LE TABLEAU VOLÉ réalisé par Pascal Bonitzer, disponible en DVD & Blu-ray le 3 septembre 2024 chez Pyramide Vidéo.
Acteurs : Alex Lutz, Léa Drucker, Nora Hamzawi, Louise Chevillotte, Arcadi Radeff, Laurence Côte, Alain Chamfort, Céline Karter…
Scénario : Pascal Bonitzer
Photographie : Pierre Milon
Musique : Alexei Aigui
Durée : 1h28
Date de sortie initiale : 2024
LE FILM
André Masson, commissaire-priseur dans la célèbre maison de ventes Scottie’s, reçoit un jour un courrier selon lequel une toile d’Egon Schiele aurait été découverte à Mulhouse chez un jeune ouvrier. Très sceptique, il se rend sur place et doit se rendre à l’évidence : le tableau est authentique, un chef-d’œuvre disparu depuis 1939, spolié par les nazis. André voit dans cet événement le sommet de sa carrière, mais c’est aussi le début d’un combat qui pourrait la mettre en péril. Heureusement, il va être aidé par son ex-épouse et collègue Bertina, et par sa fantasque stagiaire Aurore…
Quasiment dix ans après Tout de suite maintenant, Pascal Bonitzer aborde un nouvel « univers », celui du marché de l’art, autre monde peuplé de requins, comme celui de la finance. Désireux de saisir l’esprit d’une époque dans chacun de ses films, le réalisateur et prolifique scénariste (chez Raoul Ruiz, André Téchiné, Barbet Schroeder, Jacques Rivette, Chantal Akerman, Benoît Jacquot, Jacques Deray, Anne Fontaine et Pascal Thomas), s’il s’était permis une petite parenthèse quasi-inclassable dans sa filmographie avec le superbe Les Envoûtés en 2019, dirige de formidables comédiens et s’inspire cette fois d’une histoire vraie. Celle liée aux Tournesols fanés, oeuvre réalisée par Egon Schiele en 1914 et inspirée des Tournesols de Vincent van Gogh (que le peintre avait découvert en 1906), tableau disparu en 1942, qui a miraculeusement fait sa réapparition en 2003 dans le pavillon d’un jeune ouvrier chimiste de la banlieue de Mulhouse. Celui-ci devait être ensuite vendu en 2005 pour la coquette somme de 17 millions d’euros. Cependant, si le sujet est forcément passionnant, Le Tableau volé n’a pas le même charme que le précédent, et encore moins de Cherchez Hortense (2012) et de Tout de suite maintenant (2015). En éclatant sa distribution, le cinéaste part un peu dans tous les sens et les fils ont parfois du mal à se rejoindre, quand bien même les personnages sont tous bien écrits et dépeints. Mais Pascal Bonitzer n’a cette fois pas bénéficié du concours d’Agnès de Sacy au scénario, contrairement à ses trois derniers longs-métrages, et cela se ressent à plusieurs reprises. Comme en cuisine, il manque à l’ensemble un « appareil » pour consolider le tout, assez lâche, même si les ingrédients sont quand même bon en bouche. Le cinéma de Pascal Bonitzer demeure une valeur sûre.
Mine de rien, le réalisateur a peu tourné avec à peine dix films à son actif en près de trente ans de carrière comme metteur en scène. Mais la qualité a toujours été au rendez-vouschez l’ancien critique aux Cahiers du cinéma et avant tout scénariste depuis les années 1970. S’il n’a jamais pu renouer avec le succès de Rien sur Robert (600.000 entrées) en 1999, à part avec Cherchez Hortense qui a failli lui damer le pion, Pascal Bonitzer a toujours continué sur sa lancée. Dans Le Tableau volé, les personnages ne sont pas vraiment ce qu’on pourrait qualifier de sympathiques. André, commissaire-priseur chez Scottie’s, excellemment incarné par un Alex Lutz très en forme (et dans un de ses meilleurs rôles à ce jour), est un type revanchard venu de province, qui a tout fait pour grimper les échelons et s’élever socialement, qui n’hésite pas à avouer que « dans 99 % de ce métier, on drague, on fait la pute », avant d’aller garer son Aston Martin au garage et de glisser soigneusement sa grosse montre dans son écrin, qui en contient d’ailleurs bien d’autres. Aurore (merveilleuse Louise Chevillotte, révélée dans L’Amant d’un jour de Philippe Garrel, revue dans Benedetta), la secrétaire d’André, est une jeune femme froide en apparence, mais hyper-sensible, qui parvient à s’en sortir dans sa vie professionnelle et personnelle en mentant à son entourage, y compris à son père (Alain Chamfort, beaucoup d’élégance). Il y a aussi Bertina, experte chez Scottie’s, une fois de plus magistralement interprétée par Léa Drucker (la classe et le talent d’une Deneuve), ex-compagne d’André et qui ne vit que pour son métier. Le reste du casting réunit aussi Nora Hamzawi (décidément très demandée et jolie présence), Arcadi Radeff (belle découverte, aperçu dans Passages d’Ira Sachs), sans oublier la participation de Laurence Côte, du génial Olivier Rabourdin et Marisa Borini dans la scène d’exposition (peut-être la meilleure).
Le Tableau volé vaut donc finalement plus pour ses personnages, que pour son récit, qui étrangement passe au second plan et ne sert qu’au point de départ de toutes les interactions. La photo de Pierre Milon (Et la fête continue !, Twist à Bamako, Profession du père) est un peu trop passe-partout et fait penser à un téléfilm de luxe, le montage est sans doute platounet, mais la force des comédiens et des dialogues emportent facilement l’adhésion au final. Dernière chose, Le Tableau volé est dédié à Sophie Fillières, disparue en 2023, réalisatrice, scénariste, ancienne compagne de Pascal Bonitzer et mère de leur fille Agathe.
LE DVD
Après Blaq Out, Ad Vitam et France. TV Distribution qui s’étaient occupés du service après-vente de ses derniers films, Le Tableau volé de Pascal Bonitzer débarque chez Pyramide Vidéo, en DVD et Blu-ray. Le visuel reprend logiquement celui de l’affiche d’exploitation, dessinée par Floc’h, qui s’était déjà occupé de celles du Grand alibi, Cherchez Hortense et Tout de suite maintenant. Le menu principal est animé et musical.
Outre la bande-annonce, nous trouvons un entretien avec Pascal Bonitzer, mené par Philippe Rouyer (27’). Une interview qui manque de rythme, sans doute en raison des questions peu recherchées et qui ont parfois l’air d’ennuyer le réalisateur. On en apprend tout de même sur la genèse du film (« assez inhabituel » dit-il, car en fait une commande du producteur Saïd Ben Saïd), l’histoire vraie à l’origine du Tableau volé, la création des personnages, sur ses recherches concernant le monde du marché de l’art, sa collaboration avec les comédiens et le directeur de la photographie Pierre Milon, la création de l’affiche par Floc’h et le choix du titre.
L’Image et le son
L’éditeur se rattrape sur la qualité technique et force est de constater que le rendu du master est superbe ! La colorimétrie est vive et chatoyante, les teintes chaudes et froides s’allient avec homogénéité, le piqué est acéré. Le cadre fourmille de détails, l’on se régale des séquences extérieures d’une belle clarté. Relief, précision, richesse des contrastes, définition au top, un vrai sans-faute.
Immersion totale que cette piste Dolby Digital 5.1 qui offre un confort sonore dynamique et un bel écrin acoustique. Les dialogues sont exsudés avec force par la centrale, la balance frontale est ardente et les ambiances en extérieur ne sont jamais oubliées. La piste stéréo est également impressionnante et propose un confort suffisant pour qui n’est pas équipé en 5.1. L’éditeur joint les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant, ainsi qu’une piste en audiodescription.