NOS MEILLEURES ANNEES (La Meglio Gioventù) réalisé par Marco Tullio Giordana, disponible en Blu-ray et DVD le 2 novembre 2016 chez Pyramide Vidéo
Acteurs : Luigi Lo Cascio, Alessio Boni, Adriana Asti, Sonia Bergamasco, Fabrizio Gifuni, Maya Sansa, Jasmine Trinca, Riccardo Scamarcio…
Scénario : Sandro Petraglia, Stefano Rulli
Photographie : Roberto Forza
Durée : 6h00
Date de sortie initiale : 2003
LE FILM
A la fin des années soixante, deux frères d’une famille italienne, Nicola et Matteo, partagent les mêmes rêves, les mêmes espoirs, les mêmes lectures et les mêmes amitiés, jusqu’au jour où la rencontre avec Giorgia, une jeune fille souffrant de troubles psychiques, détermine le destin de chacun : Nicola décide de devenir psychiatre, alors que Matteo abandonne ses études et entre dans la police. Leur parcours ainsi que celui du reste de leur famille s’inscrit en parallèle avec les événements qui ont joué un rôle crucial dans l’histoire de l’Italie : l’inondation de Florence, la lutte contre la mafia en Sicile, les grands matchs de football de l’équipe nationale…
C’est l’oeuvre de toute une vie. Trois ans après Les Cent pas – I Cento passi, Prix du meilleur scénario au Festival de Cannes, le réalisateur italien Marco Tullio Giordana se voit proposer Nos meilleures années – La Meglio Gioventù, commande de la Rai écrite par Sandro Petraglia (Bianca et La Messe est finie de Nanni Moretti) et Stefano Rulli (Les Clefs de la maison, Romanzo Criminale). Mis en scène à l’origine pour la télévision, ce film-fleuve de six heures est ensuite scindé en deux parties, deux époques distinctes et exploité ainsi dans les cinémas du monde entier. Plus de dix ans après sa sortie, Nos meilleures années est devenu un vrai film culte.
Le succès critique et public a été instantané et ne s’est jamais démenti. Dans Nos meilleures années, le cinéaste retrace 40 ans de l’histoire italienne, de 1966 au début des années 2000, en suivant une famille romaine, et plus particulièrement le destin de deux frères, Matteo (Alessio Boni) et Nicola (Luigi Lo Cascio). La vie va les opposer suite à leur rencontre avec Giorgia (Jasmine Trinca, révélation de La Chambre du fils, Palme d’or d’Or 2001), une jeune femme fragile dont ils tombent tous les deux amoureux. Un jour, Matteo, qui vient d’abandonner son examen de littérature et qui trouve un emploi en tant qu’accompagnateur de personnes handicapées mentales, décide « d’enlever » Giorgia, une patiente d’un institut psychiatrique où elle subit des électrochocs, pour la ramener chez elle, dans sa famille. Il entreprend le voyage avec Nicola. Les trois se retrouvent sur la route, mais Giorgia est finalement récupérée par la police. Cet événement va précipiter la rupture entre les deux frères. Matteo ne s’adaptera jamais et passera sa vie, à laquelle il mettra fin tragiquement, à fuir sa famille, les femmes et l’attachement, en se consacrant à son travail. Le film suit cette famille sur quatre décennies marquées par les soubresauts politiques et sociaux en Italie : la mobilisation de la jeunesse suite aux inondations de Florence, l’affaiblissement du mouvement ouvrier, les avancées de la psychiatrie, les années de plomb et les Brigades rouges, les ravages de la mafia en Sicile avec notamment l’assassinat du juge Falcone en 1992.
Lauréat du Prix Un certain regard au Festival de Cannes, Nos meilleures années demeure un monument du cinéma italien et s’avère toujours aussi bouleversant. Véritable miracle extrait d’un cinéma devenu l’ombre de lui-même, La Meglio Gioventù est une œuvre romanesque, qui n’est pas sans rappeler Nous nous sommes tant aimés d’Ettore Scola, mais qui parvient à s’affranchir de cette immense référence à travers les portraits de ses personnages. Ces derniers s’avèrent tous attachants, merveilleusement interprétés, n’oublions pas Adrianna Asti, Sonia Bergamasco, Fabrizio Gifuni, Maya Sansa, Valentina Carnelutti, certains portés par leurs idéaux, d’autres qui s’en trouvent au contraire déçus, à l’instar de Matteo, élève brillant promis à un grand avenir, qui décidera de tout plaquer pour s’engager dans l’armée puis dans la police. Son frère Nicola, décide lui de devenir psychiatre et thérapeute, après avoir vécu sa vie d’étudiant derrière les barricades en 1968.
Nos meilleures années agit comme si un arbre généalogique s’incarnait devant nos yeux. Une branche en emmène à une autre, d’un personnage à l’autre, tout en étant rattachée à l’ensemble. Vertigineux, le récit dense et virtuose qui entrecroise la grande histoire avec celle des protagonistes, nous transporte à Rome en été 1966 à Turin en février 1968, puis en un plan au printemps 1974, Palerme en été 1977, Turin en été 1982, Palerme dix ans plus tard, jusqu’à 2003. Sans caricature, La Meglio Gioventù, titre tiré d’un recueil de poèmes de Pier Paolo Pasolini et inspiré des propres souvenirs des deux scénaristes, est un témoignage indispensable, une fresque entre rires et larmes, passionnée et passionnante, universelle et intemporelle, dont la fin laisse littéralement en miettes. Nos meilleures années est un film que l’on garde dans le coeur. Magnifique.
LE DVD
Le test du coffret DVD de Nos meilleures années, disponible chez Pyramide Vidéo, a été réalisé à partir d’un check-disc. A l’instar de la précédente édition sortie chez Océan en 2004, celle-ci se compose de deux DVD consacrés aux deux actes de trois heures du film, puis d’une troisième galette consacrée aux suppléments. Le menu principal de chaque DVD est identique, animé et musical.
Cette nouvelle édition est annoncée avec un supplément inédit. Certes, mais en dehors du making of d’époque que nous retrouvons ici, tous les autres bonus se sont faits la malle ! Un comble ! Exit les interviews du producteur Angelo Barbagallo, celle du scénariste Stefano Rulli, les bio-filmographies, la bande-annonce, l’arbre généalogique de la famille Carati, les clips représentant chaque décennie et même l’interview d’époque de Marco Tullio Giordana !
A la place, nous trouvons un entretien (en français) avec ce dernier réalisé le 23 juin 2016, pour cette nouvelle édition. Marco Tullio Giordana raconte son coup de foudre – même si le défi lui a d’abord fait peur – à la lecture du scénario qui lui avait été remis par Sandro Petraglia et Stefano Tulli : « C’était comme si je l’avais écrit, nous sommes de la même génération, nous avons vécu les mêmes expériences, entendu la même musique du temps ». Pour raconter la vie de ces hommes et femmes dans la grande histoire italienne, le cinéaste n’avait qu’une exigence, être totalement libre sur le choix des comédiens. Si le film a été tourné initialement pour la télévision italienne en quatre parties d’1h30, il a été présenté à Cannes dans la sélection Un Certain regard, point de départ de l’extraordinaire succès international du film. Le réalisateur se souvient de projections au Japon ou en Chine, où cette histoire , pourtant ancrée dans la vie italienne, a touché le public.
Le making of repris de la précédente édition (10’) est illustré par de (trop) nombreux extraits du film et des propos du réalisateur, des comédiens. Chacun revient sur l’histoire, les personnages et les thèmes.
L’Image et le son
Pyramide Vidéo annonce que le film a été remasterisé. A l’origine, les prises de vue de Nos meilleures années ont été réalisées en 16 mm, puis le film a été transféré sur support numérique pour sa diffusion à la télévision. A l’occasion de sa projection au Festival de Cannes, l’ensemble a été gonflé en 35 mm à partir du support numérique. Autant dire que l’image originale a quelque peu morflée et en toute honnêteté, le master de la présente édition ne change pas beaucoup par rapport au précédent. Les moirages et fourmillements demeurent, la définition reste aléatoire, tout comme la gestion du grain. Mais la copie est heureusement claire et lumineuse, propre, avec des couleurs qui flattent souvent les rétines. Le piqué est peut-être un peu doux, mais rappelons que le film a été tourné il y a presque quinze ans déjà et le résultat final ne saurait rivaliser avec la définition d’un film plus récent.
Les pistes française et italienne Dolby Digital 5.1 demeurent facultatives, mais quelques sensibles ambiances naturelles parviennent à poindre sur les enceintes latérales, tout comme la bande son composée de multiples chansons qui reflètent les années où se déroule l’intrigue. Si certains dialogues manquent parfois de mordant, les frontales assurent un bon confort acoustique. Privilégiez évidemment la version originale, aux sous-titres français imposés, de fort bon acabit, dynamique et précise, bénéficiant d’une large ouverture des enceintes. Le changement de langue est verrouillé.
Crédits images : © Pyramide Vidéo / Captures du DVD : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr