Test DVD / Le Livre Noir, réalisé par Anthony Mann

LE LIVRE NOIR (The Black Book) réalisé par Anthony Mann, disponible en DVD le 7 décembre 2021 chez Artus Films.

Acteurs : Robert Cummings, Richard Basehart, Richard Hart, Arlene Dahl, Arnold Moss, Norman Lloyd…

Scénario : Aeneas MacKenzie & Philip Yordan

Photographie : John Alton

Musique : Sol Kaplan

Durée : 1h26

Date de sortie initiale : 1949

LE FILM

A Paris, en 1794, cinq ans après la Révolution française, le règne de la Terreur est instauré. Robespierre use de toutes les ficelles pour éradiquer ses rivaux et conserver les grâces de la Convention. Il consigne, dans un petit livre noir, les noms de ses ennemis, prochaines victimes de la cruauté révolutionnaire. Mais ce livre noir disparaît. Afin de confondre Robespierre et le destituer, Charles d’Aubigny est chargé de le retrouver, par tous les moyens…

Sur Homepopcorn.fr, nous avons déjà longuement parlé d’Anthony Mann, de sa virtuosité, de sa légende, de son éclectisme, de La Charge des Tuniques Bleues, en passant par Les Affameurs, Je suis un aventurier, Marché de brutes et La Brigade du suicide. Le film que nous évoquerons aujourd’hui s’intitule Le Livre Noir The Black Book et se situe entre Raw Deal et La Porte du diable Devil’s Doorway. A la fin des années 1940, le réalisateur se spécialise dans le film noir à petit budget, avec parfois quelques ingrédients issus du documentaire afin de renforcer le réalisme de l’histoire, à l’instar d’Il marchait dans la nuit He Walked by Night sorti en 1948. Le Livre Noir se démarque, car il s’agit d’un drame historique et d’aventures en costume, mais aussi un thriller d’espionnage, le tout teinté d’humour noir. Deux choses concernant ce film. Premièrement, si vous souhaitez faire connaître la période de la Terreur à l’une de vos connaissances ou à l’un de vos bambins, ne lui montrez surtout pas Le Livre Noir, qui arrange à sa sauce cette période spécifique de la Révolution française, avec moult anachronismes et rencontres improbables de personnages historiques. Deuxièmement, si vous cherchez un super divertissement, magistralement mis en scène, interprété et photographié, ponctué de poursuites en calèche, de bagarres, de faux-semblants, de trahisons, de suspense alors précipitez-vous sur The Black Book, aussi connu sous le titre Reign of Terror, merveilleux spectacle qui en met plein la vue, mené sans aucun temps mort, sans un pet de gras durant 85 minutes, une vraie leçon de cinéma et de montage. Le génie d’Anthony Mann explose à chaque plan pour le plus grand bonheur de ses très nombreux aficionados, qui se laisseront facilement emporter par le souffle de ce méconnu Livre Noir.

Charles d’Aubigny (Robert Cummings) est envoyé en France par La Fayette (Wilton Graff) pour comploter avec Barras (Richard Hart) afin que Robespierre (Richard Basehart, « un fanatique avec une perruque et un esprit tordu ») ne puisse devenir dictateur. Il doit pour cela prendre l’identité du bourreau Duval, après avoir tué ce dernier. Sous ce nom, il rencontre Robespierre qui lui révèle qu’il a consigné une liste noire des ennemis de la France dans un petit livre. Ce livre attise les convoitises de Fouché (Arnold Moss), qui se met à surveiller d’Aubigny pensant qu’il pourrait le mettre sur la piste de l’opuscule. D’Aubigny se met en contact avec les partisans de Barras et retrouve Madelon (Arlene Dahl) avec qui il a eu une relation avant la Révolution. Saint-Just (Jess Barker, « un passionné de roses et de sang ») méfiant envers d’Aubigny et ne croyant pas qu’il soit Duval, fait arrêter Barras et tente de confondre le faux Duval en le confrontant à sa vraie épouse, mais informée du piège, Madelon prend sa place. Après plusieurs péripéties d’Aubigny retrouve le livre qui n’avait pas été volé mais caché par Robespierre dans une salle secrète, il a confirmation qu’il contient la liste des ennemis du dictateur. Fouché tente de s’emparer du livre, mais après une lutte entre les deux hommes, d’Aubigny s’enfuit avec, et accompagné de Madelon, ils se réfugient tous deux dans une ferme, poursuivis par des hussards dirigés par Saint-Just.

Le Livre Noir, ou comment les scénaristes Aeneas MacKenzie (Juarez de William Dieterle, La Charge fantastique de Raoul Walsh, Alerte aux Marines d’Edward Ludwig) et Philip Yordan (La Maison des étrangers de Joseph L. Mankiewicz, Le Rocher du diable de William Cameron Menzies, Houdini le grand magicien de George Marshall, Plus dure sera la chute de Mark Robson, Les 55 jours de Pékin de Nicholas Ray) s’amusent à jouer avec les acteurs de la grande Histoire comme avec des Playmobils, pour les placer dans des situations abracadabrantes. Les experts de la Révolution française risquent de s’arracher les cheveux, tant les faits réels sont pour ainsi dire « réinterprétés, malaxés et recrachés » par la machine hollywoodienne, avec juste ce qu’il faut de « reconstitution ». En revanche, The Black Book demeure un immense plaisir pour les cinéphiles, dès le premier plan, où la beauté de la photographie de John Alton (La Brigade du suicide, Le Père de la mariée, Quatre étranges cavaliers, Elmer Gantry, le charlatan) s’avère foudroyante de beauté, très inspirée de l’expressionnisme allemand et qui donne au film des allures de film noir, pour ne pas dire d’épouvante du début à la fin. Car Le Livre Noir se révèle être une véritable histoire d’espionnage, d’une folle modernité, d’une rare densité, des ingrédients qui couchés sur le papier auraient pu faire peur, mais qui contre toute attente se mélangent harmonieusement, grâce à la magistrale réalisation d’Anthony Mann.

Concernant le casting, si Robert Cummings (Desert Gold de James P. Hogan, Le Crime était presque parfait d’Alfred Hitchcock) campe un héros parfait, aventurier élégant, courageux et passionné, il se fait voler la vedette à chaque apparition du comédien Arnold Moss (Un hold-up extraordinaire de Ronald Neame, Viva Zapata ! d’Elia Kazan), parfait et diabolique dans la peau de Fouché (« toujours dans chaque bord, jamais au milieu » prévient une voix-off lors de la fabuleuse présentation des personnages), qui rappelle le Littlefinger, qu’on adorait détester dans la série Game of Thrones. Richard Basehart (Baïonnette au canon Fixed Bayonets! de Samuel Fuller, Moby Dick de John Huston) en fait un peu des caisses sous la perruque poudrée de Robespierre, mais il donne à son personnage un côté Dr Evil pas déplaisant, tandis que le charme d’Arlene Dahl enflamme comme d’habitude l’écran. On se laisse volontiers embarquer dans ces aventures « insoupçonnées » de Paul Barras, Maximilien de Robespierre, Fouché, Tallien, Saint-Just, avec quelques apparitions de La Fayette, Danton et même Napoléon Bonaparte dans la dernière scène du film !

LE DVD

Artus Films avait déjà proposé Le Livre Noir en DVD en mars 2012 dans la collection Les Grands classiques Hollywoodiens. Presque dix ans plus tard, revoilà le film d’Anthony Mann chez l’éditeur. Changement de jaquette, désormais estampillée « Les Classiques », mais aussi visiblement nouveau master (nous en reparlons plus bas). Le menu principal est fixe et musical.

Pas de bonus. Artus Films n’a pas repris l’interview de Jean-Claude Missiaen (20’) présente sur l’ancienne édition, ainsi que le Diaporama d’affiches et de photos.

L’Image et le son

Il semblerait que la copie présentée ici soit différente de celle éditée en 2012 par Artus Films. Le Livre Noir est proposé au format 1.33 – 4/3, encore marquée par des scories diverses (rayures, tâches) et une instabilité chronique, mais les contrastes paraissent plus denses et le piqué sensiblement plus acéré. Le N&B est correct, la texture argentique préservée, quelques flous sont de la partie ainsi que divers décrochages (comme si certains plans avaient été réinsérés après avoir été censurés), mais le master est acceptable.

Seule la version originale est présentée ici. Pas de miracle, l’écoute reste ponctuée par un souffle parasite, quelques craquements et un chuintement chronique. Cependant, les voix, ainsi que la musique restent claires. Les sous-titres français ne sont pas imposés.

Crédits images : © Artus Films / Captures DVD : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

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