence bien sous tous rapports. Raimu, qui avait beaucoup critiqué le travail du réalisateur à la sortie du film malgré son succès auprès du public, trouve l’un de ses rôles les plus ambigus, les plus singuliers, les plus troublants, dont il s’acquitte admirablement.

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Test DVD / Au-delà des apparences, réalisé par Colin & James Krisel

AU-DELÀ DES APPARENCES (Last Moment of Clarity) réalisé par Colin & James Krisel, disponible en DVD le 17 février 2021 chez AB Vidéo.

Acteurs : Zach Avery, Brian Cox, Udo Kier, Samara Weaving, Karl E. Landler, Nicole Ansari-Cox, Alex Fernandez, Carly Chaikin…

Scénario : Colin & James Krisel

Photographie : Andrew Wheeler

Musique : Benjamin Patrick

Durée : 1h30

Date de sortie initiale : 2020

LE FILM

Trois ans après avoir été témoin du meurtre de sa fiancée, un homme se retrouve à la dérive, jusqu’au jour où, dans un cinéma parisien, il voit une actrice qui ressemble trait pour trait à son amour mort. Il va alors découvrir une terrible vérité…

Au-delà des apparencesLast Moment of Clarity est un premier long-métrage et cela se voit d’entrée de jeu. Cela se ressentira tout du long. Comment l’expliquer ? Dans la façon de filmer et de vouloir épater les spectateurs en voulant donner une ampleur à un cadre limité, non seulement par un budget restreint, mais aussi par un bagage technique, certes convaincant, mais scolaire. Les frères Krisel, James et Colin, sont les scénaristes et les metteurs en scène d’Au-délà des apparences, thriller néo-noir qui repose sur une esthétique léchée et soignée, ainsi que sur des comédiens bien dirigés. Pour leur coup d’essai, les réalisateurs ont également voulu rendre hommage au cinéma et à la littérature qu’ils aiment, leur film étant sans cesse imprégné par une âme hitchcockienne doublée d’un parfum fané typique d’un Pulp Magazine, sensiblement rétro, mais honnête, sincère et maîtrisée. Certes, le récit a tendance à partir dans toutes les directions, le montage est d’ailleurs le point faible du film, mais les Krisel parviennent à accrocher l’attention de leur audience du début à la fin, sur un rythme lent, mais contrôlé. Au-delà des apparences est une série B, qui ne le dissimule pas, qui transpire d’amour pour le cinéma, avec laquelle les Krisel sont visiblement heureux de s’exprimer et de démontrer ce qu’ils ont sous le capot.

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Test Blu-ray / Les Yeux de Satan, réalisé par Sidney Lumet

LES YEUX DE SATAN (Child’s Play) réalisé par Sidney Lumet, disponible en Combo Blu-ray + DVD le 16 mars 2021 chez Rimini Editions.

Acteurs : James Mason, Robert Preston, Beau Bridges, Ron Weyand, Charles White, David Rounds…

Scénario : Leon Prochnik, d’après la pièce de théâtre de Robert Marasco

Photographie : Gerald Hirschfeld

Musique : Michael Small

Durée : 1h36

Année de sortie : 1972

LE FILM

Paul Reis vient de trouver un poste de professeur de sport dans un établissement catholique pour garçons. Le jeune enseignant est très rapidement troublé par l’atmosphère qui règne au sein de la pension. De violents incidents éclatent entre plusieurs élèves et Paul ne tarde pas à penser que Joseph Dobbs et Jerome Malley, deux professeurs vénérables de l’établissement, sont à l’origine de ces débordements de violence…

La longue, prolifique, exceptionnelle et éclectique carrière de Sidney Lumet (1924-2011) est de celles qui dissimuleront probablement toujours quelques pépites méconnues. Caché par deux énormes piliers et chefs d’oeuvre gigantesques de sa filmographie, entre The Offence (1972) et Serpico (1973), Les Yeux de Satan Child’s Play est assurément l’une des œuvres les plus ignorées, obscures et incomprises du réalisateur américain. Si le titre français surfe allègrement sur le succès rencontré par les films de genre prenant le diable comme protagoniste, Child’s Play, à ne pas confondre bien sûr avec le premier volet de la saga Chucky réalisé par Tom Holland en 1988, est avant tout l’adaptation de la pièce de théâtre éponyme à succès de Robert Marasco, jouée près de 300 fois à Broadway. Par sa thématique, Les Yeux de Satan rappelle l’expérience dite de la Troisième Vague, qui proposait l’étude expérimentale et psychologique d’un régime autocratique, menée par le professeur d’histoire Ron Jones avec des élèves de première d’une école en Californie, durant l’année 1967. Au cours de ses « ateliers », cette expérience sur le nazisme, commençait à échapper au professeur, prouvant de ce fait que les sentiments pouvant emporter un pays dans le totalitarisme étaient encore vivaces. N’attendez rien de fantastique ou de surnaturel dans Child’s Play, mais préparez vous plutôt à une étude comportementale qui peut conduire les êtres les plus vulnérables à commettre l’irréparable quand ils sont influencés par un être fascinant pour sa verve, son charisme et son mode de pensée. Magistralement interprété par James Mason (qui retrouvait le metteur en scène après MI5 demande protectionThe Deadly Affair et La MouetteThe Sea Gull), Beau Bridges et Robert Preston, Les Yeux de Satan peut tout d’abord décontenancer le cinéphile, curieux de voir Sidney Lumet aborder « vraisemblablement » l’épouvante, mais au final, ce film curieux fait l’effet d’un direct à l’estomac et semble n’avoir jamais été autant actualité.

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Test DVD / L’Audition, réalisé par Ina Weisse

L’AUDITION (Das Vorspiel) réalisé par Ina Weisse, disponible en DVD le 26 octobre 2020 chez Doriane Films.

Acteurs : Nina Hoss, Simon Abkarian, Jens Albinus, Ilja Monti, Serafin Mishiev, Winnie Böwe, Sophie Rois, Thomas Thieme…

Scénario : Ina Weisse & Daphne Charizani

Photographie : Judith Kaufmann

Durée : 1h34

Date de diffusion : 2019

LE FILM

Anna Bronsky est professeure de violon au Conservatoire. Contre l’avis de ses collègues, elle impose l’admission d’un élève, en qui elle voit un grand talent. Avec beaucoup d’implication, elle prépare Alexander à l’examen de fin d’année et néglige de ce fait son jeune fils Jonas, lui aussi élève violoniste et passionné de hockey sur glace. Elle s’éloigne de son mari, si aimant à son égard, le luthier français Philippe Bronsky. A l’approche de l’audition, Anna pousse Alexander vers des performances de plus en plus exceptionnelles. Le jour décisif, un accident se produit, lourd de conséquences…

Il y a des acteurs et des actrices qui fascinent dès qu’ils apparaissent à l’écran, qui subjuguent, qui laissent sans voix, même quand justement nous ne les entendons pas, juste par leur présence physique, leur charisme, leur regard, leurs expressions. C’est le cas de l’exceptionnelle Nina Hoss, née à Stuttgart en 1975, muse du réalisateur Christian Petzold avec lequel elle a déjà tourné à six reprises depuis 2001, du téléfilm Dangereuses rencontresToter Mann à Phoenix (2014), en passant par L’Ombre de l’enfantWolfsburg (2003), Yella (2007, Ours d’argent de la meilleure actrice à la Berlinale), Jerichow (2008) et bien sûr l’extraordinaire Barbara (2012). Comme sa compatriote Hanna Schygulla avant elle, Nina Hoss hypnotise le spectateur de son talent gigantesque, aussi bien sur scène que sur le grand écran. Dans L’AuditionDas Vorspiel, le deuxième long-métrage de la réalisatrice (et actrice) Ina Weisse (Der Architekt, 2008), la comédienne est à nouveau épatante dans un rôle foncièrement ambigu, dans lequel elle s’impose et marquera autant l’esprit des cinéphiles que dans Gold (2013) de Thomas Arslan et dernièrement dans Retour à MontaukRückkehr nach Montauk (2017) de Volker Schlöndorff. Si certains penseront inévitablement à l’explosif Whiplash (2014) de Damien Chazelle, L’Audition se rapproche surtout du cinéma de Michael Haneke, de La Pianiste bien sûr, mais en trouvant sa propre singularité, avec une émotion à fleur de peau doublée d’un malaise palpable, qui s’installe et se développe jusqu’à la dernière seconde. Pour son impressionnante prestation, Nina Hoss s’est vue décerner le Prix de la meilleure actrice au Festival International du film de San Sebastián.

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Test DVD / Lovecraft Country – Saison 1

LOVECRAFT COUNTRY – SAISON 1, disponible en DVD et Blu-ray le 17 février 2021 chez HBO et Warner Bros.

Acteurs : Jurnee Smollett, Jonathan Majors, Aunjanue Ellis, Wunmi Mosaku, Abbey Lee, Jamie Chung, Jada Harris, Michael Kenneth Williams, Jordan Patrick Smith…

Scénario : Misha Green, Shannon Houston, Kevin Lau, Matt Ruff, Wes Taylor, Ihuoma Ofordire, Jonathan I. Kidd & Sonya Winton, d’après le roman de Matt Ruff.

Musique : Laura Karpman & Raphael Saadiq

Durée : 10 épisodes de 55 minutes

Date de sortie initiale : 2020

LA SAISON 1

Atticus Freeman, un jeune homme de 25 ans, son amie Letitia et son oncle George embarquent dans un road trip, à travers les États-Unis des années 1950 durant les lois Jim Crow (qui introduisaient la ségrégation dans les services publics, les lieux de rassemblement et restreignaient les interactions sociales entre Blancs et gens de couleur au strict minimum), dans l’objectif de retrouver son père disparu. Commence alors une bataille pour survivre et surpasser le racisme de l’Amérique blanche, tout en affrontant des monstres terrifiants qui semblent tout droit sortis des écrits de Lovecraft.

« H.P. Lovecraft était un écrivain d’horreur extrêmement influent, populaire et talentueux, mais aussi un suprémaciste blanc notoire. Les gens de couleur étaient jusqu’à présent privés des fictions populaires dites de genre, réservées au monde des blancs ». Voilà l’extrait d’une interview de la showrunneuse Misha Green, réalisée à l’occasion de la diffusion sur HBO de la série Lovecraft Country dès août 2020. N’y allons pas par quatre chemins, cette adaptation du roman éponyme de Matt Ruff (2016) est un plantage monumental, qui partait pourtant sur de très bonnes bases et un épisode pilote très intéressant et prometteur, par ailleurs mis en scène par le français Yann Demange (‘71). Malheureusement, on déchante dès le deuxième épisode, d’une part parce que la série bifurque brutalement vers le fantastique et le pseudo-épouvante, d’autre part pour son aspect gloubi-boulga, sa morale douteuse (Jordan Peele étant de la partie, il n’y a donc aucune surprise et tous les blancs sont les vrais monstres de la série), l’absence de charisme de l’acteur principal Jonathan Majors, la laideur des effets spéciaux, son scénario qui vire au nawak et qui s’apparente finalement plus à un ersatz de The Mortal Instruments qu’à un hommage aux films de monstres des années 1950-60. Alors oui, on a déjà vu pire, mais allez au bout des dix épisodes de Lovecraft Country est pénible et harassant, surtout que la série ne va sûrement pas en s’améliorant au fil d’une intrigue qui devient incompréhensible, prétentieuse et involontairement comique. Passez votre chemin.

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Test DVD / Miss, réalisé par Ruben Alves

MISS réalisé par Ruben Alves, disponible en DVD et Blu-ray le 17 février 2021 chez Warner Bros. Entertainment France.

Acteurs : Alexandre Wetter, Pascale Arbillot, Isabelle Nanty, Thibault de Montalembert, Stéfi Celma, Quentin Faure, Moussa Mansaly, Hedi Bouchenafa…

Scénario : Elodie Namer, Ruben Alves & Cecilia Rouaud

Photographie : Renaud Chassaing

Musique : Lambert

Durée : 1h43

Année de sortie : 2020

LE FILM

Alex, petit garçon gracieux de 9 ans qui navigue joyeusement entre les genres, a un rêve : être un jour élu Miss France. 15 ans plus tard, Alex a perdu ses parents et sa confiance en lui et stagne dans une vie monotone. Une rencontre imprévue va réveiller ce rêve oublié. Alex décide alors de concourir à Miss France en cachant son identité de garçon. Beauté, excellence, camaraderie… Au gré des étapes d’un concours sans merci, aidé par une famille de cœur haute en couleurs, Alex va partir à la conquête du titre, de sa féminité et surtout, de lui-même…

Chaque année, le cinéma français présente – forcément à un moment ou à un autre – un film qui surfe sur les questions politico-sociales qui font bouillir la marmite des journalistes et des journaleux (ou journal-haineux, c’est selon), en se donnant bonne conscience, en pensant dénoncer les préjugés, les amalgames, les discours extrémistes, etc, dans l’espoir de faire évoluer les mentalités, tout en se défendant d’être militant. Révélé avec son premier long-métrage, La Cage dorée, un « feel-good movie » sans prétention qui avait su attirer plus d’1,2 millions de spectateurs dans les salles en avril 2013, Ruben Alves a pris son temps pour écrire et mettre en scène son deuxième film. Mais là où La Cage dorée faisait passer un bon moment aux spectateurs et les faisait rire avec des personnages simples, très attachants, auxquels ils pouvaient s’identifier, le réalisateur tombe dans le piège du film « à message », en livrant un long-métrage qui contredit constamment ce qu’il souhaite véhiculer, autrement dit énumérer les clichés et les caricatures, tout en s’y vautrant comme des cochons dans la gadoue, à l’instar de la séquence désormais inévitable de la danse en boite de nuit filmée au ralenti, ou celle où le personnage marche sur les trottoirs de Pigalle, avec en fond Clara Luciani (on échappe de peu à Christine and the Queens) qui miaule sa chanson Drôle d’époque. Forcément soutenu par une presse bien pensante ou à côté de la plaque (du style 20 minutes où de toute façon on aime tous les films, du moment que le buffet est bon ou que les comédiens posent pour un selfie avec le/la journaliste), Miss n’est rien d’autre qu’un ramassis d’effets éculés sur le sujet qu’il aborde, mais aussi sur ce qu’il est supposé fustiger (le besoin de genrer et de juger ceux qui échappent à la norme) et de rebondissements improbables, où l’orientation/identité sexuelle est dépeinte de telle manière qu’elle ferait passer le Pédale dure (2004) de Gabriel Aghion pour du Michelangelo Antonioni. Et mention spéciale au comédien Alexandre Wetter, à la base mannequin androgyne, qui campe un personnage aussi neurasthénique qu’agaçant à force de multiplier les mimiques de chaton. Bref, Miss est franchement déconseillé, d’une part aux allergiques habituels du cinéma français (pour une fois, ils sont excusés), d’autre part pour tous les autres. On appelle ça un Almodovar de chez Wish.

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Test Blu-ray / Police, réalisé par Anne Fontaine

POLICE réalisé par Anne Fontaine, disponible en DVD et Blu-ray + DVD le 6 janvier 2021 chez Studiocanal.

Acteurs : Omar Sy, Virginie Efira, Grégory Gadebois, Payman Maadi, Elisa Lasowski, Anne-Pascale Clairembourg, Thierry Levaret, Emmanuel Barrouyer…

Scénario : Anne Fontaine & Claire Barre, d’après le roman d’Hugo Boris

Photographie : Yves Angelo

Durée : 1h38

Date de sortie initiale : 2020

LE FILM

Virginie, Erik et Aristide, trois flics parisiens, se voient obligés d’accepter une mission inhabituelle : reconduire un étranger à la frontière. Sur le chemin de l’aéroport, Virginie comprend que leur prisonnier risque la mort s’il rentre dans son pays. Face à cet insoutenable cas de conscience, elle cherche à convaincre ses collègues de le laisser s’échapper.

Sorti quelques semaines après le soutien médiatique et polémique d’Omar Sy envers la famille Traoré, Police d’Anne Fontaine a peut-être subi les représailles de l’ensemble des spectateurs qui ont accueilli froidement, voire de manière franchement glaciale, le dix-septième long-métrage de la cinéaste qui n’aura même pas franchi la barre des 200.000 entrées. Nous ne reviendrons pas sur « l’engagement » du comédien, cela le regarde, mais disons que son discours sur son désir « d’avoir une police digne d’une vraie démocratie » a peut-être porté préjudice au film qui nous intéresse aujourd’hui. Dommage, car Police, titre sobre, évidemment déjà emprunté par Maurice Pialat en 1985, est l’une des plus belles réussites de la réalisatrice, qui démarre comme une plongée dans le quotidien de trois policiers, qui se croisent, qui s’affrontent, qui se parlent, s’entendent, « cohabitent » et s’épaulent comme ils le peuvent, avant de muer en véritable huis-clos dans une voiture de fonction, avec laquelle ils se voient confier la tâche d’escorter un prisonnier tadjik jusqu’à l’aéroport Roissy-Charles de Gaulle, où il prendra place dans un avion qui le renverra dans son pays. Tendu, Police est un drame psychologique prenant du début à la fin, formidablement interprété par son trio vedette, Omar Sy, Virginie Efira et Grégory Gadebois (son absence de l’affiche est d’ailleurs absolument scandaleuse), aux dialogues percutants et qui n’a pas peur de recourir aux silences qui en disent long sur les pensées tumultueuses des protagonistes. Séance de rattrapage obligatoire pour Police !

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Test DVD / Blackbird, réalisé par Roger Michell

BLACKBIRD réalisé par Roger Michell, disponible en DVD le 12 février 2021 chez Metropolitan Films.

Acteurs : Sam Neill, Susan Sarandon, Anson Boon, Kate Winslet, Rainn Wilson, Lindsay Duncan, Bex Taylor-Klaus & Mia Wasikowska.

Scénario : Christian Torpe

Photographie : Mike Eley

Musique : Peter Gregson

Durée : 1h33

Date de sortie initiale : 2020

LE FILM

Lily et son mari Paul, décident de réunir enfants et petits-enfants pour un week-end dans leur maison de campagne. Trois générations d’une même famille se retrouvent, avec Jennifer, l’aînée, son mari Michael et leur fils de 15 ans, Jonathan, mais aussi Anna, la cadette, venue avec Chris, sa compagne. En fait, cette réunion de famille a un but bien particulier : atteinte d’une maladie dégénérative incurable, Lily refuse de subir une fin de vie avilissante et décide de prendre son destin en main. Mais tout le monde n’accepte pas cette décision. Non-dits et secrets remontent à la surface, mettant à l’épreuve et redessinant tous les liens qui unissent les membres de cette famille, alors que le temps des adieux approche…

Honnête technicien honnête, le réalisateur sud-africain Roger Michell (né en 1956), est surtout connu des spectateurs pour le carton mondial de l’année 1999 au cinéma (placé entre La Momie et Toy Story 2, et même devant Le Monde ne suffit pas), Coup de foudre à Notting Hill Notting Hill. Éclectique, passant allègrement du thriller (Dérapages incontrôlésChanging Lanes) au drame (The Mother, avec Daniel Craig qui faisait déjà la duckface), de la comédie (Morning Glory, avec la sublime Rachel McAdams) à l’évocation historique (Week-end royalHyde Park On Hudson), ou alors le tout combiné (The Duke, qui n’est pas encore sorti et qui relate le vol du tableau Portrait du duc de Wellington de Francisco de Goya à la National Gallery en 1961), Roger Michell ne s’est jamais caché d’être pour ainsi dire un « yes man », s’acquittant de sa tâche du mieux possible et en dirigeant solidement un casting toujours attractif. C’est encore une fois le cas pour son dernier film distribué dans les salles, Blackbird, remake du film danois de Bille August Stille hjerte, récompensé à quatre reprises à la Cérémonie des Bodil, l’équivalent de nos Césars en Danemark. Il n’en fallait pas plus à certains producteurs pour en acquérir les droits et de mettre un remake en route. Avec son sujet qui a tout pour faire pleurer dans les chaumières, et qui rappelle d’ailleurs le Frankie d’Ira Sachs sorti en 2019, Blackbird est donc la version américaine de Stille hjerte mise en scène par Roger Michell, drame familial qui repose en très grande partie sur ses interprètes, huit en tout et pour tout, qui réunit Susan Sarandon, Kate Winslet, Mia Wasikowska, Sam Neill, Rainn Wilson, Bex Taylor-Klaus, Lindsay Duncan et Anson Boon. Si l’on comprend d’emblée qu’on ne va pas se taper sur les cuisses devant ce mélodrame, Blackbird vaut pour le jeu maîtrisé et sans faute de cette distribution haut de gamme, ainsi que pour son approche d’un sujet qui avait tout pour faire peur, mais qui évite de tomber dans le pathos ou les effets souvent repoussants du récit basique sur la maladie.

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Test Blu-ray / The Wicker Man, réalisé par Robin Hardy

LE DIEU D’OSIER (The Wicker Man) réalisé par Robin Hardy, disponible en Combo Blu-ray + DVD le 25 novembre 2020 chez Studiocanal.

Acteurs : Christopher Lee, Edward Woodward, Britt Ekland, Diane Cilento, Ingrid Pitt, Lindsay Kemp, Russell Waters, Aubrey Morris…

Scénario : Anthony Shaffer, d’après le roman de David Pinner

Photographie : Harry Waxman

Musique : Paul Giovanni

Durée : Version cinéma (85 minutes) et Final Cut (94 minutes).

Date de sortie initiale : 1973 / 2013

LE FILM

Une lettre anonyme amène le sergent Neil Howie à venir enquêter dans une petite île écossaise sur la mystérieuse disparition d’une jeune fille. Le policier se heurte au silence inquiétant des habitants qui vont jusqu’à nier l’existence de la disparue. Peu à peu, le sergent Howie, découvre que la petite communauté, dirigée par l’excentrique lord Summerisle, regroupe les membres d’une secte païenne qui semble s’adonner à des cérémonies d’un autre âge.

Connu en France sous le titre Le Dieu d’osier, The Wicker Man, réalisé en 1973 par Robin Hardy est très souvent cité dans les tops divers consacrés aux meilleurs films britanniques. Et cette réputation n’est pas usurpée. Quasiment cinquante ans après sa sortie dans les salles et ce même si le montage aura subi quelques coupes drastiques par la censure qui voyait d’un mauvais œil qu’on s’attaque à la religion catholique de façon aussi virulente, The Wicker Man n’a absolument rien perdu de son efficacité. Foncièrement dérangeant et pourtant parcouru tout du long par un humour noir revigorant, sombre et pourtant lumineux, véritable film de genre et néanmoins inclassable, ce Dieu d’osier étonne, bouleverse et effraie, renverse les conventions, les défonce même, pour emmener là où le spectateur était loin de se douter. C’est une des références pour de nombreux aficionados de films d’épouvante, où aucune goutte de sang n’est d’ailleurs versée, mais aussi et surtout pour moult cinéastes qui ont tenté d’en plagier l’âme, le fond, l’atmosphère, sans jamais y parvenir, ou presque, comme l’a récemment démontré le très prometteur Ari Aster avec son incroyable Midsommar, sorti en 2019. Il existe aujourd’hui au moins trois montages de The Wicker Man, celui vu dans les salles en 1973, le Director’s Cut rafistolé avec difficultés – à partir d’une copie de travail appartenant à Roger Corman – et d’une durée prolongée de 15 minutes, ainsi que le Final Cut réalisé et exploité en 2013, sous la supervision de Robin Hardy, trois ans avant de s’éteindre et qui se disait très fier de cette dernière mouture, qui se rapprochait pour lui de la version la plus proche de ses intentions originales.

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