Test Blu-ray / L’Aigle à deux têtes, réalisé par Jean Cocteau

L’AIGLE À DEUX TÊTES réalisé par Jean Cocteau, disponible en Combo Blu-ray + DVD depuis le 16 septembre 2025 chez Rimini Éditions.

Acteurs : Edwige Feuillère, Jean Marais, Silvia Monfort, Jacques Varennes, W. Edward Stirling, Martine de Breteuil, Maurice Nasil, Gilles Quéant, Ahmed Abdallah, Jean Debucourt…

Scénario : Jean Cocteau, d’après sa pièce

Photographie : Christian Matras

Musique : Georges Auric

Durée : 1h28

Date de sortie initiale : 1948

LE FILM

Veuve depuis l’assassinat de son mari, la reine d’un royaume imaginaire vit recluse dans ses appartements, tandis que sa belle-mère cherche à s’emparer du trône. Un jeune anarchiste fait irruption dans sa chambre, décidé à la tuer. Contre toute attente, ils tombent amoureux l’un de l’autre, et décident de reprendre le pouvoir du royaume.

Avec plus de quatre millions d’entrées, La Belle et la Bête, premier long-métrage de Jean Cocteau, récompensé par le Prix Louis-Delluc 1946, est un triomphe aussi colossal qu’inattendu pour son auteur. Difficile donc de prévoir quel sera son second film, l’artiste touche-à-tout trouvant avec ce nouveau médium l’occasion d’explorer, d’inventer, de s’exprimer autrement sur ses obsessions, ses peurs, sa vision de l’humanité. Il jette finalement et rapidement son dévolu sur l’adaptation cinématographique de sa pièce – en trois actes – L’Aigle à deux têtes, grand succès des planches, qui s’est jouée pendant plus d’un an à guichets fermés et ce dès sa création en décembre 1946 au théâtre Hébertot à Paris. Pièce dite « historique », dans laquelle Jean Cocteau s’inspire de la mort de Louis II de Bavière (aka le roi fou) et celle de sa cousine Élisabeth d’Autriche (aka Sissi), L’Aigle à deux têtes était par essence un huis clos centré sur les liens entrecroisés et inévitables entre l’amour et le trépas. Pour sa transposition à l’écran, le dramaturge aère sa pièce en tournant quelques scènes en extérieur, afin de mieux planter son décor principal, celui du château, perdu au milieu de la campagne et dans lequel la reine vit avec le souvenir de son mari, mort le jour de leurs noces il y a dix ans, avant que le mariage ait pu être consommé. Souvent marqué par de (très) longues plages de dialogues et un manque de rythme, L’Aigle à deux têtes fascine par la prestation d’Edwige Feuillère, qui reprenait alors le rôle qu’elle avait campé sur scène. Il en est de même pour Jean Marais, étonnamment plus sobre que dans Les Parents terribles, qui sera pourtant filmé dans la foulée et sortira trois mois plus tard, fin 1948. Si l’engouement ne sera pas le même que pour celui rencontré avec La Belle et la Bête, L’Aigle à deux têtes remporte un beau succès dans les salles avec 2,4 millions d’entrées.

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Test Blu-ray / Les Parents terribles, réalisé par Jean Cocteau

LES PARENTS TERRIBLES réalisé par Jean Cocteau, disponible en Combo Blu-ray + DVD depuis le 16 septembre 2025 chez Rimini Éditions.

Acteurs : Jean Marais, Josette Day, Yvonne de Bray, Marcel André & Gabrielle Dorziat

Scénario : Jean Cocteau, d’après sa pièce

Photographie : Michel Kelber

Musique : Georges Auric

Durée : 1h36

Date de sortie initiale : 1948

LE FILM

Michel vit chez ses parents, Yvonne et Georges. Sa mère est possessive et jalouse. Au cours d’une nuit passée hors du domicile familial, le jeune homme fait la connaissance de Madeleine, dont il tombe amoureux. Yvonne est bien décidée à s’opposer à cette liaison.

À la base des Parents terribles, il y a bien sûr une pièce de théâtre, créée par Jean Cocteau lui-même dès novembre 1938 au Théâtre des Ambassadeurs à Paris. Un succès public monstre, mais un accueil froid, ou plutôt incendiaire de la part d’une grande partie de la critique, qui s’en prenait avant tout à l’auteur lui-même, qui selon ses dires, s’était beaucoup amusé à écrire une pièce de boulevard. Accompagnée d’un parfum de scandale, la pièce fut finalement interdite sous l’Occupation, sous prétexte qu’elle véhiculait une image immorale de la famille. Dix ans plus tard, après le triomphe international de La Belle et la Bête (4,2 millions d’entrées rien qu’en France) et le succès (moindre) de L’Aigle à deux têtes, Jean Cocteau décide de revenir à ses fameux Parents terribles et décide d’adapter sa pièce au cinéma, en reprenant quasiment le même casting. S’il faut accepter le fait que Jean Marais est désormais âgé de 35 ans, ce qui n’est guère réaliste pour incarner un jeune homme de 22 printemps, Les Parents terribles version grand écran ne s’enferme pas dans le piège du simple théâtre filmé, malgré l’ouverture montrant un rideau baissé et qui se met en mouvement après les fameux trois coups frappés. Jean Cocteau s’éloigne du simple champ-contrechamp et le réalisateur, très à l’aise avec la grammaire cinématographique, use du gros plan, du hors-champ, tout en livrant une vraie leçon de montage, épaulé pour cela par l’experte en la matière, Jacqueline Sadoul (Échec au porteur, La Femme et le pantin, Meurtre à Montmartre). Loin, très loin de ce que les détracteurs habituels de Jean Cocteau ont souvent fustigé, Les Parents terribles n’a rien de poussiéreux dans sa thématique. Certes, le jeu très emphatique de certains comédiens a pris du plomb dans l’aile, celui de Jean Marais surtout, mais l’histoire demeure foncièrement moderne, culottée, étonnante, bouleversante et teintée d’un humour noir à la fois provocateur et revigorant. Assurément l’un des meilleurs films de l’illustre Jean Cocteau et l’un de ses plus faciles d’accès.

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Test Blu-ray / À cheval sur le tigre, réalisé par Luigi Comencini

À CHEVAL SUR LE TIGRE (A cavallo della tigre) réalisé par Luigi Comencini, disponible en Combo Blu-ray + DVD le 14 octobre 2025 chez Tamasa Distribution.

Acteurs : Nino Manfredi, Mario Adorf, Valeria Moriconi, Gian Maria Volontè, Raymond Bussières, Luciana Buzzanca, Ferruccio De Ceresa, Vincenzo Fortunati…

Scénario : Luigi Comencini, Furio Scarpelli, Agenore Incrocci & Mario Monicelli

Photographie : Aldo Scavarda

Musique : Piero Umiliani

Durée : 1h45

Date de sortie initiale : 1961

LE FILM

Giacinto Rossi a été condamné à trois ans de prison pour vol et abus de confiance. Il a presque purgé sa peine quand trois codétenus profitent de son poste d’aide-infirmier pour lui demander de faciliter leur évasion. Giacinto devient leur complice sans savoir ce qu’ils mijotent…

Après l’énorme succès (international) du PigeonI Soliti Ignoti (1958), Age, Scarpelli et Mario Monicelli s’associent avec Luigi Comencini pour écrire À cheval sur le tigreÀ cavallo della tigre (ou comment expliquer qu’il est dangereux d’enfourcher un tigre, mais encore plus d’en descendre puisqu’on prend le risque de se faire bouffer), passerelle entre le cinéma néoréaliste et la comédie à l’italienne. Le cinéaste y dépeint la vie carcérale de manière réaliste, son univers, le quotidien des prisonniers et les cellules surchargées, tout en dressant le portrait d’un pauvre type malchanceux qui croyait avoir trouvé la bonne combine pour sortir sa famille de la panade. Nino Manfredi incarne Giacinto, emprisonné pour avoir simulé sa propre agression. C’était sans compter sur le témoignage d’un pêcheur un peu demeuré qui a assisté à toute la scène et qui le dénonce aussitôt que Giacinto lui demande d’appeler les secours. L’immense acteur italien joue à merveille les multiples facettes que lui offre le rôle de Giacinto, faible, mouchard, trouillard, en un mot un type banal. À cheval sur le tigre est un film drôle mais aussi émouvant et violent, mettant souvent mal à l’aise comme lorsque Giacinto est rossé par ses camarades de prison, cette scène étant d’un réalisme brut et inattendu. En préparant le film, Comencini étudie longuement la vie carcérale et va même jusqu’à rencontrer d’anciens évadés. Prenant le temps d’installer les personnages et l’univers de la prison durant les 50 premières minutes du film, À cheval sur le tigre devient ensuite une grande évasion faite de rapports humains, d’espoirs et de doutes où s’impose sans difficulté l’extraordinaire Nino Manfredi. Dissimulé entre deux monuments de la carrière du maître, La Grande PagailleTutti a casa et Le CommissaireIl commissario, À cheval sur le tigre, qui n’avait guère attiré les spectateurs à sa sortie, sans doute rebutés par la noirceur et la crasse du milieu dépeint, est à juste titre réhabilité depuis une vingtaine d’années.

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Test Blu-ray / La Chambre de Mariana, réalisé par Emmanuel Finkiel

LA CHAMBRE DE MARIANA réalisé par Emmanuel Finkiel, disponible en DVD le 2 septembre 2025 chez Ad Vitam.

Acteurs : Mélanie Thierry, Artem Kyryk, Julia Goldberg, Anastasia Fein, Olena Khokhlatkina, Yona Rozenkier, Olga Radchuk, Minou Monfared…

Scénario : Emmanuel Finkiel, d’après le roman d’Aharon Appelfeld

Photographie : Alexis Kavyrchine

Durée : 2h11

Date de sortie initiale : 2025

LE FILM

1943, Ukraine, Hugo a 12 ans. Pour le sauver de la déportation, sa mère le confie à son amie d’enfance Mariana, une prostituée qui vit dans une maison close à la sortie de la ville. Caché dans le placard de la chambre de Mariana, toute son existence est suspendue aux bruits qui l’entourent et aux scènes qu’il devine à travers la cloison…

À la fin de La Chambre de Mariana, on se dit qu’il serait temps que Mélanie Thierry se voit décerner le César de la meilleure actrice. Elle en a fait du chemin l’Esmeralda de Quasimodo d’El Paris ! La chrysalide a vraiment eu lieu avec Le Dernier pour la route (2009) de Philippe Godeau, pour lequel sa bouleversante prestation lui a valu d’être récompensée par le César de la meilleure actrice dans un second rôle. Aussi rare que précieuse, Mélanie Thierry, qui a ensuite été demandée par Bertrand Tavernier (La Princesse de Montpensier), André Téchiné (Impardonnables), Diane Kurys (Pour une femme), Albert Dupontel (Au revoir là-haut) et même par Terry Gilliam (Zero Theorem) et Spike Lee (Da 5 Bloods : Frères de sang), a également porté de formidables premiers longs-métrages tels que Comme des frères de Hugo Gélin et L’Autre vie de Richard Kemp de Germinal Alvarez. Mais depuis dix ans, sa plus grande collaboration demeure celle avec le réalisateur Emmanuel Finkiel. Ainsi, après l’excellent Je ne suis pas un salaud (2015) et le sublime La Douleur (2018), dans lequel elle incarnait Marguerite Duras, Mélanie Thierry retrouve le cinéaste pour La Chambre de Mariana, adaptation du roman, chef d’oeuvre de l’écrivain israélien Aharon Appelfeld, publié en 2006 et plus ou moins inspiré de la vie de l’auteur. Emmanuel Finkiel, même s’il s’était juré de ne pas refaire un film sur la Shoah, a vu des liens avec sa propre existence et a décidé de faire La Chambre de Mariana, que l’on peut désormais voir comme le dernier volet d’une trilogie, ou plutôt d’un triptyque aux côtés de Voyages et La Douleur. Et c’est à nouveau une immense et extraordinaire réussite.

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Test Blu-ray / Monte Walsh, réalisé par William A. Fraker

MONTE WALSH réalisé par William A. Fraker, disponible en DVD & Combo Blu-ray + DVD le 18 septembre 2025 chez Sidonis Calysta.

Acteurs : Lee Marvin, Jeanne Moreau, Jack Palance, Mitch Ryan, Jim Davis, G.D. Spradlin, John Hudkins, Raymond Guth…

Scénario : David Zelag Goodman & Lukas Heller, d’après le roman de Jack Schaefer

Photographie : David M. Walsh

Musique : John Barry

Durée : 1h39

Date de sortie initiale : 1970

LE FILM

Les temps changent dans l’Ouest américain. Monte Walsh et Chet Rollins, deux cow-boys au passé mouvementé, se retrouvent au chômage et seuls. Ils acceptent de petit jobs au gré de leur vagabondage. Ils épousent respectivement une prostituée et la veuve d’un quincaillier. Alors que plus personne n’a besoin du travail des cow-boys, ils vont devoir trouver leur place dans le monde…

C’est la fin d’un siècle, d’une ère, d’un monde. Monte Walsh est un western crépusculaire adapté d’un roman de Jack Schaefer (La Loi de la prairie de Robert Wise, L’Homme des vallées perdues de George Stevens) et réalisé par William A. Fraker (1923-2010). Sil s’agit de son premier long-métrage comme metteur en scène, celui-ci n’est pas un inconnu, puisqu’il est avant tout le directeur de la photographie de plusieurs classiques du cinéma comme Rosemary’s Baby de Roman Polanski, Bullitt de Peter Yates, et plus tard de 1941 de Steven Spielberg, Les Aventures d’un homme invisibleMemoirs of an Invisible Man de John Carpenter et même de – accrochez-vous – de Street Fighter – L’ultime combat de Steven E. de Souza. Autant dire que le bonhomme a un œil. En 1970, il devient donc réalisateur, s’empare d’un scénario en or coécrit par David Zelag Goodman (Les Yeux de Laura Mars, L’âge de cristal) et Lukas Heller (Les Douze Salopards, Le Vol du Phénix, Chut…chut, chère Charlotte) et livre un magnifique western (tardif), qui peut à la fois se voir comme une parabole sur la fin d’un genre à part entière, mais aussi sur celle d’un cinéma révolu, qui a alors laissé sa place au Nouvel Hollywood, avant l’arrivée du premier blockbuster représenté par Les Dents de la mer Jaws de Steven Spielberg qui pointera son museau cinq ans plus tard. Mais on peut aussi y déceler un fabuleux portrait de Lee Marvin, qui tient le rôle-titre, représentant, figure, gueule de tout un univers. Durant les années 1960, le comédien aura tout de même collaboré avec Michael Curtiz, John Ford (à plusieurs reprises), Don Siegel, Elliot Silverstein, Stanley Kramer, Richard Brooks, Robert Aldrich et John Boorman. Un C.V. qui ferait plus d’un envieux et dans lequel il n’y a absolument rien à jeter. La cinquantaine en ligne de mire, Lee Marvin commence à se diriger vers les rôles de vétérans et Monte Walsh est assurément un film pivot dans son illustre carrière. À ne rater sous aucun prétexte.

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Test DVD / Les Indomptés, réalisé par Daniel Minahan

LES INDOMPTÉS (On Swift Horses) réalisé par Daniel Minahan, disponible en DVD le 18 septembre 2025 chez Metropolitan Film & Video.

Acteurs : Daisy Edgar-Jones, Jacob Elordi, Will Poulter, Diego Calva, Sasha Calle, Don Swayze, Ryan Fitzgerald, Andrew Keenan-Bolger…

Scénario : Bryce Kass, d’après le roman Shannon Pufalhl

Photographie : Luc Montpellier

Musique : Mark Orton

Durée : 1h53

Date de sortie initiale : 2024

LE FILM

Muriel et son mari Lee démarrent une nouvelle vie en Californie lorsqu’il revient de la guerre de Corée. Rapidement, l’équilibre de leur couple va être bouleversé par l’arrivée du charismatique Julius, le frère de Lee, un flambeur au passé secret. Un triangle amoureux se forme. Mais Julius décide de suivre Henry, un jeune joueur de cartes dont il est tombé amoureux. Ébranlée par ce départ et plus éprise d’indépendance que jamais, Muriel trouve un exutoire dans les courses de chevaux et l’exploration d’un amour qu’elle n’aurait jamais osé imaginer…

L’ombre de Douglas Sirk et celle de Todd Haynes planent sur Les IndomptésOn Swift Horses, réalisé par Daniel Minahan, essentiellement connu pour son colossal travail à la télévision, sur des séries aussi prestigieuses que The L Word, Six Feet under, Deadwood, Grey’s Anatomy, True Blood, Game of Thrones, House of Cards et bien d’autres. Cela faisait quasiment un quart de siècle que le cinéaste n’avait rien signé pour le grand écran, depuis son premier long-métrage en fait (Series 7 : The Contenders), et il revient par la grande porte, avec un casting exceptionnel, en adaptant le premier roman de Shannon Pufahl, publié en 2019. Cette relecture du rêve américain se penche sur le « modèle » familial prôné par l’Oncle Sam, la définition du foyer, questionne la notion du désir, les ambitions et surtout l’identité sexuelle. Daniel Minahan focalise son action à la marge de l’Amérique profonde – dans les casinos, les circuits hippiques, les lieux de drague et les bars-hôtels gays, tandis que la guerre de Corée connaît ses dernières heures. Sur un solide scénario écrit par Bryce Kass (remarqué avec Lizzie de Craig William Macneill), le metteur en scène livre un fabuleux drame qui fait la part belle au romanesque, partis-pris que certains trouveront démodés, mais que Daniel Minahan embrasse pleinement, pour au final signer une peinture bouleversante de la face cachée des États-Unis après la Deuxième Guerre mondiale.

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Test Blu-ray / Hurry Up Tomorrow, réalisé par Trey Edward Shults

HURRY UP TOMORROW réalisé par Trey Edwards Shults, disponible en DVD & Édition Collector Limitée Blu-ray+DVD+Livret le 18 septembre 2025 chez Metropolitan Film & Video.

Acteurs : Abel Tesfaye, Jenna Ortega, Barry Keoghan, Riley Keough, Ash T, Paul L. Davis, Sebastián Villalobos, Roman Mitichyan…

Scénario : Reza Fahim, Trey Edward Shults & Abel Tesfaye

Photographie : Chayse Irvin

Musique : The Weeknd & Daniel Lopatin

Durée : 1h45

Date de sortie initiale : 2025

LE FILM

Abel, une star de la musique, est entraîné par une de ses fans dans une odyssée qui l’amènera à remettre en question les fondements mêmes de son existence.

Voilà sans doute l’un des films les plus critiqués (négativement) de l’année 2025, Hurry Up Tomorrow, réalisé par Trey Edward Shults, que l’on avait découvert en 2017 avec It Comes at Night, œuvre post-apocalyptique maîtrisée, ambitieuse, qui révélait un auteur prometteur. Six ans après son précédent long-métrage, Waves, le metteur en scène est de retour avec Hurry Up Tomorrow, titre identique au sixième album de l’artiste The Weeknd, alias Abel Makkonen Tesfaye, célèbre dans le monde entier pour son tube Blinding Lights, devenu la chanson la plus écoutée de tous les temps sur Spotify. Le film et le disque sortent donc à quelques semaines d’intervalle, beau coup marketing, qui prolonge l’expérience musicale, à travers un faux biopic inspiré d’une histoire vraie. Le chanteur « interprète » une version alternative de lui-même et donne la réplique à Jenna Ortega, dans ce thriller psychologique que beaucoup ont gratuitement qualifié de simple et gênant ego trip. On ne va pas nier qu’il y a de cela effectivement, mais réduire Hurry Up Tomorrow à ce simple argument est on ne peut plus facile. Trey Edward Shults, en parfaite harmonie avec Abel Tesfaye, a concocté un véritable essai de cinéma, un roller-coaster visuel et d’émotions, qui plonge le spectateur dans la psyché perturbée d’une superstar de la chanson, qui se retrouve pour la première fois face à lui-même après un accident survenu sur scène. Si la minisérie The Idol, excessivement mal accueillie et qui ne connaîtra d’ailleurs qu’une seule saison, avait montré qu’il en avait sérieusement sous le capot en tant qu’acteur, Abel – The Weeknd – Tesfaye crève l’écran dans Hurry Up Tomorrow. Son face-à-face avec Jenna Ortega, pour une fois supportable, fonctionne à plein régime et on se laisse facilement embarquer dans ce ride survitaminé qui par sa mise en scène mouvementée et inventive, ainsi que par sa splendide photographie signée Chayse Irvin (BlacKkKlansman – J’ai infiltré le Ku Klux Klan), fait penser à une attraction. On en ressort aussi retourné que rassasié. Il est impératif de donner une deuxième chance à Hurry Up Tomorrow, nouvelle production de ceux déjà à la barre de la trilogie XPearlMaXXXine.

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Test Blu-ray / Hot Milk, réalisé par Rebecca Lenkiewicz

HOT MILK réalisé par Rebecca Lenkiewicz, disponible en DVD & Blu-ray le 16 octobre 2025 chez Metropolitan Film & Video.

Acteurs : Emma Mackey, Fiona Shaw, Vicky Krieps, Vincent Perez, Yann Gael, Patsy Ferran, Korina Gougouli, Denia Mimerini…

Scénario : Rebecca Lenkiewicz, d’après le roman de Deborah Levy

Photographie : Christopher Blauvelt

Musique : Matthew Herbert

Durée : 1h33

Date de sortie initiale : 2025

LE FILM

Une mère et sa fille débarquent de Grande-Bretagne dans le sud-est de l’Espagne pour un séjour de la dernière chance. La mère, Rose, en fauteuil roulant, a rendez-vous avec un spécialiste pour tenter de retrouver la motricité de ses jambes, qui lui font de plus en plus mal. Sofia, sa fille, l’accompagne, jouant les garde-malades, mais désireuse de s’adonner à quelques activités balnéaires. Sur la plage, celle-ci fait la rencontre d’Ingrid, une énigmatique touriste allemande aux mœurs particulièrement libres…

Scénariste reconnue (Ida de Pawel Pawlikowski, Désobéissance de Sebastián Lelio, Colette de Wash Westmoreland), Rebecca Lenkiewicz passe pour la première fois derrière la caméra avec Hot Milk. Derrière ce titre énigmatique, on trouve l’adaptation du roman éponyme de Deborah Levy, publié en 2016, livre dans lequel la nouvelle réalisatrice a trouvé les thèmes qu’elle souhaitait aborder et sensations qu’elle voulait transmettre à l’écran. Hot Milk au cinéma est une véritable expérience sensorielle, contemplative, marquée par une photographiée solaire, étouffante, presque anxiogène, qui reflète les états d’âme du personnage principal, Sofia. Cette dernière est interprétée par une comédienne qui a désormais le vent en poupe, la franco-britannique Emma Mackey, récemment auréolée du BAFTA de la « star montante ». Après son grand succès rencontré à la télévision avec la série Sex Education, le cinéma lui ouvre désormais les bras et les projets s’accumulent. Ainsi, après les blockbusters Eiffel de Martin Bourboulon et Mort sur le Nil – Death on the Nile de Kenneth Branagh et Barbie de Greta Gerwig, Emma Mackey est à l’affiche de trois films en 2025. Alpha De Julia Ducournau, Hot Milk donc et campera le rôle-titre de Ella McCay, qui signe le grand retour de James L. Brooks au cinéma, quinze ans après Comment savoir – How Do You Know. Avant de la retrouver aussi dans le prochain délire de Quentin Dupieux (Full Phil, avec Kristen Stewart et Woody Harrelson) et le reboot-remake des Chroniques de Narnia, Emma Mackey illumine Hot Milk, dans lequel son charisme sauvage, entre Charlotte Gainsbourg et Asia Argento, fait fureur. Derrière ce masque tendu, Sofia dissimule un ras-le-bol, comme si elle était déjà fatiguée de vivre. Sa mère, malade « imaginaire » lui rend la vie impossible, la rabaisse, la critique et ne peut pourtant s’empêcher de lui demander constamment son aide. L’arrivée en Espagne pour un grand rendez-vous médical, va bouleverser à la fois les repères de Sofia, mais aussi ses sentiments, quand elle rencontre l’énigmatique Ingrid. Hot Milk demande aux spectateurs de se laisser aller, de se laisser porter par l’émotion, l’érotisme qui se dégage de chaque apparition d’Emma Mackey, où la sensualité redouble quand elle est rejointe par Vicky Krieps, qui n’ayons pas peur des mots peut aisément être considérée aujourd’hui comme l’une des plus grandes comédiennes contemporaines. Alors, installez-vous et découvrez Hot Milk.

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Test DVD / Une pointe d’amour, réalisé par Maël Piriou

UNE POINTE D’AMOUR réalisé par Maël Piriou, disponible en DVD le 3 septembre 2025 chez Pathé.

Acteurs : Julia Piaton, Grégory Gadebois, Quentin Dolmaire, Florence Viala, Claude Guyonnet, Louis Meignan, Aude Léger, Roc Esquius…

Scénario : Maël Piriou, d’après le scénario du film Hasta la Vista coécrit par Pierre De Clercq & Mariano Vanhoof

Photographie : Guillaume Schiffman

Musique : Pascal Sangla

Durée : 1h20

Date de sortie initiale : 2025

LE FILM

Suite à la découverte d’une maladie incurable, Mélanie, avocate, fait le choix de profiter de la vie. Elle embarque son ami Benjamin dans une odyssée en Espagne, pour explorer enfin leur sensualité dans une maison close. Elle emploie Lucas, fraîchement sorti de taule, comme conducteur. Lucas, avec son van de guingois, fait le voyage un peu forcé. Contrairement à Mélanie, Benjamin ne semble pas pressé d’arriver et fait d’ailleurs tout pour prolonger cet improbable voyage à ses côtés…

Encore un premier long-métrage français qui a débarqué dans les salles. Il s’agit d’Une pointe d’amour de Maël Piriou, ancien journaliste, entré dans le monde du cinéma en concoctant quelques documentaires sur les tournages (Bonne pomme, Demain tout commence), avant de devenir scénariste (l’excellent À trois on y va de Jérôme Bonnell). Pour Une pointe d’amour, il réunit un très beau trio de comédiens, Julia Piaton, Grégory Gadebois et Quentin Dolmaire, qui participent beaucoup à la jolie réussite du film, qui d’ailleurs au passage s’avère – une fois de plus – un remake, non pas d’une œuvre sud-américaine comme c’est souvent le cas dans nos contrées, mais d’un film flamand, Hasta la Vista de Geoffrey Enthoven. Ce dernier avait connu un beau succès en France en 2012 avec plus de 120.000 entrées. Mais Maël Piriou transforme beaucoup de choses, les personnages principaux tout d’abord. Dans le film original, il s’agissait de trois jeunes d’une vingtaine d’années, handicapés (un aveugle, un second confiné sur une chaise roulante, le troisième complètement paralysé), encore vierges, qui sous prétexte d’aller faire la route des vins, prenaient en fait la direction de l’Espagne avec l’espoir d’y vivre leur première expérience sexuelle. Dans Une pointe d’amour, il se focalise sur deux trentenaires, qui envisagent le même projet que dans Hasta la Vista, mais accompagnés cette fois par un type paumé qui sera leur chauffeur. Évidemment, les relations ne sont pas aisées au départ, mais les trois compagnons de route apprendront enfin à lâcher du lest, à se confier, sur leurs désirs, leurs peurs aussi, leurs espoirs. Une pointe d’amour est un bon divertissement, un feel-good movie qui manque sans doute d’audace, mais pas de coeur.

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Test Blu-ray / Un escargot dans la tête, réalisé par Jean-Étienne Siry

UN ESCARGOT DANS LA TÊTE réalisé par Jean-Étienne Siry, disponible en Blu-ray chez Le Chat qui fume.

Acteurs : Florence Giorgetti, Renaud Verley, Jeanne Allard, Jean-Claude Bouillon, Marcel Gassouk, Charles Dubois, Hélène Hily, Rose Thiéry…

Scénario : Jean-Étienne Siry

Photographie : François About

Musique : Didier Vasseur

Durée : 1h16

Date de sortie initiale : 1980

LE FILM

Hélène Gallois traverse une période de dépression à la suite de son divorce. Lors de son séjour dans une clinique spécialisée, elle fait la connaissance d’Édouard Fournier, artiste peintre en proie à l’alcoolisme. Une amitié naît entre eux et ils décident de séjourner dans une ferme appartenant à Édouard. Cependant, l’ambiance oppressante du lieu ravive leurs traumatismes passés, les confrontant à leurs propres démons intérieurs.

« Entre le rêve et la réalité, il existe une frontière que personne ne devrait jamais franchir… ». Ainsi débute Un escargot dans la tête, dernier long-métrage et par ailleurs ultime film de Jean-Étienne Siry (1940-2019). Ce dernier est surtout connu pour son premier court, le légendaire Poing de force (1976), œuvre sur le sadomasochisme, provenant en réalité du banc de montage de Mâles Hard Corps, que le réalisateur avait signé la même année avec Norbert Terry. Si son nom ne vous dit rien, il en est tout autre pour son travail. Car si vous n’avez pas encore vu Poing de force, vous connaissez les affiches de cinéma dont il est le créateur : Les Tontons flingueurs, Les Monstres, La Tulipe Noire, Le Corniaud, Quoi de neuf, Pussycat ?, Bunny Lake a disparu, Les Centurions, La Carapate…tous ces visuels entrés dans la conscience des spectateurs et cinéphiles sont l’oeuvre de Jean-Étienne Siry. Ce dernier passe une dernière fois derrière la caméra pour Un escargot dans la tête, titre ô combien giallesque, qui n’est autre qu’un remarquable drame psychologique sur le thème de la dépression et celui du trauma. Cet Objet Filmique Non-Identifié sorti en 1980, repose sur l’intense interprétation d’une comédienne aujourd’hui complètement oubliée, Florence Giorgetti (1943-2019), qui passait sa vie professionnelle sur les planches (pendant près d’un demi-siècle), à la télévision et bien sûr au cinéma (Massacre pour une orgie, La Grande Bouffe), tout en prêtant parfois sa voix singulière à Vanessa Redgrave, Anne Bancroft, Susan Sarandon…Dans Un escargot dans la tête, elle incarne magistralement Hélène, internée après avoir mélangé alcool et barbituriques, suite à un divorce malheureux. Dans l’établissement psychiatrique, elle fait la connaissance d’un jeune homme, qui lui aussi a de nombreuses plaies à panser…La suite ? Il vous faudra la découvrir sans trop divulguer ce qui se déroule, tant Jean-Étienne Siry ne cesse d’emmener les spectateurs là où ils s’y attendent le moins. Avec cette ressortie inattendue en 2025 et en Haute-Définition chez Le Chat qui fume, Un escargot dans la tête est non seulement une des expériences les plus originales que vous verrez cette année, mais aussi une véritable expérience de cinéma, dont l’audace manque cruellement au septième art hexagonal contemporain.

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