Test DVD / Anti-squat, réalisé par Nicolas Silhol

ANTI-SQUAT réalisé par Nicolas Silhol, disponible en DVD et Blu-ray le 16 janvier 2024 chez Diaphana.

Acteurs : Louise Bourgoin, Samy Belkessa, Sâm Mirhosseini, Kahina Lahoucine, Arthur Choisnet, Agnès Sourdillon, Ike Ortiz, Adèle Wismes…

Scénario : Nicolas Silhol & Fanny Burdino

Photographie : Pierre Maillis-Laval

Musique : Fabien Kourtzer, Mike Kourtzer & Alexandre Saada

Durée : 1h30

Date de sortie initiale : 2023

LE FILM

Inès est menacée de se faire expulser de chez elle avec Adam, son fils de 14 ans. À la recherche d’un emploi, elle est prise à l’essai chez Anti-Squat, une société qui loge des personnes dans des bureaux inoccupés pour les protéger contre les squatteurs. Son rôle : recruter les résidents et faire respecter un règlement très strict. Inès est prête à tout pour se faire embaucher et s’en sortir avec Adam. Mais jusqu’où ira-t-elle ?

Il existe et il existera sûrement encore et à jamais certains réalisateurs qui voudront toujours interpeller les spectateurs sur des sujets de société, où les idées ne manquent pas et où les histoires demeurent aussi universelles qu’intemporelles. Remarqué en 2017 avec Corporate, Nicolas Silhol (diplômé de la Fémis) se penchait sur le destin d’Émilie, incarnée par Céline Sallette, une brillante responsable des Ressources Humaines, qui se retrouvait alors en première ligne suite à un drame dans son entreprise (un suicide plus précisément), subissant alors la pression de l’inspectrice du travail, mais aussi de sa hiérarchie prête à se retourner contre elle, puisqu’un coupable devait être désigné. Plus de 250.000 entrées plus tard pour ce premier long-métrage, sans oublier son boulot sur les scénarios de Magnificat de Virginie Sauveur, Sentinelle Sud de Mathieu Gérault et le superbe Les Éblouis de Sarah Suco, Nicolas Silhol revient derrière la caméra avec Anti-squat, dans la droite lignée de son film précédent, en se focalisant cette fois sur Inès, elle aussi bien décidée à sauver sa peau et celle de son fils de 14 ans. Comme dans Corporate, jusqu’où le personnage principal peut-il se permettre d’aller dans le sens du collectif, sans oublier ses propres valeurs ? S’il s’avère moins percutant que Corporate, en raison sans doute d’un maniérisme un peu pesant et de redondances qui se font ressentir durant 90 minutes, Anti-squat a des choses à dire, s’engage avec les moyens qu’on a bien voulu lui confier, environ deux millions d’euros de budget, une « misère » dans le cinéma français habitué des comédies à plus de dix millions. S’il ne réussit pas à aller au bout de chacun de ses arguments, Nicolas Silhol ouvre néanmoins plusieurs pistes pour débattre par la suite, tout en offrant à Louise Bourgoin un de ses meilleurs rôles.

Inès est menacée d’être expulsée de son logement qu’elle occupe avec son fils de 14 ans, Adam. Elle est recrutée par la société Anti-Squat qui propose d’héberger des personnes dans des bâtiments inoccupés pour les protéger des squatteurs et des dégradations. Son premier client lui confie un immeuble de bureaux. Elle doit recruter les résidents et leur faire respecter des règles strictes : les enfants et les animaux sont interdits, les fêtes sont interdites, il est interdit de s’absenter sans autorisation, etc. En outre, pour s’assurer que tout se passe au mieux, elle doit habiter sur place. Inès se trouve prise en étau entre son employeur qui exige toujours plus de fermeté de sa part et menace de ne pas renouveler son contrat, les résidents qui ont chacun des situations personnelles difficiles et vivent mal les contraintes imposées par Anti-Squat, une entreprise de gardiennage qui supporte mal cette concurrence nouvelle et tente de la déstabiliser, et Adam qui ne comprend pas que sa mère participe à ce qu’il perçoit comme une injustice alors qu’il développe une conscience politique propre.

La forme est austère, avec une photographie sombre et froide signée Pierre Maillis-Laval (Les Survivants), qui associée aux décors du même acabit donnent à Anti-squat un cachet presque post-apocalyptique, ou tout du moins dystopique. Le film s’ouvre sur un carton, mentionnant l’existence de l’article 29 de la loi ELAN datant de novembre 2018, permettant à des organismes publics ou privés, d’assurer la protection de locaux vacants, en y logeant des résidents temporaires. Là-dessus, présentation du personnage d’Inès, à la recherche d’un emploi, qui face caméra (autrement dit enfermée dans le cadre d’un cadre, procédé récurrent du film, comme l’usage des caméras de surveillance) déballe sa vie, son parcours, son envie d’acquérir un poste, mais sans indiquer à ceux qui voudront bien la recevoir, qu’elle est la mère d’un adolescent de 14 ans et qu’elle est menacée d’expulsion, alors que la trêve hivernale prend fin bientôt.

Avec un CDI promis après ce premier contrat, Inès devient donc la responsable d’un bâtiment moderne situé en banlieue parisienne, s’occupe de réaliser le « casting » des futurs résidents (à qui l’on n’a de cesse préciser qu’ils ne sont pas du tout locataires et qu’ils peuvent être remis à la rue dans les six mois), tout en préservant sa vie privée, en dissimulant la présence de son fils Adam (Samy Belkessa, belle découverte), en essayant de trouver l’équilibre entre l’aide qu’elle souhaiterait apporter à ceux qui l’entourent et ses intérêts personnels. Le cinéaste montre les bons, comme les mauvais côtés de la loi ELAN, dispositif visant à assurer la protection et la préservation des locaux vacants en les faisant occuper par des résidents temporaires, cadre légal exploité par la société (alors fictive) Anti-Squat dans le film. Mais très vite, ceux qui ont eu « la chance » de trouver un logement, toujours précaire (le chauffage n’est pas mis en route), mais disposant d’un toit au-dessus de leur tête (et ce même s’ils ont un boulot, une infirmière, un professeur, un chauffeur VTC), découvrent que certains voudraient bien profiter de leur situation, pour assurer la réfection des parties communes, tandis qu’Inès surveille de près tout ce qui se déroule dans la bâtisse. Autrement dit, s’ils ne payent « que » 200 euros par mois pour le loyer, leur présence leur impose des tâches qui deviennent ainsi quasi-gratuites pour le propriétaire.

Anti-squat n’est pas un long-métrage statique et l’on sent le réalisateur animé, préoccupé par ce qu’il est en train de raconter aux spectateurs. Une rage que l’on retrouve dans les textes d’Adam, qui s’enregistre souvent en train de les interpréter sur un toit de Paris, qui parcourt le personnage et qui se clôt d’ailleurs sur celle-ci qui mute en combat. Si Adam connaîtra une énorme déception, mais se rendra sans doute compte que sa mère a pensé avant tout à l’intérêt de celui à qui elle a donné la vie, l’adolescent sait qu’il y aura toujours d’autres luttes à venir et décide de s’investir de son côté, car cela vaut bien la peine d’essayer. Drame social aux allures de thriller, Anti-squat a connu un bide fracassant à sa sortie début septembre 2023 avec seulement 23.000 entrées. Gageons que sa sortie en DVD (et même en Blu-ray) lui donnera l’occasion d’une deuxième vie méritée.

LE DVD

Chapeau bas à Diaphana, qui en dépit de son minuscule score dans les salles, propose Anti-squat en DVD, mais aussi en Haute-Définition ! Le visuel de la jaquette reprend celui de l’affiche d’exploitation. Le menu principal est animé et musical.

Nous trouvons deux petites scènes coupées (3’20), avec d’un côté Inès qui explique à Adam le principe de son nouveau travail, et de l’autre Adam qui découvre la zone d’activité de la Tour H.

L’éditeur propose aussi de découvrir les essais du jeune et prometteur Samy Belkessa (4’30), qui passait alors son audition, en imposant d’emblée un charisme, un naturel confondant et une très belle voix posée.

L’interactivité se clôt sur la bande-annonce. Dommage de ne pas avoir autre chose à se mettre sous la dent…comme un commentaire audio du réalisateur, une interview du casting ou un making of.

L’Image et le son

La photo de Pierre Maillis-Laval est excellemment retranscrite grâce à un master Standard du plus bel effet malgré quelques instabilités de la définition. Le cadre offre une profondeur de champ et un lot de détails confondants, tandis que les contrastes s’avèrent particulièrement léchés et les noirs denses. Certains plans filmés caméra à l’épaule laissent apparaître un infime grain, un léger déséquilibre de la compression ainsi qu’une perte du piqué.

Le confort acoustique est également assuré grâce à un mixage Dolby Digital 5.1 qui exploite intelligemment les enceintes dans leurs moindres recoins. La balance frontale est saisissante, les effets nets et précis, les dialogues savamment délivrés sur le point central et les ambiances latérales participent souvent à l’immersion du spectateur. La musique bénéficie d’un bel écrin phonique, sans pour autant dénaturer l’intelligibilité des voix des comédiens. La piste Stéréo est également très dynamique. L’éditeur joint également une piste Audiodescription ainsi que les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant.

Crédits images : © Diaphana / Julien Panié – Kazak Productions / Captures DVD : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

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