Test Blu-ray / La Vie à l’envers, réalisé par Alain Jessua

LA VIE À L’ENVERS réalisé par Alain Jessua, disponible en DVD & Blu-ray le 6 novembre 2024 chez Inser & Cut/L’Oeil du témoin.

Acteurs :  Charles Denner, Anna Gaylor, Guy Saint-Jean, Nicole Gueden, Yvonne Clech, Jean Yanne, Robert Bousquet, Nane Germon…

Scénario :  Alain Jessua, d’après son roman

Photographie : Jacques Robin

Musique : Jacques Loussier

Durée : 1h35

Date de diffusion initiale : 1964

LE FILM

Jacques Valin, employé dans une agence immobilière de Montmartre, mène une vie sans problème en compagnie de son amie cover-girl. Il décide de l’épouser sur un coup de tête. Incapable de supporter les invités de la noce, dont ses patrons, il quitte le restaurant et déambule dans Paris avec sa femme, ce qui lui vaut de perdre son emploi. Coupé de la routine, il s’enferme dans la solitude et plonge peu à peu dans une folie heureuse.

Premier long métrage d’Alain Jessua (1932-2017), La Vie à l’envers est un film étrange, singulier, unique, percutant et par la suite inoubliable. L’ancien assistant de Max Ophüls, Marcel Carné, Yves Allégret et Jacques Becker signe la première pépite de sa filmographie, sans nul doute l’une des plus étonnantes et originales de l’histoire du cinéma français. Primé à Venise (Grand Prix de la presse italienne et Prix de la première œuvre) et à Cannes, grande inspiration pour Martin Scorsese, La Vie à l’envers, adapté du roman du même nom écrit par le metteur en scène lui-même, impose un univers qui lui est propre, qui a toujours détonné au sein de l’industrie cinématographique hexagonale. Véritable plongée psychologique et psychanalytique, le récit adopte le point de vue de son personnage principal du début à la fin, ne le quitte jamais, ne perd pas le fil de ses pensées, s’attarde sur son visage énigmatique, sans pour autant donner toutes les explications quant à ses agissements. Alors qu’il envisageait tout d’abord Jean-Louis Trintignant dans le rôle de Jacques Valin, Alain Jessua jette finalement son dévolu sur l’immense Charles Denner, qui avait fait précédemment une apparition dans Ascenseur pour l’échafaud de Louis Malle et interprété Landru dans le film éponyme de Claude Chabrol. Comédien exceptionnel et au phrasé inimitable, ce dernier n’a que peu à faire pour apporter à Valin une déstabilisante ambiguïté. Laissant l’imagination du public faire son office, le cinéaste tend à montrer que l’être humain qui ne souhaite pas se conformer aux règles qui lui ont été imposées pour paraître en société, saura trouver le moyen de se préserver en s’extrayant volontairement de la masse, de la faune, quitte à passer pour un fou. Ce qui serait alors vu comme de la démence chez le commun des mortels, ne serait en réalité que le dernier moyen de défense d’une âme qui a pris conscience que le monde allait droit dans le mur et qu’il était encore temps d’en réchapper. Soixante ans après sa sortie, La Vie à l’envers n’a pas fini de subjuguer, de passionner et de questionner.

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Test Blu-ray / Stay Hungry, réalisé par Bob Rafelson

STAY HUNGRY réalisé par Bob Rafelson, disponible en Édition Collector Blu-ray + DVD + Livre le 15 novembre 2024 chez Bubbel Pop’ Édition.

Acteurs : Jeff Bridges, Sally Field, Arnold Schwarzenegger, R.G. Armstrong, Robert Englund, Roger E. Mosley, Woodrow Parfrey, Scatman Crothers, Kathleen Miller, Fannie Flagg, Joanna Cassidy, Richard Gilliland, Mayf Nutter, Ed Begley Jr….

Scénario : Charles Gaines & Bob Rafelson, d’après le roman de Charles Gaines

Photographie : Victor J. Kemper

Musique : Byron Berline & Bruce Langhorne

Durée : 1h43

Date de sortie initiale : 1976

LE FILM

Joe Santo doit concilier son entraînement pour le titre de Mister Univers avec sa vie en société. Parallèlement, Craig Blake, agent immobilier, s’intéresse au rachat de son club d’entraînement et tombe amoureux de l’ancienne amante de Joe.

Il existe un film, sans doute l’un des plus beaux de l’histoire du cinéma. Il s’agit de Cinq Pièces faciles Five Easy Pieces, sorti en 1970, durant la pleine émergence du Nouvel Hollywood, réalisé par Bob Rafelson (1933-2022), par ailleurs producteur d’Easy Rider et de La Dernière séance. Ou comment les bases de ce courant cinématographique et même du mythe Jack Nicholson étaient posées. Cinéaste dont le nom est aujourd’hui quelque peu oublié, au contraire de ses longs-métrages à l’instar de ses autres collaborations avec celui qui sera alors son comédien fétiche (Le Facteur sonne toujours deux fois, Man Trouble, Blood & Wine), signe en 1976 l’un de ses opus les plus méconnus et pourtant l’un de ses plus attachants, Stay Hungry. Quasi-inédit dans nos contrées, malgré une sortie – certes discrète – dans les salles françaises, cette comédie mélancolique ou drame léger et sportif se place à un carrefour planté entre deux époques (on imagine et espère que les années 1980 seront plus légères, voire insouciantes), ainsi qu’entre deux ères du septième art. Mais pour l’heure, alors que Rocky devient le plus grand succès de l’année, suivi de près par Les Hommes du président, que La Malédiction de Richard Donner fait frémir les spectateurs, qu’un certain Travis Bickle conduit son taxi dans les rues de New York et que l’Inspecteur Harry en est déjà à sa troisième enquête, Bob Rafelson clôt ce qui apparaîtra rétrospectivement comme une trilogie avec Stay Hungry. Ainsi, après Cinq pièces faciles (1970) et The King of Marvin Gardens (1972), le réalisateur se penche sur la quête existentielle d’un autre jeune, issu ici d’une classe aisée, dont les parents viennent de disparaître dans un accident d’avion. Livré à lui-même, paumé dans sa grande baraque tenue par son valet au service de sa famille depuis un demi-siècle, Craig se voit entraîner malgré lui dans quelques combines immobilières montées par une bande d’escrocs qui souhaiteraient mettre la main sur un pâté de maisons dans une grande ville de l’Alabama. C’est alors qu’il va se prendre d’amitié pour celles et ceux qu’il devait pour ainsi dire mettre à la porte et se découvrir enfin lui-même. Chronique immersive dans le monde du culturisme, radiographie d’une jeunesse américaine en mal de repères (on pense aux futurs personnages de Bret Easton Ellis), pour ne pas dire de piliers, Stay Hungry est tout cela et encore plus. Pierre précieuse du cinéma hollywoodien dissimulé dans une parure de diamants plus célébrés qui lui ont forcément fait de l’ombre, le film de Bob Rafelson est – pour continuer dans le monde de la joaillerie – un diamant à découvrir, à faire connaître, à conseiller entre cinéphiles, qui impose à l’écran l’impressionnant Arnold Schwarzenegger, récompensé par le Golden Globe de la révélation masculine.

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Test Blu-ray / Topaze, réalisé par Marcel Pagnol

TOPAZE réalisé par Marcel Pagnol, disponible le 1er octobre 2024 en Blu-ray, chez CMF (Compagnie Méditerranéenne de Films).

Acteurs : Fernandel, Jacqueline Pagnol, Helène Perdrière, Pierre Larquey, Milly Mathis, Marcel Vallée, Jacques Castelot, Yvette Etiévant, Jacques Morel…

Scénario : Marcel Pagnol, d’après sa pièce de théâtre

Photographie : Philippe Agostini

Musique : Raymond Legrand

Durée : 2h22

Date de sortie initiale : 1951

LE FILM

Instituteur à la pension Muche, Topaze, minable répétiteur incapable de tricher sur les notes de riches cancres, est licencié. Réduit au chômage, il donne des leçons particulières au neveu de Suzy Courtois, une demi-mondaine… Il va alors prendre conscience de la vanité de sa mission éducative et devenir une fripouille cynique…

Dans l’oeuvre et la carrière de Marcel Pagnol, Topaze tient une place prépondérante. C’est avec cette pièce de théâtre créée en 1927 à Berlin, puis l’année suivante au Théâtre des Variétés à Paris que l’auteur obtiendra la reconnaissance publique et critique, non seulement en France, mais aussi dans le monde entier. Pourtant, ce n’est pas lui qui l’adaptera au cinéma cinq ans plus tard, mais Louis Gasnier, avec Louis Jouvet dans le rôle-titre. Pour cela, Marcel Pagnol attendra 1936, après une mouture américaine avec John Barrymore et même une version égyptienne, en confiant le personnage principal à Alexandre Arnaudy. Le cinéaste y revient étrangement en 1951, en signant son propre remake, avec cette fois son épouse Jacqueline et Fernandel au casting. Rétrospectivement, Topaze demeure plus connu pour son premier acte, celui où on nous présente le quotidien du professeur, dont nous allons suivre l’étrange parcours. Car Topaze bifurque ensuite vers la comédie de mœurs dite financière, où Marcel Pagnol plonge le dénommé Albert Topaze dans une histoire de magouilles fondées sur le trafic d’influence, la corruption de fonctionnaires et la prévarication, ou plus communément le grave manquement d’un fonctionnaire, d’un homme d’État, aux devoirs de sa charge (abus d’autorité, détournement de fonds publics, concussion). C’est donc un Pagnol différent, plus engagé sans doute, qui étonne même dans le phrasé de ses interprètes, Fernandel jouant ici sans son légendaire accent. Topaze apparaît aujourd’hui comme un film trop long et lent, étouffant (aucune scène n’a été tourné en extérieur et cela se ressent) et reste marqué par de longues tirades sur les « affaires » qui ne nous intéressent guère. Cela étant, les comédiens (est-il utile de préciser qu’ils sont tous extraordinaires) y vont à fond, ont l’air de s’amuser beaucoup et resplendissent de charisme et de talent. Antépénultième long-métrage de Marcel Pagnol, si l’on considère que Manon des sources et Ugolin, sortis en 1952, comme un seul film, Topaze se voit encore comme une curiosité, mais ne possède pas l’aura des autres monuments du cinéaste.

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Test Blu-ray / Naïs, réalisé par Raymond Leboursier & Marcel Pagnol

NAÏS réalisé par Raymond Leboursier & Marcel Pagnol, disponible le 1er octobre 2024 en Blu-ray, chez CMF (Compagnie Méditerranéenne de Films).

Acteurs : Fernandel, Jacqueline Pagnol, Raymond Pellegrin, Henri Poupon, Charles Blavette, Henri Arius, Germaine Kerjean, Paule Langlais…

Scénario : Marcel Pagnol, d’après une nouvelle d’Emile Zola

Photographie : Charles Suin & Walter Wottitz

Musique : Vincent Scotto & Henri Tomasi

Durée : 2h03

Date de sortie initiale : 1945

LE FILM

Naïs, jeune paysanne provençale, aime Frédéric, fils débauché des patrons de son père. Elle devient sa « maîtresse des vacances ». Toine le bossu les surprend, mais, par amour pour Naïs, il devient leur complice. Micoulin, le père de la jeune fille, met tout en œuvre pour venger son honneur…

Naïs marque le retour de Marcel Pagnol derrière la caméra, cinq ans après La Fille du puisatier, sans parler de La Prière aux étoiles, entamé en 1941, mais dont le tournage sera interrompu en raison des conditions que l’on imagine difficiles sous le régime de Vichy, qui défendait au réalisateur de se rendre à Paris pour ses prises de vue. Marcel Pagnol, dont Alfred Greven, président de la fameuse Continental, désirait lui confier quelques œuvres de propagande nazie, décide finalement de détruire ce qu’il avait tourné pour La Prière aux étoiles, afin d’éviter toutes récupérations. 1945, Naïs sort sur les écrans, d’après Naïs Micoulin, une nouvelle d’Émile Zola, sur lequel Marcel Pagnol a dû laisser parfois la place à la mise en scène à Raymond Leboursier, qui selon les professionnels n’a quasiment rien tourné en réalité. Néanmoins, Naïs est et restera une œuvre mineure dans la carrière exceptionnelle de son auteur et vaut essentiellement aujourd’hui pour l’excellence et la beauté de ses interprètes, Fernandel en tête bien sûr, bouleversant comme jamais, ainsi que la blonde et diaphane Jacqueline Bouvier, devenue la compagne de Marcel Pagnol. Celle qui inspirera Manon des sources au réalisateur, est resplendissante de naturel et de fraîcheur dans Naïs et ses scènes avec Fernandel sont les plus belles du film, qui montre quelques baisses de rythme. Il n’empêche que même plus « anecdotique », Naïs reste bien supérieur aux drames du même acabit, son propos restant par ailleurs moderne, tout comme certaines répliques qui font encore mouche. Une escapade sous le soleil ardent, au milieu des grillons, avec la divine Jacqueline, cela ne se refuse pas.

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Test Blu-ray / Le Schpountz, réalisé par Marcel Pagnol

LE SCHPOUNTZ réalisé par Marcel Pagnol, disponible le 1er octobre 2024 en Blu-ray, chez CMF (Compagnie Méditerranéenne de Films).

Acteurs : Fernandel, Orane Demazis, Fernand Charpin, Robert Vattier, Pierre Brasseur, Léon Belières, Jean Castan, Enrico Glori…

Scénario : Marcel Pagnol

Photographie : Willy Faktorovitch

Musique : Casimir Oberfeld

Durée : 2h09

Date de sortie initiale : 1938

LE FILM

Jeune commis épicier un peu mythomane, Irénée, à qui le cinéma a tourné la tête, est convaincu qu’il deviendra un acteur célèbre. Il rencontre une équipe de tournage qui lui réserve une plaisanterie cruelle. Il arrive aux studios plein d’espoir…

« Quand on fait rire sur la scène ou sur l’écran, on ne s’abaisse pas, bien au contraire. Faire rire ceux qui rentrent des champs, avec leurs grandes mains tellement dures qu’ils ne peuvent plus les fermer, ceux qui sortent des bureaux avec leurs petites poitrines qui ne savent plus le goût de l’air, ceux qui reviennent de l’usine, la tête basse, les ongles cassés, avec de l’huile noire dans les coupures de leurs doigts…Faire rire tous ceux qui mourront, faire rire tous ceux qui ont perdu leur mère, ou qui la perdront…Le rire n’est pas une espèce de convulsion absurde et vulgaire mais une chose humaine que Dieu a peut-être donnée aux hommes pour les consoler d’êtres intelligents. » Marcel Pagnol

Tourné en parallèle de Regain, Le Schpountz est un des monuments de son auteur, Marcel Pagnol (1895-1974). Après le dernier épisode de sa Trilogie marseillaise, le réalisateur confie à nouveau le rôle principal à Fernandel. Ainsi, après Saturnin, le valet de ferme dans Angèle et Urbain Gédémus, le rémouleur de Regain, le comédien endosse l’habit et la raie au milieu d’Irénée Fabre, commis-épicier, persuadé qu’il est fait pour le cinéma, son « talent caché ». Inspiré par une véritable anecdote survenue au moment du tournage d’Angèle en 1934, Le Schpountz révèle l’entre-soi du monde du septième art, où les artistes et techniciens n’hésitent pas à se moquer ouvertement d’un grand garçon benêt (ou un « fada », un « raté », « un bon à rien », « une loque », « une épave », « un pauvre couillon » comme le dit affectueusement l’oncle d’Irénée), persuadé qu’il est fait pour « briller » et mettre les spectateurs à ses pieds. Succession ininterrompue de dialogues anthologiques durant plus de deux heures, cette comédie tragique ou drame comique (cela fonctionne souvent dans les deux sens avec Marcel Pagnol), Le Schpountz possède la même force de frappe qu’un film de Chaplin, son propos est inaltérable, universel et intemporel. Immense chef d’oeuvre.

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Test Blu-ray / Si tu vas à Rio…tu meurs, réalisé par Philippe Clair

SI TU VAS À RIO…TU MEURS réalisé par Philippe Clair, disponible en Blu-ray le 25 septembre 2024 chez Gaumont.

Acteurs : Aldo Maccione, Roberta Close, Ze’ev Revach, Caroline Ohrner, Philippe Clair, Wilson Grey, Nico il Grande, Bruno Frydman…

Scénario : Philippe Clair & Ze’ev Revach

Photographie : Walter Carvalho

Musique : David Tygel

Durée : 1h42

Date de sortie initiale : 1987

LE FILM

Marco, le prêtre, et Aldo, le voyou, sont deux frères jumeaux et se trouvent tous les deux, sans le savoir, à Rio. Marco est en mission dans une favela tandis qu’Aldo est chargé d’écouler une importante quantité de drogue.

1982, Philippe Clair connaît l’un de ses plus grands succès avec Plus beau que moi, tu meurs, qui attire pas moins de 3,3 millions de spectateurs dans les salles. Par où t’es rentré ? On t’a pas vu sortir, dans lequel le réalisateur donne la réplique à Jerry Lewis, ne connaît pas le même engouement deux ans plus tard. Un sacré revers pour le film qui plafonne à 825.000 d’entrées. Mais le pire est à venir pour Philippe Clair, puisqu’en 1986, Si t’as besoin de rien… fais-moi signe n’attire que…82.000 spectateurs. Un bide monumental. Du coup, le cinéaste est obligé de se refaire et il s’agit pour lui de la dernière chance. Ravalant sa fierté, il planche sur la suite de Plus beau que moi, tu meurs, sur lequel les conditions de tournage avec Aldo Maccione avaient été peu reluisantes, les deux hommes s’étant même fâchés à la fin des prises de vue. Pour l’acteur, cela va plutôt bien, puisqu’il vient d’enchaîner plusieurs hits Le Bourreau des cœurs de Christian Gion et Aldo et Junior de Patrick Schulmann, même si Le Cowboy de Georges Lautner et Pizzaiolo et Mozzarel, également de Christian Gion, ont été deux déceptions au box-office. C’est donc cinq ans après que le public découvre Si tu vas à Rio… tu meurs, plusieurs années durant lesquelles l’humour et les attentes ont pu changer considérablement. L’accueil chaleureux voire triomphal rencontré par Les Compères, Papy fait de la résistance, Banzaï, Marche à l’ombre, Trois hommes et un couffin, Les Fugitifs et bien d’autres témoignent de la nouvelle orientation humoristique hexagonale. Philippe Clair tente le tout pour le tout. Et le résultat final sera décevant pour lui, puisque Si tu vas à Rio… tu meurs ne parvient pas à franchir la barre des 500.000 billets vendus. Pourtant, rétrospectivement, cette suite surpasse largement (pour ne pas dire sur tous les points) le premier opus et s’avère même une des comédies les plus sophistiquées de son auteur. Avec un beau cadre large et une photographie soignée, Philippe Clair livre une comédie frappadingue, dépaysante (la ville de Rio est bien filmée et les décors naturels mis en valeur), interprétée par des comédiens survoltés, sur lesquels trône évidemment Aldo Maccione, qui reprend avec bonheur son double-rôle Aldo/Marco. Sans doute l’un des meilleurs films de Philippe Clair.

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Test Blu-ray / Au P’tit Zouave, réalisé par Gilles Grangier

AU P’TIT ZOUAVE réalisé par Gilles Grangier, disponible en Combo Blu-ray + DVD Edition limitée le 16 octobre 2024 chez Pathé.

Acteurs : François Périer, Dany Robin, Paul Frankeur, Marie Daëms, Jacques Morel, Alice Field, Robert Le Fort, Bernard Lajarrige, Paul Azaïs…

Scénario : Pierre Laroche & Albert Valentin

Photographie : Marcel Grignon

Musique : Vincent Scotto

Durée : 1h40

Date de sortie initiale : 1950

LE FILM

Dans un quartier populaire de Paris, où les policiers et un assassin de vieilles filles sévissent, le café Au P’tit Zouave offre réconfort et sécurité aux habitants modestes de la ville. Mais l’arrivée d’un homme plus fortuné et mystérieux vient perturber l’équilibre déjà précaire de l’établissement.

Les années qui ont passé ont contribué à réhabiliter l’oeuvre de Gilles Grangier (1911-1996). Si vous êtes fidèles à Homepopcorn depuis toutes ces années, vous savez que nous avons toujours défendu le réalisateur, conspué par la Nouvelle vague et ses disciples du 6e arrondissement. Nos chroniques consacrées à La Vierge du Rhin, Trois jours à vivre, Meurtre à Montmartre, Échec au porteur, Le Sang à la tête, Train d’enfer, Gas-oil, Maigret voit rouge et Archimède le clochard témoignent de notre amour inconsidéré pour le travail de cet artisan du cinéma français, qui a toujours su imprimer sa griffe dans des œuvres populaires. Gilles Grangier, c’est plus d’une soixantaine de mises en scène étalées sur près de quarante ans et s’il y a eu sans aucun doute un avant et un après Jean Gabin (les deux hommes feront douze films ensemble), on connaît indéniablement moins bien la première partie de sa prolifique et éclectique carrière. L’ancien assistant de Sacha Guitry, René Pujol et Georges Lacombe, ayant signé son premier long-métrage en 1943 (Adémaï bandit d’honneur avec Noël-Noël), enchaîne les tournages après la Seconde Guerre mondiale, allant jusqu’à signer trois films par an, avec une prédilection pour la comédie et le film musical. Au P’tit Zouave clôt cette décennie et s’avère une étonnante chronique, légère en apparence, d’un petit bar parisien situé au bas de la station de métro Dupleix, non loin de La Motte-Picquet – Grenelle et des usines Citroën. En réalité, l’endroit est propice aux rencontres les plus singulières, où l’on se confie au patron bougon (Robert Dalban, génial comme à son habitude) qui rappelle Bernard Blier dans Archimède le clochard, tandis que la serveuse Fernande (l’explosive Annette Poivre) regarde tout ce beau monde, les yeux rêveurs, tout en ne perdant pas une miette de ce qui est dit. Alors, quand le quartier devient le terrain de jeu d’un tueur en série, les suspicions commencent. Au P’tit Zouave est anecdotique quand on s’intéresse à Gilles Grangier, mais il y a toujours quelque chose à glaner ici et là chez ce cinéaste, une dimension documentaire notamment, à l’instar de l’ouverture, où le générique défile tandis que la caméra, placée à l’avant du métro, donne un bel aperçu de la capitale. On se sent bien devant un opus de Gilles Grangier, dont on ressent un humanisme non feint, raison pour laquelle Au P’tit Zouave mérite le coup d’oeil.

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Test Blu-ray / Cinq tulipes rouges, réalisé par Jean Stelli

CINQ TULIPES ROUGES réalisé par Jean Stelli, disponible en Combo Blu-ray + DVD Edition limitée le 16 octobre 2024 chez Pathé.

Acteurs : Jean Brochard, René Dary, Suzanne Dehelly, Raymond Bussières, Pierre-Louis, Robert Berri, Robert Le Fort, Luc Andrieux…

Scénario : Marcel Rivet & Charles Exbrayat

Photographie : Marcel Grignon

Musique : René Sylviano

Durée : 1h34

Date de sortie initiale : 1949

LE FILM

Lors du Tour de France 1948, cinq coureurs sont retrouvés morts avec une tulipe rouge près de leur corps. Une journaliste et un inspecteur de police mènent l’enquête pour retrouver le meurtrier…

Bien avant La Grande Boucle (2013), Le Vélo de Ghislain Lambert (2001), Les Triplettes de Belleville (2003), Les Cracks (1968), The Program (2015), pour ne citer que ceux-là, la course cycliste inspirait le cinéma en 1949 avec Cinq tulipes rouges. Étrange mélange des genres que cette enquête policière menée durant le Tour de France de 1948, sur lequel le film de Jean Stelli (1894-1975) a réellement été tourné, en collaboration avec Peugeot, L’Équipe, France Soir et Le Parisien Libéré, organisateurs de cette épreuve sportive réputée dans le monde entier. Jean Stelli, le réalisateur prolifique, éclectique et néanmoins méconnu de La Valse Blanche (1943), Le Voile Bleu (1942), Les Amoureux de Marianne (1953), ancien acteur puis assistant de Julien Duvivier (L’Ouragan sur la montagne, Les Roquevillard, Golgotha), avait déjà pris le Tour de France comme toile de fond pour sa comédie romantique sortie en 1939, Pour le maillot jaune, avec Albert Préjean. Cette fois, une série de meurtres se déroule au fil des étapes du Tour 1948, les prétendants au maillot jaune étant mystérieusement assassinés les uns à la suite des autres, une tulipe rouge étant systématiquement retrouvée près du corps de la victime. Cinq tulipes rouges vaut assurément le coup d’oeil, d’une part pour sa dimension documentaire (Jean Stelli avait un passé de journaliste et connaissait le terrain), avec ses coureurs qui mangent copieusement le tout arrosé de gros rouge, ses entraîneurs survoltés, ses mécanos amateurs de jolies donzelles, d’autre part pour le duo formidable formé par la géniale Suzanne Dehelly (La Nuit est mon royaume, Premier rendez-vous), impayable dans la peau de La Colonelle, la journaliste qui mène l’enquête à la façon d’un Myron Bolitar (les connaisseurs d’Harlan Coben comprendront), et Jean Brochard (Pot-Bouille, Les Diaboliques, Cécile est morte!) tout aussi impérial dans celle de l’inspecteur-chef Honoré Ricoul. Très rythmé, souvent drôle, bien mené et excellemment interprété, Cinq tulipes rouges mérite d’être redécouvert, surtout par les amateurs de la Petite Reine.

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Test Blu-ray / Cent jours à Palerme, réalisé par Giuseppe Ferrara

CENT JOURS À PALERME (Cento giorni a Palermo) réalisé par Giuseppe Ferrara, disponible en Combo Blu-ray+DVD le 17 septembre 2024 chez Rimini Éditions.

Acteurs : Lino Ventura, Giuliana De Sio, Lino Troisi, Stefano Satta Flores, Arnoldo Foà, Adalberto Maria Merli, Andrea Aureli, Anita Zagaria, Aldo Sarullo, Luigi Nicolosi, Rosario Coniglione, Guido Sagliocca…

Scénario : Pier Giovanni Anchisi, Giuseppe Ferrara, Riccardo Iacona, Giuseppe Tornatore, William Laurent & Giorgio Arlorio

Photographie : Silvio Fraschetti

Musique : Vittorio Gelmetti

Durée : 1h38

Date de sortie initiale : 1984

LE FILM

Printemps 1982. Après avoir brillamment combattu les Brigades Rouges, le général Dalla Chiesa accepte le poste de préfet de Palerme, ville contrôlée par la mafia sicilienne. Incorruptible, inflexible, il va devenir la bête noire de l’organisation criminelle.

Alors âgé de 65 ans et ayant derrière lui trente ans de carrière, Lino Ventura avait un grand regret, que le cinéma italien ne l’ait pas plus sollicité. Sa dernière expérience remonte à 1976, avec Cadavres exquis Cadaveri eccellenti de Francesco Rosi, dans lequel il donnait la réplique à Renato Salvatori et Max von Sydow. Le comédien accepte d’interpréter le général Carlo Alberto dalla Chiesa, préfet de Sicile où il menait une lutte acharnée contre la Mafia et assassiné à Palerme deux ans auparavant. Une histoire brûlante d’actualité et qui l’est d’ailleurs encore quarante ans après. Lino Ventura a peu à faire pour s’imposer dans la peau de cet officier italien, ancien résistant durant la Seconde Guerre mondiale, général des Carabiniers. Après s’être opposé au terrorisme, notamment aux célèbres Brigades rouges durant les Années de plomb, ce héros national était comme qui dirait le dernier rempart contre la Mafia qui gangrenait la Sicile et s’installait sur la scène internationale via le trafic de drogue et d’armes. Personnalité forte et charismatique, Dalla Chiesa met immédiatement le nez dans des affaires qui ne le « concernaient » pas, ce qui n’allait évidemment pas plaire à ceux qui tenaient réellement les rênes, y compris certains politiques en lien avec la pègre. Après quatre mois de dur affrontement, le préfet est tué sauvagement avec son épouse Emanuela dans sa voiture, sans jamais avoir eu l’aide du gouvernement, qui lui avait pourtant promis d’obtenir les pouvoirs nécessaires à son combat. C’est dire si cet attentat est encore dans les mémoires quand le réalisateur et ancien critique Giuseppe Ferrara (1932-2016) s’attaque à ce sujet, qui aura nécessité pas moins d’une demi-douzaine de scénaristes, dont Pier Giovanni Anchisi (La Possédée du lac), Giuseppe Tornatore (Malèna, Cinema Paradiso) et Giorgio Arlorio (El Mercenario, Queimada). S’il n’atteint pas la maîtrise, la rigueur et la virtuosité d’un Francesco Rosi, Cent jours à Palerme n’en reste pas moins une œuvre coup de poing, étonnamment violente, sanglante même, qui offre à Lino Ventura son dernier vrai rôle, avant de tirer sa révérence en faisant une apparition dans La Rumba de Roger Hanin.

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Test Blu-ray / Un homme à genoux, réalisé par Damiano Damiani

UN HOMME À GENOUX (Un uomo in ginocchio) réalisé par Damiano Damiani, disponible en Combo Blu-ray + DVD le 1er octobre 2024 chez Artus Films.

Acteurs : Giuliano Gemma, Eleonora Giorgi, Michele Placido, Tano Cimarosa, Ettore Manni, Luciano Catenacci, Nello Pazzafini, Fabrizio Forte…

Scénario : Damiano Damiani & Nicola Badalucco

Photographie : Ennio Guarnieri

Musique : Franco Mannino

Durée : 1h46

Date de sortie initiale : 1979

LE FILM

Sorti de prison, Nino, un petit truand sans envergure, a décidé de se ranger. Mais quand il se rend compte que, dans son quartier, rôde un tueur à gages, il est convaincu d’en être la cible. Il va devoir renouer avec son passé criminel pour faire face à ce danger.

Goodbye & Amen, Comment tuer un juge, Nous sommes tous en liberté provisoire, La Mafia fait la loi, Amityville II – Le Possédé, Confession d’un commissaire de police au procureur de la République, El Chuncho, Seule contre la mafia…on pourrait continuer encore longtemps comme ça. Autant de titres qui font vibrer le cinéphile féru de cinéma italien et tous imputables à un réalisateur, Damiano Damiani (1922-2013). Un uomo in ginocchio, traduit littéralement en français par Un homme à genoux pour sa sortie en DVD et Blu-ray dans nos contrées en 2024, était alors inédit dans notre pays, probablement en raison de son important échec de l’autre côté des Alpes. Pourtant, de l’aveu même de son auteur, il s’agissait peut-être de son film le plus personnel, ou tout du moins l’un de ses préférés. Merveilleusement incarné par l’immense Giuliano Gemma, Un homme à genoux est le long-métrage qui clôt les années 1970 pour le cinéaste et on ne peut pas dire qu’il se montre optimiste quant à la nouvelle décennie qui s’annonce. Fondamentalement sombre et alarmiste, profondément mélancolique, inquiet, triste, Un uomo in ginocchio rend compte d’un monde qui s’est arrêté de tourner pour la plupart des petites gens en Sicile, qui (sur)vivent comme ils le peuvent, quitte à tomber dans la criminalité. C’est le cas pour Nino, repris de justice, libéré pour bonne conduite après deux années de prison, après avoir été arrêté pour vol de voitures. Marié, deux enfants, Nino est placé en liberté conditionnelle et a misé le peu d’argent qu’il avait avec son épouse dans un petit kiosque. Comme le destin s’acharne souvent, le petit débit de boissons est situé en face d’un entrepôt à poissons où s’est récemment déroulé le rapt de la femme d’un avocat de renom et lié à la mafia. Soupçonné d’avoir été mêlé à cette affaire, Nino est condamné à mort par des mafieux qui le soupçonnent d’avoir fait partie du kidnapping. C’est donc seul contre tous que Nino va tenter de s’innocenter…Sur un scénario aussi virtuose que labyrinthique coécrit par Damiano Damiani et Nicola Badalucco (Black Journal de Mauro Bolognini, Mort à Venise et Les Damnés de Luchino Visconti), Un homme à genoux prend aux tripes du début à la fin, embarque le spectateur dans la spirale infernale dans laquelle est plongé malgré lui le personnage principal, une réaction en chaîne dont on ne connaît jamais réellement quel est le premier maillon, ni le dernier. Une magistrale démonstration de force d’un réalisateur au sommet de son art pour un chef d’oeuvre à découvrir enfin en France dans une copie restaurée 4K grâce aux bons soins d’Artus Films.

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