UN VAMPIRE À BROOKLYN (A Vampire in Brooklyn) réalisé par Wes Craven, disponible en Blu-ray le 6 janvier 2021 chez Paramount Pictures.
Acteurs : Eddie Murphy, Angela Bassett, Allen Payne, Kadeem Hardison, Zakes Mokae, John Witherspoon, Joanna Cassidy, Simbi Kali…
Scénario : Charles Murphy, Michael Lucker, Chris Parker, Eddie Murphy, Vernon Lynch Jr.
Photographie : Mark Irwin
Musique : J. Peter Robinson
Durée : 1h42
Année de sortie : 1995
LE FILM
Le temps est venu pour Maximillian, vampire aristocrate exilé dans les Caraïbes, d’assurer sa descendance. Il se rend donc à New York à la recherche de la femme idéale. Il rencontre Rita Veder, qui travaille dans la police mais qui ignore totalement qu’elle est à moitié vampire. Pour la conquérir sans éveiller ses soupçons, Maximillian doit user de ruse et déployer tout son charme. Il s’adjoint également l’aide de Julius qu’il transforme en zombie pour la circonstance.
S’il a moins rapporté que le premier opus au box-office, Le Flic de Beverly Hills 2 conforte la place d’Eddie Murphy dans le top des acteurs les plus bankables et les plus appréciés par les spectateurs dans le monde. Un an plus tard, Un prince à New York – Coming to America est aussi un triomphe au box-office et l’acteur commence à multiplier les rôles grimés dans le même film, en interprétant ici pas moins de quatre personnages, se donnant même parfois la réplique. Étrangement, c’est juste après le film de John Landis que la machine va commencer à s’enrayer, par petites étapes, doucement, mais sûrement. Son premier coup d’essai derrière la caméra, par ailleurs le seul à ce jour, à savoir Les Nuits de Harlem – Harlem Nights (1989) dans lequel il tient l’affiche avec Richard Pryor, ne rencontre pas le succès espéré (même si le film rentre largement dans ses frais), même chose pour 48 Heures de plus (1990), pour lequel il obtient un salaire record, qui ne parvient pas à retrouver la flamme du premier opus, mais qui rapporte tout de même 150 millions de dollars à l’international. 1992 accélère brutalement la chute d’Eddie Murphy avec deux opus sortis la même année, Boomerang de Reginald Hudlin et Monsieur le député – The Distinguished Gentleman de Jonathan Lynn. Si le premier s’en sort honorablement, le second est réellement le premier revers pour le comédien. Sentant le vent tourner, Eddie Murphy décide de retrouver son personnage fétiche d’Axel Foley pour une troisième aventure du Flic de Beverly Hills, que réalisera John Landis, cinéaste qui lui a déjà porté chance. Mais cette fois, le film ne rentabilise sa mise sur le sol de l’Oncle Sam (42 millions de dollars pour 50 millions de budget). Un échec conséquent pour l’acteur, surtout pour le troisième épisode de la saga qui a fait de lui une star. Cherchant alors à se renouveler, il produit et écrit avec son frère Charlie l’histoire d’Un vampire à Brooklyn – Vampire in Brooklyn, une comédie horrifique sur laquelle Eddie Murphy mise beaucoup, malgré un budget fortement revu à la baisse, 14 millions de dollars. A la barre, nous retrouvons Wes Craven, qui vient d’essayer de redorer le blason de Freddy Krueger dans (le largement surestimé) Freddy sort de la nuit – Wes Craven’s New Nightmare, lui aussi désireux de s’essayer à un nouveau genre et surtout attiré à l’idée de diriger une star internationale. Malheureusement, la sauce n’a pas pris et ne prendra d’ailleurs jamais. S’il est aujourd’hui considéré comme un petit classique, Un vampire à Brooklyn apparaissait déjà has-been en 1995 et ne s’est évidemment pas amélioré plus de 25 ans après sa sortie. La faute à un Eddie Murphy monolithique, qui pense qu’être affublé de longues dents effilées ou croulant sous des tonnes de prothèses fera de lui un vampire charismatique sera suffisant pour contenter à la fois ses fans de la première heure, heureux de le voir interpréter à nouveau plusieurs personnages – le vampire principal, un prédicateur alcoolique et un gangster italien blanc grossier – grâce au talent des maquilleurs, et les aficionados de films d’épouvante. Mais ce cocktail, même si secoué dans tous les sens, ne fonctionne pas et se révèle indigeste.
Un navire abandonné s’écrase dans un chantier naval à Brooklyn, New York. Silas Green, le vigile du port, inspecte le rafiot et n’y découvre que des cadavres. Pendant ce temps, Julius Jones, le neveu de Silas, a une altercation avec des gangsters italiens. Au moment où les deux crétins sont sur le point de tuer Julius, Maximillian, un vampire arrivé sur le navire, intervient et les tue. Max infecte Julius avec son sang vampirique, transformant ainsi Julius en zombie, et explique qu’il est venu des Caraïbes à Brooklyn à la recherche de celle qui lui donnera une descendance, afin de vivre au-delà de la nuit et de la prochaine pleine lune. L’élue de son coeur se trouve être une agent du NYPD, Rita Veder, qui ne s’est pas encore remise de la mort de sa mère, chercheuse en paranormal, enfermée pour maladie mentale à la fin de sa vie. Alors qu’elle et son partenaire, Justice, enquêtent sur les corps découverts sur le navire, Rita commence à avoir des visions d’une femme qui lui ressemble et commence à se poser des questions sur le passé de sa mère. Rita ignore complètement son héritage de vampire et pense qu’elle perd la tête comme sa mère. Max initie une série de méthodes sinistres pour attirer Rita.
Un vampire à Brooklyn est une œuvre schizophrène, dans le sens où l’on sent constamment Wes Craven et Eddie Murphy tenter de reprendre les manettes du film, le premier en essayant de faire ce qu’il connaît le mieux, à savoir filmer l’épouvante et instaurer une ambiance effrayante (avec de l’humour et si possible de l’émotion), le second, conscient que son public de base est en droit d’attendre quelques vannes potaches, essayant d’insuffler le plus d’humour possible, mais voulant en même temps ses capacités d’acteur dramatique. Mais peine perdue. Non seulement le scénario est poussif et se contente de retrouver une atmosphère de blacksploitation (on pense forcément à Blacula de William Crain), mais même les blagues sont absolument pathétiques. Le pompon revient au sidekick d’Eddie Murphy interprété par Kadeem Hardison, vu dans Les Blancs ne savent pas sauter), horripilant et peu aidé par le gag récurrent de la décomposition de son personnage. C’est comme si l’on sentait Wes Craven se forcer à filmer ces séquences, qui n’arrachent aucun sourire et font même pitié.
De son côté, Eddie Murphy souhaite visiblement prouver qu’il peut parfaitement être sobre face à la caméra. Du coup, il ne fait rien. Son visage reste figé, ses yeux éteints. Heureusement (ou pas), il craque à plusieurs reprises pour balancer une ou deux punchlines, mais de ce fait ruine les efforts de Wes Craven qui tentait de mettre en place une atmosphère ou tout simplement une crédibilité nécessaire pour s’intéresser au film. Demeurent la beauté et la sensualité de la magnifique Angela Bassett (dans un rôle initialement prévu pour Jada Pinkett pas encore Smith), qui venait d’enchaîner Malcolm X de Spike Lee et Tina (What’s Love Got to Do with It) de Brian Gibson et se préparait à tourner Strange Days de Kathryn Bigelow. Si Un vampire à Brooklyn vaut au moins qu’on y accorde 1h30 de notre temps, c’est bel et bien pour elle, car le reste du casting est franchement navrant. Même la photographie du pourtant surdoué Mark Irwin (Chromosome 3, Scanners, Vidéodrome, La Mouche, The Mask et bien d’autres) peine à convaincre, la faute probablement à un Wes Craven quelque peu paumé qui n’arrive pas à insuffler d’âme à sa mise en scène, ainsi qu’un montage raté de Patrick Lussier, futur réalisateur de l’improbable (et néanmoins sympathique) Hell Driver 3D.
Conspué par la critique à sa sortie, cette comédie fantastique et horrifique, ni amusante, ni effrayante ne connaîtra aucun succès dans les salles. En revanche, l’année suivante, Eddie Murphy se refera une belle santé au box-office avec Le professeur Foldingue – The Nutty Professor, tandis que Wes Craven présentera un des films les plus emblématiques de sa carrière, Scream.
LE BLU-RAY
Dix ans après une seconde édition en DVD (identique à la première sortie en 2002), Un vampire à Brooklyn arrive pour la première fois en Haute-Définition en France. Paramount Pictures reprend le visuel de l’affiche originale d’exploitation. Le menu principal est fixe et muet.
Aucun supplément sur ce Blu-ray.
L’Image et le son
On ne sait pas si Un vampire à Brooklyn était véritablement attendu en Blu-ray mais toujours est-il que l’éditeur livre un master HD plutôt soigné, au point que les couches de latex d’Eddie Murphy sont bien visibles sur les plans rapprochés. L’image a subi un véritable lifting numérique, en préservant la texture argentique originale et offre des plans d’une netteté absolue sur les doublures du comédien sur les scènes dites agitées. Du point de vue technique, la propreté du master est donc indéniable, la saturation des couleurs solide, le piqué est joliment aiguisé sur les plans rapprochés mais divers fourmillements demeurent sur les plans à (mauvais) effets spéciaux. Les atmosphères nocturnes et enfumées sont toujours délicates à encoder, surtout sur une photographie d’un film des années 1990, et malgré une brillante compression, la définition peine à trouver un équilibre HD probant, surtout sur les très nombreuses scènes sombres, parfois éclairées aux néons. Mais bon, la qualité est bel et bien présente, surtout quand on se souvient de l’édition Standard souvent constellée de poussières.
La piste DTS-HD Master Audio 5.1 anglaise ne fait certes pas dans la dentelle mais offre son lot d’effets latéraux percutants. La musique signée par J. Peter Robinson (The Gate de Tibor Takács) est délivrée par l’ensemble des enceintes bien que les frontales révèlent une dynamique plus palpable que les enceintes arrière. Le caisson de basses a de son côté de nombreuses occasions de briller, tandis que les dialogues sont solidement plantés sur la centrale. De la première à la dernière image, le spectacle acoustique est assuré et donne un sérieux coup de fouet au film qui en a bien besoin. Une version française au doublage réussi est également de mise et encodée en Dolby Digital 5.1, beaucoup moins ardente. L’écoute demeure suffisamment énergique, mais n’arrive pas à la cheville de la DTS-HD Master Audio 5.1 originale.