Test Blu-ray / La Loi, c’est la loi, réalisé par Christian-Jaque

LA LOI, C’EST LA LOI réalisé par Christian-Jaque, disponible en DVD & Blu-ray le 4 février 2025 chez Coin de Mire Cinéma.

Acteurs : Totò, Fernandel, Nino Besozzi, Noël Roquevert, Leda Gloria, Nathalie Nerval, Luciano Marin, Albert Dinan…

Scénario : Jacques Emmanuel, Jean-Charles Tacchella, Christian-Jaque, Jean Manse, Agenore Incrocci & Furio Scarpelli

Photographie : Gianni Di Venanzo

Musique : Nino Rota

Durée : 1h38

Date de sortie initiale : 1958

LE FILM

Le village d’Assola est curieusement découpé par les méandres de la frontière franco-italienne. Le douanier français Ferdinand Pastorelli fait respecter la loi tandis que son ami d’enfance, le contrebandier Giuseppe La Paglia, ne cesse de la violer. De plus leur intimité est liée au fait que Giuseppe a épousé Antonietta la première femme de Ferdinand, lequel a convolé en secondes noces avec Hélène.

La filmographie de Christian-Jaque (1904-1994) semble être infinie et chaque année nous (re)découvrons moult pépites réalisées par l’intéressé, du début des années 1930 à la fin des années 1970. Ainsi, après Le Bidon d’or (son premier long-métrage), Adorables créatures, Fanfan la Tulipe, Souvenirs perdus, La Chartreuse de Parme, L’Enfer des anges, Les Bonnes causes, La Tulipe Noire et Si tous les gars du monde…, voici un autre indispensable de la carrière du cinéaste, La Loi, c’est la loi. Cette immense comédie réunit Fernandel et Totò, et pour cause, puisque l’action du film se déroule à la frontière – qui zigzague – franco-italienne, ou italo-française, cela dépend du point de vue. Enchaînement ininterrompu de rebondissements et de quiproquos, La Loi, c’est la loi est un modèle de divertissement pour toute la famille, magistralement écrit avec pas moins de six scénaristes à la barre, qui demeure une référence en la matière, à tel point que Dany Boon s’en inspirera pour Rien à déclarer, qui confrontait cette fois deux douaniers, un belge et un français. Auréolé d’un grand succès en 1958 avec 3,4 millions de spectateurs, une grande année pour Fernandel avec le triomphe de À Paris tous les deux et qui sera aussi suivi de ceux de La Vie à deux et Les Vignes du Seigneur, La Loi c’est la loi est un grand spectacle.

À la suite d’une curieuse délimitation frontalière, le petit village d’Assola se trouve moitié en territoire italien, moitié en territoire français. Douanier français, Ferdinand Pastorelli a pour mission de faire respecter la loi. Discipliné et incorruptible, il traque sans répit son vieil ami d’enfance Giuseppe La Paglia, un contrebandier italien rusé. Les deux hommes sont d’autant plus liés que Giuseppe a épousé Antonietta, la première femme de Ferdinand, qui, lui depuis, a épousé Hélène. Ferdinand réussit enfin à coincer son vieux rival, mais celui-ci révèle que Ferdinand est en réalité de nationalité italienne. En effet, la fantaisie de ce tracé des frontières fait que le douanier Ferdinand Pastorelli, qui a été déclaré à la mairie française, se trouvait à sa naissance, dans une pièce alors située en Italie. Giuseppe abuse de la situation pour empêcher le douanier de l’arrêter. Ferdinand, doit donc à présent, régulariser sa situation. Il est alors immédiatement exclu de sa propre administration qui l’accuse d’avoir porté son uniforme illégalement, et passe pour bigame. De plus, le pauvre douanier se voit accusé de désertion par les Italiens et, les Français le rejetant, le voici apatride et sans naissance légale.

On retrouve indéniablement la griffe du mythique tandem Agenore Incrocci et Furio Scarpelli, plus connu sous les noms d’Age & Scarpelli, souvent inscrits au générique des plus grands films de l’âge d’or du cinéma italien. Ils collaborent ainsi avec Jacques Emmanuel (Le Gentleman de Cocody, Quand passent les faisans), Jean-Charles Tacchella (Cousin cousine), Jean Manse, grand complice de Fernandel (Le Boulanger de Valorgue, Le Bon roi Dagobert, La Cuisine au beurre, La Vache et le prisonnier, Le Grand chef…), sans oublier Christian-Jaque lui-même. Comme quoi, avoir une demi-douzaine de scénaristes crédités n’est pas forcément mauvais signe. Du début à la fin, sans temps mort, notre pauvre Ferdinand voit son existence être bousculée, au point de voir son identité s’effacer petit à petit, à cause de l’administration française et italienne, qui se contredisent en permanence. Fernandel est en très grande forme dans La loi, c’est la loi. Cela n’a rien d’étonnant, car il doit se montrer à la hauteur de son partenaire, le légendaire Totò, de son vrai nom Antonio de Curtis, une des plus grandes stars du cinéma transalpin, une icône (encore de nos jours, au même titre que Charlie Chaplin), qui la même année apparaît au générique du Pigeon I soliti ignoti de Mario Monicelli, chef d’oeuvre matriciel, pierre fondatrice de la comédie dite « à l’italienne ».

Le duo fonctionne à plein régime, quand bien même on se rend compte que chacun parlait dans sa propre langue, Totò étant par la suite doublé en français (par Carlo Croccolo) lors des scènes où les deux têtes d’affiche se confrontent. La magie du septième art opère et le cinéphile ne peut qu’être joie devant les chamailleries de ces deux génies comiques. Ceux-ci se délectent de dialogues jouissifs et de répliques souvent vachardes, qui restent étonnamment modernes, caractéristique du cinéma de Christian-Jaque. Le réalisateur suit ces deux tornades, dont l’énergie contamine la mise en scène, avec une caméra très mobile. L’élégance du cinéaste est toujours aussi présente, la photographie de Gianni Di Venanzo, un maître dans son domaine, à qui l’on doit les images de Main basse sur la ville et Salvatore Giuliano de Francesco Rosi, ou bien le somptueux Femmes entre elles de Michelangelo Antonioni, est superbe, et la musique de Nino Rota (Le Parrain, Le Casanova de Fellini, Rocco et ses frères) s’imprime aussi dans la mémoire, tout en apportant au film un aspect burlesque et bande dessinée, qui renvoie parfois au cinéma muet.

Les deux acteurs principaux sont aussi solidement épaulés par un casting de choix, venant aussi des deux côtés de la frontière, Nino Besozzi (La Chance d’être femme d’Alessandro Blasetti, avec Sophia Loren), le génial Noël Roquevert, Leda Gloria (le sublime Guendalina d’Alberto Lattuada), Albert Dinan (La Vierge du Rhin, Le Passage du Rhin, Le Rouge est mis), l’indispensable Henri Crémieux (Le Président, Le Temps des loups, Monsieur), une distribution quatre étoiles et comme d’habitude excellemment dirigée par Christian-Jaque.

Bourré de malice, d’ironie, jamais vulgaire, La Loi, c’est la loi, sorti en Italie sous le titre La Legge è legge dans un montage légèrement raccourci pour logiquement recentrer l’action sur Totò, est à redécouvrir de toute urgence. Si toutes les comédies d’aujourd’hui étaient du même acabit…

LE BLU-RAY

Ce sont des rendez-vous que nous ne manquons jamais depuis l’apparition de l’éditeur Coin de Mire Cinéma en octobre 2018. La nouvelle vague apparaît dans les bacs le 4 février et propose cette fois en Haute-Définition : Cerf-volant du bout du monde (1958) de Roger Pigaut, Le Diable par la queue (1969) de Philippe de Broca, La Loi c’est la loi (1958) de Christian-Jaque, Monsieur (1964) de Jean-Paul Le Chanois et Le Tonnerre de Dieu (1965) de Denys de La Patellière. Comme nous l’avions mentionné, l’éditeur a été obligé de revoir sa copie en raison des coûts de production. Si les splendides Digibooks ont laissé place aux Blu-rays traditionnels, le contenu et la ligne éditoriale restent identiques et la Séance subsiste ! En ce qui concerne La Loi c’est la loi, le film de Christian-Jaque, était jusqu’à présent disponible en DVD chez Lancaster (qui ça?), sorti en 2009. Le disque repose dans un boîtier Blu-ray classique de couleur noire, lui-même glissé dans un surétui cartonné. Le menu principal est fixe et musical.

La Séance démarre par les actualités (très chargées) de la 38ème semaine de l’année 1958 (15’). De l’athlétisme à Colombes, l’Islande qui limite ses eaux territoriales (ce qui entraîne moult tensions et une guerre du poisson), l’inauguration du nouveau siège parisien de l’UNESCO (le site Fontenoy) comprenant une céramique de Joan Miró et une fresque de Picasso, l’aménagement urbain de La Défense (en présence de Gaulle et André Malraux), la mise en service d’un bombardier supersonique (pouvant transporter la bombe H), un attentat du FLN à l’encontre de Jacques Soustelle (qui s’en sort miraculeusement, contrairement à un ouvrier présent sur place), la rencontre de Gaulle/Konrad Adenauer (premier chancelier fédéral de la République fédérale d’Allemagne, l’un des promoteurs de la réconciliation franco-allemande), le maréchal Montgomery qui se voit remettre la grand-croix de la Légion d’honneur des mains du général De Gaulle aux Invalides, Churchill avec son épouse sur la Côte d’Azur pour leurs noces d’or, ainsi que l’aviation française (plus précisément, la Caravelle) sont les sujets abordés.

Esquimaux Gervais ! Bonbons Gilbert ! Demandez les chocolats glacés et les friandises ! Pendant huit minutes, redécouvrez les réclames publicitaires d’antan ! Admirez la nouvelle Simca V8-Vedette, le savon Monsavon et bien d’autres encore !

Cette édition Blu-ray présente aussi le montage italien de La Loi, c’est la loi, d’une durée de 89 minutes, qui présente bien entendu quelques changements (le prologue, qui adopte cette fois le point de vue du personnage de Totò) et qui supprime quelques scènes avec Fernandel pour se recentrer plus vite sur Giuseppe.

L’interactivité se clôt sur un lot de bandes-annonces.

L’Image et le son

Restauration 4K pour La Loi, c’est la loi ! Un traitement princier qui ressuscite ce bijou de Christian-Jaque. Voici donc un nouveau master HD au format 1.37 respecté se révèle extrêmement pointilleux en matière de piqué, de gestion de contrastes (noirs denses, blancs lumineux), de détails ciselés et de relief. La propreté de la copie est souvent sidérante, la nouvelle profondeur de champ permet d’apprécier la composition des plans de Christian-Jaque, la photo signée par le grand Gianni Di Venanzo retrouve une nouvelle jeunesse doublée d’un superbe écrin, et le grain d’origine a heureusement été conservé. Les fondus enchaînés sont également fluides et n’occasionnent pas de décrochages.

La piste mono bénéficie d’un encodage en DTS HD-Master Audio. Si quelques saturations demeurent inévitables sur la composition de Nino Rota, l’écoute se révèle fluide, équilibrée, limpide et surtout saisissante. Aucun craquement intempestif ne vient perturber l’oreille des spectateurs, les ambiances sont précises, les dialogues clairs, dynamiques. Les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant sont également disponibles.

Crédits images : © Coin de Mire Cinéma / Les Films Ariane / TF1 Studio / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

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