L’APPEL DE LA CHAIR (La Notte che Evelyn uscì dalla tomba) réalisé par Emilio Biraglia, disponible en Combo Blu-ray + DVD le 7 septembre 2021 chez Artus Films.
Acteurs : Anthony Steffen, Marina Malfatti, Enzo Tarascio, Giacomo Rossi Stuart, Umberto Raho, Roberto Maldera, Joan C. Davis, Erika Blanc…
Scénario : Fabio Pittorru & Massimo Felisatti
Photographie : Gastone Di Giovanni
Musique : Bruno Nicolai
Durée : 1h39
Date de sortie initiale : 1971
LE FILM
Depuis la mort de son épouse Evelyn, Alan Cunningham, un lord anglais, voit sa santé mentale s’effondrer. Il passe son temps à se livrer à des jeux sadomasochistes avec des prostituées dans son château en ruines. Un jour, il rencontre la belle Gladys, sosie parfait d’Evelyn. Il la demande en mariage et la fait venir vivre au château. Peu à peu, il devient alors victime d’hallucinations, hanté par le fantôme de sa première femme.
Il y a de fortes chances que le nom d’Emilio Miraglia (1924-1982, même si son décès reste incertain) ne vous dise rien, à moins d’être calé dans le domaine du giallo, il y en a forcément, mais néanmoins ce cinéaste n’aura réalisé que six longs-métrages en l’espace de cinq années, de 1967 à 1972, L’Appel de la chair – La Notte che Evelyn uscì dalla tomba, sorti en France en VHS sous le titre Holocauste pour une vierge ou bien encore La Crypte du fou, étant son quatrième film. Dans celui-ci, le metteur en scène reprend quelques motifs apparus dans ses précédents opus, dont une histoire d’héritage qui était déjà au centre de son premier coup d’essai La Peur aux tripes – Assassination avec Henry Silva, qui tenait par ailleurs le rôle titre de Ce salaud d’inspecteur Sterling – Quella carogna dell’ispettore Sterling (1969). L’Appel de la chair est un giallo pour ainsi dire gothique, empreint de fantastique, qui se démarque du tout venant à l’époque où fleurissaient les thrillers transalpins, qui envahissaient les salles du monde entier. Produit par Antonio Sarno (Parlons femmes et Drame de la jalousie d’Ettore Scola), ce film demeure aujourd’hui l’un des parfaits représentants du genre, à la fois psychologique, tendu, rempli de rebondissements, de faux-semblants et de magnifiques poitrines dénudées.
Ébranlé par la mort de son épouse infidèle Evelyn, l’aristocrate Alan Cunningham a été interné dans un asile psychiatrique. Aussitôt relâché, il ramasse des prostituées rousses dans les boîtes de nuit pour les ramener dans son château en partie en ruines pour y exercer des jeux sadomasochistes avec elles. Comme elles ressemblent à sa femme défunte, qui le hante dans ses rêves, il devient fou et les tue. Son garde-chasse, qui n’est d’autre que le frère d’Evelyn, garde le silence en échange d’une somme d’argent que lui remet Alan. Un jour, grâce à son cousin George, il rencontre une superbe rousse, Gladys, qui lui rappelle évidemment Evelyn. Suivant le conseil de George, Alan l’épouse pour tenter de se soigner car elle est le sosie de son ancienne épouse. Une fois la nouvelle Lady Cunningham installée avec lui dans son château, il devient la proie d’hallucinations et croit entendre le fantôme de son ex-épouse, Evelyn, qui est bien décidée à le persécuter…
L’Appel de la chair est construit autour du personnage incarné par Anthony Steffen (1929-2004), apparu presque vingt ans auparavant dans Les Egarés – Gli Sbandati de Francesco Maselli, qui sortait alors de Viva Django ! d’Edoardo Mulargia et qui se préparait à s’envoler pour Haïti afin d’y tourner Tropique du Cancer – Al Tropico del Cancro avec ce dernier et Giampaolo Lomi. S’il demeure l’une des plus grandes stars du western italien (il détient d’ailleurs le record de films du genre en tête d’affiche face à Franco Nero, Gianni Garko, Giuliano Gemma et Gian Maria Volonté), Anthony Steffen, de son vrai nom Antonio Luiz de Teffé von Hoonholtz ou Antonio de Teffè, est impeccable aussi dans ce registre, qu’il avait déjà abordé l’ année précédente dans Les Sept Châles de soie jaune – Sette scialli di seta gialla de Sergio Pastore. D’entrée de jeu, l’audience est invitée à suivre le parcours et l’évolution du trauma d’Alan, que l’on voit en train de tenter de s’évader d’une clinique psychiatrique. On peut donc se poser la question tout le reste du film si ce que nous voyons n’est pas un rêve du personnage principal, que l’on imagine drogué par quelques substances destinées à l’apaiser. L’Appel de la chair est un thriller rudement mené, marqué par de magnifiques décors, dont celui du Palais Porto situé en Vénétie, une superbe photographie de Gastone Di Giovanni (Les Obsessions sexuelles d’un veuf, Vicieuse et manuelle), une partition très inspirée de Bruno Nicolai, un casting féminin solide composé entre autres de la mythique Erika Blanc (Nos héros réussiront-ils à retrouver leur ami mystérieusement disparu en Afrique ?, Amour et mort dans le jardin des Dieux, Au service du diable, Opération peur, Tire, Django, tire !), Marina Malfatti (Toutes les couleurs du vice, Le Tueur à l’orchidée) et Maria Teresa Toffano, dont la poitrine offerte aux spectateurs restera longtemps gravée dans leur mémoire.
Alors, est-ce que tout ce que nous voyons ne serait qu’un songe chimique d’Alan et une plongée tortueuse dans un esprit perturbé ? Ces étranges personnages, le frère d’Evelyn, la tante invalide, ces meurtres successifs, ces jeunes femmes rousses destinées à être flagellées – puis tuées – dans une pièce secrète du château, ce quasi-sosie de la défunte épouse d’Alan seraient-ils le(s) fruit(s) de son imagination ? A vous de voir, toujours est-il qu’Emilio Miraglia et sa comédienne Marina Malfatti remettront le couvert l’année suivante pour La Dame rouge tua sept fois – La dama rossa uccide sette volte, qui sera l’ultime long-métrage du cinéaste, ainsi qu’un film-miroir à L’Appel de la chair. Un fabuleux doublé.
LE COMBO BLU-RAY + DVD
Nous avons déjà passé en revue Les Contrebandiers de Santa Lucia et Flics en jeans, sortis chez Artus Films le 7 septembre. Parallèlement à ces deux polars, l’éditeur sort aussi deux gialli, tous deux réalisés par Emilio Miraglia, L’Appel de la chair et La Dame rouge tua sept fois. Aujourd’hui, nous nous penchons sur L’Appel de la chair, qui apparaît Artus Films dans un superbe combo Blu-ray + DVD, disposés dans un Digipack à deux volets magnifiquement illustrés, glissé dans un fourreau cartonné. Très belle sérigraphie des deux disques, qui reprend la couleur jaune emblématique du genre. Le menu principal est fixe et musical.
C’est toujours un plaisir de le lire ou de l’écouter, comme cela a déjà été le cas sur les éditions des Tueurs de l’Ouest, Opération K, Société anonyme anti-crime et Avoir vingt ans, Emmanuel Le Gagne (Culturopoing) nous présente L’Appel de la chair (21’30). Le journaliste revient sur ce « giallo un peu particulier, mixe de film gothique et de giallo traditionnel », passe en revue la courte carrière en tant que réalisateur d’Emilio Miraglia, le casting, le travail sur les décors (qui participent au changement d’ambiances et donc à l’identité de L’Appel de la chair), les thèmes et les partis pris.
L’interactivité se clôt sur un Diaporama d’affiches et de photos d’exploitation, sans oublier un lot de bandes-annonces, y compris celle de L’Appel de la chair (en langue anglaise).
L’Image et le son
Artus Films déroule le tapis rouge au film d’Emilio Miraglia avec un superbe master Haute-Définition (1080p, AVC). Ce traitement royal permet même de (re)voir à la hausse ce giallo particulier. Dès le générique, la propreté s’avère sidérante, la copie est stable, le piqué aiguisé et la photo du chef opérateur Gastone Di Giovanni est respectée et n’a vraisemblablement jamais été aussi resplendissante. Les quelques poussières et griffures qui ont pu échapper au scalpel numérique demeurent subliminales, le cadre large est sublime, la restauration 2K subjugue du début à la fin, tout comme la luminosité, la patine argentique, les couleurs et l’élégante tenue des contrastes.
Propre et dynamique, le mixage italien LPCM 2.0 ne fait pas d’esbroufe et restitue parfaitement les dialogues (postsynchronisés), laissant une belle place à la belle partition de Bruno Nicolai. A titre de comparaison, elle demeure la plus riche et la plus équilibrée du lot. La version française LPCM 2.0 est aussi dynamique, malgré un léger souffle et un rendu plus artificiel. Les sous-titres français ne sont pas imposés sur la version originale. Les scènes coupées réintégrées ici (puisqu’il s’agit de la version intégrale) et non doublées, passent directement en italien sous-titré en français.
Commentaire très érudit du film.
Attention cependant : vous confondez les mots « audience » et « public » dans votre critique. L’influence de l’anglais, peut-être ?
Bonjour Noodles. Merci pour vos commentaires. Nous tâcherons de faire attention désormais ! Bonne journée 🙂