Test Blu-ray / Un flic aux trousses, réalisé par Jeff Kanew

UN FLIC AUX TROUSSES (Eddie Macon’s Run) réalisé par Jeff Kanew, disponible en DVD et combo Blu-ray + DVD le 6 juillet 2021 chez Elephant Films.

Acteurs : Kirk Douglas, John Schneider, Lee Purcell, Lisa Dunsheath, Leah Ayres, Tom Noonan, J.C. Quinn, Gil Rogers, Jay O. Sanders, Todd Allen…

Scénario : Jeff Kanew, d’après le roman de James McLendon

Photographie : James A. Contner

Musique : Norton Buffalo

Durée : 1h35

Date de sortie initiale: 1983

LE FILM

Eddie Macon, jeune homme condamné très durement alors qu’il n’a commis qu’un délit mineur, s’échappe de la prison de Huntsville au Texas et fuit à Laredo. Son but est simple : franchir la frontière Mexicaine pour enfin retrouver sa femme et son fils. Carl Marzack, le policier taciturne qui l’a arrêté la première fois, se lance à sa poursuite…

Dans les années 1980, Kirk Douglas, la soixantaine déjà bien entamée, commence à se faire rare sur le grand écran. Durant la décennie, il ne tournera que six longs-métrages, dont Saturn 3 de Stanley Donen, Home Movies de Brian De Palma et Nimitz, retour vers l’enfer de Don Taylor. Juste après le western australien L’Homme de la rivière d’argent de George Miller, le comédien revenait sur la terre de l’oncle Sam pour y tourner un film policier intitulé Un flic aux trousses Eddie Macon’s Run, réalisé par Jeff Kanew (né en 1944). Si en VF le flic en question est bien campé par la légende hollywoodienne, le Eddie Macon du titre original est quant à lui interprété par John Schneider, star de la série Shérif, fais-moi peur The Dukes of Hazzard (le cousin blond, Bo Duke, c’était lui !), à l’époque le show le plus regardé aux Etats-Unis après Dallas. C’est dire la popularité de l’acteur alors âgé de 22 ans. La fin de la série se profile et John Schneider commence à s’intéresser au cinéma. Avec Un flic aux trousses, il fait sa première apparition sur le grand écran et s’en sort remarquablement bien dans ce film policier très ancré dans son époque et qui annonce d’ailleurs l’ambiance de quelques films de la Cannon qui fleuriront peu de temps plus tard. Comme son titre anglais l’indique, il s’agit plus d’un « run movie » qu’un road movie, le personnage – très sympathique – d’Eddie Macon, prisonnier passant toute la première partie du film à courir après être parvenu à s’échapper, afin de rejoindre son épouse et leur fils de l’autre côté du Rio Grande. Mais c’était sans compter sur l’acharnement d’un vieux flic retors à qui Kirk Douglas prête volontiers sa fossette et son sourire carnassier. Tout cela pour dire qu’Un flic aux trousses n’est sans doute pas un sommet dans la carrière exceptionnelle du monstre hollywoodien, mais n’en demeure pas moins fort divertissant, bien mené, drôle et très agréable à suivre.

La première évasion n’a pas été couronnée de succès pour Eddie Macon, jeune homme condamné pour un crime qu’il n’a pas commis, il a fait l’erreur d’aller retrouver sa femme. Première piste à vérifier pour le vieux flic Carl Marzack qui l’a pincé. Tirant les leçons de cette expérience, Eddie prépare sa seconde tentative dans les moindres détails. Il la réussit et traverse les étendues désolées du Texas, traqué par ce policier teigneux.

Si Eddie Macon (John Schneider donc, qui interprète aussi deux titres de la B.O) ne fait que détaller comme un lapin durant le premier acte, le réalisateur Jeff Kanew profite de ces scènes pour y intégrer des flashbacks qui reviennent sur le passé récent de son personnage, comme des souvenirs qui lui reviennent en tête pendant qu’Eddie enchaîne les kilomètres. Scénariste, monteur et réalisateur, Jeff Kanew démontre qu’il en a sous le capot en terme de narration et de mise en scène, son film se laissant voir encore très facilement presque quarante ans après sa sortie. A travers ces souvenirs dispersés durant la cavale d’Eddie, on comprend que ce dernier a déménagé de la Floride au Texas afin de mieux subvenir aux besoins de sa femme Chris (Leah Ayres, vedette de Carnage The Burning de Tony Maylam et de Bloodsport Tous les coups sont permis de Newt Arnold aux côtés de JCVD) et de leur jeune fils Bobby, qui souffre d’une maladie du sang. Son tempérament le conduit à quelques infractions mineures qui le mènent en prison, mais après une tentative d’évasion infructueuse, il se retrouve avec une peine excessivement sévère. Face à cette injustice, Eddie et Chris élaborent un plan d’évasion. Après s’être d’abord impliqué dans le rodéo de la prison et s’être planqué dans un camion à bestiaux, Eddie entame une longue course à travers le pays, dans la nature sauvage du Texas, pour tenter d’atteindre la frontière américano-mexicaine à Laredo, où lui et sa famille ont prévu de se retrouver, avant de prendre définitivement le large. En cours de route, il est poursuivi par Carl Marzack, un flic spécialisé dans les prisonniers en cavale, qui avait déjà capturé Eddie lors de sa précédente tentative d’évasion. Sur son chemin, Eddie est pris pour un voleur de bétail par une famille d’éleveurs dégénérée (et tuyau de poêle), les Potts (on reconnaît Tom Noonan, le Francis Dollarhyde du Sixième Sens – Manhunter de Michael Mann, le Cain de RoboCop 2 d’Irvin Kershner), qui le kidnappent, le séquestrent et sont même sur le point de le pendre. Eddie parvient à s’échapper. Ensuite, il rencontre Jilly Buck (ravissante Lee Purcell), qu’Eddie aide à se tirer des pattes d’un violeur. Jilly accepte rapidement de l’aider dans son plan, tandis que Marzack se rapproche de sa proie.

On ne s’ennuie pas une seconde devant Un flic aux trousses. Jeff Kanew, révélé en 1979 avec Natural Enemies, fait preuve de beaucoup d’humour décalé, qui sera aussi remarqué dans ses films suivants, Les Tronches Revenge of the Nerds, Touché ! Gotcha et Coup double Tough Guys, pour lequel il retrouvera Kirk Douglas en 1986. Certains pourront évidemment reprocher à Eddie Macon’s Run de tirer sur la corde sensible avec l’enfant malade, mais en contrepartie le réalisateur tire à boulets rouges sur tout et sur tout le monde. Certains personnages sont montrés comme des cinglés (la famille de fermiers), d’autres comme des racistes, des homophobes (« Un type qui laisse sa femme boire toute seule, c’est sûrement le roi des pédés ! »), des obsédés sexuels (les autres bouseux quoi), d’autres comme des profiteurs dès qu’ils ont une once de pouvoir sur l’autre, à l’instar du patron qui arnaque Eddie, interprété par John Goodman dans son premier rôle au cinéma. Si les faits et gestes de Carl ‘Buster’ Marzack s’accompagnent toujours de violence (il faut voir les interrogatoires musclés en version française), on comprend finalement que ce flic au bout du rouleau (même s’il est capable de battre n’importe qui, sans se forcer, en faisant des pompes devant la télé) sait qu’il effectue probablement sa dernière enquête et souhaite se prouver qu’il est encore – un peu – dans le coup et fait pour ce boulot. Avant de conclure par une réplique qui sera immortalisée par Danny Glover dans la tétralogie de L’Arme fatale, « Je suis trop vieux pour ces conneries ».

Kirk Douglas s’éclate avec ce personnage au langage fleuri, dialogues encore plus poétiques en français quand le comédien Roger Rudel déclame de sa voix légendaire « Votre trou du cul de mari et votre beau-frère à la con vont être tirés d’affaire ! ». On adore et on vous le conseille.

LE BLU-RAY

Invisible depuis de très nombreuses années, on peut même dire quelques décennies, Un flic aux trousses est exhumé par Elephant Films en DVD et en combo Blu-ray + DVD. Visuel élégant repris d’une des affiches d’exploitation, qui illustre aussi le menu principal, très légèrement animé et musical. Jaquette réversible.

On était prêt à le parier, Julien Comelli nous présente Un flic aux trousses (21’). Le journaliste en culture-pop indique que le film de Jeff Kanew, monté autour de Kirk Douglas et de John Schneider, avait complètement disparu des radars après son passage dans les vidéoclubs. Puis, il évoque la carrière du réalisateur (on notera d’ailleurs quelques digressions), avant de parler plus longuement de sa redécouverte personnelle d’Un flic aux trousses, « un choc culturel […] à voir comme un témoignage historique, un film qui ne pourrait plus se faire aujourd’hui, qui montre ou dit des choses impensables de nos jours ». S’il exagère sans doute un peu, surtout quand il dit que la VF du film (qu’il conseille absolument) a peut-être inspiré La Classe Américaine à Michel Hazanavicius et donne à Eddie Macon’s Run un aspect de comédie involontaire et foncièrement réac (ce en quoi nous sommes en total désaccord), Julien Comelli en profite pour rendre un bel hommage aux plus grandes voies françaises du doublage de l’époque, dont Roger Rudel et Jean-Claude Michel, avant d’énumérer quelques pépites de la série B et Z rendues célèbres pour leur VF nawak (Eaux sauvages, Femmes en cages, Maîtresses très particulières). Enfin, le complice d’Elephant Films met en relief les différentes inspirations et influences qui se font ressentir du début à la fin, comme celle de Guet-Apens de Sam Peckinpah (pour le final), Midnight Express d’Alan Parker (pour l’innocent accusé à tort) et même de Massacre à la tronçonneuse de Tobe Hooper (pour le portrait des texans quelque peu dégénérés).

L’interactivité se clôt sur un lot de bandes-annonces.

L’Image et le son

Jusqu’alors inédit dans nos contrées en DVD et surtout en Haute Définition, Un flic aux trousses fait son apparition en galette bleue chez Elephant Films. Ce Blu-ray est au format 1080p. Le master, même s’il est évident que celui-ci affiche déjà quelques heures de vol, est de bonne facture. L’image est stable et excellemment nettoyée, les couleurs sont ravivées, les contrastes agréables. Le cadre est habilement exploité avec une profondeur de champ fort appréciable et un piqué aiguisé à souhait. Hormis quelques plans flous et un grain argentique pour le coup vraiment trop lissé, ce Blu-ray saura contenter les cinéphiles et amateurs de bonnes séries B.

Si Julien Comelli exagère en déclarant que la VF d’Un flic aux trousses donne au film un aspect comédie involontaire, il n’en demeure pas moins que le doublage est fantastique et mérite bien qu’on le visionne au moins une fois (ou plus si vous le souhaitez) ainsi. D’autant plus que la piste DTS HD Master Audio 2.0 se révèle être tout aussi réussie que la version originale, dynamique (percutante même), riche (peut-être moins sur les bruitages) et très propre. Les sous-titres français ne sont pas imposés en anglais.

Crédits images : © Elephant Films / Universal / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

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