SIERRA réalisé par Alfred E. Green, disponible en DVD le 17 juillet 2019 chez Sidonis Calysta
Acteurs : Audie Murphy, Tony Curtis, Wanda Hendrix, Burl Ives, Dean Jagger, Richard Rober…
Scénario : Edna Anhalt, Milton Gunzburg d’après le roman de Stuart Hardy
Photographie : Russell Metty
Musique : Walter Scharf
Durée : 1h19
Date de sortie initiale : 1950
LE FILM
Jeff Hassard est recherché pour un meurtre qu’il n’a pas commis. Il se cache avec son fils Ring dans les montagnes de la Sierra Nevada. Un jour, la petite famille vient en aide à une jeune avocate perdue. Cette dernière va tout mettre en oeuvre pour prouver l’innocence de Jeff. Malheureusement, les complications ne se font pas prier lorsqu’une bande de voleurs vient les affronter…
A travers d’autres chroniques, nous avons déjà parlé en long en large d’Audie Murphy, de se personnalité trouble, de son palmarès durant la Seconde Guerre mondiale, de sa carrière à Hollywood et plus spécialement dans le western où il rencontra un très large succès. Nous ne nous étendrons donc pas à nouveau sur tout cela, pour nous concentrer plus rapidement sur le film qui nous intéresse aujourd’hui, à savoir Sierra, également connu sous les titres français (ou belges) La Tête d’un innocent ou bien encore Aventure dans la Sierra. Réalisé par le vieux briscard Alfred E. Green (1889-1960), Sierra est l’un des premiers longs métrages mettant en scène Audie Murphy en vedette. 1950 est l’année phare pour le comédien, qui enchaînera alors trois films pour le studio Universal, Le Kid du Texas – The Kid from Texas de Kurt Neumann, Sierra donc, et Kansas en feu – Kansas Raiders de Ray Enright. Rétrospectivement, Sierra est clairement le plus faible des trois, même si Audie Murphy commence à se sentir à l’aise devant la caméra et démontre son potentiel. Sierra n’est pas déplaisant et se regarde comme un petit récit de western qui divertir durant 1h20 et qui s’oublie immédiatement après, avant de passer à un autre.
Son ami Miguel assassiné, Don Diego de la Vega se jure de le venger. Sous son identité, il prend les fonctions de gouverneur du Nouvel Aragon, une province que le despotique Colonel Huerta rançonne, éliminant tous ses opposants et régnant par la terreur. Si Don Diego joue les aristocrates frivoles et poltrons pour mieux tromper l’ennemi, c’est pour mieux l’affronter derrière le masque de Zorro, un cavalier qui, surgissant de nulle part, ridiculise l’armée et pousse les paysans à la révolte. Rusé, Don Diego propose même à Huerta de servir d’appât dans le piège que celui-ci tend à l’insaisissable justicier…
Zorro, l’esprit du renard noir, l’immortel, le vengeur invulnérable. Créé en 1919 par Johnston McCulley, le justicier masqué vêtu de noir qui combat l’injustice et défend la veuve et l’orphelin a inspiré moult romans, séries télévisées, bandes dessinées, jeux et évidemment des films dont ce formidable Zorro réalisé par Duccio Tessari en 1975 avec Alain Delon dans le rôle-titre. Coproduit par le comédien, désireux de toucher un public familial loin de ses films policiers et drames habituels, tourné en Espagne avec une équipe essentiellement italienne, Zorro demeure un des plus grands succès populaires d’Alain Delon. Véritable triomphe avec plus de 56 millions d’entrées dans le monde, Zorro remplit les salles, enregistre des records d’affluence en Chine où il sera parmi les premiers films occidentaux diffusés au moment de l’ouverture du pays.
MOONWALK ONE réalisé par Theo Kamecke, disponible en DVD depuis le 2 décembre 2014 chez ED Distribution
Acteurs : Buzz Aldrin, Neil Armstrong, Michael Collins, Robert H. Goddard, Richard Nixon, Sharon Sites Adams…
Scénario : Theo Kamecke, E.G. Valens, Peretz W. Johnnes
Musique : Charles Morrow
Durée : 1h48
Date de sortie initiale : 1971
LE FILM
Réalisé en 1969, Moonwalk One capte la première expédition de l’Homme sur la Lune lors de la mission Apollo 11. Véritable documentaire de création, le film permet de découvrir des décennies plus tard des images tournées grâce au matériel de la NASA et à ce jour jamais montrées. Mêlant séquences d’archives et moments captés dans le vif de l’action, Theo Kamecke donne à voir cet événement tel qu’il a été vécu à l’époque : une aventure humaine incroyable, une épopée scientifique hallucinante. Mais aussi une plongée dans l’inconnu, avec ce qu’elle offre de possibilités de changements, et de responsabilités.
Moonwalk One est une véritable expérience cinématographique. Ce film-documentaire événement et vertigineux convie les spectateurs à embarquer avec trois hommes, Neil Armstrong, Michael Collins et Buzz Aldrin, pour une virée à 340.000 kilomètres de la Terre pendant 3 jours. Ce film exceptionnel quasi-inédit avait été diffusé dans le monde entier un an après les premiers pas de Neil Armstrong sur la Lune, avant d’être présenté au Festival de Cannes en 1971. Depuis, cette oeuvre avait disparu des radars, une fois l’engouement médiatique retombé pour le sujet et la course à l’espace devenue presque quotidienne.
QUI M’AIME ME SUIVE ! réalisé par José Alcala, disponible en DVD le 24 juillet 2019 chez AB Vidéo
Acteurs : Daniel Auteuil, Catherine Frot, Bernard Le Coq, Solam Dejean-Lacréole, Vanessa Paric, Diouc Koma, India Hair, Olivier Loustau…
Scénario : José Alcala, Agnès Caffin
Photographie : Philippe Guilbert
Musique : Fred Avril
Durée : 1h26
Date de sortie initiale : 2019
LE FILM
Gilbert et Simone vivent une retraite agitée dans un village du Sud de la France. Le départ d’Étienne, son voisin et amant, le manque d’argent, mais surtout l’aigreur permanente de son mari, poussent Simone à fuir le foyer. Gilbert prend alors conscience qu’il est prêt à tout pour retrouver sa femme, son amour.
Depuis son César largement mérité pour Marguerite (2015) de Xavier Giannoli, Catherine Frot est devenue plutôt rare sur le grand écran. Celle qui aura rempli les salles sur son nom, en passant allègrement de l’univers d’Albert Dupontel (Le Vilain) à Pascal Thomas (la trilogie Mon petit doigt m’a dit / Le Crime est notre affaire / Associés contre le crime), a également été récompensée par le Molière de la meilleure comédienne dans un spectacle de théâtre privé en 2016 pour Fleur de cactus. Après le succès modéré de Momo (2017) dans lequel elle tenait le haut de l’affiche avec Christian Clavier, Catherine Frot retrouve le réalisateur José Alcala, qui l’avait dirigée en 2011 dans le polar Coup d’éclat, mais pour une comédie cette fois intitulée Qui m’aime me suive ! Lumineuse, bondissante et fantaisiste, elle y donne la réplique à Daniel Auteuil et Bernard Le Coq, pour un triangle amoureux doux-amer, mais aussi une réflexion sur le désir après soixante ans, la situation des retraités qui ont du mal à subvenir à leurs besoins, l’amitié fraternelle et le pardon. Une chronique de mœurs, un drame sentimental inattendu.
EXFILTRÉS réalisé par Emmanuel Hamon, disponible en DVD le 17 juillet 2019 chez Metropolitan Vidéo
Acteurs : Swann Arlaud, Finnegan Oldfield, Jisca Kalvanda, Charles Berling, Kassem Al Khoja, Ethan Palisson, Sophie Cattani, Andrino Mpioso, Driss Ramdi, Mathieu Lourdel…
Scénario : Emmanuel Hamon, Benjamin Dupas
Photographie : Thomas Bataille
Musique : Armand Amar
Durée : 1h38
Date de sortie initiale : 2019
LE FILM
A Paris, deux jeunes activistes montent une opération d’exfiltration à hauts risques pour ramener en France une mère et son jeune fils pris au piège dans l’enfer de Daech.
Ancien assistant de Régis Wargnier sur Indochine (1991), de Diane Kurys sur Après l’amour (1991), de Patrice Chéreau sur La Reine Margot (1994), de Robert Altman sur Prêt-à-porter (1994) et de Philippe Lioret sur Tenue correcte exigée (1996), Emmanuel Hamon possède un C.V. fort recommandable. Il se tourne vers le documentaire politique, social et historique. Fort de cette expérience, le réalisateur signe un premier long métrage, Exfiltrés, qui reflète ses préoccupations, sa connaissance du terrain, des enjeux politiques, du terrorisme. Véritable tour de force, Exfiltrés est un thriller haut de gamme inspiré par une histoire vraie, merveilleusement interprété, couillu, tendu, passionnant et qui fait froid dans le dos.
RENDEZ-VOUS AVEC UNE OMBRE (The Midnight Story) réalisé par Joseph Pevney, disponible en DVD le 16 juillet 2019 chez ESC Editions
Acteurs : Tony Curtis, Marisa Pavan, Gilbert Roland, Jay C. Flippen, Argentina Brunetti, Ted de Corsia, Richard Monda, Kathleen Freeman, Herb Vigran, Peggy Maley…
Scénario : Edwin Blum, John Robinson
Photographie : Russell Metty
Musique : Hans J. Salter, Henry Vars
Durée : 1h26
Année de sortie : 1957
LE FILM
Un soir, le Père Tomasino, adoré de ses ouailles, est assassiné à l’arme blanche dans une sombre ruelle de San Francisco. Personne ne comprend qui pouvait lui en vouloir. Joe Platini, jeune policier, est désespéré. Orphelin, il a été recueilli par le prêtre qui lui a permis d’arriver à cette situation. Le jour de l’enterrement, Joe remarque au cimetière un homme qui se lacère la main. Intrigué, il en fait part à ses supérieurs, mais ceux-ci lui rétorquent qu’on ne peut soupçonner quelqu’un sur un simple fait. Il décide alors de démissionner pour mener sa propre enquête. Il réussit à s’introduire dans la famille de cet homme, Sylvio Malatesta, et y est très vite adopté. Face à la gentillesse de tous, il se trouve désarmé et ses soupçons commencent à s’effriter…
CELLE QUE VOUS CROYEZ réalisé par Safy Nebbou, disponible en DVD et Blu-ray le 2 juillet 2019 chez Diaphana
Acteurs : Juliette Binoche, Nicole Garcia, François Civil, Marie-Ange Casta, Guillaume Gouix, Charles Berling, Jules Houplain, Jules Gauzelin…
Scénario : Safy Nebbou, Julie Peyr d’après le roman de Camille Laurens
Photographie : Gilles Porte
Musique : Ibrahim Maalouf
Durée : 1h37
Date de sortie initiale : 2019
LE FILM
Pour épier son amant Ludo, Claire Millaud, 50 ans, crée un faux profil sur les réseaux sociaux et devient Clara une magnifique jeune femme de 24 ans. Alex, l’ami de Ludo, est immédiatement séduit. Claire, prisonnière de son avatar, tombe éperdument amoureuse de lui. Si tout se joue dans le virtuel, les sentiments sont bien réels. Une histoire vertigineuse où réalité et mensonge se confondent.
Découvert en 2004 avec son excellent premier long métrage Le Cou de la girafe, le réalisateur Safy Nebbou (né en 1968) a su imposer sa griffe et son univers au fil de ses six films mis en scène en quinze ans. Si l’on remarque une nette prédilection pour le suspense, genre dans lequel il est d’ailleurs le plus habile et le plus convaincant (L’Empreinte en 2008, Comme un homme en 2012), le cinéaste s’est également illustré dans le biopic avec L’Autre Dumas (2010), par forcément pour le meilleur, et Dans les forêts de Sibérie (2016), adapté du récit autobiographique éponyme de Sylvain Tesson. Avec Celle que vous croyez, Safy Nebbou s’attaque au drame psychologique. En adaptant le roman homonyme de Camille Laurens publié en 2016, le réalisateur signe un film fort sur les rencontres 2.0., sur le désir féminin et sur celui de plaire après 50 ans, tout en offrant à Juliette Binoche l’un de ses plus beaux rôles depuis quinze ans.
Claire Milaud est une femme divorcée de cinquante ans et professeur de son métier. Un jour, elle crée son faux profil sur Facebook sous l’apparence d’une jeune femme de vingt-quatre ans, ajoutant un faux prénom, Clara, de fausses photos et de faux caractères. Tout cela pour espionner son ex-amant Ludo, mais elle y tombe sur son meilleur ami Alex avec qui elle va s’amuser virtuellement et sentimentalement…
Juliette Binoche n’a jamais arrêté de tourner. La comédienne n’a pas chômé dans les années 2010 qui avait ouvert la décennie avec Copie conforme d’Abbas Kiarostami. Capable de métamorphoses inattendues, l’actrice née en 1964 aura enchaîné grands spectacles hollywoodiens (Godzilla de Gareth Edwards, Ghost in the Shell de Rupert Sanders), comédies insignifiantes dans lesquelles elle abuse de son rire contagieux (La Vie d’une autre de Sylvie Testud, Telle mère, telle fille de Noémie Saglio) ou gigantesque délire (Ma Loute de Bruno Dumont). Mais Juliette Binoche c’est aussi l’incarnation de femmes matures, confrontées à leur demi-siècle et aux autres générations, comme dans Elles de Małgorzata Szumowska (dans lequel François Civil jouait d’ailleurs le fils de l’actrice !), Sils Maria d’Olivier Assayas, et dernièrement dans le très beau Un beau soleil intérieur de Claire Denis.
Dans Celle que vous croyez, la comédienne clôt comme qui dirait les années 2010 avec un personnage qui englobe tous ses rôles précédents. Avec sa sensibilité à fleur de peau, sa voix étranglée par l’émotion, ses yeux embués comme un personnage de manga et sa respiration saccadée, Juliette Binoche foudroie le coeur des spectateurs une fois de plus et mériterait sa dixième nomination aux César. A ses côtés, François Civil (né en 1990) confirme tout le bien que l’on pensait de lui depuis sa réelle découverte dans Made in France de Nicolas Boukhrief. Formidable dans Burn Out de Yann Gozlan, le comédien est à l’affiche de quatre films en 2019, Le Chant du loup d’Antonin Baudry, Mon inconnue de Hugo Gélin, Deux moi de Cédric Klapisch et Celle que vous croyez. Quatre longs métrages à travers lesquels le comédien démontre la diversité de son talent.
Safy Nebbou jongle avec les genres, distille quelques effets de comédie dans un drame passionnel pur et dur, tout en instaurant un suspense palpable. L’ombre de Vertigo – Sueurs froides d’Alfred Hitchcock plane parfois sur Celle que vous croyez, toutes proportions gardées. Le réalisateur filme Paris de façon presque anonyme, une ville gigantesque qui referme ses tentacules sur ses habitants, les isole et les place face à eux-mêmes, état souvent mis en relief par l’utilisation de portes-fenêtres, des miroirs ou des écrans dans lesquels se reflètent les visages, le tout magnifié par la photographie du chef opérateur Gilles Porte. Le cinéaste n’a pas peur du romanesque et trouve un juste équilibre entre le mélodrame et son étude souvent passionnante sur les débordements liés aux réseaux sociaux en mélangeant alors réalité et virtuel. Un superbe portrait de femme.
LE DVD
Le DVD et le Blu-ray de Celle que vous croyez sont disponibles chez Diaphana. L’éditeur nous a confié l’édition standard, dont le visuel reprend celui de l’affiche du film. Le menu principal est animé et musical.
Formidable making-of (35’) disponible sur les deux éditions. Ce document se compose d’entretiens avec l’équipe du film, et surtout d’images de tournage où nous pouvons observer le travail du réalisateur Safy Nebbou avec les comédiens. Le roman original de Camille Laurens, son adaptation, la psychologie des personnages, la préparation des comédiens, les partis pris, les conditions de tournage, tous ces sujets sont abordés au cours de ce module bien réalisé.
L’interactivité se clôt
sur la bande-annonce.
L’Image et le son
Le master SD est assez aléatoire. Les scènes en extérieur bénéficient d’une belle restitution de la photographie de Gilles Porte, avec des couleurs froides et un piqué acéré. En revanche, là où ça coince ce sont les scènes en intérieur dans l’appartement de Claire où la définition est très aléatoire. La gestion des contrastes est déséquilibrée et le rendu assez terne.
Ce n’est pas avec un film comme Celle que vous croyez que vous mettrez à contribution votre installation sonore. L’éditeur joint tout de même une piste DD 5.1 convaincante, mais la Stéréo également au programme fait son office avec des effets dynamiques. A noter que l’éditeur joint les sous-titres pour sourds et malentendants, ainsi qu’une piste Audiodescription.
UN CONDÉ réalisé par Yves Boisset, disponible le 4 juin 2019 en DVD et Blu-ray chez ESC Editions
Acteurs : Michel Bouquet, Françoise Fabian, Gianni Garko, Michel Constantin, Anne Carrère, Rufus, Théo Sarapo, Henri Garcin, Pierre Massimi, Bernard Fresson, Adolfo Celi…
Scénario : Yves Boisset, Sandro Continenza, Claude Veillot
LE BANDIT (The Naked Dawn) réalisé par Edgar G. Ulmer, disponible en DVD le 23 mai 2019 chez Sidonis Calysta
Acteurs : Arthur Kennedy, Betta St. John, Eugene Iglesias, Charlita, Roy Engel, Tony Martinez, Francis McDonald…
Scénario : Julian Zimet
Photographie : Frederick Gately
Musique : Herschel Burke Gilbert
Durée : 1h19
Date de sortie initiale : 1955
LE FILM
Son complice abattu lors du hold-up d’un wagon de marchandises, Santagio trouve refuge dans une ferme isolée du Haut-Mexique. Si Manuelo Lopez, le fermier, projette de le tuer pour s’emparer du butin, il y renonce après que le bandit en fuite lui a sauvé la vie. Pendant ce temps, sa femme, Maria, fatiguée d’une vie de labeur et de misère, supplie le fugitif de l’emmener aussi loin que possible. Bientôt, au moment de son départ, Santagio voit arriver Gunt, son receleur, accompagné de policiers…
De l’avis quasi-unanime, Le Bandit – The Naed Dawn est le chef d’oeuvre du cinéaste Edgar George Ulmer (1904-1972). D’origine autrichienne, ancien comédien et décorateur, assistant de F.W. Murnau, Robert Siodmak, Billy Wilder, Fred Zinnemann, il passe à la mise en scène dans les années 1930 et signe notamment Le Chat noir – The Black Cat (1934) avec Boris Karloff et Bela Lugosi. Suivront plus tard, pêle-mêle, L’Ile des péchés oubliés (1943), Barbe Bleue (1944) avec John Carradine, Detour (1945), Les Pirates de Capri (1951), L’Homme de la planète X (1951) qui reflètent l’éclectisme et le caractère prolifique du réalisateur. Edgar G. Ulmer a alors plus de quarante films et documentaires à son actif quand il entreprend Le Bandit. Un western qui n’en est pas vraiment un, mais plutôt un drame psychologique, très littéraire voire théâtral, qui renvoie aux œuvres de Tennessee Williams. Et c’est immense. Le Bandit n’a beau durer que 78 minutes, chaque seconde, chaque réplique, chaque séquence foudroient le spectateur. Pas étonnant que la critique européenne et les cinéphiles purs et durs comme François Truffaut et Bertrand Tavernier aient rapidement élevé ce film comme l’un des plus fondamentaux, riches et passionnants des années 1950.
Au Mexique, deux paysans, Santiago et Vicente, désillusionnés par la révolution, deviennent bandits et dévalisent un wagon de marchandises stationné en gare de Matamoros. Vicente est, néanmoins, mortellement atteint par un veilleur de nuit. Santiago assomme celui-ci et fuit avec son complice. Il demeure auprès de Vicente jusqu’à son ultime soupir, se comportant auprès de lui comme son confesseur. Il finit par trouver refuge chez un couple de jeunes fermiers, Manuel et Maria. Aidé de Manuel, Santiago délivre le butin – quatre caisses de montres-bracelets – à Guntz, un agent des douanes corrompu, et qui refuse de lui donner la part dévolue à Vicente. Plus tard, Maria est victime des brutalités de son époux, attiré par l’argent de Santiago. Elle cherche alors à fuir avec le bandit.
D’entrée de jeu, Edgar G. Ulmer s’éloigne de tous les stéréotypes liés au western. Si son personnage principal est mexicain et arbore un sombrero, tous les décors qui l’entourent contrastent avec les clichés habituels. Si les chevaux sont présents, les vieilles bagnoles au capot poussiéreux sont là aussi. Les armes apparaissent, mais pas de duel au soleil ici, la loi de l’Ouest a laissé la place à la loi de la jungle. Santiago, merveilleusement interprété par le grand et trop souvent oublié Arthur Kennedy (Les Affameurs d’Anthony Mann, L’Ange des maudits de Fritz Lang) passe de tableau en tableau, comme de scène en scène avec une dimension quasi-théâtrale, principalement en huis clos, qui reflète l’enfermement irrémédiable du personnage (ou comment Ulmer use du Technicolor comme du N&B au temps de l’expressionnisme allemand), malgré ses désirs de liberté.
Le premier acte détonne puisque Santiago se démarque des bandits typiques du western en soutenant son camarade Vicente dans sa lente agonie. En soutenant délicatement son complice et ami jusqu’à son dernier souffle, allant même lui chercher une couverture pour le réconforter et lui apporter une dernière once de chaleur, Santiago est montré comme un être généreux, humain. Vicente mourra en souriant, sur une lyrique partition d’Herschel Burke Gilbert. Dans la seconde partie, Santiago rencontre Manuel et Maria, jeune couple qui tente de survivre grâce à leur petit lopin de terre. Manuel est un homme faible et frustré, qui s’en prend violemment à sa femme. Cette dernière, « donnée » à son époux, rêve de s’enfuir et d’échapper à cette vie monotone, qui la condamne à s’occuper de la cuisine, du ménage. Sachant que la naissance d’un enfant enterrerait définitivement ses espoirs d’évasion, Maria – magnifique Betta St John – s’éprend rapidement de Santiago, qui représente à ses yeux la liberté et l’indépendance dont elle rêve. Edgar G. Ulmer instaure alors une tension sexuelle palpable, en jouant sur les corps fiévreux et en sueur, à l’instar d’Elia Kazan dans Un tramway nommé désir (1951).
Ce qu’il y a de remarquable dans Le Bandit, c’est la densité de son sujet, la richesse de ses thématiques, le tout exploré, trituré et analysé durant seulement 1h20. Roller-coaster d’émotions, Le Bandit joue avec l’empathie des personnages. Ni forcément sympathiques, ni détestables, les trois protagonistes sont montrés de façon brute, dans leur complexité, avec leurs bons comme leurs mauvais côtés. Quitte à vivre, les personnages le souhaitent de la meilleure façon possible, le pardon est accessible et s’il faut mourir, que cela se fasse de la façon la plus douce possible, peut-être même secrètement, au pied d’un arbre.
Le final, somptueux,
inattendu, poétique, mais pourtant inévitable, clôt cette tragédie
dans une explosion de sérénité. Immense chef d’oeuvre absolu de
tous les temps.
LE DVD
Le test du DVD du Bandit, disponible chez Sidonis Calysta, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est animé et musical.
Le Bandit était déjà sorti en 2013 dans la collection spécialisée de Sidonis Calysta. L’éditeur reprend les mêmes interventions proposées alors sur la galette éditée il y a six ans. Toutefois, celle de Bertrand Tavernier, qui durait alors 13 minutes, est ici rallongée de 25 minutes ! Cela permet donc au réalisateur et historien du cinéma, de s’étendre plus sur ce film qu’il adule et dont il se remémore la découverte au cinéma à l’occasion d’une ressortie dans une salle parisienne, Le Floride, film qu’il était retourné voir plusieurs fois la même semaine. Son engouement est réel, toujours aussi enthousiaste et ses propos reflètent une passion ici débordante de sincérité. Bertrand Tavernier revient en détails sur ses longues recherches effectuées pour trouver qui était ce fameux Julian Zimet, qui avait écrit ce western singulier. Puis, le fond et la forme se croisent jusqu’à la dernière seconde de cette intervention, durant laquelle Bertrand Tavernier passe également en revue le casting.
Avec sa présentation de huit minutes, Patrick Brion a évidemment peu le temps de nous donner quelques propos inédits sur Le Bandit. L’historien du cinéma est certes aussi passionné par le film d’Edgar G. Ulmer que son confrère, mais en dehors de quelques redites sur les sujets abordés dans Le Bandit, il n’y a ici rien de particulièrement intéressant.
L’interactivité se clôt
sur la bande-annonce et une galerie de photos.
L’Image et le son
Authoring différent, mais master identique ! On retrouve donc les spécificités de l’ancienne copie, à savoir une colorimétrie fanée, bleutée, un piqué complètement émoussé, des poussières, des griffures, des plans flous et une gestion des contrastes totalement aléatoire qui dénaturent toutes les séquences sombres. En revanche, le 16/9 est enfin disponible alors que le format n’était disponible qu’en 4/3 sur l’édition 2013.
La version française est couverte, lourde, étouffée, accompagnée d’un souffle omniprésent du début à la fin. Tendez bien l’oreille si vous avez opté pour cette option. La piste anglaise est heureusement plus claire avec des dialogues distincts et des effets plus vifs. Les sous-titres français ne sont pas imposés.
Scénario : Sébastien Marnier, Elise Griffon d’après le roman éponyme de Christophe Dufossé
Photographie : Romain Carcanade
Musique : Zombie Zombie
Durée : 1h44
Année de sortie : 2019
LE FILM
Lorsque Pierre Hoffman intègre le prestigieux collège de Saint Joseph il décèle, chez les 3e1, une hostilité diffuse et une violence sourde. Est-ce parce que leur professeur de français vient de se jeter par la fenêtre en plein cours ? Parce qu’ils sont une classe pilote d’enfants surdoués ? Parce qu’ils semblent terrifiés par la menace écologique et avoir perdu tout espoir en l’avenir ? De la curiosité à l’obsession, Pierre va tenter de percer leur secret…
Souvenez-vous, il y a trois ans…A la sortie d’Irréprochable, son premier long métrage, nous avions fait le pari que nous entendrions à nouveau parler du réalisateur Sébastien Marnier. Journaliste et écrivain (Mimi, Une vie de petits fours), ce dernier avait signé avant cela quelques courts métrages, dont Le Grand avoir en 2002 et Le Beau Jacques en 2003 avec Philippe Nahon. Véritable coup de maître sorti au milieu de blockbusters estivaux, porté par une critique quasi-unanime, Irréprochable, thriller social et psychologique nappé d’humour noir, nous avait laissés pantois. L’Heure de la sortie confirme tout le bien que l’on pensait de ce nouvel auteur et cinéaste. Après avoir offert son plus grand rôle à Marina Foïs, Sébastien Marnier s’impose comme un immense directeur d’acteurs dans L’Heure de la sortie, porté par un impérial Laurent Lafitte et une poignée de jeunes comédiens épatants, troublants et ambigus. Entre David Lynch, Michael Haneke, John Carpenter et plus récemment de Jeff Nichols, ne manquez pas ce chef d’oeuvre instantané.
Pierre, un professeur en collège, se retrouve en charge d’enseigner une classe de troisième expérimentale, composée de douze élèves surdoués, suite au suicide de leur professeur. La venue de Pierre est mal vue par cette classe, qui ne tardera pas à le lui faire sentir. Au fur et à mesure que les jours passent, le professeur se doute que tout ne tourne pas rond et ne va pas tarder à découvrir la vérité.
Nous attendions impatiemment le nouveau long métrage de Sébastien Marnier, longuement mûri par le cinéaste pendant près de dix ans et qui souhaitait à l’origine en faire son premier film. Nous ne sommes pas déçus. Le réalisateur va même encore plus loin qu’Irréprochable en se frottant au genre fantastique par petites touches réalistes, tout en enfermant ses personnages et les spectateurs dans un environnement anxiogène et glaçant. Très bien entouré par Emmanuelle Bercot, Gronge, Pascal Greggory et Grégory Montel, Laurent Lafitte apparaît une fois de plus là où on ne l’attendait pas, même si l’environnement inquiétant et énigmatique rappelle parfois l’excellent et sous-estimé K.O. de Fabrice Gobert (Simon Werner a disparu…, la série Les Revenants) dans lequel il tenait déjà le haut de l’affiche. Dans L’Heure de la sortie, adaptation du roman éponyme de Christophe Dufossé (2002), son personnage quelque peu mal aimable, est plongé malgré-lui dans l’univers sous-cloche d’un collège réputé pour ses meilleurs élèves, tous réunis dans une même classe. Face au comédien, les adolescents Luàna Bajrami, Victor Bonnel, Adèle Castillon, Matteo Perez, Thomas Guy et Léopold Buchsbaum impressionnent par leur charisme, leur spontanéité et tiennent la dragée haute à leur partenaire.
Non seulement Sébastien Marnier jongle avec les genres (SF, thriller paranoïaque, drame) avec virtuosité et une impressionnante maturité, en ayant bien digéré ses références, mais son film délivre également un message écologique alarmant, sans être pesant ou donneur de leçons. L’Heure de la sortie flatte à la fois les sens, le coeur et l’âme, réconcilie les amateurs de films d’auteurs et populaires, tout en titillant constamment l’intelligence du spectateur, en lui faisant perdre ses repères, en le déstabilisant sans cesse. Parallèlement, le réalisateur soigne chacun de ses cadres et sa mise en scène subjugue du début à la fin, le tout nappé par la partition entêtante du groupe Zombie Zombie.
De nombreuses scènes s’impriment d’ores et déjà dans nos mémoires, à l’instar du final, vertigineux, qui ne cesse de hanter l’auteur de ces mots depuis des mois. Récompensé au Festival international du film francophone de Namur, au festival international du film de Catalogne, ainsi que par le Prix Jean-Renoir des lycéens, L’Heure de la sortie est un des films les plus riches, les plus aboutis, les plus ambitieux et les plus marquants que vous aurez l’occasion de voir en 2019.
LE DVD
Point de Blu-ray pour L’Heure de la sortie et c’est bien dommage…Le DVD est disponible chez Blaq Out. Le menu principal est fixe et musical.
Les suppléments sont peu nombreux. On apprécie les scènes coupées (8’30), centrées sur le personnage de Laurent Lafitte, même si l’on pouvait espérer un commentaire audio pour apprendre la raison de leur éviction.
Un montage de 15 minutes montre également le comparatif avant/après l’incrustation des effets numériques.
Et c’est tout !
Aucun entretien avec le réalisateur, ni court-métrage ou même la
bande-annonce !
L’Image et le son
Le master de L’Heure de la sortie est plutôt bichonné par Blaq Out. Le cadre large est élégant, les couleurs soignées et le piqué suffisamment aiguisé. Les contrastes sont assurés, denses et riches, les détails ne manquent pas et la profondeur de champ est soignée. Malgré un sensible bruit vidéo sur les arrière-plans, des moirages et un léger fléchissement de la définition sur les scènes en intérieur, la copie demeure éclatante. La belle photo riche et contrastée du chef opérateur Romain Carcanade, passe agréablement le cap du petit écran.
La piste Dolby Digital 5.1 offre un agréable confort acoustique, proposant une large ouverture frontale, divers effets latéraux (gros travail sur le son) et une belle spatialisation musicale. De son côté, la Dolby Stéréo 2.0 remplit aisément son contrat avec une balance des avant ferme et savamment équilibrée. À noter la présence de sous-titres français pour sourds et malentendants, ainsi qu’une piste Audiodescription.