Test Blu-ray / Le Convoi, réalisé par Sam Peckinpah

LE CONVOI (Convoy) réalisé par Sam Peckinpah, disponible en Blu-ray le 1er septembre 2023 chez Studiocanal.

Acteurs : Kris Kristofferson, Ali MacGraw, Ernest Borgnine, Burt Young, Madge Sinclair, Franklyn Ajaye, Brian Davies, Seymour Cassel, Cassie Yates…

Scénario : Bill L. Norton

Photographie : Harry Stradling Jr.

Musique : Chip Davis

Durée : 1h48

Date de sortie initiale : 1978

LE FILM

Rubber Duck est rejoint par ses anciens collègues camionneurs dans un mouvement contestataire contre le shérif Wallace qui agit comme un véritable tyran. Leur convoi parcourt les routes du Nouveau-Mexique jusqu’au moment où les forces de l’ordre les arrêtent en les empêchant de poursuivre. L’affaire commence alors à se médiatiser…

C’est l’avant-dernier opus d’un cinéaste dont le nom donne des frissons aux cinéphiles. Le Convoi Convoy est en effet le treizième long-métrage de Sam Peckinpah, mais aussi son plus grand succès commercial à travers le monde, malgré des critiques plus que mitigées à sa sortie. S’il est toujours aujourd’hui considéré comme mineur dans la filmographie du maître, Le Convoi n’en reste pas moins un sacré tour de force et demeure l’un des derniers témoignages du Nouvel Hollywood, comme si la dépouille de ce courant avait été ranimée une ultime fois, pour renouer avec l’aura d’oeuvres comme Macadam à deux voies Two-Lane Blacktop de Monte Hellman et surtout de Point limite zéro Vanishing Point de Richard C. Sarafian, auxquels Sam Peckinpah aurait greffé la légèreté de Cours après moi shérif Smokey and the Bandit de Hal Needham, gros carton de l’année précédente. Il en résulte un spectacle haut de gamme, un road movie où les gros bahuts suivraient la ligne blanche séparant l’asphalte, avec d’un côté le quotidien sclérosé et corseté, et de l’autre le désir inné de liberté. À ce titre, Kris Kristofferson est impeccable dans la peau du leader malgré-lui du mouvement improvisé de cette folle échappée, où prenant le volant pour échapper à la prison après une bagarre qui a mal tourné, celui-ci se retrouve à la tête d’un convoi de camions (mais pas que) qui commence à s’étaler sur le ruban goudronné et interminable. Ou quand Sam Peckinpah remplace ses canassons par des camions cylindrés pour parcourir le Nouveau-Mexique. Un pur et grand divertissement.

Martin Penwald – nom de code sur la C.B. : « Rubber Duck » – est un chauffeur routier à l’esprit individualiste. Roulant à vive allure en convoi avec « Pig Pen » Bobby et « Spider Mike », il se fait piéger par le shérif « Dirty » Lyle Wallace. En utilisant la fréquence radio des camionneurs, celui-ci a fait croire que la voie était libre. Après avoir été rançonnés de soixante-quinze dollars chacun, les trois hommes roulent jusqu’à un « routier » où ils font halte. Lyle surgit de nouveau, prêt à user de n’importe quel motif pour arrêter un des chauffeurs présents. Rubber Duck le met hors d’état de nuire ; ses deux camarades font de même avec deux policiers arrivés entre-temps. Tous s’empressent de reprendre le volant de leurs gigantesques semi-remorques afin de gagner au plus vite la frontière de l’État. C’est un convoi d’une huitaine de véhicules qui s’ébranle, Rubber Duck en tête, avec à son bord Melissa, reporter photographe entraînée malgré elle dans l’aventure. Dans la poursuite qui s’engage, nombre de voitures de police sont détruites. Or, au fil des kilomètres, le convoi grandit jusqu’à atteindre une centaine d’éléments. Et si les forces de police se font plus importantes, elles ne peuvent pas le stopper : Rubber Duck transportant trente-huit mille litres d’un produit chimique inflammable, les barrages s’ouvrent devant lui… L’opinion publique penche en faveur des camionneurs, et le gouverneur Haskins, qui, en pleine campagne électorale, y voit l’opportunité d’un gain de voix, soutient leurs revendications.

Immédiatement après Croix de fer Cross of Iron, son seul film de guerre, qui s’était soldé sur un échec grave aux États-Unis, mais qui avait connu un beau succès en Europe, Sam Peckinpah enchaîne avec Le Convoi, d’après un scénario de Bill L. Norton (American Graffiti, la suite), inspiré par la chanson Convoy de C. W. McCall, hit de l’année 1975 qui découlait de la propre expérience du chanteur comme routier dans un convoi croissant de véhicules sur la route de Denver. Le Convoi se regarde, se suit et se vit comme si le spectateur prenait place dans le train-fou d’une fête foraine. On rit, on jubile, on en prend plein les yeux, on se laisse prendre par la main par un cinéaste toujours au sommet de son art, qui compile les plans larges, les ralentis, les bastons, les gros plans sur les tronches burinées, tout en décontraction, avec aussi une rage de tous les instants, avec une envie de foncer droit devant, sans se retourner, sans penser aux conséquences.

Un happening qui forcément va faire des émules, donner l’impulsion à certains de se rallier au convoi (y compris des catholiques ou même une voiturette de golf), mais aussi être récupéré politiquement. Kris Kristofferson, qui sortait d’Une étoile est née A Star is Born de Frank Pierson et qui se préparait à tourner de loooongs mois avec Michael Cimino pour La Porte du paradis, est un monstre de charisme avec ses yeux bleus perçants et son visage strié de rides creusées par une quarantaine déjà bien démarrée. Il incarne les derniers soubresauts d’une rébellion, ironiquement puisque Duck ne cherche en fait qu’à échapper à la prison après une bagarre qui a touché un flic quelque peu pourri. Mais puisque certains se reconnaissent dans ce périple lancé à plus de cent à l’heure, pourquoi pas faire la route ensemble après tout ! Il est en plus joliment accompagné par Melissa, interprétée par la mythique Ali MacGraw, qui faisait son retour au cinéma six ans après Guet-apens, après quoi celle-ci avait mis sa carrière entre parenthèses pour vivre une relation tumultueuse avec Steve McQueen, à qui le rôle de Duck avait d’ailleurs été proposé.

Bénéficiant en outre d’un casting de choix, où se distingue une fois de plus l’immense Ernest Borgnine (neuf ans après La Horde sauvage), Burt Young (qui vient de rendre l’âme) et Seymour Cassel, le réalisateur de Major Dundee, Un nommé Cable Hogue, Les Chiens de paille et Apportez-moi la tête d’Alfredo Garcia dispose aussi du plus gros budget de sa carrière, 12 millions de dollars, somme qui sera très largement amortie puisque Le Convoi rapportera près de quatre fois sa mise. Sur son montage percutant, Convoy embarque le spectateur dans son sillage pendant près d’1h50 où l’action ne s’arrête quasiment jamais une seconde.

LE BLU-RAY

Quasi-introuvable en DVD depuis des années, Le Convoi revient dans les bacs en Blu-ray, pour la première fois en France. Le disque repose dans un boîtier classique de couleur bleue, tandis que la jaquette reprend le visuel d’exploitation. Même chose pour l’illustration du menu principal, fixe et muet.

Aucun supplément. Quel dommage franchement…

L’Image et le son

Cette édition Blu-ray au format 1080p (AVC) permet de relever le niveau des couleurs, du piqué et des contrastes du film, tout en lui donnant une nouvelle stabilité. Ce grand classique bénéficie aujourd’hui d’une édition digne de nom édité par Studiocanal. L’élévation HD n’est pas négligeable pour un titre comme celui-là. Saluons avant tout l’impeccable étalonnage qui rend justice aux tonalités originelles du film. L’image retrouve son caractère fluide et naturel, notamment au niveau des splendides décors, paysages et longues routes de l’Amérique, mais également au niveau des visages comme les perles de sueur. Le cadre est riche en détails, chaque plan ou sujet d’arrière-plan est d’une qualité et d’une profondeur séduisante, à l’instar des noirs concis. Aucune tâche ou défaut n’est constatable, si ce n’est quelques troubles et sensibles pertes de la définition. Que les puristes soient rassurés, le superbe grain de la photo du chef opérateur Harry Stradling Jr. (Boire et déboires, Le Merdier, Une Bible et un fusil) est savamment restitué. Le Convoi retrouve un éclat fantastique et la restauration demeure impressionnante.

Le Convoi est disponible en version originale et française DTS HD Master Audio 2.0. La première instaure un confort acoustique plaisant avec une délivrance suffisante des dialogues, des effets annexes convaincants et surtout une belle restitution de la musique. La piste française se focalise souvent sur les voix au détriment des ambiances environnantes et de la musique. Les deux options acoustiques sont propres et dynamiques.

Crédits images : © Studiocanal/ Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

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