Test Blu-ray / L’Ombre d’Emily, réalisé par Paul Feig

L’OMBRE D’EMILY (A Simple Favor) réalisé par Paul Feig, disponible en DVD et Blu-ray le 8 février 2018 chez Metropolitan Vidéo

Acteurs : Anna Kendrick, Blake Lively, Henry Golding, Andrew Rannells, Jean Smart, Bashir Salahuddin, Joshua Satine, Ian Ho, Kelly McCormack, Aparna Nancherla, Rupert Friend…

Scénario : Jessica Sharzer

Photographie : John Schwartzman

Musique : Theodore Shapiro

Durée : 1h56

Date de sortie initiale : 2018

LE FILM

Stephanie cherche à découvrir la vérité sur la soudaine disparition de sa meilleure amie Emily.

Oublions son remake-reboot-suite de SOS FantômesGhostbusters, même si son film ne méritait pas toutes ces insultes et cette volée de bois vert, Paul Feig est de retour aux affaires avec L’Ombre d’EmilyA Simple Favor. Si l’on retrouve son humour pince-sans-rire, le réalisateur aborde son film avec une ironie et un cynisme revigorants, à travers une histoire à la fois douce et surtout très amère, qui lui permet de s’amuser avec les codes du film noir hollywoodien des années 1940-50, en jouant avec le mélange des genres, tout en dirigeant deux formidables comédiennes, Blake Lively et Anna Kendrick. Une très belle réussite à inscrire au palmarès du metteur en scène de l’une des plus grandes comédies de ces quinze dernières années, Mes Meilleures amiesBridesmaids.

Warfield, Connecticut. Stephanie Smothers est la mère au foyer de banlieue parfaite : coquette, polie et aimante, elle participe aussi à toutes les activités de l’école de son fils qu’elle élève seule depuis la mort de son mari et anime un vlog d’astuces pour maman. Néanmoins, les autres parents se moquent d’elle, ce qui l’empêche de se faire des amis. Mais tout commence à changer quand elle fait la rencontre d’Emily Nelson, la mère d’un ami de son fils. Les deux femmes sont très différentes : Emily est mariée, travaille en ville, jure, boit et dispose d’une grande confiance en elle et d’une classe folle. Pourtant, un après-midi, elles commencent à échanger autour d’un martini. Ce petit rendez-vous devient alors une habitude, au point qu’elles deviennent amies. Un jour, Stephanie reçoit un appel d’Emily qui lui demande de récupérer son fils après les cours. Mais la soirée passe, puis un jour, puis un autre et aucun signe d’Emily. Désespérée, elle contacte le mari d’Emily qui est en déplacement pour lui faire part de la disparition de sa femme. Une enquête de police est ouverte, mais Stephanie ne peut s’empêcher de penser à son amie. Elle va alors commencer à découvrir les nombreux et sombres secrets d’Emily.

Nouveau virage dans la carrière de Paul Feig donc avec L’Ombre d’Emily. Après Les Flingueuses et Spy, qui mixait l’humour et les scènes d’action, sans oublier le fantastique avec SOS Fantômes donc, le réalisateur adapte le roman Disparue de Darcey Bell, sur un scénario de Jessica Sharzer, récurrente sur la série American Horror Story. S’il n’a pas sa férocité, Paul Feig rappelle Billy Wilder en égratignant le vernis de l’American Way of Life, avec un sourire carnassier. Autrement dit, si les petites bourgades américaines sont belles, colorées, fleuries, avec leurs habitants qui participent à la vie de la communauté, qui font des gâteaux pour les kermesses, qui s’entraident pour aller chercher les enfants à la sortie de l’école, tout n’est qu’apparence, décor et faux-semblants. N’importe qui peut dissimuler un passé trouble, un crime, un vol, le péché est partout. A l’instar de la géniale série Big Little Lies, L’Ombre d’Emily joue sur l’ambivalence des personnages, leur psyché perturbée et dissimulée, tout est convoitise, désir, envie. Chaque protagoniste est replié sur lui-même, tout en lorgnant chez le voisin chez qui l’herbe est toujours plus verte. A ce titre, les deux actrices principales trouvent ici l’un de leurs meilleurs rôles.

Anna Kendrick, girl next door du cinéma américain depuis la saga Twilight, révélée il y a dix ans dans In the Air de Jason Reitman et devenue depuis très bankable à Hollywood (la trilogie Pitch Perfect), a déjà démontré toute l’étendue de son talent dans le registre plus dramatique dans Sous surveillance de Robert Redford, End of Watch de David Ayer et l’excellent Mr. Wolff de Gavin O’Connor. Ambiguë et attachante, sexy et prude, inquiétante et empathique, la comédienne est quasiment de tous les plans et s’en acquitte à merveille. Souvent réduite à sa beauté diaphane, Blake Lively est pourtant devenue une actrice confirmée, qui n’a eu de cesse de faire des choix intéressants pour se débarrasser de ce carcan. De The Town de Ben Affleck, en passant par Savages de Oliver Stone, Adaline de Lee Toland Krieger et Café Society de Woody Allen, elle est impériale, magnétique et sensuelle dans L’Ombre d’Emily, vulgaire, castratrice, condescendante, manipulatrice, mauvaise mère, alcoolique, qui dissimule un passé perturbé. Au milieu des deux têtes d’affiche et donc des deux personnages principaux, Henry Golding parvient à tirer son épingle du jeu.

Paul Feig s’amuse des retournements de situation, des clichés inhérents au genre et des rebondissements dignes d’une série B, en se moquant de l’innocence et du puritanisme, sans jamais tomber dans la méchanceté gratuite. La mise en scène en solide, les décors soignés, la photographie léchée, les costumes très classes, tout ce qui se joue est cruel (dialogues très acides), tandis que résonne moult chansons françaises des années 60 (France Gall, Jacques Dutronc, Brigitte Bardot, Françoise Hardy), avec une petite touche d’Orelsan en guise de générique de fin et une faute de goût avec Les Passants de Zaz. Personne n’est parfait. Tiens, encore Billy Wilder. Tout cela pour dire que L’Ombre d’Emily est un film très réjouissant.

LE BLU-RAY

Le test du Blu-ray de L’Ombre d’Emily, disponible chez Metropolitan Vidéo, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est très beau, animé et musical. Même chose pour les sous-menus, très élégants. Ça fait plaisir !

C’est l’une des grandes éditions du mois de février 2019 ! L’éditeur a concocté un Blu-ray remplit de suppléments, par ailleurs très bons. Cette section est présentée par Paul Feig, débordant d’énergie derrière son bureau.

Les sept premiers modules intitulés Martinis sur pierre tombale (20’), L’esthétique du film (12’30), Récit d’un réalisateur raffiné (10’30), Le triangle amoureux (6’), Le style selon Paul (5’), Dennis Nylon (5’) et A propos des enfants (4’30) donne un grand aperçu du tournage de L’Ombre d’Emily. Les comédiens, le réalisateur (toujours en costard trois-pièces), le directeur de la photographie, les responsables des costumes et des décors prennent la parole au fil des quarante jours de prises de vue. La psychologie et l’évolution des personnages sont intelligemment abordées, tout comme les thèmes du film. Attention aux nombreux spoilers puisque le dénouement y est ouvertement évoqué.

Le plus inattendu provient de l’épilogue rejeté lors des projections tests. Le réalisateur et sa scénariste avaient prévu de terminer le film sur un flash mob où Sean faisait une demande en mariage à Stéphanie dans la cour de l’école. Une séquence pour laquelle Henry Golding et d’autres comédiens s’étaient durement entraînés, qui a finalement été coupée au montage final. Heureusement, car même si la scène est amusante, elle aurait clairement donné au film un côté grotesque et inapproprié. Cela n’empêche pas Paul Feig de présenter cette scène (d’une durée de 5’), ainsi que son making of (5’) avec les répétitions des acteurs.

Nous trouvons ensuite 16 minutes de scènes coupées (anecdotiques), parmi lesquelles est intégré le flash mob vu précédemment. Cette fois encore, Paul Feig fait une petite intro sur cette section.

Trois commentaires audio (!) uniquement réservés aux anglophiles sont également au programme, sans sous-titres français. Le dénominateur commun est la présence de Paul Feig sur les trois pistes. Il est seul derrière le micro sur le premier, accompagné des acteurs Anna Kendrick, Blake Lively, Jean Smart et Bashir Salahuddin sur le second, et de la scénariste Jessica Sharzer, de la productrice Jessie Henderson, du chef opérateur John Schwartzman et de la costumière Renee Ehrlich Kalfus sur le dernier.

L’interactivité se clôt sur un montage de prises ratées (3’30) et des bandes-annonces.

L’Image et le son

Tout d’abord, c’est la clarté, le relief des séquences diurnes et en extérieur qui impressionnent et flattent la rétine, avec des couleurs bigarrées et chatoyantes. Le piqué est vigoureusement acéré (un peu plus lisse sur les scènes en intérieur), les noirs denses, les détails abondent aux quatre coins du cadre et les contrastes affichent une très belle densité. C’est très plaisant et l’ensemble tire habilement partie de l’apport HD. Un transfert très élégant qui met en avant la photo du chef opérateur John Schwartzman (Armageddon, Pearl Harbor, Jurassic World).

On ne s’attendait pas à ce service princier ! Dès la première séquence, l’ensemble des enceintes des pistes anglaise DTS-HD Master Audio 7.1 est mis à contribution, ainsi que sur la version française DTS-HD Master Audio 5.1 au doublage réussi. Les ambiances sont très présentes, l’excellente musique de Theodore Shapiro bénéficie d’un traitement de faveur avec une large ouverture, tout comme les tubes français des années 1960. Les dialogues ne sont jamais pris en défaut et demeurent solidement plantés sur la centrale. L’éditeur joint également une piste Audiodescription, ainsi que les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant.

Crédits images : © Metropolitan FilmExport / LIONSGATE / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Le Flic de Belleville, réalisé par Rachid Bouchareb

LE FLIC DE BELLEVILLE réalisé par Rachid Bouchareb, disponible en DVD et Blu-ray le 18 février 2018 chez Metropolitan Vidéo

Acteurs : Omar Sy, Luis Guzmán, Biyouna, Diem Nguyen, Issaka Sawadogo, Eriq Ebouaney, Maïmouna Gueye, Julie Ferrier, Franck Gastambide…

Scénario : Rachid Bouchareb, Larry Gross, Marion Doussot

Photographie : Alain Duplantier

Musique : Éric Neveux

Durée : 1h51

Date de sortie initiale : 2018

LE FILM

Baaba est flic à Belleville, quartier qu’il n’a jamais quitté, au grand désespoir de sa copine qui le tanne pour enfin vivre avec lui, ailleurs, et loin de sa mère. Un soir, Roland, son ami d’enfance, est assassiné sous ses yeux. Baaba prend sa place d’Officier de liaison auprès du Consulat de France à Miami, afin de retrouver son assassin. En Floride, flanqué de sa mère plus qu’envahissante, il est pris en main par Ricardo, un flic local toujours mal luné. Contraint de faire équipe, le duo explosif mène l’enquête…

Etrange idée de la part de Rachid Bouchareb d’avoir voulu s’inspirer du buddy-movie américain à l’ancienne pour son dernier film, Le Flic de Belleville, un temps envisagé avec Jamel Debbouze et Queen Latifah. En effet, nous n’imaginions pas le réalisateur de Little Senegal (2001), Indigènes (2006), Hors-la-loi (2010), du superbe téléfilm Just Like a woman (2012) et également producteur de Bruno Dumont (La Vie de Jésus, L’Humanité, Flandres et Camille Claudel 1915) s’aventurer sur le terrain de la comédie policière à gros budget. Le titre fait évidemment référence à la trilogie du Flic de Beverly Hills et cette production, entièrement montée sur le nom d’Omar Sy, essaye de proposer un spectacle plus ambitieux que la moyenne, toutes proportions gardées. Conspué par la critique à sa sortie, certains ont même parlé d’accident industriel, Le Flic de Belleville, pensé comme le troisième volet d’une trilogie américaine après Just Like a Woman et La Voie de l’ennemi, n’est certainement pas honteux et malgré ses points faibles (un gros manque de rythme entre autres) reste un divertissement plus qu’honnête et dépaysant dans lequel Omar Sy est parfaitement à sa place.

Originaire du quartier de Belleville, Sebastian Bouchard, dit « Baaba », est devenu officier de police. Il est bien décidé à rester dans son quartier, au grand désespoir de sa copine souhaitant aller vivre ailleurs. Baaba a du mal à s’éloigner de sa mère, légèrement envahissante. Un soir dans un restaurant, Roland, son ami d’enfance, est assassiné sous ses yeux. Roland était officier de liaison du Consulat général de France à Miami et était de passage à Paris pour une enquête sur un trafic de stupéfiants. Baaba décide alors de se rendre en Floride, en emmenant avec lui sa mère, qu’il n’arrive toujours pas à laisser seule. À Miami, il est encadré par un flic local blasé et irascible, Ricardo Garcia. Les deux hommes vont alors être forcés de travailler ensemble malgré tout ce qui les sépare.

Le scénario, coécrit avec Larry Gross (48 heures, 48 heures de plus), est prétexte pour faire un parallèle entre Omar Sy et Eddie Murphy, y compris sur l’affiche d’exploitation, tout en faisant un clin d’oeil à 2 flics à Miami et L’Arme fatale. De ce point de vue-là, le comédien s’éclate dans ce rôle et se révèle autant à l’aise dans les scènes de comédie que dans les séquences d’action flingue à la main, tout comme dans les rues crasseuses de Belleville et sur les boulevards ensoleillés de Miami. Depuis son César du meilleur acteur pour Intouchables, Omar Sy a su profiter de quelques opportunités à Hollywood (X-Men : Days of Future Past de Bryan Singer, Inferno de Ron Howard, Jurassic World de Colin Trevorrow) même s’il s’agissait plus d’une participation, tout en confortant sa place au box-office en France avec De l’autre côté du périph de David Charhon, Samba d’Eric Toledano et Olivier Nakache, Chocolat de Roschdy Zem et Demain tout commence d’Hugo Gélin, qui ont tous été de gros cartons qui se sont d’ailleurs bien exportés. En revanche, Knock de Lorraine Lévy s’est soldé par un échec cuisant. Avec près de 650.000 entrées, Le Flic de Belleville n’est pas LE bide entendu ici et là, mais cela n’a pas suffi à rembourser les 15 millions d’euros de budget. Pourtant, une fois n’est pas coutume dans la comédie française, l’argent se voit à l’écran.

Rachid Bouchareb soigne sa mise en scène avec un très beau cadre et la photographie du chef opérateur Alain Duplantier (À bout portant) est belle, lumineuse et très élégante. Maintenant il est vrai que l’histoire n’a absolument rien de transcendant et que l’intérêt s’essouffle rapidement. Omar Sy assure le show et le film ne vaut que pour lui, ainsi que pour sa confrontation avec Luis Guzmán (déjà présent au générique de La Voie de l’ennemi), éternel second rôle du cinéma hollywoodien, vu chez Ridley Scott, Sidney Lumet, Anthony Minghella, Brian De Palma, Paul Thomas Anderson et Steven Soderbergh. Un C.V. impressionnant pour le comédien portoricain emblématique de la rubrique « On ne sait jamais comment il s’appelle ».

Balançant ses vannes en français et en anglais, menant son enquête, tout en s’engueulant avec sa nana (la ravissante Diem Nguyen) et subir les railleries de sa vieille maman (Biyouna), Omar Sy traverse tranquillement Le Flic de Belleville, sans se forcer, dans une série B honnête et sympathique.

LE BLU-RAY

Le test du Blu-ray du Flic de Belleville, disponible chez Metropolitan Vidéo, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est animé, lumineux et musical.

En plus d’un lot de bandes-annonces, l’éditeur joint un (très mauvais) making of (23’). Mollement réalisé, mal monté, ce documentaire se contente de compiler les interventions du casting et les images de tournage dans le quartier de Belleville à Paris. Le son est très étouffé, les propos sont sans intérêt, uniquement dithyrambiques et promotionnels. Aucune image de plateau à Miami et Luis Guzmán n’est même pas évoqué.

L’Image et le son

C’est superbe. Les couleurs sont resplendissantes, les contrastes riches et remarquables, le piqué aiguisé, les détails légion aux quatre coins du cadre large. La profondeur de champ est exceptionnelle, tout comme la luminosité des séquences tournées à Miami. La HD permet de se rendre compte de la richesse insoupçonnée de la photographie.

La version originale mixe le français et l’anglais, tout en respectant la musicalité des langues et donc la confrontation entre les deux personnages principaux sur le sol américain. Privilégiez donc cette option, plutôt que la version 100 % française, même si les deux pistes se valent du point de vue dynamique, avec des effets latéraux percutants, des basses frappantes (surtout sur la scène du DJ et les séquences agitées), des ambiances naturelles et des voix bien plantées sur la centrale. L’éditeur joint également une piste Audiodescription, ainsi que les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant.

Crédits images : © Metropolitan FilmExport / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Johnny English contre-attaque, réalisé par David Kerr

JOHNNY ENGLISH CONTRE-ATTAQUE (Johnny English Strikes Again) réalisé par David Kerr, disponible en DVD et Blu-ray le 13 février 2019 chez Studiocanal

Acteurs : Rowan Atkinson, Emma Thompson, Olga Kurylenko, Ben Miller, Jake Lacy, David Mumeni, Adam James, Irena Tyshyna…

Scénario : Neal Purvis, Robert Wade

Photographie : Florian Hoffmeister

Musique : Howard Goodall

Durée : 1h28

Date de sortie initiale : 2018

LE FILM

Lorsqu’un pirate informatique révèle le nom et la couverture de tous leurs agents infiltrés, les Services secrets britanniques n’ont pas d’autre choix que de rappeler le seul agent capable de les aider à débusquer le criminel : Johnny English, retraité du MI7, et désormais simple enseignant.

Etait-ce bien raisonnable ? Il semblerait que tous les sept ans, Rowan Atkinson ait décidé de renfiler le smoking de l’agent Johnny English. Après deux films Mr Bean (près de 500 millions de dollars cumulés) et deux Johnny English (320 millions récoltés), la tentation était grande pour le comédien qui cartonne à la télévision depuis 2016 dans la peau du commissaire Jules Maigret. Certes, cela fait plaisir de revoir sa trogne sur le grand écran, mais ses grimaces sont directement reprises des anciens épisodes de la série Mr Bean des années 1990, tout comme les gags et quiproquos qui n’ont pour ainsi dire pas changé. A l’instar de son personnage d’agent secret mis à la retraite, Johnny English contre-attaque est un film complètement démodé aujourd’hui. On est d’ailleurs plus mal à l’aise qu’hilare…

Cette nouvelle aventure démarre lorsqu’une cyber-attaque révèle l’identité de tous les agents britanniques sous couverture. Johnny English devient alors le dernier espoir des services secrets. Rappelé de sa retraite, il plonge tête la première dans sa mission : découvrir qui est le génie du piratage qui se cache derrière ces attaques. Avec ses méthodes obsolètes Johnny English doit relever les défis de la technologie moderne pour assurer la réussite de sa mission.

« Il ne craint rien, il n’a peur de rien, il ne comprend rien «  scandait l’affiche française de Johnny English en 2003. Rowan Atkinson persiste et signe dans le rôle de l’agent le plus débile des services secrets britanniques, pour le pire et pas vraiment pour le meilleur. C’est même ce qui s’appelle tirer sur la corde, même si celle-ci est déjà bien entamée et ne tient plus que sur quelques fibres. Johnny English contre-attaque n’est pas le seul exemple dans le même genre. Mais quand on voit au générique le nom d’un réalisateur totalement inconnu, David Kerr, qui signe son premier long métrage après avoir oeuvré pendant vingt ans à la télévision (Inside No. 9), un budget divisé par deux par rapport à celui alloué au second volet, une durée moindre, un méchant falot (Jake Lacy), un thème musical qui tourne en boucle, on est en droit de se poser quelques questions sur la légitimité de cette entreprise. Comme pour Les Vacances de Mr Bean, Johnny English débarque dans le sud de la France pour accomplir sa mission, avec l’aide de son fidèle comparse Bough (Ben Miller). On connaît la suite, du moins la suite de la suite.

Rowan Atkinson n’est pas un débutant et sait ce que les spectateurs attendent de lui. Le problème, c’est qu’il n’a jamais su renouveler sa panoplie de comique, comme lors de la scène de danse endiablée ou de l’endormissement impromptu. Sur un postulat de départ qui tient sur un papier OCB, les séquences s’enchaînent à la va-comme-je-te-pousse, sans rythme, avec un je-m’en-foutisme, laissant au spectateur le choix de rire, de sourire, ou d’écarquiller les yeux devant des situations plutôt embarrassantes. Pourtant, âgé de 63 ans, Rowan Atkinson affiche une forme olympique et seule son énergie parvient à donner un semblant d’intérêt à ce troisième volet qui racle les fonds de tiroir. Même le charme de la sublime Olga Kurylenko – ancienne Bond Girl dans l’immonde Quantum of Solace – semble éteint et n’agit pas, c’est dire si le navire prend l’eau. Les très nombreux clins d’oeil à James Bond sont amusants, mais le scénario en abuse, jusqu’à reprendre certains décors vus GoldenEye et Casino Royale. Dans tout ce gloubi-boulga, la merveilleuse Emma Thompson surnage, mais c’est normal à force de mouliner constamment des bras. Quant à la mise en scène, elle se contente d’« enregistrer » ce qui se passe.

C’est embêtant, car moult gags auraient franchement pu donner quelque chose de très drôles, comme la scène de la réalité virtuelle, qui est de loin la meilleure du film, mais qui reste malheureusement bien trop sage. Malgré tout, cette dernière (?) mission de Johnny English, rejeton de l’Inspecteur Clouseau, Austin Powers et de Frank Drebin, a encore une fois remporté un très gros succès avec 160 millions de dollars de recette pour un budget de 25 millions. Preuve indiscutable de l’affection des spectateurs pour Rowan Atkinson.

LE BLU-RAY

Le test du Blu-ray de Johnny English contre-attaque, disponible chez Studiocanal, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est fixe et muet.

Aucun supplément sur cette édition.

L’Image et le son

L’éditeur livre un master HD de haute volée, lumineux, détaillé, formidablement contrasté et au piqué vif. Si la définition n’est toutefois pas optimale avec des scènes sombres un peu trop douces, force est de constater le soin apporté au transfert. Le cadre large bénéficie d’un beau traitement de faveur, les détails abondent sur les gros plans et les séquences extérieures diurnes, la colorimétrie est bigarrée et la compression AVC consolide l’ensemble.

Les versions française et originale disponibles en DTS-HD Master Audio 5.1 se révèlent autant explosives et immersives dès le générique d’ouverture. La musique omniprésente du compositeur Howard Goodall, complice de Rowan Atkinson depuis La Vipère noire (1983), est constamment spatialisée, le caisson de basses est régulièrement sollicité sur les séquences d’action, les voix sont solidement plantées sur la centrale et la balance frontale demeure percutante tout du long. N’oublions pas les effets latéraux multiples sur les latérales. L’éditeur joint également une piste Audiodescription, ainsi que les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant.

Crédits images : © Studiocanal / Universal / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Le Grand bain, réalisé par Gilles Lellouche

LE GRAND BAIN réalisé par Gilles Lellouche, disponible en DVD et Blu-ray le 27 février 2019 chez Studiocanal

Acteurs : Mathieu Amalric, Guillaume Canet, Benoît Poelvoorde, Jean-Hugues Anglade, Virginie Efira, Leïla Bekhti, Marina Foïs, Philippe Katerine, Félix Moati, Alban Ivanov, Jonathan Zaccaï, Mélanie Doutey, Erika Sainte, Claire Nadeau…

Scénario : Gilles Lellouche, Ahmed Hamidi, Julien Lambroschini

Photographie : Laurent Tangy

Musique : Jon Brion

Durée : 2h02 (version cinéma) / 2h12 (version longue)

Date de sortie initiale : 2018

LE FILM

C’est dans les couloirs de leur piscine municipale que Bertrand, Marcus, Simon, Laurent, Thierry et les autres s’entraînent sous l’autorité toute relative de Delphine, ancienne gloire des bassins. Ensemble, ils se sentent libres et utiles. Ils vont mettre toute leur énergie dans une discipline jusque-là propriété de la gent féminine : la natation synchronisée. Alors, oui c’est une idée plutôt bizarre, mais ce défi leur permettra de trouver un sens à leur vie…

Quatorze ans après le génial Narco, qu’il avait co-réalisé avec Tristan Aurouet en 2004, Gilles Lellouche signe son premier long métrage en solo avec Le Grand bain. Depuis ce premier coup d’essai, le comédien/metteur en scène/scénariste a mûri et son cinéma s’en ressent. Vrai et grand coup de coeur de l’année 2018, Le Grand bain concilie l’humour et l’émotion de façon inattendue et dresse le portrait de quelques paumés, désenchantés, à qui la vie n’a pas fait de cadeaux, qui n’en espèrent d’ailleurs plus rien, jusqu’à ce qu’ils trouvent enfin un but et surtout une oreille attentive à laquelle se livrer, pour enfin retrouver le goût de vivre et l’estime de soi. Enfin, Le Grand bain c’est aussi et surtout un casting quatre étoiles, de magnifiques comédiens, merveilleusement dirigés, investis, en parfaite osmose, que Gilles Lellouche parvient comme qui dirait à rebooter en les présentant sans fard et avec une rare tendresse.

Huit hommes de diverses générations « cabossés » par la vie (dépression, échec professionnel ou familial…) vont reprendre goût à la vie en s’investissant dans leur équipe de natation synchronisée. En prévision des championnats du monde organisés en Norvège, ils sont pris en charge par deux coaches ex-championnes, Delphine, ancienne alcoolique, et Amanda, une sportive paraplégique.

Non, ce n’est pas un film de « potes » comme pouvait l’être Les Petits mouchoirs. Le Grand bain ne paraît jamais « forcé » et les acteurs retrouvent une authenticité qu’ils avaient pour la plupart pu perdre au fil des années. En s’inspirant du cinéma social britannique (The Full Monty entre autres), Gilles Lellouche leur offre un rôle en or, tout en restant lui-même derrière la caméra. A cette occasion, il retrouve Guillaume Canet (ici Laurent, directeur d’une aciérie), Benoît Poelvoorde (Marcus, directeur d’un magasin de piscines) et Mélanie Doutey. Si cette dernière fait plutôt une participation, le premier montre à quel point il peut être bon quand il est bien dirigé, tandis que le second est comme d’habitude immense, capable d’un humour dévastateur et d’une sensibilité à fleur de peau. Les autres membres de l’équipe ne déméritent évidemment pas avec rien de moins que Mathieu Amalric alias Bertrand (chômeur puis vendeur de meubles), Jean-Hugues Anglade (Simon, musicien raté), Philippe Katerine (Thierry, manutentionnaire de la piscine), Alban Ivanov (Basile, trentenaire sans ambition), Balasingham Thamilchelvan (le mystérieux Avanish qui ne parle pas un mot de français) et Félix Moati (John, infirmier, qui viendra renforcer la troupe). Ça c’est pour le groupe sportif. Ils sont coachés par Delphine (Virginie Efira, fragile comme du cristal) et Amanda (Leïla Bekhti, explosive en entraîneuse sadique), qui vont les encourager et les mener jusqu’à la compétition internationale.

Le réalisateur convoque et mélange tout ce beau monde, d’horizons et d’écoles divers, sans oublier les personnages satellites excellemment campés par Marina Foïs, Claire Nadeau, Jonathan Zaccaï et bien d’autres. Le Grand bain est à ce jour le projet le plus personnel de Gilles Lellouche, un film qu’il portait depuis plusieurs années, porté par une envie de parler d’individus renfermés sur eux-mêmes, qui se redécouvrent en intégrant et en étant accepté par un groupe au sein duquel la parole va progressivement se libérer. En toute honnêteté, on ne s’attendait pas à être cueilli de la sorte. Rien ne paraît exagéré ou poussif, tout y est chaleureux, sans pathos, sensible et mélancolique, très attachant. Loin des poncifs du cinéma bobo à la morale bien pensante, Le Grand bain mixe et rassemble les classes sociales, sans distinction, sans jugement, mais avec une certaine poésie. Outre la ribambelle de grands acteurs, Gilles Lellouche fait souvent preuve de virtuosité et soigne chacun de ses plans, sans tomber dans la gratuité et dans le seul but d’épater la galerie. La mise en scène, la photographie de Laurent Tangy et la géniale bande originale signée Jon Brion agrémentée de tube 80’s (Tears For Fears, Phil Collins, Imagination) emportent immédiatement l’adhésion.

Le Grand bain agit donc comme une véritable potion magique où tous les ingrédients se marient à merveille, pour le plus grand bonheur des spectateurs qui l’ont largement plébiscité puisque le film aura attiré près de 4,5 millions de spectateurs. Un succès populaire qui devrait être suivi par quelques César à la prochaine grande fête du cinéma, puisque Le Grand bain est nommé dans dix catégories : meilleurs film, réalisateur, acteur dans un second rôle (Jean-Hugues Anglade et Philippe Katerine), actrice dans un second rôle (Leïla Bekhti et Virginie Efira), scénario original, photographie, montage et son.

LE BLU-RAY

Le test du Blu-ray du Grand bain, disponible chez Studiocanal, a été réalisé à partir d’un check-disc. Cette édition comprend deux disques. Le menu principal du premier Blu-ray est animé et musical, celui du second est fixe et musical. Les suppléments se trouvent sur le premier disques, tandis que le deuxième propose la version longue du Grand bain (2h12).

Si vous avez aimé voire adoré Le Grand bain, précipitez-vous sur le making of (35’) qui fait comme qui dirait office de film dans le film, dans le sens où les comédiens apprennent à se connaître véritablement durant leur entraînement qui aura duré sept mois, à raison d’une ou deux fois par semaine. Le tout chapeauté par Julie Fabre, ancienne entraîneuse de l’équipe de France de natation synchronisée olympique. Les acteurs se confient face caméra sur ce défi physique, qu’ils ont tous brillamment relevé. Gilles Lellouche revient quant à lui sur son « bébé », qu’il a porté durant quelques années avant de pouvoir enfin le concrétiser. A l’instar des personnages du Grand bain, tous les comédiens deviennent complices dans l’effort, dans leurs progressions et dans leurs motivations, et c’est aussi beau que dans le film. Mention spéciale au passage de la cryothérapie, où chacun passe à tour de rôle dans une pièce à -10 degrés, puis une autre à -60 degrés, pour finir à -110 degrés !

En plus d’une galerie de photos, l’éditeur joint une version longue du Grand bain, qui comprend notamment quelques scènes en plus avec Marcus, le personnage incarné par Benoît Poelvoorde, ainsi qu’une très belle scène entre Mathieu Amalric et Marina Foïs.

L’Image et le son

Les contrastes sont riches, la luminosité est omniprésente, les scènes nocturnes sont logées à la même enseigne et le relief est probant. Les visages sont détaillés à souhait, tout comme les décors, la colorimétrie est froide et hivernale, le piqué joliment aiguisé (surtout sur les scènes en extérieur), le relief est indéniable et la photo élégante du chef opérateur Laurent Tangy (Radiostars, La French, HHhH) trouve en Blu-ray un écrin idéal.

Un seul choix disponible, une piste DTS-HD Master Audio 5.1 créant d’entrée de jeu une large et puissante spatialisation musicale. La balance frontales-latérales est très dynamique, les voix solidement plantées sur la centrale. Toutes les enceintes sont mises à contribution, certains effets naturels tirent leur épingle du jeu. Les sous-titres anglais et français destinés au public sourd et malentendant sont disponibles, tout comme une piste Audiodescription pour les spectateurs aveugles et malvoyants.

Crédits images : © Studiocanal / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Le Monde est à toi, réalisé par Romain Gavras

LE MONDE EST À TOI réalisé par Romain Gavras, disponible en DVD et Blu-ray le 19 décembre 2018 chez Studiocanal

Acteurs : Karim Leklou, Isabelle Adjani, Vincent Cassel, Oulaya Amamra, Gabby Rose, Sam Spruell, Mounir Amamra, Mahamadou Saengare…

Scénario : Romain Gavras, Karim Boukercha, Noé Debré

Photographie : André Chémétoff

Musique : SebastiAn, Jamie XX

Durée : 1h40

Date de sortie initiale : 2018

LE FILM

François, petit dealer, a un rêve : devenir le distributeur officiel des bâtonnets glacés Mr Freeze au Maghreb. Cette vie, qu’il convoite tant, vole en éclat quand il apprend que Dany, sa mère, a dépensé toutes ses économies. Poutine, le caïd lunatique de la cité propose à François un plan en Espagne pour se refaire. Mais quand tout son entourage : Lamya son amour de jeunesse, Henri un ancien beau-père à la ramasse tout juste sorti de prison, les deux jeunes Mohamed complotistes et sa mère chef d’un gang de femmes pickpockets, s’en mêle, rien ne va se passer comme prévu !

Huit ans après son premier long métrage Notre jour viendra, Romain Gavras (né en 1981) est de retour derrière la caméra avec Le Monde est à toi. Gros délire comico-policier porté par un casting de luxe, ce second essai est franchement revigorant et fait du bien au cinéma français. Sous ses airs de ne pas se prendre au sérieux, Le Monde est à toi est pourtant un vrai film pop excellemment mis en scène, à la photographie chiadée, trouvant le parfait équilibre entre l’humour, l’action, la violence et l’émotion. Enfin, c’est aussi et surtout la révélation d’un comédien sur lequel il faudra désormais compter, Karim Leklou.

François – de son vrai prénom Fares – est un dealer repenti du « 9.3 ». Il rêve de monter un business légal en lançant une franchise de Mister Freeze au Maroc. Pour cela, il compte sur la somme d’argent qu’il a planquée chez sa mère Danny, joueuse invétérée, spécialisée dans le vol de bijoux en grands magasins. Quand il découvre que cette dernière a dilapidé ses économies, il n’a d’autre choix que d’accepter le go fast en Espagne que lui propose le nouveau boss de la cité. Mais c’était sans compter sur la sortie de prison d’Henri, son ex-beau-père, la mafia anglaise qui règne sur la Costa del Sol, le retour de Nadia son ex-petite amie et de sa mère qui a décidé de « l’aider » pour ce qui l’espère être son dernier coup…!

Cela fait beaucoup pour un seul film, mais Romain Gavras s’en sort haut la main et avec une élégance insoupçonnée. Le cofondateur en 1995 du collectif Kourtrajmé avec Kim Chapiron, qui s’est fait connaître avec ses clips musicaux qui suscitaient systématiquement la controverse pour leur violence extrême (Stress de Justice ou Born Free de M.I.A), rend hommage aux films des frères Coen, tout en conservant une âme bien française. Cela se fait notamment grâce à la bande originale décalée qui mixe à la fois Michel Sardou et Booba, Laurent Voulzy et PNL, Daniel Balavoine et Jul. Il y en a pour tous les goûts ! D’ailleurs, Romain Gavras met tout le cinéma qu’il affectionne dans son deuxième long métrage.

Ce mélange fonctionne également grâce à des interprètes géniaux. Karim Leklou donc, que l’on avait déjà aperçu dans les sublimes Suzanne et Réparer les vivants de Katell Quillévéré et qui s’impose du début à la fin avec talent et charisme, tout en apportant une vraie mélancolie à son personnage. Il n’a pas à rougir face aux deux stars qui l’entourent. Vincent Cassel est formidable dans le rôle d’Henri, quinquagénaire paumé, regard bas et triste (les lentilles marron font leur effet), qui sort de douze ans de taule, qui devient obsédé par les Illuminati et qui replonge malgré-lui dans quelques combines pour pouvoir s’en sortir, mais aussi et surtout « pour rendre service ». Le comédien prouve une fois de plus à quel point il peut être bon et même génial quand il est bien dirigé, mais aussi quand il ne porte pas le poids d’un film sur ses épaules. Mais celle qui vole toutes ses scènes à chaque apparition est la grande Isabelle Adjani, sensationnelle en mère juive excentrique, étouffante, prête à tout pour protéger son rejeton de près de 40 ans. Si elle l’avait déjà prouvé dans sa carrière, l’immense comédienne démontre une fois de plus son talent comique dévastateur. Ce rôle pourrait bien lui valoir le sixième César de sa carrière, le premier en tant que meilleure actrice dans un second rôle. François Damiens et Philippe Katerine font également une petite participation frappadingue, tandis que le reste du casting fait la part belle à la jeune génération avec notamment l’excellente Oulaya Amamra, révélation de Divines de Houda Benyamina. Ceux qui ont l’oeil remarqueront également le réalisateur John Landis au détour d’un plan dans le restaurant.

Tout ce beau petit monde, ces écoles diverses et variées donnent son originalité au film de Romain Gavras. Tragi-comique, polar, drame social, film de gangsters tourné entre le 93 et Benidorm, Le Monde est à toi ne cesse de jouer avec les genres en se focalisant sur des délinquants et autres voyous qui essayent de se la jouer Scarface et Ocean’s Eleven, en calquant de façon absurde leurs actions et leurs motivations à partir des images, des codes, des mythes et des clichés véhiculés par le cinéma. C’est cette opposition entre le fantasme et la réalité – François voudrait juste se sortir de la panade de façon légale – qui se confrontent constamment qui font du Monde est à toi une grande réussite, qui a su embarquer près de 350.000 spectateurs dans son sillage après avoir fait fureur sur la Croisette en 2018 à la Quinzaine des réalisateurs.

LE BLU-RAY

Le DVD et le Blu-ray du Monde est à toi sont disponibles chez Studiocanal. Le visuel de la jaquette, glissée dans un boîtier classique de couleur bleue, reprend celui de l’affiche du film. Le menu principal est sobre, animé et musical.

Aucune supplément sur cette édition.

L’Image et le son

L’éditeur livre un master HD resplendissant ! Le relief est sans cesse appréciable, le piqué est vif et acéré, les détails foisonnent sur le cadre large, les noirs sont denses, les couleurs explosives, les contrastes léchés et chaque source de lumière se révèle éclatante. Ajoutez à cela un piqué acéré comme un scalpel, des séquences nocturnes aussi élégantes que les scènes diurnes ainsi qu’une profondeur de champ fascinante et vous obtenez un feu d’artifice pour les mirettes !

Un seul choix disponible, une piste DTS-HD Master Audio 5.1 créant d’entrée de jeu une large et puissante spatialisation. La bande originale s’en donne à coeur joie, tout comme les séquences agitées (l’assaut sur le cargo, le karaoké) mettent à mal votre installation avec de très bonnes basses et une balance frontale-latérale explosive. Toutes les enceintes sont mises à contribution, certains effets sont particulièrement saisissants, les effets naturels sont légion. Les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant sont disponibles, tout comme une piste Audiodescription pour les spectateurs aveugles et malvoyants.

Crédits images : © Studiocanal / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Paul Sanchez est revenu !, réalisé par Patricia Mazuy

PAUL SANCHEZ EST REVENU ! réalisé par Patricia Mazuy, disponible en DVD et Blu-ray le 2 janvier 2019 chez Blaq Out

Acteurs : Laurent Lafitte, Zita Hanrot, Philippe Girard, Idir Chender, Anne-Lise Heimburger, Anthony Paliotti, Achille Reggiani, Diego Bordonaro, Mike N’Guyen…

Scénario : Patricia Mazuy, Yves Thomas

Photographie : Frédéric Noirhomme

Musique : John Cale

Durée : 1h51

Date de sortie initiale : 2018

LE FILM

Paul Sanchez, criminel disparu depuis dix ans, a été aperçu à la gare des Arcs sur Argens. A la gendarmerie, on n’y croit pas, sauf peut-être la jeune Marion…

Quel film étrange et déroutant ! Le cinquième long métrage de la réalisatrice Patricia Mazuy (Saint Cyr, Sport de filles) est en effet une véritable proposition de cinéma inclassable, qui joue constamment sur les ruptures de ton, tout en croisant les genres. Polar, comédie burlesque, western, thriller, Paul Sanchez est revenu ! ne cesse de décontenancer et de perturber. On ne sait pas si l’on doit rire devant l’absurdité de telle séquence, ou craindre pour tel personnage. Sur une histoire originale de son complice Yves Thomas (Travolta et moi), la cinéaste lorgne du côté de la série B et du western spaghetti, transformant les paysages du Var en Far West, en Var West donc, en se focalisant sur deux personnages placés d’un côté et de l’autre de la loi. Paul Sanchez est revenu ! est ni plus ni moins l’un des films les plus originaux de 2018.

Paul Sanchez, un criminel qui a assassiné toute sa famille et qui a disparu depuis 10 ans, semble être revenu sur les lieux de son crime ! Il est du moins signalé aux abords de la gare des Arcs dans le Var. À la gendarmerie de la ville, tout le monde croit à un canular, à l’exception de Marion, une gendarme de 25 ans. Elle va alors se mettre à le traquer seule.

Patricia Mazuy dresse le décor de son intrigue dans les premiers plans avec les enseignes multicolores de magasins divers disposés le long d’une voie rapide. Suivront rapidement la gendarmerie où tout le monde s’active pour assurer la paix dans les environs, puis le rocher rouge de Roquebrune qui surplombe la région avec l’autoroute qui se déploie à ses pieds. La jeune Marion, volontaire et animée par le désir de bien faire son travail, fait du zèle. Elle vient de surprendre Johnny Depp en train de se payer du bon temps dans sa Porsche, avant de le verbaliser et de lui confisquer son véhicule. Ce qui n’est pas vraiment du goût de son supérieur hiérarchique. Quelque peu cloisonnée dans son quotidien, Marion rêve visiblement d’action ou d’un évènement qui pourrait faire parler d’eux sur BFM TV. Alors quand elle apprend qu’un ancien meurtrier en cavale serait de retour dans le coin, elle décide de foncer pour lui mettre le grappin dessus la première.

Paul Sanchez est revenu ! c’est comme qui dirait une version française de Hot Fuzz d’Edgar Wright, mâtiné du cinéma des frères Coen, de Bruno Dumont et une pincée de Sergio Leone. D’un côté, Marion, incarnée par la divine Zita Hanrot (grande année 2018 avec La Fête est finie et Carnivores), est une gendarme au début de sa carrière, que l’on sent fatiguée de s’occuper des tâches ingrates, loin de ses évidents désirs d’aventures mouvementées. D’autant plus que ses collègues et son chef (génial Philippe Girard) ne cessent de la freiner ses ardeurs. De l’autre côté, Paul Sanchez, interprété par Laurent Lafitte, décidément abonné aux films qui sortent du lot (K.O., L’Heure de la sortie) est un individu trouble, énigmatique et sauvage qui trouve refuge dans une anfractuosité du rocher de Roquebrune. Sa taille imposante, ses bras ballants et les motifs de son blouson renvoient directement au Clint Eastwood de la Trilogie du Dollars de Sergio Leone, tandis que la superbe composition du gallois John Cale rappelle les compositions d’Ennio Morricone.

Dans ce western urbain contemporain, Patricia Mazuy dresse le portrait en parallèle de deux âmes solitaires qui pètent un câble à cause d’un présent moribond. Jusqu’à l’inéluctable confrontation. Durant la première partie, la réalisatrice fait perdre ses repères aux spectateurs, au point de relâcher parfois son attention et donc son intérêt. Malgré tout, l’étrangeté des relations entre les personnages et celle de leurs motivations font que l’on se laisse finalement porter par un récit quelque peu opaque qui rappelle parfois furieusement la série Twin Peaks. Les échanges entre les protagonistes semblent sans cesse à sens unique, comme un dialogue de sourds, comme si la réponse de l’un n’avait aucun rapport avec la question de l’autre. Paul Sanchez est revenu ! est une œuvre décalée qui ne fait que refléter le burn out des personnages. Comme si elle était placée sous cloche, la petite ville de Roquebrune-sur-Argens semble repliée sur elle-même, comme si tout s’était arrêté dix ans plus tôt, après l’assassinat par Paul Sanchez de son épouse et de leurs quatre enfants. Un trauma avec lequel les habitants doivent vivre ou qui leur a donné une envie de profiter encore plus de l’existence. Alors quand la figure du démon Paul Sanchez réapparaît, les désirs enfouis et les peurs cachées se révèlent, tandis que d’autres y voient l’occasion de transformer leur vie en mauvaise série télé policière.

Au premier visionnage, Paul Sanchez est revenu ! peut franchement laisser perplexe. Ce n’est qu’en y repensant après que toutes les strates du film de Patricia Mazuy se révèlent l’une après l’autre avec pour effet de donner envie de s’y replonger à nouveau. Une belle réussite que cet OVNI.

LE BLU-RAY

Le Blu-ray de Paul Sanchez est revenu !, est disponible chez Blaq Out. La jaquette, glissée dans un boîtier classique de couleur bleue, reprend le visuel de l’affiche du film. Même chose pour le menu principal, fixe et musical.

Après le film, rien de tel que d’écouter la réalisatrice Patricia Mazuy (15’). Durant son interview, la cinéaste aborde la genèse de Paul Sanchez est revenu !, les lieux de tournage, les thèmes, le casting, le travail avec les comédiens, la psychologie et l’évolution des personnages, sans oublier les partis pris et ses intentions, ainsi que la musique de John Cale. Patricia Mazuy évoque également à plusieurs reprises les ruptures de ton.

La réalisatrice intervient également sur les scènes coupées (11’). Dommage que l’éditeur n’ait pas proposé ces séquences avec les commentaires en option. Toutefois, il est toujours intéressant de comprendre pourquoi telle ou telle scène a été écartée au montage, qui s’est révélé très difficile dixit la cinéaste. Notons une séquence de cauchemar particulièrement réussie de Marion, durant laquelle la jeune gendarme imagine des enfants qui dansent dans l’ombre ou d’elle-même avec la bouche remplie de larves. Patricia Mazuy a également préféré retirer des éléments trop explicites quant à l’identité du personnage de Laurent Lafitte.

Enfin, l’éditeur, que l’on ne remerciera jamais assez de nous faire découvrir de nombreux courts-métrages, propose La Scarpa, réalisé par Patricia Mazuy en 1979 (8’). Un carton en introduction annonce que la réalisatrice a perdu la copie sonore, ainsi que le son de ce « court-métrage d’extrême jeunesse ». Demeure alors ce « vestige muet », tiré d’une copie de travail en Super 8, racontant l’histoire d’un cowboy fasciste qui poursuite une touriste dragueuse dans les rues de Rome. Avec la comédienne Laure Duthilleul dans les deux rôles.

L’Image et le son

Comme d’habitude, l’éditeur soigne son master HD qui se révèle exemplaire. Le label «Blaq Out» est donc encore une fois au rendez-vous pour le Blu-ray de Paul Sanchez est revenu !. L’image bénéficie d’un codec AVC de haut niveau, des contrastes d’une densité jamais démentie, ainsi que des détails impressionnants aux quatre coins du cadre large. Certains plans étendus sont magnifiques et tirent entièrement parti de cette indispensable élévation en Haute définition. Les visages, filmés en gros plans, des comédiens peuvent être analysés sous tous les angles, la photo est ambrée et chaude, la clarté demeure frappante, tout comme la profondeur de champ, le piqué est affûté et les partis pris esthétiques merveilleusement restitués. Ce Blu-ray est évidemment une franche réussite technique et offre de fabuleuses conditions pour revoir le film de Patricia Mazuy.

La version DTS-HD Master Audio 5.1 instaure d’excellentes conditions acoustiques et fait surtout la part belle à la musique de John Came. Les ambiances naturelles sont bien présentes, quelques effets sont saisissants (la circulation) et le rendu des voix est sans failles. L’éditeur joint aussi une piste française DTS-HD Master Audio 2.0 qui contentera largement celles et ceux qui ne disposeraient pas d’enceintes latérales. Nous trouvons également une piste audiodescription ainsi que les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant.

Crédits images : © Blaq Out / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Legends of Tomorrow, saison 3

LEGENDS OF TOMORROW – SAISON 3, disponible en DVD et Blu-ray le 5 décembre 2018 chez Warner Bros.

Acteurs : Brandon Routh, Caity Lotz, Amy Louise Pemberton, Dominic Purcell, Franz Drameh, Victor Garber, Tala Ashe, Maisie Richardson-Sellers, Nick Zano, Arthur Darvill, Jes Macallan, Matt Ryan, Wentworth Miller, Neal McDonough…

Musique : Blake Neely

Durée : 17 épisodes de 43 minutes + 4 épisodes du crossover Crisis on Earth-X (avec Supergirl, Arrow et Flash)

Date de sortie initiale : 2017-2018

LA SÉRIE

Après avoir vaincu la Legion of Doom, les Légendes ont découvert qu’ils ont brisé le temps. Ils décident alors d’explorer cette nouvelle réalité pour remettre les choses en place avec l’aide du Bureau Temporel, une nouvelle agence protectrice du temps fondée par Rip Hunter. Ils seront à nouveau confrontés à Damien Darhk et à sa fille Nora, qui veulent ressusciter un démon temporel…

Voici déjà la troisième saison de la série Legends of Tomorrow, dérivée d’Arrow et de Flash. D’emblée, ce spin-off a su faire sa place avec un ton volontairement plus humoristique et en lorgnant sur les séries fantastiques des années 1990. Dans cette nouvelle saison, les scénaristes rendent un évident hommage à la cultissime série Code Quantum, puisque nos héros, qui voyagent dans le temps depuis le tout premier épisode, sont contraints de réparer leurs erreurs, les « anomalies » temporelles, conséquences de leur précédente mission. Diffusée sur The CW aux Etats-Unis entre le 10 octobre 2017 et le 9 avril 2018, cette troisième saison a vu ses audiences se stabiliser, contrairement à celles des autres séries DC plus malmenées. Legends of Tomorrow n’est peut-être pas la série la plus réussie du lot, Flash la domine largement, mais s’avère probablement la plus fun et la plus divertissante. Mission réussie pour cette nouvelle saison !

Résumé avec spoilers. Six mois se sont écoulés. Rip Hunter (Arthur Darvill, invité sur sept épisodes) a fondé une nouvelle agence, le Bureau Temporel, afin d’éradiquer les anachronismes (on pense beaucoup à Men In Black), c’est-à-dire les personnes, objets ou créatures présentes dans une époque qui n’est pas la leur. Pour le reste de l’équipe, le retour à la vie « normale » est un peu difficile. Ray Palmer travaille pour une start-up de la Silicon Valley tandis que Sara Lance travaille comme employée dans un supermarché de Star City. Nate, avec l’aide de Kid Flash, continue d’utiliser ses pouvoirs pour combattre le crime à Central City. Quant à Jefferson et au professeur Stein, ils coulent une vie paisible à Central City, ce dernier appréciant le fait de devenir bientôt grand-père. Mick se livre aux douceurs du farniente sur la plage d’Aruba.

C’est justement là-bas que Mick, croyant avoir affaire à un employé, l’invective en demandant de lui apporter un autre cocktail. En ôtant ses lunettes de soleil, il s’aperçoit que l’ombre en face de lui n’est autre que celle de Jules César, arguant conquérir le monde connu. Après avoir ligoté l’empereur, Mick contacte aussitôt Sara, qui réunit Ray et Nathaniel pour s’occuper du problème. Ensemble, ils se rendent à l’Agence du Bureau Temporel afin de signaler l’anachronisme à Rip, mais ce dernier est contrarié par les retombées de leurs dernières actions : en venant à bout de la Legion of Doom, ils ont également brisé le temps, ce qui a causé les anachronismes. Par conséquent, Rip ne leur fait plus confiance et ne souhaite plus les voir voyager dans le temps, ayant par ailleurs confisqué le Waverider qui sert de simulateur à ses agents.

Toutefois, les Légendes refusent de rester sur la touche. Ils reprennent leur vaisseau par la force et rejoignent Mick. Mais entre-temps César s’est enfui et se retrouve parmi des lycéens en vacances. Après avoir capturé de nouveau l’évadé du temps, le groupe retourne dans le passé pour remettre César à son époque. Croyant avoir réussi leur mission, un nouveau contretemps fait place : le régent a dérobé le livre de Nathaniel sur l’avenir de Rome et a par conséquent réécrit l’histoire en conquérant le monde connu. C’est à ce moment que Rip et son équipe arrivent pour reprendre l’affaire en main. Mais au moment de s’emparer de l’ouvrage, l’agent Ava Sharpe (Jes Macallan, atout charme et sexy) est enlevée. L’équipe des Légendes intervient et bat aisément César et ses soldats.

La continuité temporelle est sauvegardée, Sharpe et Hunter peuvent repartir. Malgré les conseils d’Ava, Rip autorise l’équipe à garder le Waverider pour qu’ils continuent de corriger les anomalies spatio-temporelles ; Sharpe s’étonne du choix de son supérieur, mais Hunter pense que le manque de subtilité des Légendes sera utile contre la menace qui arrive. Nathaniel confie à Ray qu’il regrette qu’Amaya (intense et magnétique Maisie Richardson-Sellers) ne soit plus là. Elle est retournée en 1942, au Zambèze, où elle protège son pays des braconniers et colons européens. Les Légendes se décident à utiliser la technologie du Bureau Temporel pour réparer les anachronismes et commencent par une cible simple : le cirque de P.T. Barnum aurait un smilodon parmi ses attractions de 1870. Pour maîtriser la bête, les pouvoirs des Légendes ne conviennent pas et Sara décide de ramener Amaya, retournée au Zambèze en 1942.

Cette saison 3 regorge de références à la pop culture. Au détour d’une conversation, Victor Garber concepteur du Titanic dans le chef d’oeuvre de James Cameron, rappelle le fiasco qu’à été le voyage inaugural du paquebot. Steven Spielberg et plus particulièrement E.T. l’extra-terrestre sont nommés à travers l’épisode où Ray Palmer, alors enfant, dissimule dans sa chambre un bébé Dominateur. Ray doit alors empêcher son propre assassinat par une agence peu orthodoxe. Les scénaristes se lâchent encore plus que d’habitude dans cette troisième saison à l’instar des morts exsangues retrouvés dans les rues de Londres en 1895, apparemment tués par un vampire, ou bien encore Hélène de Troie, échappée d’une guerre qu’elle n’a pas voulue, trouve finalement refuge sur l’île de Themyscira, foyer des Amazones et de la super-héroïne Wonder Woman. Les fans de Peter Jackson seront aux anges, puisqu’on y voit Ray intervenir sur le plateau du Seigneur des Anneaux en 1999, afin d’y rencontrer le comédien John Noble, qui incarnait Denethor, le père de Boromi et de Faramir. Finalement, tout ce qui concerne le grand « méchant » Mallus (à qui John Noble prête sa voix), un être maléfique et hors du temps, importe moins que les péripéties quotidiennes, l’humour bon enfant et les clins d’oeil cinématographiques. Même l’agaçant Damien Darhk apparaît ici plus cool, comme s’il se rendait compte lui-même du ridicule de ce qu’il dégageait.

C’est sans doute le bazar dans les épisodes, où l’on passe allègrement de la guerre du Vietnam (avec des références à Apocalypse Now), à l’affrontement avec le gorille Grodd (venu de la série Flash), en passant par une bataille contre les Vikings ou Barbe-Noire. Les Legends doivent également aider le jeune Elvis Presley à devenir le King en 1954, puis l’on passe à un épisode tout droit sorti d’Un jour sans fin où une boucle temporelle fait revivre la même journée à Zari Adrianna Tomaz, nouvelle venue dans la troupe, interprétée par l’excellence Tala Ashe. Recrutée en 2042, le talent principal de cette belle demoiselle est d’être une hackeuse hors pair et qui voue une passion pour les jeux vidéo vintage. Tout cela sans oublier la participation des Legends au formidable crossover Crisis on Earth-X, aux côtés des super-héros de Supergirl, Arrow et Flash. Un quadruple-épisode qui marque la disparition d’un des membres des Legends…Matt Ryan en profite pour revenir dans la peau et le costume débraillé de John Constantine, tandis que Wentworth Miller fait un dernier comeback. De son côté, Wally West, dont les scénaristes ne savaient plus quoi lui faire faire dans la série Flash, rejoint les Legends.

Alors certes Caity Lotz fait toujours la moue et fronces les sourcils, Dominic Purcell grogne à tout bout de champ et Brandon Routh abuse de son sourire Ultra-Brite, mais cela fonctionne vraiment bien, chacun est à sa place et semble prendre encore beaucoup de plaisir à se donner la réplique. Un plaisir contagieux et qui ne se dément pas au fil des épisodes.

LE BLU-RAY

La troisième saison des Legends of Tomorrow, disponible chez Warner Bros., se compose de trois disques placés dans un boîtier classique de couleur bleue, glissé dans un surétui cartonné. La liste des épisodes apparaît au verso, tout comme celle des suppléments. Le menu principal est identique sur les trois Blu-ray, fixe et musical, qui reprend le visuel de la jaquette. Signalons que l’éditeur a eu la bonne idée de proposer l’intégralité de l’épisode crossover divisé sur les quatre séries DC. Cette édition se compose donc de 21 épisodes de 42 minutes.

Des scènes coupées (16’30 au total), aux effets visuels non finalisés, sont disponibles sur les trois disques.

Le second Blu-ray contient un débat bien rythmé entre les producteurs des séries DC, qui répondent aux questions de l’animateur Hector Navarro (42’) sur la création de l’énorme crossover, Crisis on Earth-X, composé des épisodes 8 de Supergirl, Arrow, Flash et DC’s Legends of Tomorrow. C’est ici que vous apprendrez chacune des étapes ayant conduit à cette histoire de tentative d’invasion de la Terre par des soldats nazis issus d’un monde dystopique appelé Terre-X. Les spoilers sont évidemment au rendez-vous. Chacun aborde la difficulté d’écrire pour une vingtaine de personnages réunis à l’écran et sur les défis finalement relevés.

Le troisième disque est le plus rempli. On y trouve tout d’abord un module en compagnie du producteur exécutif Phil Klemmer (18’), qui propose un retour complet sur la création et les évènements de la troisième saison des Legends of Tomorrow.

Un petit supplément de 6 minutes rend compte du travail des artistes et créateurs des effets spéciaux, de la prévisualisation au tournage, en passant par la post-production.

Outre un petit bêtisier très sympa (7’30), cette section propose un best-of du Comic-Con 2017 avec notamment un résumé des présentations des nouvelles saisons de Supergirl, Flash, Arrow, DC’s Legends of Tomorrow et Gotham (58’).

L’Image et le son

Les épisodes sont proposés au format HD (1080p, AVC). Les couleurs sont chaudes et resplendissantes, le piqué acéré, les contrastes au top et la profondeur de champ abyssale. Les séquences diurnes sont éclatantes et seules quelques séquences à effets spéciaux s’avèrent sensiblement moins définies en raison des images composites. En dehors de ça, Warner Bros. met la barre haute, le résultat est superbe et la promotion HD indispensable.

Sans surprise, seule la version originale est livrée au format DTS-HD Master Audio 5.1. Privilégiez évidemment cette option qui instaure un confort acoustique digne des plus grands blockbusters avec une spatialisation tonitruante, des effets latéraux à foison, une percutante délivrance des dialogues et une balance frontale explosive. Mention également au caisson de basses très souvent sollicité dans les scènes d’action. Les réfractaires à la V.O. devront se contenter d’une toute petite VF Dolby Digital 2.0 Stéréo au doublage amusant. Etrangement, les allemands disposent d’un mixage Dolby Digital 5.1.


Crédits images : © Warner Bros. / DC Comics / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test DVD / Guy, réalisé par Alex Lutz

GUY réalisé par Alex Lutz, disponible en DVD le 9 janvier 2019 chez Studiocanal

Acteurs : Alex Lutz, Tom Dingler, Pascale Arbillot, Brigitte Roüan, Dani, Nicole Calfan, Élodie Bouchez, Bruno Sanches…

Scénario : Alex Lutz, Thibault Segouin, Anaïs Deban

Photographie : Mathieu Le Bothlan

Musique : Vincent Blanchard, Romain Greffe

Durée : 1h37

Date de sortie initiale : 2018

LE FILM

Gauthier, un jeune journaliste, apprend par sa mère qu’il serait le fils illégitime de Guy Jamet, un artiste de variété française ayant eu son heure de gloire entre les années 60 et 90. Celui-ci est justement en train de sortir un album de reprises et de faire une tournée. Gauthier décide de le suivre, caméra au poing, dans sa vie quotidienne et ses concerts de province, pour en faire un portrait documentaire.

C’est la grande surprise de la fin d’été 2018. Guy, second long métrage réalisé par Alex Lutz est un documenteur passionnant, troublant, fascinant et surtout merveilleusement interprété. Né à Strasbourg en 1978, Alexandre Lutz aka Alex Lutz, fait ses débuts au cinéma en 2008 dans Les Femmes de l’ombre de Jean-Paul Salomé. Parallèlement à son succès sur scène, il apparaît dans OSS 117 : Rio ne répond plus (2009), puis dans moult comédies pas franchement réussies (euphémisme) comme La Croisière, Bowling, Turf, Les Visiteurs : La Révolution, Les Aventures de Spirou et Fantasio. Pourtant, malgré la qualité « relative » de ces films, Alex Lutz a toujours brillé à chaque apparition. Pour son spectacle sobrement intitulé Alex Lutz, il se voit récompenser par le Molière de l’humour en 2016. A la télévision, depuis 2012 sur Canal+, il interprète la blonde du tandem Catherine et Liliane, aux côtés de son comparse l’excellent Bruno Sanches, dans la revue de presse du Petit Journal de Yann Barthès. En 2015, il passe tout naturellement de l’autre côté de la caméra avec sa première mise en scène, Le Talent de mes amis, qui passe complètement inaperçu. Trois ans plus tard, débarque ce Guy dont on n’attendait rien ou pas grand-chose, et qui pourtant s’impose comme une très grande réussite. En reprenant le personnage d’un de ses sketchs joué à la cérémonie des Molières, Alex Lutz explose littéralement à l’écran. Un rôle qui le place en grand favori pour le César du meilleur acteur. Le film est d’ailleurs nommé dans trois autres catégories, meilleur réalisateur, meilleur film et meilleur scénario original.

Après avoir vu le film, le personnage de Guy nous accompagne. Son lent débit, ses doigts qui tiennent une cigarette fine, son regard qui semble toujours perplexe, sa bouche souvent ouverte (on a l’impression de voir André Dussollier), ses gestes ralentis, ses tâches de vieillesse (incroyable maquillage qui nécessitait plus de 4 heures pour transformer Alex Lutz), son dos courbé, ses cheveux blancs qui volent au vent. Guy c’est l’incarnation d’une idole qui a vieilli en même temps que ses fans. Si le film est souvent ponctué de répliques drôles et vachardes, Guy est une œuvre furieusement mélancolique. La tirade finale sur le temps qui passe, sur la postérité, sur le souvenir et la transmission foudroie le spectateur en plein coeur et il est alors difficile de retenir ses larmes.

Sous couvert d’un vrai documentaire sur une fausse star de la chanson française (inspiré d’Herbert Léonard, Guy Marchand, Michel Delpech, Julien Clerc, Frank Michael et bien d’autres), Alex Lutz, également auteur avec Vincent Blanchard et interprète des chansons originales créées spécialement pour le film (un vrai répertoire), s’interroge sur la brièveté de l’existence, en nous donnant envie de profiter au maximum du peu de temps qui nous est imparti. Film étonnamment riche et complexe, Guy délivre son message de façon subliminale, tandis que nous admirons le jeu d’Alex Lutz, qui nous fait croire à ce personnage, y compris une fois le film terminé. L’acteur-réalisateur s’entoure de solides comédiens, la géniale et trop rare Pascale Arbillot dans le rôle de la compagne dévouée et qui équilibre son compagnon, Tom Dingler qui incarne Gauthier, dont le spectateur adopte le point de vue du début à la fin, celui d’un fils qui découvre son père (qui ne sait rien de cette paternité), qui l’observe, qui le découvre, qui apprend à l’aimer. Nicole Calfan, Dani, Elodie Bouchez, Brigitte Roüan, Bruno Sanchez, ainsi que quelques vedettes de la radio et de la télévision participent à l’authenticité du film, tout comme les reconstitutions des shows à la Maritie et Gilbert Carpentier façon Podium.

Guy est le portrait d’un artiste quelque peu oublié des médias, qui n’a pourtant jamais cessé de travailler. C’est aussi une déclaration d’Alex Lutz envers son public, puisqu’on y ressent une envie folle d’aimer et d’être aimé. Pour résumer, Guy, présenté à la Semaine de la Critique du festival de Cannes, est un vrai petit miracle, un futur film culte et probablement le meilleur biopic jamais consacré à un artiste français.

LE DVD

Guy s’est malheureusement soldé par un échec dans les salles, d’où l’absence d’édition HD pour ce titre. Le DVD repose dans un boîtier Amaray classique de couleur noire. La jaquette reprend le visuel de l’affiche. Le menu principal est fixe et musical.

Pas grand-chose en guise de suppléments…quatre teasers d’une minute chacun, qui font également office de scènes coupées avec Guy à la radio, avec ses fans, avec Sophie et avec son webmaster.

L’Image et le son

A l’instar d’un réel documentaire ou d’un reportage pris sur le vif, le film d’Alex Lutz est la plupart du temps filmé à l’épaule. La copie est quasi exempte de défauts. Le piqué est constamment acéré sur les plans rapprochés, la colorimétrie est vive, la clarté fort agréable. Seules les séquences tournées en basse lumière apparaissent moins définies. Les contrastes sont soignés, le relief est indéniable et les séquences diurnes n’ont rien à envier à un transfert HD traditionnel.

Contrairement à ce que l’on pouvait attendre, la piste Dolby Digital 5.1 instaure quelques petites ambiances latérales au moment des séquences de concert ou même en extérieur. Les dialogues sont clairs et se détachent sans mal sur la centrale. La stéréo est également de fort bon acabit et dynamique à souhait. L’éditeur joint également les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant, ainsi qu’une piste Audiodescription.

Crédits images : © Apollo Films / Studiocanal / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

 

Test Blu-ray / La Folle journée de Ferris Bueller, réalisé par John Hughes

LA FOLLE JOURNÉE DE FERRIS BUELLER (Ferris Bueller’s Day Off) réalisé par John Hughes, disponible en Blu-ray le 9 janvier 2019 chez Paramount Pictures

Acteurs : Matthew Broderick, Alan Ruck, Mia Sara, Jeffrey Jones, Jennifer Grey, Cindy Pickett, Lyman Ward, Charlie Sheen…

Scénario : John Hughes

Photographie : Tak Fujimoto

Musique : Ira Newborn

Durée : 1h43

Date de sortie initiale : 1986

LE FILM

Un jour de printemps, Ferris décide de prendre le large loin du centre-ville de Chicago. En quête de liberté, il sèche les cours, s’enfuit avec sa petite amie et son meilleur copain. Le proviseur se lance à leurs trousses. Mais quand on est malin, courageux et qu’on roule en Ferrari la vie à 17 ans ne peut être que merveilleuse…

La vie bouge bien trop vite. Si tu ne t’arrêtes pas de temps en temps, elle peut te filer entre les doigts.

C’est toujours très difficile de s’attaquer à un film culte qui a su marquer plusieurs générations, qui continue de faire de nouveaux adeptes et sur lequel les années qui passent ont peu d’emprises. La Folle journée de Ferris BuellerFerris Bueller’s Day Off fait partie de ces chefs d’oeuvre, le quatrième consécutif pour John Hughes après Seize bougies pour Sam, The Breakfast Club et Une créature de rêve, qui se transmettent, vers lesquels on se dirige instantanément en cas de coup de blues et qui vous requinquent en moins de deux dès que vous récitez les dialogues en même temps que les personnages comme un film-karaoké. Ferris Bueller crève l’écran au point de briser également le quatrième mur et en s’adressant directement au spectateur. Procédé casse-gueule, ici virtuose, tandis que résonne encore le Chick chicka chicka du tube de Yello, Oh Yeah. Immense masterpiece, capolavoro, bref c’est valable dans toutes les langues, La Folle journée de Ferris Bueller est également l’une des pierres fondatrices de la comédie américaine des années 1980, 1990, 2000, 2010, que l’on citera sûrement encore en 2020.

A Chicago, le jeune Ferris Bueller est devenu une véritable idole dans son lycée. Rusé, débrouillard et charmeur, il a séduit tous ses proches à l’exception de Jeanie, sa soeur, et d’Ed Rooney, le proviseur de l’établissement, qui ne le connaissent que trop bien. Une fois de plus, Ferris a décidé de sécher les cours, pour la neuvième fois du semestre. Il réussit à duper ses parents, embarque Sloane, sa petite amie, et convainc Cameron, son complice de toujours, de les accompagner en ville. Pour s’y rendre, ils «empruntent» la superbe Ferrari 250 GT du père de Cameron. Jamais à court d’idées, Ferris est bien décidé à profiter de tout : vitesse, bons restaurants, événements sportifs, fêtes dans les rues. Mais le proviseur du lycée ne l’entend pas de cette oreille et les prend en chasse…

Save Ferris !

C’est LA référence pour celui ou celle qui a besoin de liberté. Ferris Bueller, c’est le jeune gars qui ne s’en fait pas, qui ne veut pas prendre la vie au sérieux et qui pour cela a décidé de s’autoriser quelques bifurcations. Si John Cusack, présent au générique de Seize bougies pour SamSixteen Candles en 1984 a été envisagé pour tenir le rôle principal, c’est finalement Matthew Broderick qui hérite du personnage qui allait lui coller à la peau tout le reste de sa carrière. Jeune vedette de WarGames (1983) de John Badham et du somptueux Ladyhawke, la femme de la nuit (1984) de Richard Donner, Matthew Broderick ne fait qu’un avec son personnage. Avec un naturel confondant, charismatique en diable, le sourire charmeur et pourtant capable de se montrer vachard quand on lui cherche des noises, le jeune comédien âgé de 23 ans devient une icône à part entière. Il donne la réplique à Alan Ruck, avec lequel l’alchimie est évidente puisque les deux amis partageaient l’affiche d’une pièce de théâtre à Broadway depuis plus d’un an. Plus âgé que son partenaire (il avait alors près de 30 ans au moment du tournage), Alan Ruck hérite du plus beau personnage du film, Cameron, jeune lycéen hypocondriaque, renfermé, mal dans sa peau.

Fils d’un avocat fortuné que l’on ne verra jamais à l’écran, cloisonné dans une habitation moderne en verre plantée au beau milieu de la forêt, dans une chambre plus petite que le garage qui protège les voitures de luxe de son paternel (dont la fameuse Ferrari), Cameron s’est toujours laissé embarquer par la tornade Ferris. Malgré leurs grandes différences, les deux lycéens sont les meilleurs amis du monde depuis la maternelle. C’est là la magie propre à John Hughes, puisque même si La Folle journée de Ferris Bueller est une comédie aussi hilarante que revigorante, une vraie mélancolie effleure très souvent avec des personnages qui se raccrochent le plus possible à une insouciance qui leur échappe inévitablement. Ce spleen provient également et surtout lorsque Cameron évoque son père, qui l’effraie véritablement. Agité, très nerveux, le jeune homme voit en Ferris sa seule bouée de sauvetage dans un monde qui lui fait aussi peur que son avenir. On pourrait d’ailleurs rapprocher Cameron de Jeanie Bueller, la sœur de Ferris, interprétée par la belle Jennifer Grey, juste avant d’exploser avec Dirty Dancing. Alors que ses parents passent tout à Ferris, Jeanie subit sans cesse leurs remontrances, ce qui entraîne une jalousie, une haine, une animosité qui font peur à ceux qui la croisent dans les couloirs du bahut. Comme Cameron, cette journée lui sera profitable, puisqu’elle fera la rencontre d’un jeune mec paumé (Charlie Sheen, venu de L’Aube rouge de John Milius) qui lui dira doucement ses quatre vérités et ce qu’elle n’osait pas s’avouer sur sa propre vie. Suite à cet échange, Jeanie apprendra enfin à penser à sa propre existence plutôt qu’à celle de son frère.

De son côté, Ferris a beau montrer un visage au sourire enjôleur, il respecte l’immense sensibilité de Cameron et l’aide à prendre confiance en lui. C’est donc également une folle journée pour Cameron Frye. L’atout charme vient de la ravissante et éternellement jeune (pour les spectateurs) Mia Sara, tout juste révélée par Legend de Ridley Scott. Si sa carrière restera essentiellement confidentielle, à part pour son rôle dans le génial Timecop (1994) de Peter Hyams aux côtés de Jean-Claude Van Damme, l’actrice incarne celle qui donne à Ferris Bueller son équilibre. Plus posée et rationnelle, elle n’en reste pas moins rêveuse, bienveillante et aimante envers son boyfriend, pourtant très convoité et le mec le plus populaire du bahut.

Dans le monde de John Hughes, le badguy est le personnage du proviseur, celui qui incarne le maintien de l’ordre et les règles à respecter. Ici, Ed Rooney a décidé, purement et simplement, d’avoir la peau de celui qui le nargue à travers ses absences à répétition. Loin d’être relégué au « personnage secondaire », Jeffrey Jones jouit des scènes les plus drôles du film, y compris lorsqu’il donne la réplique à Edie McClurg, éternelle secrétaire qui planque ses stylos dans sa coupe en boule. Chacune de ses répliques déclenche les fous rires et le personnage bénéficie d’ailleurs du dernier mot (ou presque puisqu’il y a une scène post-générique où Ferris interpelle une dernière fois son audience) durant les credits de fin.

Les récits initiatiques s’entrecroisent au cours de cette journée mémorable, dans un Chicago ensoleillé, formidablement éclairé par Tak Fujimoto, le chef opérateur de La Balade sauvage et La course à la mort de l’an 2000. Sans aucune vulgarité, sans raillerie ni aucun mépris, John Hughes fait d’un cancre invétéré un vrai héros de cinéma, mais aussi celui de plusieurs millions de spectateurs qui se reconnaissent alors en lui. Peu importe son âge, on a tous une part de Ferris Bueller en nous, celui qui nous donne envie de dire « Aujourd’hui, je n’ai pas envie », afin de profiter un peu plus en allant voir ce qui se passe dehors, plutôt que de rester sous les néons d’un bureau étriqué. En 2008, La Folle journée de Ferris Buelle est classé 15e par le magazine Empire parmi les 100 Meilleurs personnages de films de l’histoire, tandis qu’il est inscrit en 2014 au National Film Registry afin d’être conservé à la Bibliothèque du Congrès.

LE BLU-RAY

L’attente a été longue, très longue même, pour voir enfin débarquer La Folle journée de Ferris Bueller en Haute-Définition, près de vingt ans après sa première édition en DVD ! Dommage que le visuel original n’ait pas été repris pour cette nouvelle jaquette qui parviendra néanmoins à sauter aux yeux des adeptes du film. Sérigraphie très sobre. Le menu principal est un peu fouillis, animé sur quelques séquences du film.

En fait, le seul mauvais point de cette édition, et non des moindres, est de ne pas avoir repris le formidable commentaire audio de John Hughes au cours duquel le réalisateur se confiait sur sa propre adolescence, en révélant ainsi ce qui avait pu nourrir ses personnages. Néanmoins, nous bénéficions de près d’1h15 de bonus (réalisés en 2005) alors ne faisons pas la fine bouche, mais conservons tout de même l’ancien DVD.

Le premier supplément (28’) se focalise essentiellement sur les comédiens de La Folle journée de Ferris Bueller, avec les deux directrices de casting, mais aussi et surtout des interviews du casting principal, avec quelques images de John Hughes remontant à 1986 pour la sortie du film. Matthew Broderick, Alan Ruck, Mia Sara (images de 1986 uniquement), Jennifer Grey (1985 et 2005), Lyman Ward, Cindy Pickett, Jeffrey Jones, Richard Edson, Ben Stein, Kristy Swanson, Jonathan Schmock et Edie McClurg, sont tous réunis pour évoquer leurs souvenirs sur la genèse, les conditions de tournage, les personnages, les thèmes abordés et la postérité du chef d’oeuvre de John Hughes ! Quelques photos et images de plateau viennent également illustrer l’ensemble.

On retrouve tout ce beau petit monde dans un making of (15’30) qui se penche un peu plus sur la réalisation de certaines scènes clés du film. Cette fois encore, des images de tournage dévoilent l’envers du décor, les anecdotes se multiplient et l’on apprend entre autres que La Folle journée de Ferris Bueller a été écrit en six jours, juste avant la grève des scénaristes.

Le module intitulé Who is Ferris Bueller ? (9’) donne cette fois encore la parole aux mêmes intervenants, qui dressent le portrait du personnage principal, avec les valeurs qu’il représente. Quelques légères redites, mais dans l’ensemble, ce bonus parvient à compléter les précédents.

Bueller ? Bueller ? Bueller ? Vous connaissez cette réplique. On la doit à Ben Stein, qui interprète le professeur d’économie dans le film de John Hughes. Major de sa promotion à la fac de droit de Yale, auteur de discours des présidents Richard Nixon et Gerald Ford, écrivain, scénariste, avocat, Ben Stein a également participé à quelques longs métrages en tant qu’acteur comme S.O.S. Fantômes II et The Mask. Un segment lui est entièrement consacré (11’), avec des images de 1986 et de 2005, durant lequel l’intéressé revient sur sa carrière atypique. Avec une ironie mordante et toujours pince-sans-rire, Ben Stein explique que la journée de tournage passée sur le plateau de La Folle journée de Ferris Bueller est l’une des plus « parfaites » de toute sa vie. Une apparition qui a marqué son existence et celle des spectateurs, puisque même Kurt Cobain et George Bush, croisés par hasard, n’avaient pas pu s’empêcher de réciter ses répliques en sa présence. Ben Stein partage ses souvenirs et tente d’expliquer pourquoi La Folle journée de Ferris Bueller est selon lui un film très important.

L’éditeur joint enfin un montage (10’) d’interviews réalisées par les comédiens eux-mêmes avec d’un côté Matthew Broderick et Alan Ruck, Alan Ruck et Mia Sara, Matthew Broderick et Jeffrey Jones, avec en sus les images de tournage d’une scène coupée au restaurant, où le trio écoute les explications du maître d’hôtel sur la cuisine du…pancréas.

L’interactivité se clôt sur une galerie de photos.

L’Image et le son

En France, La Folle journée de Ferris Bueller ne possède pas le même statut qu’aux Etats-Unis, où le film est disponible en Blu-ray depuis…dix ans. C’est donc la même copie qui arrive dans nos contrées et le fait est que les canons de restauration de 2009 ne sont pas les mêmes qu’aujourd’hui. Anyway, la copie présentée est très propre, même s’il reste quelques pétouilles, griffures et autres. La HD est flagrante, surtout sur la luminosité et l’éclat des couleurs (le rouge de la Ferrari), bien que la définition puisse étonnamment varier sur un champ-contrechamp. Le grain est plutôt bien géré (même s’il est trop atténué à notre goût sur certains plans), le piqué agréable, les détails appréciables (la chambre de Ferris) et la profondeur de champ indéniable.

La version originale dispose d’une piste Dolby True HD 5.1. Les voix sont solidement plantées sur la centrale et la scène frontale n’a jamais semblé aussi riche. Les frontales se mêlent ardemment à l’ensemble en créant une vraie et solide spatialisation musicale (le mythique Oh Yeah de Yello), mais aussi avec des ambiances naturelles (la voie rapide, le stade et la performance de Ferris sur le char), le tout avec naturel, ainsi qu’une intervention du caisson de basses aux moments opportuns. Si comme l’auteur de ces mots vous avez découvert La Folle journée de Ferris Bueller quand vous étiez gamins, vous restez attachés à la version française et son immense doublage. Il faudra cependant vous contenter d’une piste Dolby Digital 2.0, mais heureusement celle-ci est plutôt dynamique.

Crédits images : © Paramount Pictures / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / La Vie dissolue de Gérard Floque, réalisé par Georges Lautner

LA VIE DISSOLUE DE GÉRARD FLOQUE réalisé par Georges Lautner, disponible en DVD et Blu-ray le 20 février 2019 chez Gaumont

Acteurs : Roland Giraud, Clémentine Célarié, Jacqueline Maillan, Marie-Anne Chazel, Gérard Rinaldi, Mathilda May, Sonia Lassaux, Ingrid Lurienne, Mitsou…

Scénario : Jean-Jacques Tarbès, Christian Watton, Christian Clavier, Martin Lamotte, Georges Lautner

Photographie : Yves Rodallec

Musique : Dailey News

Durée : 1h21

Date de sortie initiale : 1986

LE FILM

Gérard Floque, créatif publicitaire, a bien des ennuis. Le même jour, il perd son emploi, il apprend que sa fille aînée fume du hasch et que sa femme le trompe. Il claque alors la porte de l’agence et du domicile pour se lancer dans une autre vie. Profitant de quelques jours de vacances en solitaire, il est bientôt rejoint par sa belle-mère, ses filles, sa femme et son amant. Retour à la case départ.

Dans les années 1980, Georges Lautner (1926-2013) va connaître son plus grand succès dans les salles avec Le Professionnel (5,2 millions d’entrées), mais également le début de son déclin au box-office. Après 1984 et Joyeuses Pâques (3,4 millions d’entrées), les spectateurs déserteront progressivement les films du cinéaste. En 1985, Le Cow-Boy avec Aldo Maccione se plante avec « seulement » 707 000 entrées. Edouard Molinaro ayant déclaré forfait, c’est Georges Lautner qui reprend alors le flambeau de La Cage aux folles III – « Elles » se marient, mais cette fois encore, le succès est relatif puisque 1,7 million de français se déplaceront pour voir le dernier volet des aventures de Zaza Napoli et de Renato, alors qu’ils étaient près de 5,5 millions pour le premier épisode et trois millions pour le second. Qu’à cela ne tienne, Georges Lautner décide de rebondir et pour cela s’associe entre autres avec Martin Lamotte et Christian Clavier, pour La Vie dissolue de Gérard Floque. Pur produit des années 1980, le film invite plusieurs générations de comédiens et prend pour cible la publicité, tout en offrant l’un de ses meilleurs rôles au génial Roland Giraud. Si cette fois encore le score a été décevant avec à peine 650.000 entrées à sa sortie en janvier 1987, La Vie dissolue de Gérard Floque est devenu un petit classique, chéri par les fans de Georges Lautner, qui n’ont de cesse réciter les répliques vachardes écrites par le duo Lamotte/Clavier.

La vie de Gérard Floque s’écroule en deux heures. Rentrant chez lui après avoir été renvoyé de son travail par son meilleur ami, il y trouve la police venue l’avertir que sa fille de douze ans est au poste pour trafic de drogue. En perquisitionnant son domicile, les policiers découvrent ensuite que la femme de Gérard a un amant, un présentateur vedette de la télé. Celui-ci se réfugie chez une amie où il est poursuivi par sa belle-mère, psychologue pédante et excentrique qui le tient pour coupable des écarts de sa femme et de sa fille.

Rétrospectivement, il est amusant de voir quelle énergie Georges Lautner affichait encore à 60 ans. Amoureux de la jeunesse, le réalisateur des Barbouzes a toujours su s’entourer et surtout mélanger les âges, les cultures, les parcours, toujours au service du rire. Son film s’apparente à une BD filmée avec des séquences qui s’apparentent à des vignettes qui se succèdent et les scènes qui s’enchaînent comme des pages que l’on tourne. La Vie dissolue de Gérard Floque est un film-patchwork où Georges Lautner a mis de tout et surtout les produits de son époque. Des décors aux costumes, en passant par les maquillages, la bande-originale avec Jeanne Mas et son Johnny, Johnny, ou bien encore les deux chansons Don’t Stop Now par Daily News et Je veux seulement un homme par Annine, les années 1980 éclatent les yeux et les tympans avec ce qu’elles avaient de plus innocent, sans tenir compte du mauvais goût. Il y a donc une véritable nostalgie à revoir La Vie dissolue de Gérard Floque, mais pas seulement.

Il s’agit d’une vraie bonne comédie où l’on rit du début à la fin. Les dialogues sont tordants, le rythme alerte avec un montage cut, les comédiens sont en très grande forme. Film très court, on se demande si Georges Lautner n’a pas rajouté quelques séquences pour en allonger artificiellement la durée. Cela expliquerait pourquoi le long métrage s’ouvre sur un clip-live du titre Don’t Stop Now susmentionné, dans son intégralité ! Paradoxalement, La Vie dissolue de Gérard Floque n’a pas non plus de véritable « conclusion ». Le générique de fin démarre sur la même chanson qui ouvrait le film et que l’on entend à de multiples reprises, sans que l’on s’y attende, c’est à prendre ou à laisser. Cela a pu expliquer le fait que les spectateurs aient été décontenancés en sortant de la salle. Toujours est-il que le film est sans cesse ponctué de scènes cultes, notamment celle du pétage de câble de l’immense Michel Galabru en début de film après la diffusion d’un spot promo pour son parfum (« Eaux fortes de Jean-Etienne Nasal, Eaux fortes, le parfum de la jeunesse ! ») jugé trop « moderne ». Impossible de ne pas exploser de rire devant cette gueulante qui quelque part est entrée dans l’Histoire du cinéma et qui a d’ailleurs été maintes fois diffusée à la mort du comédien en 2016. Et puis le casting réunissant Roland Giraud, Clémentine Célarié, Jacqueline Maillan, Marie-Anne Chazel, Gérard Rinaldi, Richard Taxi, Mario David, Mathilda May, Christian Clavier, Jacques François, Mireille Darc dans une courte apparition, Maaike Jansen, Jacques Ramade, Jackie Sardou, Catherine Lachens, Michel Peyrelon, Dominique Besnehard et les éternels complices du réalisateur, Jean Luisi et Henri Cogan emporte immédiatement l’adhésion. Bref, on adore La Vie dissolue de Gérard Floque qui plus de trente ans après n’a rien perdu de son panache comique jubilatoire et rentre-dedans.

LE BLU-RAY

L’attente a été longue, très longue même, puisque La Vie dissolue de Gérard Floque n’était JAMAIS sorti en DVD ! Alors merci Gaumont de rendre enfin disponible ce film culte de Georges Lautner ! Et en Blu-ray en plus ! Le menu principal est fixe et muet et le test a été effectué sur check-disc.

Sylvain Perret est spécialiste du cinéma de Georges Lautner. Il nous propose une présentation de La Vie dissolue de Gérard Floque (12’30). Pour cela, le journaliste replace le film dans la carrière du réalisateur, après les deux échecs du Cow-Boy et La Cage aux folles III – « Elles » se marient. Puis, il en vient à l’écriture du scénario, aborde les thèmes, le casting, ainsi que le côté « désarticulé » du film qui ne comporte pas vraiment de conclusion, ni d’enjeux dans sa dernière partie. Sylvain Perret aborde également la représentation de l’homosexualité dans La Vie dissolue de Gérard Floque. Enfin, la sortie et le relatif échec du film sont évoqués.

Quel plaisir de retrouver Roland Giraud ! A l’occasion de la sortie de La Vie dissolue de Gérard Floque en DVD et Blu-ray, le comédien né en 1942 enchaîne les anecdotes et souvenirs, liés ou pas au film qui nous intéresse. Il débute d’ailleurs cet entretien en expliquant que le rôle pour lequel on le félicite toujours et dont on lui parle le plus est celui des Bronzés font du ski, dans lequel il ne fait qu’une courte apparition. « Leçon d’humilité » dit-il. Puis, le comédien évoque Georges Lautner, « un gentleman, un homme très distingué », avant d’en venir à la genèse de La Vie dissolue de Gérard Floque, l’écriture du scénario, ses partenaires à l’écran dont certains sont malheureusement « partis » depuis. Ayant revu le film pour cette interview, Roland Giraud s’étonne de la belle photographie de ce film qu’il a eu beaucoup de plaisir à tourner. Roland Giraud en profite également pour parler de Coluche, de sa femme Maaike Jansen (qui joue dans le film), de Jean Carmet, ainsi que de ses nouvelles envies de cinéma. Cela tombe bien, puisque suite au succès dans les salles des Vieux fourneaux (quasiment un million d’entrées), les propositions commencent visiblement à revenir. Ce sera toujours un plaisir de le revoir sur le grand écran.

L’interactivité se clôt sur la bande-annonce constituée de prises alternatives.

L’Image et le son

Il serait difficile de faire mieux que ce Blu-ray (Encodage MPEG 4 / AVC – Format du film respecté 1.66, 1080p) qui respecte les volontés artistiques originales dont le grain original, tout en tirant intelligemment partie de l’opportunité HD. La clarté est fort appréciable, notamment sur toutes les séquences en extérieur, la propreté du master est irréprochable, ainsi que la stabilité, le relief, la gestion des contrastes et le piqué qui demeure agréable. Les nombreuses séquences nocturnes sont également excellemment conduites avec des noirs denses et des couleurs lumineuses.

Le mixage DTS-HD Master Audio Mono instaure un réel confort acoustique. Les dialogues sont ici délivrés avec ardeur et clarté, la propreté est de mise, les effets riches et les silences denses, sans aucun souffle. L’éditeur joint également les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant.

Crédits images : © Gaumont / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr