Test Blu-ray / La Secte, réalisé par Michele Soavi

LA SECTE (La Setta) réalisé par Michele Soavi, disponible en combo Blu-ray/DVD chez Le Chat qui fume

Acteurs : Kelly Curtis, Herbert Lom, Mariangela Giordano, Michel Adatte, Carla Cassola, Angelika Maria Boeck, Giovanni Lombardo Radice, Niels Gullov, Tomas Arana, Dario Casalini, Paolo Pranzo, Yasmine Ussani, Erica Sinisi

Scénario : Michele Soavi, Dario Argento, Gianni Romoli

Photographie : Raffaele Mertes

Musique : Pino Donaggio

Durée : 1h57

Année de sortie : 1991

LE FILM

1970, Californie. Une communauté hippie est massacrée par Damon et les membres de sa secte. Vingt-et-un ans plus tard, Francfort. Tandis que des crimes rituels attribués à la secte des Sans-Visage ponctuent l’actualité, Miriam Kreisl, jeune institutrice, manque de renverser un vieillard au comportement étrange. S’il refuse de se faire soigner, il accepte en revanche de se reposer quelques heures chez elle. Curieusement, Moebius semble connaître la maison et fait part à Miriam d’une mystérieuse destinée. Bientôt, des faits étranges et sanglants se produisent dans l’entourage de la jeune femme.

Auréolé du succès de Sanctuaire, son second long métrage, le réalisateur Michele Soavi s’associe à nouveau deux ans plus tard avec le producteur Dario Argento. Ce dernier cosigne également le scénario avec le metteur en scène, mais aussi Gianni Romoli, futur auteur de la mini-série culte La Caverne de la Rose d’or. Ecrit durant la période « ésotérique » du cinéaste, La SecteLa Setta manque cruellement de rythme et les années ne lui ont pas été profitables. Pourtant, Michele Soavi ne manque pas d’imagination, son style visuel est souvent percutant et l’interprétation est solide, mais le récit est à la traîne en raison d’un intérêt relatif.

1970, Californie. Une communauté hippie accueille dans son camp un voyageur, Damon, sans se douter qu’il est un fanatique. La nuit tombée, ce dernier, accompagné d’autres membres de sa secte, la massacre entièrement. 1991, Francfort. L’actualité allemande est ponctuée de crimes rituels sataniques. Un homme, Martin Romero, traque une femme, Mary Crane, dans les rues de la ville avant de l’assassiner chez elle. Face à la police, avant qu’il ne se suicide, il affirme qu’il était obligé de la tuer. Pendant ce temps, une institutrice, Miriam Kreisl, renverse un vieillard, Moebius Kelly, en voiture. Sans se douter de lui, qui refuse de se faire soigner à l’hôpital, elle accepte de l’accueillir chez elle pour le soigner. Le vieil homme étrange semble reconnaître sa maison et fait part à Miriam d’une étrange destinée. Alors qu’elle dort, il lâche un scarabée sur son corps et l’insecte pénètre son nez. Réveillée par un cauchemar, elle trouve Moebius en train de suffoquer.

La Secte est un film fourre-tout. La ravissante Kelly Curtis, tout aussi sexy que sa sœur de Jamie Lee, doit affronter un scarabée, un lapin qui zappe à la télé, un suaire maléfique, des arracheurs de visages, un docteur amoureux, le tout sur une musique au synthé de Pino Donaggio. Comme s’ils étaient eux-mêmes conscients que le genre arrivait à sa fin, ce qui sera alors le cas avec Dellamorte Dellamore, le film suivant de Michele Soavi, les auteurs peinent à se renouveler et donc décident de créer le chaos dans la vie jusqu’alors calme et bien réglée d’une simple institutrice, qui comme dans Rosemary’s Baby se retrouve à devoir enfanter l’Antéchrist.

Le premier acte est interminable. Les scènes s’étirent en longueur, les séquences s’enchaînent à la va-comme-je-te-pousse et la photo de Raffaele Mertes n’est guère enthousiasmante. Arrive alors Kelly Curtis, certes moins célèbre que son illustre sœur, mais qui n’en possède pas moins une belle présence face à la caméra et dont la ressemblance parfois troublante avec sa cadette rappelle parfois Laurie Strode en prise avec Michael Myers. Heureusement, La Secte va en s’améliorant. Le deuxième acte, celui où bascule l’histoire contient son lot d’émotions fortes, notamment tout ce qui concerne le puits et le suaire qui étouffe ses victimes. Divers effets gores font leur effet, surtout celui du rituel consistant à arracher le visage d’une femme innocente à l’aide de crochets « sacrés », pour ensuite le greffer sur celui du grand gourou (qui ne s’appelle pas Skippy) interprété par Herbert Lom (la franchise La Panthère Rose) et le ramener ainsi à la vie.

Michele Soavi se lâche alors dans un dernier acte beaucoup plus intéressant. Le rythme s’emballe, tout comme la mise en scène. Les angles improbables se suivent pour refléter la folie dans laquelle se retrouve plongée Miriam, le chef opérateur s’amuse avec les filtres et les spots de couleurs, l’oeuvre de Roman Polanski plane tout du long sur le final, à l’instar du récent Mother ! de Darren Aronofsky qui se révèle finalement plus proche, jusque dans son dénouement, de La Secte que de Rosemary’s Baby. C’est donc un résultat en demi-teinte pour La Secte, surtout après la grande réussite de Sanctuaire, pris entre un délire visuel et pictural inspiré et une histoire de satanisme peu convaincante.

LE BLU-RAY

La Secte est disponible dans les bacs grâce aux bons soins de ce cher Chat qui fume. Un sublime combo Blu-ray/DVD, trois disques, un Digipack trois volets quadri avec un étui cartonné du plus bel effet et au visuel intrigant. Les menus principaux sont animés sur la musique du film.

Attention, nous disposons ici d’encore plus de suppléments que pour Sanctuaire ! Près de 2h30 de bonus qui font de cette édition l’une des plus complètes de l’éditeur à ce jour.

La première partie de l’entretien avec Michele Soavi (20’) reprend les mêmes propos que celui disponible sur l’édition de Sanctuaire. Le réalisateur se remémore sa rencontre Dario Argento, dont le cinéma lui a donné la passion pour le genre quand il avait 12 ans. Le destin a finalement réuni les deux hommes qui sont rapidement devenus amis, jusqu’à ce que Dario Argento lui propose d’être son assistant sur Ténèbres (1982). Ce dernier a ensuite produit son second long métrage en tant que metteur en scène, Sanctuaire. Michele Soavi en vient ensuite plus précisément sur La Secte. La genèse (une adaptation avortée du Golem de Gustav Meyrink), les conditions des prises de vues (Soavi a tourné lui-même 90 % du film en tant que caméraman), ses inspirations (la culture celte, l’ésotérisme, Rosemary’s Baby, The Wicker Man), le casting, les symboles (l’eau notamment), la bande originale et l’accueil (frileux) du public. Michele Soavi clôt cet entretien sur une note nostalgique, en se remémorant l’époque où il était alors totalement libre derrière la caméra.

Comme pour Michele Soavi, l’intervention du chef décorateur Massimo Antonello Geleng démarre de la même façon que pour celle de Sanctuaire (23’). Après avoir évoqué sa rencontre avec le réalisateur, notre interlocuteur aborde son travail sur La Secte, un film réalisé dans de meilleures conditions que pour Sanctuaire et à 70 % dans des studios italiens. Le focus est surtout fait sur les séquences du puits, mais Massimo Antonello Geleng parle également du casting et du travail de Michele Soavi. Cet entretien se termine également sur la même conclusion que pour Sanctuaire.

Place au comédien Giovanni Lombardo Radice, qui interprète Martin Romero dans La Secte (12’). Ce n’est pas une surprise, cette interview reprend également certains propos entendus pour Sanctuaire. L’acteur revient surtout sur son amitié avec Michele Soavi, sur Dario Argento à la production, sur le fait qu’il n’aime pas les films d’horreur et n’a d’ailleurs jamais vu La Secte.

Place à un module plus inédit en la présence de Raffaele Mertes (28’). Le directeur de la photographie aborde les partis pris et les conditions de tournage de La Secte. Le travail à la steadycam, avec l’Innovision, cet objectif spécial permettant de s’incruster dans les moindres recoins (comme dans un tuyau de lavabo) sont passés en revue, tout comme le casting, l’investissement de Kelly Curtis dans les scènes difficiles et mouvementées.

Voici maintenant l’entretien indispensable de cette édition. Gianni Romoli, scénariste aux côtés de Dario Argento et Michele Soavi revient avec détails sur la genèse, le tournage et la sortie de La Secte (35’). On apprend entre autres que le projet original s’intitulait Catacombes et liait l’Italie contemporaine avec l’antiquité, où l’on suivait l’histoire horrifique d’une secte. Devant le refus de Dario Argento de produire cette histoire qu’il n’aimait pas, l’histoire est alors remaniée en conservant ce qui concerne la secte. Gianni Romoli explique ensuite ce qui a nourri le scénario et comment La Secte est finalement devenu une analyse consciente de l’évolution du genre. Diverses anecdotes liées au tournage s’enchaînent alors sur un rythme vif. Cette interview se termine sur une note assez amère, Gianni Romoli indiquant que Dario Argento les a éjecté lui et le coscénariste Franco Ferrini après avoir bien avancé sur Trauma (1993). Il indique également regretter le fait que Michele Soavi ait préféré suivre la voie du film d’auteur, plutôt que de persévérer dans la veine horrifique.

Oublié sur la liste des bonus sur le Digipack, l’immense compositeur Pino Donaggio intervient également pour parler de son travail sur La Secte (13’). Il se souvient tout d’abord de sa rencontre avec Dario Argento pour son segment de Deux yeux maléfiques, coréalisé avec George A. Romero en 1990. Puis Pino Donaggio aborde ses expérimentations au synthétiseur électronique pour La Secte, film qu’il apprécie d’ailleurs toujours autant, bien qu’il ait uniquement collaboré avec Dario Argento, alors producteur, et non pas Michele Soavi.

Tout cela se termine par l’intervention plus analytique de La Secte, par l’historien du cinéma Fabrizio Spurio (25’). C’est ici que les passionnés des critiques détaillées se dirigeront pour en savoir plus sur les intentions du réalisateur Michele Soavi, sur ses partis pris et sur les symboles (présence des insectes et des animaux, l’eau comme vecteur du mal) disséminés dans son film. Le fond et la forme sont donc habilement croisés, tandis que Fabrizio Spuro se rappelle avoir été invité à venir sur le plateau grâce au créateur des effets spéciaux Rosario Prestopino, décédé en 2008 et auquel un hommage est rendu à la fin du module. ce dernier lui avait offert un des « visages arrachés » en souvenir, que Fabrizio Spuro présente ici à la caméra.

L’interactivité se clôt sur un lot de bandes-annonces des films bientôt disponibles chez Le Chat qui fume.

L’Image et le son

Que voilà un superbe master ! Présenté dans son format original 1.85 respecté (16/9 compatible 4/3), La Secte brille de mille feux. La colorimétrie est riche, le piqué étonnamment aiguisé, les noirs denses, le grain argentique plaisant, les contrastes au beau fixe et la propreté irréprochable. L’apport HD est non négligeable et profite aux partis paris du chef opérateur Raffaele Mertes (Trauma) qui fait la part belle aux teintes bleutées. Le confort est donc total pour (re)découvrir La Secte et peut-être lui redonner une seconde chance.

Trois versions DTS-HD Master Audio 2.0 disponibles sur cette édition ! Quitte à choisir, sélectionnez la piste anglaise (le film a d’ailleurs été tourné dans cette langue), plus dynamique, aérée, percutante que les versions française et italienne. Cette dernière s’en tire néanmoins avec les honneurs, du moins bien mieux que la langue de Molière au spectre réduit. Les sous-titres français sont imposés et le changement de langue verrouillé à la volée.

Crédits images : © Le Chat qui fume, 1994 Mario et Vittorio Cecchi Gori – Silvio Berlusconi Communications Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Chucky – Jeu d’enfant, réalisé par Tom Holland

CHUCKY – JEU D’ENFANT (Child’s Play) réalisé par Tom Holland, disponible en DVD et Édition Collector Blu-ray + DVD + Livret le 3 juillet 2018 chez ESC Edition

Acteurs : Catherine Hicks, Chris Sarandon, Alex Vincent, Brad Dourif, Dinah Manoff, Tommy Swerdlow, Jack Colvin, Neil Giuntoli

Scénario : Don Mancini, John Lafia, Tom Holland

Photographie : Bill Butler

Musique : Joe Renzetti

Durée : 1H27

Année de sortie : 1989

LE FILM

Abattu par la police et sur le point de rendre son dernier souffle, le serial killer Charles Lee Ray transfère, grâce au vaudou, son esprit dans une poupée Brave Gars, le dernier jouet à la mode. Si, baptisée Chucky, elle fait le bonheur du petit Andy, six ans, la poupée révèle bientôt sa nature maléfique, multipliant les victimes. Prisonnier de son enveloppe de plastique, Charles Lee Ray n’attend plus qu’une chose : changer au plus vite de corps. Et Andy lui semble tout indiqué comme donneur involontaire…

Commençons cette critique par un étrange fait divers : En 1876, la famille Otto emménage dans une grande maison en Californie dans la ville de Key West. La famille est aisée et dispose de plusieurs employés. Un jour, le patriarche se dispute violemment avec une des domestiques qui quittera le domicile par la suite. Mais avant de partir, elle offrira au petit Robert Eugene Otto, âgé de 6 ans, un poupon que l’enfant nommera comme lui : Robert. Robert est ensuite devenu une des attractions les plus insolites de la Californie. Après avoir vraisemblablement semé la terreur auprès de ses multiples propriétaires, il est maintenant exposé dans le musée de sa ville natale, Key West. Don Mancini et Tom Holland s’inspireront de cette étrange histoire pour écrire le script du chef-d’oeuvre en devenir, Child’s Play ou Jeu d’enfant, plus connu dans nos contrées sous le titre Chucky.

Magistral tour de force visuel et scénaristique, ce premier opus entraînera une franchise qui a force de suites s’est embourbée dans un humour autrefois subtil, mais rapidement devenu poussif. Jeu d’enfant est un véritable film d’horreur. Une ambiance générale très premier degré, une mise en scène millimétrée et astucieuse accompagne à merveille cette histoire de poupée psychopathe qui va bien plus loin que son simple concept de base. Chucky n’est pas un simple jouet, c’est un tueur cruel piégé dans un corps en plastique, qui sévit dans une famille déjà fragilisée. Sa soif de sang va s’animer dans l’appartement de l’enfant innocent qui l’a « adopté »,  Andy Barclay (Alex Vincent), qui va alors devoir affronter cette entité aussi grotesque qu’effroyablement dangereuse. Seuls sa mère, interprétée par Catherine Hicks (Sept à la maison) et le lieutenant Norris qu’incarne un Chris Sarandon (visiblement dépassé par les événements), viendront en aide à l’enfant menacé.

Tom Holland, fraîchement sorti du sympathique Vampire, vous avez dit vampire ? (1985), met comme à son habitude la pédale douce sur la violence outrancière et préfère employer une multitude d’astuces que n’aurait pas renié Alfred Hitchcock, en laissant son décor, les ombres et le hors-champ créer la peur chez le spectateur. La caméra, utilisée de manière subjective de manière à se mettre dans la peau du nabot démoniaque, a été inspiré à Tom Holland par le biais du téléfilm Trilogy of Terror. Un téléfilm a sketches en trois parties, diffusé en mars 1975 et dont le troisième acte (écrit par Richard Matheson), La Poupée de la terreur, raconte l’histoire d’une poupée vaudou cherchant à assassiner sa propriétaire. Traumatisé par ce petit film, Tom Holland aura nourri son imaginaire au fil des ans, en repensant inlassablement à ce minuscule poupon qui l’avait tant effrayé.

Et le réalisateur semble avoir rarement été aussi à l’aise, il est même surprenant de l’entendre parler de restriction artistique, ainsi que du tournage rapidement devenu complexe, en raison des marionnettes utilisées dont les dispositifs étaient à l’époque révolutionnaires. Les mouvements de Chucky s’avèrent pourtant d’une remarquable fluidité, encore aujourd’hui.

Porté par la voix désincarnée du génial Brad Dourif, Chucky tue, frappe, insulte, mord, poignarde, grâce au génie des créateurs des effets visuels, dont les prouesses techniques effectuées directement face à la caméra restent particulièrement bluffantes.

Jeu d’Enfant est un bijou, qui plus est, soulignée par une très belle bande originale signée Joe Renzett.

LE BLU-RAY

Jeu d’Enfant est disponible dans les bacs grâce aux bons soins d’ESC Editions. En DVD, mais aussi et surtout dans un superbe combo Blu-ray/DVD épais, Un mediabook visuellement très beau et élégant. Le boîtier contient également un livret de 24 pages écrit par Marc Toullec.

Le menu principal est animé, fluide et accompagné par le thème du film.

 

 

Pour ce qui est des suppléments, les fans de la poupée psychopathe pourront se repaître de trois entretiens tous très intéressants.

Les poupées maléfiques, une projection enfantine effrayante (17’), par Laurent Aknin. l’historien et critique de cinéma revient sur l’utilisation de la poupée ou du pantin au cinéma, des oeuvres d’épouvante des années 50 aux productions Blumhouse.

Jeu d’enfant, l’origine d’une saga familiale (16’), par Caroline Vié. La romancière et critique de cinéma revient sur les origines du célèbre poupon. De ses inspirations à la continuité de la saga, soulignant les qualités et défauts des six films, ainsi que la carrière du scénariste Don Mancini.

Entretien avec Tom Holland (20’) Cela faisait un bon bout de temps que ce bon vieux Tom Holland n’avait pas montré sa bouille devant une caméra. Il revient donc afin de présenter son film et aussi pour livrer quelques anecdotes croustillantes sur Jeu d’Enfant. Soucis de production, souvenirs d’enfance, le cinéaste se livre avec honnêteté et modestie dans cet entretien passionnant.

N’oublions pas la présentation du cinéaste (20 secondes), disponible en introduction du film !

L’interactivité se clôt sur la bande-annonce.

L’Image et le son

Jeu d’Enfant – Chucky arrive dans les bacs français dans une très belle édition HD (1080p) entièrement restaurée 4K. Le travail est impressionnant et l’image est très propre, débarrassée de la majeure partie des poussières, griffures et autres résidus qui ont dû être minutieusement enlevés image par image. Tout au long du processus de restauration, un soin particulier a été apporté afin que la texture originale du film, les détails, la structure du grain ne soient pas affectés par le traitement numérique. Ce nouveau transfert Haute Définition permet de redécouvrir Jeu d’Enfant – Chucky sous toutes ses coutures avec une magnifique patine argentique. Cette élévation HD offre à la colorimétrie un nouveau lifting et retrouve pour l’occasion une nouvelle vivacité. La gestion du grain et des contrastes demeure solide du début à la fin, y compris sur les séquences sombres, sans aucune réduction de bruit. Les détails et le piqué sont assez impressionnants, les plans flous sont d’origine. N’oublions pas la stabilité de la copie soutenue par un codec AVC exigeant.

La version originale bénéficie d’un remixage DTS-HD Master Audio 5.1. Au premier abord on pouvait craindre le pire. Il n’en est rien, bien au contraire. Cette option acoustique séduisante permet à la composition de Joe Renzetti (Frankenhooker) d’environner le spectateur pour mieux le plonger dans l’ambiance du film. Les effets latéraux ajoutés ne tombent jamais dans la gratuité ni dans l’artificialité. De plus, les dialogues ne sont jamais noyés et demeurent solides, la balance frontale assurant de son côté le spectacle acoustique, riche et dynamique. Les fans de l’excellente version française devront se contenter d’une piste DTS-HD Master Audio 2.0. Cette version se révèle assez percutante et propre, mais certains dialogues s’avèrent sensiblement couverts. Aucun souffle constaté.

Test Blu-ray / Sanctuaire, réalisé par Michele Soavi

SANCTUAIRE (La Chiesa) réalisé par Michele Soavi, disponible en combo Blu-ray/DVD chez Le Chat qui fume

Acteurs :  Hugh Quarshie, Tomas Arana, Fedor Chaliapine Jr., Barbara Cupisti, Giovanni Lombardo Radice, Asia Argento, Roberto Caruso, Roberto Corbiletto, Alina De Simone, John Karlsen

Scénario : Franco Ferrini, Michele Soavi

Photographie : Renato Tafuri

Musique : Keith Emerson, Fabio Pignatelli, Philip Glass

Durée : 1h42

Année de sortie : 1989

LE FILM

Moyen Âge. Accusés de servir le Diable, les habitants d’un village sont massacrés par des chevaliers. Afin d’enrayer la propagation du mal, une église est érigée sur le charnier. De nos jours, lors des travaux de restauration qu’elle dirige, Lisa découvre un parchemin dissimulé dans la paroi des sous-sols de l’église. Elle s’empresse d’en faire part à Ewald, le nouveau bibliothécaire. Imprégné des théories de l’alchimiste Fulcanelli, Ewald, bien résolu à percer le secret du parchemin, va, bien malgré lui, réveiller des forces obscures et malveillantes… qui bientôt vont se déchaîner en se propageant à tous ceux présents dans l’édifice.

Né en 1957, Michele Soavi débute au cinéma en tant qu’assistant-réalisateur de Dario Argento sur Ténèbres (1982), Phenomena (1985) et Opéra (1987). Il seconde également Lamberto Bava sur Démons (1985), coécrit et produit par le même Dario Argento. Il fait ses premiers pas derrière la caméra avec Bloody Bird, slasher, giallo, film d’horreur qui remporte un vrai succès et se voit même primé au Festival d’Avoriaz. Alors qu’un troisième volet de la franchise Démons (au succès international) est abandonné durant l’écriture du film, Michele Soavi reprend le travail des scénaristes Franco Ferrini, Lamberto Bava, Dardano Sacchetti et Dario Argento pour le remanier, afin d’en faire son second long métrage en tant que réalisateur. Ce travail donnera naissance à SanctuaireLa Chiesa, aka The Church dans les pays anglo-saxons, formidable film d’épouvante et fantastique qui contient son lot d’émotions fortes, tout en offrant à la jeune Asia Argento, âgée de 13 ans, son premier vrai rôle au cinéma.

Durant le Moyen-Age, des chevaliers teutoniques éliminent tout un village accusé d’hérésie et de sorcellerie. Pour purifier le lieu, une cathédrale est bâtie sur les cadavres de ces villageois considérés comme possédés et soupçonnés d’être des partisans de Satan. Cette construction est censée enterrer les forces du Mal pour l’éternité. Des siècles plus tard, alors que des travaux de rénovation sont engagés dans l’édifice, une jeune femme, Lisa, fait la découverte d’un parchemin dissimulé dans une fissure du bâtiment et contacte un jeune bibliothécaire, Evan, pour qu’il le déchiffre. Ce dernier tente de le décrypter mais il délivre, sans le savoir, des esprits maléfiques. Alors que le bâtiment religieux enferme un groupe de visiteurs à cause d’un mécanisme accidentellement déclenché par Evan, autrefois pensé par l’architecte de la cathédrale, les démons s’échappent du charnier pour prendre le contrôle de leurs corps et les poussent à commettre des atrocités entre eux.

Passionné par la peinture et les grands maîtres, Michele Soavi imprègne Sanctuaire de références picturales (Jérôme Bosch notamment) et concocte de vrais tableaux gothiques absolument remarquables. Du point de vue visuel, on en prend plein les mirettes durant 1h40. Sa mise en scène étonnamment virtuose pour un deuxième film, ses décors impressionnants et la photo riche et contrastée de Renato Tafuri, font de Sanctuaire l’un des films de genre italiens des années 1980 les plus recherchés sur la forme. Le prologue médiéval étonne par sa violence graphique qui peut faire penser à quelques séquences de la série Game of Thrones avant l’heure, toutes proportions gardées bien sûr. Si certains trouveront à redire sur un dernier acte qui part un peu dans tous les sens dans le but sans doute d’épater la galerie, Sanctuaire est une œuvre très généreuse, qui reflète l’amour du cinéaste pour le genre, soucieux d’offrir aux spectateurs un spectacle riche en émotions fortes et en hémoglobine.

Du point de vue interprétation, hormis le plaisir de suivre les premiers pas d’Asia Argento devant la caméra, nous retiendrons surtout la tronche incroyable de Fedor Chaliapine Jr. (Le nom de la rose) qui campe un évêque qui ne semble pas très catholique, la beauté de Barbara Cupisti (L’éventreur de New York) et l’excellent Hugh Quarshie. Sur un rythme plutôt lent, mais très maîtrisé, Sanctuaire enchaîne les morceaux de bravoure (un coït avec un démon), entre effets gores très réussis (un suicide au marteau piqueur), huis clos dégénéré (coucou [REC] !) possessions démoniaques, humour noir (les vieux qui fêtent leur anniversaire de mariage), dans une recherche formelle, baroque, constante et omniprésente, avec en fond les compositions de Keith Emerson, Philip Glass et le groupe incontournable Goblin.

Tous ces ingrédients en apparence hétérogènes, contribuent à la singularité et surtout à la belle réussite de Sanctuaire.

LE BLU-RAY

Sanctuaire est disponible dans les bacs grâce aux bons soins de ce cher Chat qui fume. Un sublime combo Blu-ray/DVD, trois disques, un Digipack trois volets quadri avec un étui cartonné du plus bel effet et au visuel intrigant. Les menus principaux sont animés sur la musique du film.

C’est devenu une habitude, mais nous ne pouvons que saluer une fois de plus le travail acharné de l’éditeur griffu qui ne vient pas les pattes vides, puisque près de 90 minutes de suppléments accompagnent le film de Michele Soavi !

Et c’est Asia Argento qui ouvre le bal de cette interactivité, à travers une interview (8’30) au cours de laquelle la comédienne se souvient du tournage de l’un de ses premiers films. Un module un peu trop court, mais être en compagnie d’Asia ne se refuse évidemment pas.

Ensuite, c’est au tour de Michele Soavi de prendre la parole (20’). le réalisateur se remémore sa rencontre Dario Argento, dont le cinéma lui a donné la passion pour le genre quand il avait 12 ans. Le destin a finalement réuni les deux hommes qui sont rapidement devenus amis, jusqu’à ce que Dario Argento lui propose d’être son assistant sur Ténèbres (1982). Ce dernier a ensuite produit son second long métrage en tant que metteur en scène, Sanctuaire. Michele Soavi en vient ensuite plus précisément sur le film qui nous intéresse. La genèse, les conditions des prises de vues, ses inspirations (les peintures de Jérôme Bosch), le casting, la bande originale et l’accueil du public.

Passons maintenant à l’entretien avec Franco Casagni (10’). Le créateur des maquillages et effets spéciaux aborde les débuts de sa carrière dans Les Barbarians (1987) puis sa collaboration avec Dario Argento sur Opéra (1987), qui l’a conduit à travailler pour Michele Soavi sur Sanctuaire. Cette fois encore, diverses anecdotes de tournage s’enchaînent pour notre plus grand plaisir.

Place au comédien Giovanni Lombardo Radice, qui interprète le Révérend dans Sanctuaire (14’30). Le « Père Giovanni » revient surtout sur son amitié avec Michele Soavi, sur Dario Argento à la production, sur ses partenaires à l’écran, sur son personnage et le tournage à Budapest.

L’intervention la plus dense et la plus complète de cette édition reste celle du chef décorateur Massimo Antonello Geleng (21’). D’emblée, ce dernier indique être très heureux d’évoquer Sanctuaire, pour lequel il a toujours une grande affection. L’association avec Michele Soavi qui lui a permis de travailler également sur La Secte et Dellamorte Dellamore du même metteur en scène, mais également sur divers films de Dario Argento dont Le syndrome de Stendhal (1996) et Le Fantôme de l’Opéra (1998). Massimo Antonello Geleng mentionne également les difficultés rencontrées pour éclairer le plateau, notamment en raison des vitraux de la cathédrale qui servait alors de décor à Budapest.

Le dernier invité de cette édition n’est autre que Franco Ferrini (13’), scénariste de Sanctuaire, Phenomena de Dario Argento, mais aussi des deux Démons, réalisés par Lamberto Bava en 1985 et 1986. Alors que les producteurs désiraient surfer sur les succès de ces deux précédents films, Lamberto Bava décline finalement cette proposition. Dario Argento et Franco Ferrini ayant déjà bien avancé le script pour un troisième volet de Démons, l’histoire est ensuite reprise pour aboutir finalement à ce que deviendra Sanctuaire. Le casting est également passé au peigne fin.

L’interactivité se clôt sur la bande-annonce (anglaise) du film et d’autres trailers de films prévus chez l’éditeur.

L’Image et le son

Nous ne sommes pas déçus ! C’est avec un plaisir immense que nous découvrons ce film de Michele Soavi dans de pareilles conditions ! D’emblée, la colorimétrie s’impose par sa tenue, le relief est très appréciable et le piqué est souvent tranchant pour un film qui a déjà près de trente ans. Le chef-opérateur Renato Tafuri (Bloody Bird), voit sa photo – légèrement ouatée dans son prologue médiéval et plus contrastée par la suite – restituée et offre un lot de détails conséquents. Si la profondeur de champ n’est guère exploitée, certains gros plans étonnent par leur précision, la clarté est de mise sur quelques scènes, la copie stable (merci au codec AVC), le grain bien géré et les noirs denses. N’oublions pas non plus la vertueuse restauration et la propreté de la copie, débarrassée de toutes les scories possibles et imaginables. Ce Blu-ray est en format 1080p et l’apport HD loin d’être négligeable.

Trois versions DTS-HD Master Audio 2.0 disponibles sur cette édition ! Quitte à choisir, sélectionnez la piste anglaise, plus dynamique, aérée, percutante que les versions française et italienne. Cette dernière s’en tire néanmoins avec les honneurs, du moins bien mieux que la langue de Molière au spectre réduit. Les sous-titres français sont imposés.

Crédits images : © Le Chat qui fume, 1994 Mario et Vittorio Cecchi Gori – Silvio Berlusconi Communications Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Les Dents, pipi et au lit, réalisé par Emmanuel Gillibert

LES DENTS, PIPI ET AU LIT ! réalisé par Emmanuel Gillibert, disponible en DVD et Blu-ray le 1er août 2018 chez M6 Vidéo

Acteurs :  Arnaud Ducret, Louise Bourgoin, Timéo Bolland, Saskia Dillais de Melo, Laurent Ferraro, Michaël Cohen, Colette Kraffe, Hervé Masquelier…

Scénario : Emmanuel Gillibert, Marion Thièry

Photographie : Jérôme Alméras

Musique : Martin Rappeneau

Durée : 1h45

Année de sortie : 2018

LE FILM

Antoine est un célibataire endurci, fêtard et séducteur. Il vit dans un magnifique appartement Parisien avec Thomas, son colocataire, où les soirées arrosées battent son plein toutes les semaines. Lorsque Thomas part vivre à Los Angeles, il trouve à Antoine un nouveau colocataire pour le remplacer… « Jeanne, 1m70, yeux bleus ». Si la description fait saliver Antoine, il ne sait pas encore que la charmante Jeanne n’emménage pas seule… Mais accompagnée de ses deux enfants : Théo, 8 ans, et Lou, 5 ans !
Antoine, qui est loin d’être un papa poule, va goûter bien malgré lui aux joies de la vie de famille…

Certains diront qu’il est facile de s’en prendre aux comédies françaises, mais que « ce genre n’a pour prétention que de faire rire les spectateurs ». Certes, nous n’allons pas contredire ces ardents défenseurs, il y en a, de ces films qui sortent quasiment chaque semaine avec sur l’affiche les protagonistes mis en avant sur fond bleu, avec le titre écrit en jaune. Mais tout de même, il y a un minimum, ce que Les Dents, pipi et au lit ne se contente pas même de proposer au public. Ecriture paresseuse, dialogues au rabais, mise en scène inexistante, direction d’acteurs poussive, comédiens exténuants, en un mot gênant.

Fils de Michel Gillibert, écrivain et Secrétaire d’État à la Formation professionnelle sous le deuxième mandat de François Mitterrand, frère du producteur Charles Gillibert, qui a entre autres financé Mia Hansen-Løve, Gus Van Sant, Olivier Assayas et Xavier Dolan, Emmanuel Gillibert n’a donc pas eu beaucoup de soucis à se faire pour lancer son premier film en tant que scénariste et réalisateur. Ainsi, débarque Les Dents, pipi et au lit, énième « cocasserie », foncièrement embarrassante du début à la fin, qui surfe sur le thème visiblement à la mode de la colocation et surtout de l’éternel adulescent parigo, qui préfère se biturer au champagne, s’enfiler des ecsta comme des smarties et jouer à la Playstation, plutôt que de s’investir.

« Alors elle est bonne ? », « Elle est trop bonne ! », « Qu’est-ce qu’elle est bonne ! ». On repassera sur la qualité des répliques. D’ailleurs en parlant de repasser, cela ne fait pas un pli, ce premier long métrage compile toutes les tares d’un cinéma français sans ambition et opportuniste, dans le sens où l’ensemble surfe sur la pseudo-popularité d’un acteur de seconde zone, Arnaud Ducret. Ce dernier interprète ici un rôle que Franck Dubosc n’aurait pas renié il y a quinze ans. Seulement Ducret n’est pas Dubosc. Là où ce dernier a toujours su insuffler une réelle humanité dans ses personnages de tocard pour créer l’empathie, Arnaud Ducret campe ici un gros con, un beauf, immature, vulgaire, misogyne et obsédé sexuel. Autant dire qu’on ne croit pas une seconde au revirement d’Antoine, au contact de deux gamins de 5 et 8 ans, et de leur mère tout juste divorcée. Bon, on comprend qu’il ait envie tout de suite de prendre cette dernière dans ses bras puisqu’elle est incarnée par Louise Bourgoin, mais tout de même, l’évolution du personnage se fait en un clin d’oeil.

L’actrice est décidément, pour ne pas dire malheureusement, cantonnée à la comédie bas de gamme. En l’espace d’un an et demi, elle est apparue dans une sorte de trilogie avec Sous le même toit de Dominique Farrugia, L’Un dans l’autre de Bruno Chiche et Les Dents, pipi et au lit. Elle vaut pourtant bien mieux que ça, comme elle l’avait déjà prouvé chez Anne Fontaine (La Fille de Monaco), Gilles Marchand (L’Autre Monde) ou Guillaume Nicloux (La Religieuse). Toutefois, elle est ici le clown blanc et la sobriété de son jeu est ce qu’on peut sauver de ce marasme. Malheureusement, Arnaud Ducret, qui fait également le lien avec Adopte un veuf (succès surprise de l’année 2016) est à l’écran du début à la fin. Alors qu’il cartonne à la télévision dans la série Parents mode d’emploi depuis 2013, il commence sérieusement à enchaîner les navets au cinéma. L’Oncle Charles, Les Profs, Les Profs 2, L’Embarras du choix, Les Nouvelles Aventures de Cendrillon, Gaston Lagaffe, cela commence à faire un C.V. bien chargé et même beaucoup pour un seul homme. S’il n’est guère aidé par l’indigence du scénario (qui convoque Herbert Léonard comme guest de luxe, trop la classe), une musique pouêt-pouêt qui surligne chaque gag et une photo passe-partout, on se lasse très vite de ses grimaces outrancières, de ses gueulantes à répétition, de son absence de charisme tout simplement. Le bilan est donc très lourd pour Les Dents, pipi et au lit, qui s’en est pourtant plutôt pas mal tiré au box office avec près de 450.000 spectateurs.

LE BLU-RAY

Le test du Blu-ray de Les Dents, pipi et au lit, disponible chez M6 Vidéo, a été réalisé à partir d’un check-disc. Comme souvent, l’éditeur a préféré miser sur un autre visuel, plutôt que de reprendre celui de l’affiche d’exploitation, pourtant plus attractif. Le menu principal est animé sur quelques séquences du film.

En plus de la bande-annonce, M6 Vidéo propose les interviews croisées du réalisateur Emmanuel Gillibert et des comédiens Louise Bourgoin et Arnaud Ducret. Les trois intervenants parviendraient presque à rendre le film intéressant avec leurs arguments bien trouvés et leurs sourires naturels. Le metteur en scène ne cache pas qu’il n’avait aucune ambition en écrivant ce film, tandis que les deux acteurs ne tarissent pas d’éloges envers leur partenaire.

L’Image et le son

L’apport HD pour ce film peut d’abord paraître limité. Mais c’était sans compter sur les quelques séquences en extérieur donnant un peu d’air à l’ensemble. Le relief est indiscutable, la texture flatteuse et la colorimétrie pimpante. Après, il est vrai que l’action se situe essentiellement dans l’appartement et qu’aucune profondeur de champ n’est exploitée. Mais le réalisateur a opté pour le cadre large et le spectateur aura l’impression d’être plongé au beau milieu de cette colocation forcée. Notons toutefois un encodage AVC un peu feignant qui consolide l’ensemble comme il le peut mais qui donne à la photo un aspect parfois légèrement téléfilm.

La piste DTS-HD Master Audio 5.1 offre une belle spatialisation ponctuelle de la bande-son, caisson de basses compris. Outre la spatialisation musicale, certaines ambiances naturelles parviennent à percer sur les quelques séquences en extérieur mais finalement, l’ensemble demeure axé sur les frontales, dynamiques et fluides, tandis que la centrale exsude les dialogues avec efficacité. L’éditeur joint également les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant, ainsi qu’une piste Audiodescription.

Crédits images : © SND / M6 Vidéo Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test DVD / Chien, réalisé par Samuel Benchetrit

CHIEN réalisé par Samuel Benchetrit, disponible en DVD le 18 juillet 2018 chez M6 Vidéo

Acteurs :  Vincent Macaigne, Vanessa Paradis, Bouli Lanners, Olivier Bisback, Tom Canivet, Thibaut Pira Van Overeem…

Scénario : Samuel Benchetrit, Gabor Rassov d’après le roman Chien de Samuel Benchetrit

Photographie : Guillaume Deffontaines

Musique : Raphaël Haroche

Durée : 1h28

Année de sortie : 2018

LE FILM

Jacques Blanchot perd sa femme, son travail et son logement. Devenu rapidement étranger au monde qui l’entoure, il est recueilli par Max, patron d’une animalerie. Ce dernier, sadique et humiliant, dresse Jacques qui devient littéralement son chien…

Chien est le sixième long métrage de l’écrivain Samuel Benchetrit. Après deux courts-métrages, Janis et John sort sur les écrans en 2003. Malgré ce succès d’estime, il attendra cinq ans pour repasser derrière la caméra avec l’excellent film à sketches, J’ai toujours rêvé d’être un gangster. Ses opus suivants, Chez Gino (2011), Un voyage (2014) et Asphalte (2015) n’ont connu aucun succès dans les salles. Pour Chien, Samuel Benchetrit s’inspire de son propre roman sorti en 2015 et signe son meilleur film depuis dix ans. Si La Métamorphose de Franz Kafka n’est jamais bien loin, le réalisateur se penche sur l’incommunicabilité entre les êtres, ou plutôt l’absence de communication, mais aussi sur le besoin de tendresse et d’amour. Et qui de mieux que Vincent Macaigne pour incarner un « homme-chien » sans…cabotiner ?!

Le roman Chien reflétait toutes les névroses de l’écrivain à un moment difficile de sa vie, alors que la dépression le guettait après une rupture sentimentale, avec le sentiment de ne plus appartenir à la société. Ou comment relier l’homme à l’animal. Exutoire, livre cathartique, Chien a permis à Samuel Benchetrit de se sortir de ses maux, en imaginant jusqu’où un être qui a tout perdu est prêt à se rabaisser pour obtenir quelques marques d’affection, une caresse, quelques signes d’amour. Loin d’être une version mélancolique de Didier d’Alain Chabat (1997), Chien est un film singulier, quasi-inclassable, tourné avec les moyens du bord dans des décors froids, dépouillés, faits de béton, mais imprégné d’une infinie tendresse. Pourtant, le film peut rebuter par certaines séquences assez violentes, d’ordre physique mais également psychologique, surtout durant la seconde partie, moins percutante et attachante que la première, mais qui ne manque pas d’attraits.

Le premier acte est consacré à la chute du personnage. Après s’être fait larguer de la pire façon que ce soit par sa compagne, interprétée par une Vanessa Paradis blafarde, famélique et foncièrement antipathique, qui prétexte être devenue allergique à compagnon en étant à son contact, Jacques est ensuite victime de la loi des séries. Il perd le chien qu’il venait tout juste d’acheter pour son fils dans une animalerie, est viré de son hôtel, son patron le renvoie, les rapports avec son enfant se glacent. Comme lien social, Jacques n’a plus que le propriétaire de l’animalerie. Progressivement, ce dernier va prendre Jacques sous son aile…mais en tant que chien. Pour survivre, Jacques va accepter de faire et d’être tout naturellement ce qu’on attend de lui.

S’il traîne ses airs de Droopy dégingandé depuis sa découverte dans le superbe Un monde sans femmes de Guillaume Brac (2011), Vincent Macaigne, pourtant déjà gâté au cinéma chez Sébastien Betbeder, Justine Triet, Antonin Peretjatko ou encore dernièrement chez Éric Toledano et Olivier Nakache, trouve ici l’un de ses meilleurs rôles. Sans jamais rendre son personnage pathétique, le comédien parvient à en restituer toute la tristesse. Rarement, Vincent Macaigne aura été aussi bouleversant. La seconde partie se focalise sur l’étrange relation qui s’instaure entre Jacques et Max, interprété par le monstre Bouli Lanners, ce dernier trouvant ici l’occasion de laisser libre cours à ses désirs d’autorité et de pouvoir. Plus démonstratif, peut-être plus mécanique également, ce deuxième acte manque parfois de rythme et aurait mérité d’être plus resserré. Toutefois, cela contribue au malaise distillé jusqu’au dénouement où Jacques devra choisir la condition dans laquelle il se sent finalement le mieux.

Chien est une œuvre absurde, drôle, émouvante, une fable subversive, dérangeante et intelligente qui mérite l’attention du spectateur. De loin le film le plus abouti de son auteur.

LE DVD

Le test du DVD de Chien, disponible chez M6 Vidéo, a été réalisé sur un check-disc. Le menu principal est animé et musical. Très mauvais point à l’éditeur qui a préféré miser sur un visuel hideux centré sur les trois vedettes, plutôt que de reprendre l’excellente affiche d’exploitation, pourtant bien plus représentative et attractive.

Si vous avez aimé Chien ou même si le film vous a laissé perplexe ou rebuté, n’hésitez pas à le revoir avec les commentaires audio de Samuel Benchetrit. Sans aucun temps mort et du début à la fin, le réalisateur revient sur chaque aspect de son film en abordant la psychologie des personnages, les partis pris, ses intentions. Il met en parallèle son roman et son adaptation, les conditions de tournage en Belgique. Nous apprenons également que Jean-Claude Van Damme a failli interpréter le rôle finalement tenu par Bouli Lanners, JCVD n’ayant visiblement pas vraiment compris où Samuel Benchetrit voulait en venir avec ce personnage, que l’acteur belge voulait plus « héroïque ». Ce commentaire intimiste et passionnant revient également sur l’échec cinglant du film dans les salles, le cinéaste essayant de comprendre ce qui a pu rebuter les spectateurs.

L’interactivité se poursuit avec une interview de Samuel Benchetrit divisée en trois segments, La genèse – Du livre au film (10’), Les acteurs (14’) et Du tournage à la sortie (7’). Si vous venez d’écouter le commentaire audio, cet entretien vous paraîtra redondant puisque tous les propos tenus ici font écho avec ce qui a déjà été entendu précédemment.

Cette section se clôt sur 4 teasers et la bande-annonce.

L’Image et le son

Cette édition DVD de Chien s’avère plutôt soignée. La propreté de la copie est assurée, les couleurs blanchâtres reflètent un tournage hivernal et même les visages paraissent blafards tout du long. Le piqué est aléatoire, mais s’en tire honorablement. La gestion des contrastes est solide, même si nous pouvions attendre plus de détails sur le cadre large. Les rares séquences tournées en extérieur sont très belles et lumineuses.

Chien repose essentiellement sur les dialogues. La piste Dolby Digital 5.1 distille les voix des comédiens avec efficacité, tandis que les latérales s’occupent de l’accompagnement musical et des ambiances naturelles en extérieur. Une spatialisation discrète, mais intelligente. L’éditeur joint également une piste Stéréo, dynamique et riche. Signalons l’absence de sous-titres français destinés au public sourd et malentendant. Pas de piste Audiodescription non plus.

Crédits images : © Paradis Films / M6 Vidéo Captures DVD : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / À armes égales, réalisé par John Frankenheimer

À ARMES ÉGALES (The Challenge) réalisé par John Frankenheimer, disponible en DVD et Blu-ray le 25 juillet 2018 chez Carlotta Films

Acteurs :  Scott Glenn, Toshiro Mifune, Donna Kei Benz, Atsuo Nakamura, Calvin Jung, Sab Shimono, Kenta Fukasaku, Yoshio Inaba…

Scénario : Richard Maxwell, John Sayles

Photographie : Kozo Okazaki

Musique : Jerry Goldsmith

Durée : 1h49

Année de sortie : 1982

LE FILM

Kyoto, 1945, une cérémonie de la plus haute importance a lieu : le chef du clan Yoshida se retire et laisse sa place à son fils aîné, Sensei, et lui remet deux épées ancestrales,  symboles du pouvoir. Jaloux, le cadet tue son père avant de s’enfuir avec les précieuses armes. Plusieurs décennies passent, les enfants de Sensei apprennent que l’une des épées a été retrouvée à Los Angeles. Ils proposent alors à un boxeur en fin de carrière de la leur ramener. Un chemin périlleux l’attend.

Alors que les films de ninja commencent à se multiplier à Hollywood, surtout grâce à la Cannon avec L’Implacable NinjaEnter the Ninja réalisé en 1980 par l’illustre Menahem Golan lui-même et sa suite Ultime Violence – Ninja 2 Revenge of the Ninja mis en scène par Sam Firstenberg, certains cinéastes de renom prennent le train en marche pour surfer sur cette nouvelle vague. C’est le cas de John Frankenheimer (1930-2002). Oui, le cinéaste du Prisonnier d’Alcatraz (1962), Un crime dans la tête (1962), Le Train (1964), Grand prix (1966), French Connection 2 (1975) décide de s’y mettre aussi avec À armes égalesThe Challenge. Réalisé en 1982, ce film d’action de seconde zone contient tous les éléments installés dans les nanars qui commençaient alors à fleurir au cinéma, et ce jusqu’à la fin des années 1980. Difficile de trouver la griffe de John Frankenheimer dans À armes égales. Toutefois, cette série B, limite Z, a su devenir culte auprès des spectateurs adeptes du genre et reste un divertissement fort sympathique.

Los Angeles, 1982. Rick, un boxeur en fin de carrière, est recruté par Toshio et Akiko Yoshida pour rapporter clandestinement au Japon un sabre appartenant à leur père, le maître Yoshida. À peine arrivé à l’aéroport d’Osaka, il est kidnappé par les sbires de Hideo, puissant homme d’affaires mais aussi le frère et ennemi juré de maître Yoshida, prêt à tout pour récupérer le sabre…

« Il a été conditionné pour l’ultime défi » scandait l’affiche française du film. Et voilà notre pauvre américain quelque peu déglingué en route vers la rédemption. Ce boxeur miteux est interprété par Scott Glenn. Remarqué dans quelques séries (Les Rues de San Francisco, L’homme de fer, Baretta) puis au cinéma dans Apocalypse Now et Urban Cowboy, le comédien s’avère un étonnant mélange de David Carradine de la série Kung Fu et de Chuck Norris époque La Fureur du Dragon. Le premier pour la ressemblance physique, le second pour la coupe de cheveux du style baldaquin, mais aussi pour son non-jeu. Comme s’il portait tout le poids du monde sur ses épaules, Scott Glenn incarne péniblement Rick, à qui tous les malheurs arrivent. Lui qui désirait seulement se faire un peu de fric pour payer son loyer, se retrouve finalement au Japon au milieu d’une guerre fratricide.

Au programme, vengeance impitoyable, bastons, maniement du sabre, punchlines, fusillades. Sans oublier les rites d’initiation (un repas avec des anguilles vivantes à avaler) et les punitions où le héros se voit enterrer jusqu’au cou pendant cinq jours, obligé de gober les insectes qui s’approchent de lui. Le scénariste John Sayles (Piranhas, Hurlements) s’est fait plaisir.

Rick, tout d’abord vulgaire, égoïste, seulement préoccupé par l’argent qu’on lui doit, apprendra naturellement à faire le point sur sa vie, à écouter la personne en face de lui (surtout s’il s’agit d’une belle nana bad-ass), avant d’accepter son destin. Il est l’Elu, comme Néo dans Matrix, qui a quand même un peu plus de mal à lever la jambe pour affronter son adversaire, mais qui manie aussi bien la pétoire. À armes égales vaut donc pour son indéniable cachet nanar. Le film est correctement emballé, Scott Glenn est amusant (involontairement c’est vrai), Toshiro Mifune (Les Sept Samouraïs) cachetonne, la musique de Jerry Goldsmith est excellente et notre doublage français vaut son pesant avec notamment le gigantesque Richard Darbois qui prend un malin plaisir à doubler le personnage principal.

L’assaut final à la James Bond, on peut alors penser à celui d’On ne vit que deux fois, se tient grâce à l’indiscutable maîtrise technique de John Frankenheimer. Une petite réussite donc, efficace et récréative où les agrafeuses peuvent devenir des armes redoutables et où les têtes sont tranchées comme des pastèques.

LE BLU-RAY

Voilà deux ans que nous attendions impatiemment le retour de la Midnight Collection initiée par Carlotta Films en 2016 ! Pour cette co-édition avec L’Atelier d’images, nous retrouvons «  le meilleur de la VHS en Blu-ray et DVD  ». La jaquette, glissée dans un boîtier élégant de couleur noire et estampillée «  VHS  », est très sympa et reprend le style Vidéoclub des années 1980 avec le visuel original. Le menu principal est sobre, fixe et musical. Vivement les autres titres, en espérant ne pas attendre aussi longtemps !

Seule ombre au tableau de cette édition, le film n’est accompagné que de sa bande-annonce originale (non restaurée) et des credits habituels.

L’Image et le son

Disponible en France pour la première fois en version restaurée Haute Définition, le film de John Frankenheimer bénéficie d’un Blu-ray au format 1080p soigné. Un lifting numérique a visiblement été effectué, avec un résultat probant, même si des points et des tâches restent constatables (bien que rares). L’encodage AVC est de haute tenue et la promotion HD non négligeable. Les détails sont appréciables, le piqué et la clarté sont aléatoires mais plus nets sur les séquences diurnes, la colorimétrie retrouve une nouvelle jeunesse et les contrastes affichent une petite densité inattendue. L’ensemble est propre, stable en dehors de très légers fourmillements, le reste des scories demeure subliminal, et le grain est respecté. La première bobine et le générique de fin restent plus grumeleux avec une définition hasardeuse. Notons que les sous-titres anglais très encombrants sont incrustés sur l’image lors des échanges en japonais.

Sachant que les spectateurs français ont avant tout découvert ce film dans la langue de Molière, Carlotta Films livre un mixage français propre et respectueux de l’écoute originale avec bien sûr le doublage d’époque. Au jeu des comparaisons, la version originale s’en sort mieux avec des effets plus naturels et une dynamique plus marquée que la VF aux dialogues assez sourds. Les deux pistes sont proposées en DTS-HD Master Audio 1.0, qui ne peuvent évidemment pas rivaliser avec les standards actuels, mais l’éditeur permet de revoir ce « classique » dans de bonnes conditions techniques, sans craquement ni souffle. Le changement de langue est verrouillé à la volée, tout comme les sous-titres français.

Crédits images : © Carlotta Films / L’Atelier d’images / CBS Broadcasting INC. / CBS STUDIOS INC. Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test DVD / Madame, réalisé par Amanda Sthers

MADAME réalisé par Amanda Sthers, disponible en DVD le 3 avril 2018 chez Studiocanal

Acteurs :  Toni Collette, Harvey Keitel, Rossy de Palma, Michael Smiley, Tom Hughes, Violaine Gillibert, Joséphine de La Baume, Stanislas Merhar…

Scénario : Amanda Sthers, Matthew Robbins

Photographie : Régis Blondeau

Musique : Matthieu Gonet

Durée : 1h28

Année de sortie : 2017

LE FILM

Anne et Bob, un couple d’américains fortunés récemment installé à Paris, s’apprêtent à donner un grand dîner, et convient douze invités triés sur le volet, réunissant la haute société anglaise, française et américaine. Mais lorsque Anne réalise qu’un treizième couvert est posé pour Steven, le fils du premier mariage de Bob, elle panique : pour cet événement mondain, hors de question de provoquer le mauvais sort ! Elle demande à Maria, sa domestique, d’enfiler une robe et de se faire passer pour une riche amie espagnole. Maria se retrouve assise à côté de David, un expert en art issu de la noblesse britannique. Aussi quand, sous le charme de Maria, il la recontacte le lendemain, révéler sa véritable identité est impossible. Une romance commence, qui va faire trembler les valeurs élitistes et le mariage d’Anne. A moins que cette dernière n’arrive à l’étouffer…

Madame est le deuxième long métrage d’Amanda Queffélec-Maruani, plus connu sous le nom d’Amanda Sthers. L’écrivaine (Ma place sur la photo, Le Reste de nos vies) se lance dans le monde du cinéma en cosignant Un vrai bonheur, le film (2005) de Didier Caron (d’après sa propre pièce), amusante comédie, mais qui se solde par un bide cinglant. Elle passe naturellement derrière la caméra en 2009 avec Je vais te manquer, film choral au casting conséquent, de Michael Lonsdale à Carole Bouquet, en passant par Pierre Arditi, qui cette fois encore se solde par un échec commercial cuisant. Quasiment dix ans après son coup d’essai, Amanda Sthers revient avec son second long métrage, Madame, dont elle est également la scénariste. Assurément, l’auteure livre son meilleur travail pour le grand écran.

Si les dialogues sont souvent truculents, Madame est surtout porté par des comédiens très en forme, avec en première ligne Rossy de Palma, pour laquelle le rôle principal a été spécialement écrit. C’est d’ailleurs sous l’impulsion, pour ne pas dire « sur commande », de l’épatante actrice espagnole et égérie de Pedro Almodóvar (auquel est fait un petit clin d’oeil), qui avait vu sa pièce de théâtre Le Vieux Juif Blonde, qu’Amanda Sthers lui a concocté ce Madame qui joue sur la différence de classe sociale.

Le postulat est simple. Lors d’un dîner mondain, la maîtresse de maison apprend qu’ils seront treize à table et demande à l’une de ses gouvernantes de se joindre à eux. En partant de ce synopsis, la scénariste-réalisatrice fait se confronter deux univers que tout oppose. Elle convoque un casting international. Aux côtés de Rossy de Palma, Toni Collette, Harvey Keitel, Michael Smiley, Tom Hugues, Stanislas Merhar se donnent la réplique, souvent très piquante, voire acide. On s’amuse de voir la géniale Toni Collette faire du Vélib’, mariée avec un homme plus âgé qu’elle, interprété par Harvey Keitel, dont le personnage, prisonnier de son niveau de vie, préfère aller s’amuser et batifoler avec sa jeune prof de français, incarnée par la divine Joséphine de La Baume. Mention spéciale à l’irlandais Michael Smiley, qui tombe sous le charme de Maria (Rossy de Palma), préférant son naturel, sa beauté intérieure qui illumine la beauté singulière de son visage à la Modigliani et ses blagues coquines aux discussions protocolaires sans intérêt.

Cette situation va mettre chacun des protagonistes face à leurs propres problèmes sentimentaux et sexuels. Ainsi, en se demandant comment Maria a pu conquérir malgré elle son voisin de table, la maîtresse de maison va tenter de reconquérir son époux et tenter de savoir ce qui peut bien plaire chez cette femme. Certes, Madame ne vaut pas pour sa mise en scène, que l’on pourrait qualifier de « fonctionnelle », mais le montage est assez vif, les acteurs en pleine forme, les dialogues amusants. Bien que le film se déroule à Paris de nos jours, on a souvent l’impression que le récit pourrait se dérouler au début du XXe siècle. Ce décalage est souvent étonnant et apporte un charme certain à ce vaudeville au budget modeste (4 millions d’euros), joliment photographié et surtout divertissant.

LE DVD

Après une discrète sortie dans les salles, Madame est pris en charge par Studiocanal pour son arrivée dans les bacs et uniquement en DVD. Le menu principal est fixe et muet.

Aucun supplément.

L’Image et le son

Pas d’édition Haute-Définition pour Madame, mais ce n’est pas une surprise. Avec à peine 100.000 entrées au compteur, la sortie du film d’Amanda Sthers en Blu-ray était pour ainsi dire suicidaire. Toutefois, ce DVD s’en sort avec tous les honneurs. Les intérieurs feutrés bénéficient de très beaux contrastes, les séquences tournées en extérieur sont lumineuses, le piqué est acéré. Le cadre large offre son lot de détails, surtout sur les nombreux gros plans. La colorimétrie est chatoyante, le relief appréciable.

Les versions anglaise et française sont proposées en Dolby Digital 5.1. Disons le, le soutien des latérales est anecdotique pour un film de cet acabit. Les enceintes arrière servent essentiellement à spatialiser la musique de Matthieu Gonet, les tubes Rock ‘n’ Dollars de William Sheller qui ouvre le film, Aserejé de Las Ketchup et quelques ambiances naturelles dans la rue. Les dialogues et la balance frontale jouissent d’une large ouverture, et parviennent à instaurer un confort acoustique suffisant. Une piste française Stéréo est également au programme, ainsi que les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant, sans oublier une piste Audiodescription.

Crédits images : © Studiocanal / Sam Hellmann / Thibault Grabherr Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Le Secret des Marrowbone, réalisé par Sergio G. Sánchez

LE SECRET DES MARROWBONE (El Secreto de Marrowbone ou Marrowbone) réalisé par Sergio G. Sánchez, disponible en DVD et Blu-ray le 18 juillet 2018 chez Metropolian Vidéo

Acteurs :  George MacKay, Anya Taylor-Joy, Charlie Heaton, Mia Goth, Matthew Stagg, Kyle Soller, Nicola Harrison, Tom Fisher…

Scénario : Sergio G. Sánchez

Photographie : Xavi Giménez

Musique : Fernando Velázquez

Durée : 1h51

Année de sortie : 2018

LE FILM

Pour ne pas être séparés, Jack, 20 ans, et ses frères et sœurs plus jeunes, décident de cacher à tout le monde le décès de leur mère qui les élevait seule. Ils se retrouvent livrés à eux-mêmes dans la ferme familiale isolée, mais bientôt, d’étranges phénomènes indiqueraient qu’une présence malveillante hante leur unique refuge…

Alors oui, bien sûr, on a déjà sûrement vu ça plusieurs fois au cinéma ces quinze dernières années, mais Le Secret des MarrowboneEl Secreto de Marrowbone ou tout simplement Marrowbone (titre international) est un film très prometteur. Même si le tournage s’est fait en langue anglaise, le titre espagnol renvoie à ses décors naturels (tout le film y a été tourné), mais aussi et surtout à son cinéaste et scénariste Sergio G. Sánchez. Né en 1973, il signe ici son premier long métrage en tant que réalisateur, après avoir écrit les deux premiers films de J.A. Bayona, L’Orphelinat (2007) et The Impossible (2012). D’ailleurs l’oeuvre de ce dernier, jusque dans la musique composée par Fernando Velázquez (Quelques minutes après minuit), imprègne chaque plan et même l’histoire du Secret des Marrowbone. C’est même ce qui en fait sûrement son relatif point faible, puisque le spectateur un tant soit peu intéressé par le cinéma de genre, surtout ibérique, parviendra à anticiper les rebondissements et le twist à la M. Night Shyamalan. Toutefois, la mise en scène, la beauté de la photographie et l’excellence de ses interprètes valent largement le déplacement.

Lorsque leur mère décède, Jack, ses deux frères et leur sœur se réfugient à Marrowbone, une ferme isolée abandonnée depuis des années et qui appartenait à leur grand-tante. Par peur d’être séparés et placés dans des foyers différents, ils décident d’enterrer le cadavre de leur mère dans le jardin et continuent à faire croire qu’elle est toujours vivante. Un jour, alors qu’ils sont isolés du monde extérieur, un notaire débarque chez eux pour demander à leur mère de signer un testament. La demeure est également hantée et renferme un secret dans le grenier…

En fait, raconter l’histoire du Secret des Marrowbone en dit déjà presque trop. Sans « singer » le cinéma de celui qui lui a donné sa chance dans le milieu, qui apparaît ici en tant que producteur et avec lequel il a fait ses premières armes sur des films importants, Sergio G. Sánchez démontre surtout ici un don pour le storytelling, pour la direction d’acteurs et pour instaurer une ambiance inquiétante, tout en privilégiant l’émotion et les liens entre les personnages. Pas étonnant que le metteur en scène se soit vu remettre le Prix Goya du meilleur nouveau réalisateur en 2018. En fait ce que l’on retient avant tout du Secret des Marrowbone, également influencé par les incontournables du genre (Les Innocents de Jack Clayton, Rebecca d’Alfred Hitchcock, Les Autres d’Alejandro Amenábar), c’est avant tout les comédiens.

Le rôle principal est tenu par le britannique George MacKay, l’une des révélations du magnifique Captain Fantastic de Matt Ross (2016), vu également dans la série 22.11.63 adaptée de l’oeuvre de Stephen King. Magnétique et à fleur de peau, George MacKay est assurément l’un des grands acteurs en devenir et porte admirablement le film de Sergio G. Sánchez. C’est aussi le cas de la désormais incontournable Anya Taylor-Joy. Après The Witch de Robert Eggers, Morgan de Luke Scott et Split de M. Night Shyamalan (bientôt dans Glass), la comédienne confirme son aura, son charisme et l’art d’inspirer les réalisateurs de genre. Le reste du casting est du même acabit avec Charlie Heaton (Stranger Things), Mia Goth (A Cure for Life) et Kyle Soller (la série Poldark), tous vraiment épatants.

Le Secret des Marrowbone a du mal à se sortir d’un certain cahier des charges. On sent le nouveau réalisateur appliqué, chaque plan étant particulièrement soigné, également soutenu par le travail du chef opérateur Xavi Giménez, ancien collaborateur de Jaume Balagueró sur La Secte sans nom ou de Brad Anderson sur The Machinist. Une pléthore de talents réunis à la fois devant et derrière la caméra. Si au final ce conte émeut bien plus qu’il donne les frissons, Le Secret des Marrowbone, présenté en ouverture de Gérardmer en 2018, qui mélange allègrement thriller, horreur, fantastique et histoire d’amour, n’est en aucun cas déplaisant et mérite l’attention des spectateurs et des cinéphiles.

LE BLU-RAY

Le test du Blu-ray du Secret des Maroowbone, disponible chez Metropolitan Vidéo, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est élégant, animé et musical.

Point de making-of à l’horizon, ni d’interviews, mais une grande quantité de scènes coupées (28’). Ces séquences prolongeaient notamment la relation entre Jack et Allie, ainsi que d’autres moments clés du film. Mais la plupart des scènes laissées sur le banc de montage dévoilaient également trop le twist final et l’on comprend aisément pourquoi le réalisateur les a écartées. On se demande également pourquoi elles avaient été écrites tant celles-ci paraissaient trop explicites. Une fin alternative, très jolie, est également disponible.

L’interactivité comporte également une bande-démo avant/après l’incrustation des effets visuels, ainsi que des bandes-annonces et des liens internet.

L’Image et le son

Metropolitan est synonyme d’excellence : relief, colorimétrie, piqué (acéré), contrastes (impressionnants), densité des noirs, on en prend plein les yeux. Les teintes sont chatoyantes et chaque détail aux quatre coins de l’écran est aussi saisissant qu’étourdissant. Ce transfert immaculé soutenu par un encodage AVC solide comme un roc laisse pantois d’admiration. Heureusement, les scènes sombres sont logées à la même enseigne. Ce master HD du Secret des Marrowbone permet de découvrir le film dans de superbes conditions. Le léger grain inhérent à la photo d’origine est respecté.

Le spectateur est littéralement plongé dans l’atmosphère du film grâce aux mixages DTS-HD Master Audio 5.1 anglais et français. La composition de Fernando Velázquez est distillée par l’ensemble des enceintes. Nous sommes en plein conte et les latérales, ainsi que les frontales et le caisson de basses remplissent parfaitement leur fonction, à savoir distiller un lot conséquent d’effets qui font sursauter, même à bas volume. Les conditions acoustiques sont donc soignées, amples, précises, les voix des comédiens jamais noyées. Une piste Audiodescription est également disponible, ainsi que les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant.

Crédits images : © Metropolitan FilmExport Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / L’École buissonnière, réalisé par Nicolas Vanier

L’ÉCOLE BUISSONNIÈRE réalisé par Nicolas Vanier, disponible en DVD et Blu-ray le 13 février 2018 chez Studiocanal

Acteurs :  François Cluzet, Jean Scandel, Eric Elmosnino, François Berléand, Valérie Karsenti, Thomas Durand, Laurent Gerra, Carolina Jurczak…

Scénario : Jérôme Tonnerre, Nicolas Vanier d’après le livre éponyme de ce dernier

Photographie : Éric Guichard

Durée : 1h55

Année de sortie : 2017

LE FILM

Paris 1930. Paul n’a toujours connu qu’un seul horizon : les hauts murs de son orphelinat parisien. Confié à Célestine, une dame de la campagne, et à son mari Borel, le garde-chasse, l’enfant des villes arrive en Sologne, région souveraine et sauvage. L’immense forêt, les étangs embrumés et les landes, tout ici appartient au comte de la Fresnaye, un veuf taciturne qui vit solitaire dans son manoir. S’il tolère les braconniers sur son domaine, Borel, lui, les traque sans relâche et s’acharne sur le plus rusé d’entre eux, Totoche. Aux côtés du braconnier, grand amoureux de la nature, Paul va faire l’apprentissage de la vie mais aussi de la forêt et de ses secrets. Un secret plus lourd pèse sur le domaine… car Paul n’est pas là par hasard.

Depuis 2004 et le triomphe du Dernier Trappeur (plus de deux millions d’entrées), l’aventurier, écrivain et réalisateur Nicolas Vanier est abonné au succès et le public semble le suivre chaque fois. C’était encore le cas dernièrement pour le remake-reboot de Belle et Sébastien, qui a attiré les spectateurs dans toutes les salles européennes – dont trois millions en France – et qui a engrangé deux suites. Son dernier film en date, L’École buissonnière est l’adaptation de son propre roman et non pas le remake du film du même nom réalisé par Jean-Paul Le Chanois et sorti en 1949, même si on y retrouve également l’importance du contact avec la nature. Né à Dakar, mais ayant grandi en Sologne, Nicolas Vanier rend hommage au Pays de la Loire qui a contribué à lui donner l’amour de la faune et de la flore. Si le metteur en scène n’évite pas le côté carte postale rétro-nostalgique hérité des Choristes de Christophe Barratier, il n’est pas difficile de se laisser porter par l’indéniable beauté des images et les bons sentiments distillés ici et là.

On suit donc l’histoire, deuxième incursion dans la fiction pour Nicolas Vanier après Belle et Sébastien, à travers les yeux de Paul (le jeune Jean Scandel, charismatique et très à l’aise), un orphelin, enfermé depuis toujours sous les combles d’un orphelinat parisien. Jusqu’au jour où il découvre le monde de la campagne en Sologne, lorsqu’il est emmené chez Célestine, épouse du garde-chasse et femme de chambre du comte de La Fresnaye. Paul va découvrir des personnages uniques et inoubliables, dont Totoche le braconnier. Avec sa barbe hirsute et son langage parfois fleuri (« Nom d’une pipe en bois ! »), François Cluzet se la joue Michel Simon dans Boudu sauvé des eaux. S’il en fait un peu des caisses, l’acteur semble s’amuser avec ce personnage de braconnier, qui prend un malin plaisir à faire tourner en bourrique le garde-chasse Borel. Ce dernier est interprété par Eric Elmosnino, qui parvient à surpasser son partenaire dans le genre « monsieur plus », en jouant la caricature à fond de l’agent municipal porté sur la bouteille, rasé avec une biscotte. La confrontation des deux personnages rappelle très souvent celle de Louis de Funès avec Moustache dans le cultissime Ni vu, ni connu, réalisé par Yves Robert en 1958 et adapté de L’Affaire Blaireau d’Alphonse Allais.

Le plus beau rôle masculin du film, même si bourré de clichés, reste celui campé par un François Berléand étonnant, qui apporte cette fois une belle dose d’émotions à son éternel personnage de bougon. Mais celle qui tire son épingle du jeu est incontestablement Valérie Karsenti, connue depuis dix ans par les téléspectateurs grâce à la série Scènes de ménages, dans laquelle elle campe Liliane, la femme de José. Si ses apparitions au cinéma sont rares, on a pu la voir chez Bertrand Blier dans Combien tu m’aimes ? (2005) ou Tellement proches de Olivier Nakache et Éric Toledano (2009), elle illumine le film de Nicolas Vanier à chaque apparition. N’oublions pas les amusantes participations de Laurent Gerra et Urbain Cancelier en gendarmes tout droit sortis d’un sketch avec moustache passée à la brillantine et mains sur la bedaine.

Si le récit est somme toute classique, pour ne pas dire archi-rabattu, la sincérité et la sensibilité du réalisateur transparaissent à chaque plan. Le cadre est soigné, la photo très belle, le rythme soutenu, l’authenticité préservée (avec de véritables solognots en guise de figurants) et les apartés sur les animaux environnants ne font pas « pièces rapportées » ou éléments de décor placés pour faire joli. Nicolas Vanier prend soin de dévoiler toute la beauté de la région naturelle forestière de la Sologne, même si le film se termine sur une note ambiguë en faisant la part belle à la chasse. Toutefois, Nicolas Vanier s’en défend en ajoutant que les chasseurs de l’époque respectaient la nature.

Certains spectateurs, une minorité, seront forcément énervés par le côté « C’était mieux avant » qui n’est pas sans rappeler une pub pour le jambon Herta, les autres verront un beau film, tendre, élégant, sensible et honnête pour toute la famille.

LE BLU-RAY

L’École buissonnière est disponible en DVD et Blu-ray chez Studiocanal. Le visuel de la jaquette, glissée dans un boîtier classique de couleur bleue, lui-même glissé dans un surétui cartonné, reprend celui de l’affiche du film. Le menu principal est animé et musical.

Les amateurs de bonus seront un peu déçus par cette interactivité peu chargée.

Le montage animalier (6’) contentera peut-être les amoureux de la nature. Il s’agit d’un montage de plans non gardés, où l’on peut admirer plus attentivement certains de nos amis des eaux et de la forêt.

Si L’École buissonnière dure déjà près de deux heures, Nicolas Vanier avait déjà supprimé quelques scènes, présentées ici (17’). Ces séquences prolongeaient l’arrivée de Paul en Sologne, montrait la première fois qu’il apercevait Totoche, et sa confrontation avec les gamins du village. S’ensuit une partie de pêche traditionnelle.

Cette section se clôt sur un bêtisier (3’), qui s’apparente surtout à un montage réalisé pour fêter la fin du tournage, ainsi qu’un clip promotionnel de trente secondes pour la région Centre-Val de Loire. Envie de partir en Touraine, à Chartres ou au Zoo-Parc de Beauval ?

L’Image et le son

Ma-gni-fi-que ! Ce sublime master HD s’avère l’un des plus beaux de l’année 2018. La photographie d’Éric Guichard (Himalaya – l’enfance d’un chef, Les Saisons) est restituée dans ses moindres partis pris, les scènes diurnes sont éclatantes, le piqué affûté comme une lame de rasoir, les couleurs d’une richesse inégalée. Le cadre large regorge de détails, chaque feuille, chaque brin d’herbe se détache naturellement, les noirs sont denses. Edition Haute-Définition indispensable.

La piste française DTS-HD Master Audio 5.1 instaure un confort acoustique dynamique, dense et souvent percutant, avec des voix délicatement posées sur le canal central. La spatialisation musicale est systématique, toutes les scènes en extérieur sortent du lot avec des ambiances naturelles qui vous transportent au coeur de la forêt, tandis que les scènes plus intimistes baignent dans un silence de marbre. L’éditeur joint également une piste Audiodescription, ainsi que les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant.

Crédits images : © Radar Films/ Jean-Michel Turpin / StudioCanal /Eric TraversCaptures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Incidents de parcours, réalisé par George A. Romero

INCIDENTS DE PARCOURS (Monkey Shines) réalisé par George A. Romero, disponible en DVD et combo Blu-ray+DVD le 7 août 2018 chez ESC Editions

Acteurs :  Jason Beghe, John Pankow, Kate McNeil, Joyce Van Patten, Christine Forrest, Stephen Root, Stanley Tucci, Patricia Tallman…

Scénario : George A. Romero d’après le roman Monkey Shines de Michael Stewart

Photographie : James A. Contner

Musique : David Shire

Durée : 1h53

Année de sortie : 1988

LE FILM

Allan, jeune homme à l’avenir prometteur, est un jour victime d’un accident qui le paralyse totalement. Grâce à Ella, un singe capucin que lui a donné son ami Geoffrey, Allan reprend goût à la vie. Seulement Geoffrey est un génie de la recherche scientifique. Sa dernière trouvaille : augmenter l’intelligence des primates en leur injectant un sérum constitué de tissus du cerveau humain. Bien entendu, Ella n’a pas échappé à ses expériences.

Non, l’immense George A. Romero (1940-2017) n’est pas « que » le réalisateur de films de zombies. Incidents de parcours (1988), titre français idiot de Monkey Shines, est le dixième long métrage du cinéaste. Certes, les cinéphiles retiennent essentiellement La Nuit des morts-vivantsThe Night of the Living Dead (1968), Zombie (1978), Creepshow (1982) ou bien encore Le Jour des morts-vivantsDay of the Dead (1985), mais résumer la carrière du metteur en scène par ces films emblématiques serait – comme on le dit dans Last Action hero – une monumentale erreur. Incidents de parcours, réalisé trois ans après Le Jour des morts-vivants, est l’adaptation du roman de Michael Stewart, Monkey Shines. Comme il le fera en 1992 pour La Part des ténèbres, tiré du roman éponyme de Richard Bachman alias Stephen King, le réalisateur s’approprie le matériel original pour aborder les thèmes qui lui sont chers (ou « chairs » devrait-on dire), entre autres la part d’animalité présente en chaque être humain, les dérives de la science avec l’homme qui se prend pour Dieu. Méconnu en dehors du cercle de ses admirateurs, comme Knightriders (1981), Incidents de parcours mérite pourtant d’être reconsidéré et reste un sacré tour de force de George A. Romero.

Allan Mann est un brillant étudiant en droit. Il est jeune, sportif, le monde semble s’ouvrir à lui jusqu’au jour où, victime d’un accident, il devient tétraplégique. Son monde s’écroule et bientôt Allan ne voit plus que le suicide comme porte de sortie. Pour le sortir de sa dépression, Geoffrey, un ami chercheur, lui offre alors un petit singe capucin du nom d’Ella. Elle est dressée pour accompagner et aider les handicapés dans leurs vies quotidiennes. Ella se révèle extrêmement brillante et ingénieuse et bientôt une relation fusionnelle s’instaure entre elle et son maître. Relation qui devient exclusive, Ella ne supportant pas la présence de Mélanie, la kinésithérapeute d’Allan et plus généralement toute personne s’interposant entre elle et son maître.

Trente ans après sa discrète sortie dans les salles, Incidents de parcours demeure une vraie petite leçon de mise en scène. Le rythme est lent, mais toujours maîtrisé et le récit repose sur un montage percutant qui ne laisse aucun moment de répit au spectateur. Le cinéaste est en pleine possession de ses moyens et démontre son art du storytelling. Monkey Shines se déguste comme un roman que l’on dévorerait page après page. Par ailleurs, le film n’est certainement pas à classer dans le genre épouvante, mais se révèle être un drame intimiste parasité par l’incursion du fantastique et du thriller. On pense alors à David Cronenberg ou plus spécialement à Stephen King, ami du cinéaste. Un temps pressenti pour réaliser Les Vampires de Salem à la fin des années 1970, George A. Romero avait ensuite collaboré avec l’écrivain sur Creepshow, avant de travailler sur l’adaptation de Simetierre, qui ne verra finalement pas le jour. Les deux hommes se distinguent par leur capacité à rendre le surnaturel réaliste, qui s’immisce dans le quotidien le plus banal. C’est le cas dans Incidents de parcours, qui repose également sur un excellent casting de têtes méconnues, ce qui renforce l’empathie pour les personnages.

Jason Beghe, vu dans la série Californication, qui en dehors de sa barbe postiche digne d’un hérisson mort, parvient à rendre son personnage toujours attachant malgré son ambiguïté. A ses côtés, quelques têtes plus « reconnaissables » à inscrire dans la catégorie «On ne sait jamais comment ils s’appellent », comme celle de John Pankow (Police fédérale, Los Angeles) ou bien celle désormais plus célèbre de l’excellent Stanley Tucci dans une de ses premières apparitions au cinéma. Sans oublier le charme de Kate McNeil. Mais l’un des personnages principaux s’avère le capucin, seule « star » visible sur l’affiche du film. On imagine volontiers la patience nécessaire de la part de l’équipe pour obtenir les réactions désirées, surtout pour le dernier acte, énorme morceau de bravoure où les rebondissements s’enchaînent pendant près de vingt minutes, quand l’homme doit faire face à ses instincts primaires. L’ombre d’Alfred Hitchcock plane également sur Monkey Shines, et plus particulièrement de Psychose auquel on ne peut s’empêcher de penser pour la sous-intrigue avec la mère du personnage principal, qu’il appelle plusieurs fois « Mother ».

Produit et distribué par la société Orion Pictures (Terminator, RoboCop, Platoon, Le Silence des agneaux), Incidents de parcours fait partie de ce genre de films que l’on redécouvre avec un plaisir non dissimulé. D’une part en raison de la nostalgie que l’on peut avoir pour ce genre de productions typiques des années 80, d’autre part parce qu’il s’agit d’un vrai bon film, en dehors de son happy-end convenu imposé à Romero par le studio, que l’on déterre comme une pépite en ayant la conviction qu’il mériterait une audience bien plus large.

LE BLU-RAY

Jusqu’ici indisponible en France, Incident de parcours arrive dans les bacs en DVD et combo Blu-ray+DVD+livret exclusif (24 pages) écrit par Marc Toullec, en édition limitée, sous les couleurs de ESC Editions. Le menu principal est animé et musical.

En plus des bandes-annonces d’Incidents de parcours, de Jeu d’enfant et de Street Trash, ne manquez pas l’intervention de l’excellent Julien Sévéon (22’). L’auteur de l’ouvrage George A. Romero : Révolutions, Zombies et Chevalerie (Popcorn, 2017), propose une brillante et passionnante analyse du film qui nous intéresse ici. Monkey Shines est également replacé dans la filmographie du cinéaste, tout comme les thèmes abordés sont croisés avec ceux déjà présents dans les autres opus de George A. Romero. Le journaliste aborde les conditions de tournage d’Incidents de parcours (notamment avec les capucins), indique les différences avec le roman original (inédit en France) de Michael Stewart et comment le réalisateur a su s’approprier l’histoire originale pour y mettre ses propres obsessions, en dépit d’une fin optimiste imposée par le studio. Notons également que deux courts extraits d’interviews de George A. Romero se greffent à cet entretien.

L’Image et le son

Pour son trentième anniversaire, Incidents de parcours arrive dans un nouveau master Haute-Définition et nous ne sommes pas déçus ! Avec son format respecté 1.85 et une solide compression AVC, ce Blu-ray au format 1080p permet de (re)découvrir le film de George A. Romero dans de très bonnes conditions techniques. La copie est très propre, stable et lumineuse, la restauration impressionnante, les contrastes bien équilibrés. Les détails étonnent souvent par leur précision, notamment sur les gros plans détaillés à souhait (la sueur qui brille sur le front d’Allan), les couleurs retrouvent un éclat inespéré. Le grain argentique est également bien géré, même si plus épais sur les séquences sombres.

Les versions originale et française bénéficient d’un mixage DTS HD Master Audio 2.0. Le confort acoustique est assuré dans les deux cas. L’espace phonique se révèle suffisant et les dialogues sont clairs, nets, précis, même si l’ensemble manque de vivacité sur la piste anglaise. Que vous ayez opté pour la langue de Shakespeare (conseillée) ou celle de Molière, aucun souffle ne vient parasiter votre projection et l’ensemble reste propre. Les sous-titres français ne sont pas imposés sur la version originale.

Crédits images : © ESC Editions / ESC Distribution / MGMCaptures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr