Test Blu-ray / Dix hommes à abattre, réalisé par H. Bruce Humberstone

DIX HOMMES À ABATTRE (Ten Wanted Men) réalisé par H. Bruce Humberstone, disponible en DVD et Combo Blu-ray + DVD le 2 mars 2023 chez Sidonis Calysta.

Acteurs : Randolph Scott, Jocelyn Brando, Richard Boone, Alfonso Bedoya, Donna Martell, Skip Homeier, Clem Bevans, Leo Gordon, Minor Watson, Lester Matthews, Tom Powers, Dennis Weaver, Lee Van Cleef…

Scénario : Kenneth Gamet, d’après une histoire originale d’Irving Ravetch & Harriet Frank Jr.

Photographie : Wilfrid M. Cline

Musique : Paul Sawtell

Durée : 1h20

Date de sortie initiale: 1955

LE FILM

John Stewart s’installe dans un immense domaine en Arizona. Campbell, un éleveur, aimerait épouser sa fille adoptive, Maria. Devant ses menaces, Maria se cache chez John. Furieux, Campbell engage dix hommes pour se débarrasser de John, dont il convoite la ferme, et récupérer Maria…

Inconnu au bataillon, du moins en ce qui nous concerne, le réalisateur H. Bruce Humberstone (1901-1984), malgré près de soixante mises en scène à son actif, ne possède qu’une infime partie de son œuvre disponible en DVD-Blu-ray dans nos contrées. On peut ainsi trouver Le Cavalier au masqueThe Purple Mask (1955) avec Tony Curtis, un western avec Victor Mature, Massacre à Furnace CreekFury at Furnace Creek (1948), un film de guerre avec John Payne et Maureen O’Hara, Les Rivages de TripoliTo the Shores of Tripoli (1942), une comédie-musicale avec Glenn Miller, Tu seras mon mari Sun Valley Serenade (1941). les cinéphiles les plus pointus sauront qu’il est aussi celui qui aura signé trois opus de Tarzan avec Gordon Scott dans le rôle-titre, Tarzan et le Safari perdu (1957), Le Combat mortel de Tarzan (1958) et le téléfilm Tarzan et les trappeurs (1960), même s’il n’est pas crédité pour ce dernier. Sorti en 1955, Dix hommes à abattre Ten Wanted Men est l’un des ultimes ouvrage de H. Bruce Humberstone pour le cinéma, puisqu’il se consacrera essentiellement au petit écran par la suite, sur beaucoup de séries comme The Survivors, Daniel Boone et Colt.45. Plus de dix ans après Les Rivages de Tripoli il retrouve Randolph Scott, alors dans la dernière partie de sa carrière, juste avant que celui-ci n’entame le légendaire cycle Ranown avec Budd Boetticher. Dix hommes à abattre, à ne pas confondre avec Sept hommes à abattre, justement le premier film du cycle susmentionné, est un petit western que l’on pourrait qualifier d’anecdotique, clairement divisé en deux parties. Si la première, en gros jusqu’à la quarantième minute, soit à mi-temps du film, s’avère redondante et peu enthousiasmante, la seconde vaut le coup d’oeil avec ses règlements de comptes qui ont tardé à venir, mais qui ne déçoivent pas, tout comme l’interprétation toujours inspirée de Randolph Scott. Les fans apprécieront sans doute, les autres pourraient trouver le temps long…

Ocatilla, une petite ville de l’Arizona. Tenace, John Stewart, notable et riche éleveur, est parvenu à défendre son ranch contre les Indiens. Sous prétexte qu’il accorde l’hospitalité à sa fille adoptive Maria, son rival Wick Campbell, qui voudrait désormais forcer la douce et ravissante jeune femme à l’épouser, engage dix tueurs pour l’abattre, mais il s’agit en réalité pour ce dernier de faire main basse sur ses terres afin d’agrandir son propre domaine. Assiégé auprès d’une poignée de fidèles, Stewart leur résiste, mais son frère Adam est assassiné. Stewart n’a alors plus qu’une idée en tête, la vengeance.

Randolph Scott s’éloigne du cowboy taciturne au visage fermé dans Dix hommes à abattre, du moins durant les quarante premières minutes, où il apparaît souriant, suffisant presque, dans la peau d’un homme fier de ce qu’il a accompli, de s’être enrichi, pas forcément légalement, d’avoir fait prospérer la ville, d’être devenu quelqu’un dont le nom s’affiche sur les devantures des boutiques. Après la mort de son frangin, John Stewart ne sera plus le même homme, ou plutôt redevient celui qu’il était avant de s’enorgueillir de ses succès, de son influence et de sa richesse. Le costume est crasseux, le regard a changé et la main effleure constamment le Colt. Randolph Scott, également producteur, est impeccable, mais il se fait voler la vedette par l’excellent Richard Boone, acteur mythique vu dans Le Dernier des géants, La Lettre du Kremlin, Le Seigneur de la guerre, L’Homme qui n’a pas d’étoile, Alamo et L’Homme de l’Arizona, deuxième « épisode » du cycle Ranown. Dans Dix hommes à abattre, il campe un homme fou de jalousie, qui entreprend d’épouser celle qu’il avait adoptée, devenue une belle mexicaine, qui tombe amoureuse du neveu de son ennemi John Stewart. L’occasion est double pour Wick Campbell, qui souhaiterait récupérer celle qu’il considère comme étant sa propriété, tout en mettant la main sur une partie des terres et du bétail de Stewart. Lâche, il décide d’engager quelques cowboys à la gâchette facile, dont l’un est campé par le jeune Lee Van Cleef, menés par le redoutable Frank Scavo, incarné par le génial Leo Gordon, dont la tronche fantastique a été vue chez Simon Nuchtern (Savage Dawn), Peter Collinson (Les Baroudeurs), Claude Sautet (L’Arme à gauche), Roger Corman (The Intruder, La Malédiction d’Arkham), Melvin Frank (Violence au Kansas) et bien d’autres.

Dommage que les poursuites et les affrontements soient toujours filmés de la même façon, des scènes par ailleurs peu aidées par un montage paresseux, ce qui est d’autant plus frustrant quand on sait que le responsable est Gene Havlick, collaborateur récurrent de Frank Capra (Mr. Smith au Sénat, Vous ne l’emporterez pas avec vous, Horizons perdus, L’Extravagant Mr Deeds), qui n’arrive pas à insuffler de rythme à l’action. La photographie de Wilfrid M. Cline (La Rivière de nos amours) et la musique de Paul Sawtell (Je suis une légende, Le Sous-marin de l’apocalypse, Le Cri de guerre des apaches) sont des gros points forts, même si Dix hommes à abattre est souvent trop bavard et peine à maintenir l’intérêt du spectateur. Néanmoins, celui qui parviendra au bout de trois quarts d’heure sera bien récompensé, le récit devenant plus prenant, Randolph Scott sortant de sa « retraite » pour prendre la pétoire, même s’il utilisera finalement plus sa matière grise que le plomb. Une série B sympathique, mais sûrement pas indispensable.

LE BLU-RAY

À l’instar des Écumeurs, Dix hommes à abattre faisait jusqu’à présent partie d’un coffret de 20 westerns précédemment édité par Sidonis Calysta en décembre 2021. Mars 2023, le film de H. Bruce Humberstone est enfin disponible à l’unité, en DVD et combo Blu-ray + DVD dans la collection Silver. Très beau visuel. Le menu principal est animé et musical.

Le premier supplément est une interview d’Edward Buscombe (17’). L’auteur spécialiste du western dresse un formidable portrait de Randolph Scott, expliquant en parallèle pourquoi il s’agit de son acteur préféré du genre, indiquant par exemple qu’il lui trouve « beaucoup de qualités négatives, qui n’est pas flamboyant et ne fait pas d’esbroufe avec ses colts, ni de cascades à cheval, qui est très calme, qui parle peu, qui n’est pas non plus un tombeur ni un playboy, mais qui est toujours respectueux des femmes ». Edward Buscombe commente ensuite Dix hommes à abattre, analyse l’évolution du personnage joué par Randolph Scott et replace le film dans la carrière du comédien.

Jean-François Giré (12’) donne son avis sur Dix hommes à abattre, en dressant tout d’abord le parcours du réalisateur (« intéressant » dixit l’intervenant) H. Bruce Humberstone, avant d’en venir plus précisément à cette série « B+ », en louant la prestation de Randolph Scott, en disséquant les thèmes, en passant le casting eu peigne fin et les séquences les plus réussies. Au final, Jean-François Giré encourage les spectateurs à redécouvrir ce film.

Patrick Brion (9’) passe en revue les grands westerns de l’année 1955 (dont trois films, rien que ça, d’Anthony Mann), puis parle de façon très positive de Dix hommes à abattre, en évoquant la carrière d’H. Bruce Humberstone (« un metteur en scène très habile »), le travail des scénaristes Irving Ravetch et Harriet Frank Jr., le casting, le rôle différent joué par Randolph Scott (dont Patrick Brion a toujours été fan) et les qualités du film.

L’interactivité se clôt sur la bande-annonce (abîmée) de Dix hommes à abattre.

L’Image et le son

Très beau master HD (1080p, AVC) proposé par Sidonis Calysta pour Dix hommes à abattre, anciennement proposé en DVD par Sony Pictures en 2005. Dès la flamme Columbia, la copie affiche un grain argentique fin et très bien géré, une clarté flatteuse, une stabilité appréciable et de très belles couleurs. Certes, quelques décrochages sur les fondus enchaînés sont constatables et divers plans sont plus flous, mais le film de H. Bruce Humberstone n’était jamais apparu aussi pimpant – la propreté est quasi-impeccable – dans nos contrées.

La version originale (aux sous-titres français non imposés) l’emporte sur la piste française au doublage pincé et au souffle chronique. En anglais, l’écoute est claire, frontale et riche, dynamique et vive. Les effets annexes sont plus conséquents sur la version originale que sur la piste française, moins précise.

Crédits images : © Sidonis Calysta / Columbia Pictures / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

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