Test DVD / La Gravité, réalisé par Cédric Ido

LA GRAVITÉ réalisé par Cédric Ido, disponible en DVD le 6 septembre 2023 chez Blaq Out.

Acteurs : Max Gomis, Jean-Baptiste Anoumon, Steve Tientcheu, Olivier Rosemberg, Thierry Godard, Hafsia Herzi, Bilel Chegrani, Djilane Diawara…

Scénario : Jeanne Aptekman, Melisa Godet & Cédric Ido

Photographie : David Ungaro

Musique : Evgueni Galperine Sacha Galperine

Durée : 1h23

Année de sortie : 2023

LE FILM

Dans une cité en banlieue parisienne, une bande d’adolescents, qui s’appelle les Ronins, gère le trafic de drogue après s’être débarrassé des « anciens ». Alors qu’un alignement de planètes à venir rend le ciel rouge, Christophe, un des anciens, sort de prison et revient dans la cité, où il retrouve des amis d’enfance, Daniel et Joshua, et découvre que les choses ont bien changé en son absence…

C’est un film étrange, qui peut laisser perplexe, dubitatif, et pourtant La Gravité, second long-métrage de Cédric Ido est sans doute l’une des propositions de cinéma les plus intéressantes et même ambitieuses de 2023. En combinant à la fois le film d’auteur et le divertissement populaire, le réalisateur parvient à sensibiliser le public sur la violence qui gangrène la banlieue défavorisée, tout en lui accordant un moment de détente en jouant avec les genres. Solidement interprété par le trio Max Gomis (une vraie gueule, magnétique, une vraie révélation), Jean-Baptiste Anoumon (Les Choses qu’on dit, les choses qu’on fait) et l’excellent et très prometteur Steve Tientcheu (Normale, Sage-homme, Robuste, Les Misérables), La Gravité ose des choses, en dit beaucoup aussi, mais il le fait sobrement, sans vouloir trop en faire, avec une élégance de tous les instants, une passion contagieuse pour la science-fiction (intelligente) et une envie de faire réfléchir une audience, tout en lui offrant un spectacle digne du grand écran. Pari réussi pour ce cinéaste dont les influences s’étendent de John Carpenter à Akira Kurosawa !

Un mystérieux alignement des planètes embrase le ciel et inquiète tous les habitants de la cité. Une bande d’adolescents, Les Ronins, règnent en maîtres sur cette cité, et voient cet évènement planétaire comme la possibilité d’une nouvelle ère. Daniel, Joshua et Christophe, 3 amis d’enfance que le deal et la prison ont séparés, vont devoir s’unir pour affronter ce gang. Après cette nuit-là, où le ciel a viré au rouge sang, plus rien ne sera jamais pareil…

On l’avait découvert grâce à La Vie de Château, co-réalisé avec Modi Barry, sorti en 2017, dont l’intrigue se déroulait à Paris, quartier Château d’Eau, autour du chef d’un groupe de rabatteurs employés par les salons de coiffure afro des environs, dont les rêves de grandeur et la réputation étaient tués dans l’oeuf en raison de l’ascension sur le boulevard d’un jeune rival aux méthodes plus agressives. Cédric Ido, cette fois seul derrière la caméra, joue sur la métaphore, y compris dans le titre de sa seconde œuvre, en montrant que les habitants de ces immondes tours sans âme demeurent plantés, sans espoir de s’en sortir, comme s’ils étaient englués dans le béton. Certains, comme l’un des personnages principaux de La Gravité, essayent tant bien que mal d’échapper à l’attraction terrestre. Pour cela, Daniel s’entraîne à courir, toujours plus loin, toujours plus vite. Mais il revient systématiquement à son point de départ. Même son envol définitif pour le Canada avec celle qu’il aime (Hafsia Herzi, magnétique comme d’habitude) et leur fille paraît flou, sans cesse repoussé, inaccessible, comme un mirage auquel il se raccroche.

La vie ne fait pas de cadeau, chacun tente plus ou moins de l’accepter et de s’élever comme ils le peuvent, la plupart du temps au moyen d’affaires louches, comme le trafic de drogue. Même sur ce point, Cédric Ido apporte une petite touche fantastique, en créant une drogue de synthèse non classifiée (du coup, les flics sont totalement absents), tout en plongeant ses personnages dans une atmosphère mystérieuse car parasitée par cet alignement des planètes du système solaire, qui rappelle souvent l’exceptionnel Melancholia de Lars Van Trier. Certains vont s’approprier cet événement pour vouloir redistribuer les cartes, s’emparer du pouvoir, reléguer les « anciens » à l’arrière-plan, pour pouvoir régner en maître sur la cité, un environnement que connaît bien le scénariste et metteur en scène, pour avoir grandi à Stains en Seine-Saint-Denis. Mais les vieux de la vieille en ont encore sous le capot et affrontent le gang arriviste des Ronins formé par des ados de 14 ans, ce qui nous vaut l’une des meilleures séquences d’action de l’année, bien brutale, sèche, immersive, annoncée par la superbe affiche du film.

Singulier et original, La Gravité l’est assurément, tout comme il est aussi marquant avec son cadre léché, sa photographie stylisée signée David Ungaro (Le Samaritain avec Sylvester Stallone) et la composition envoûtante des frères Sacha et Evgueni Galperine, déjà auteurs de la BO de Gagarine de Fanny Liatard et Jérémy Trouilh, qui partage d’ailleurs de nombreux points communs avec La Gravité. Une expérience à ne pas manquer.

LE DVD

Comme La Vie de Château, La Gravité est disponible uniquement en DVD chez Blaq Out. La jaquette reprend le visuel de l’affiche d’exploitation. Le boîtier Amaray est glissé dans un surétui cartonné. Le menu principal est quant à lui animé et musical.

Aucun autre supplément en dehors de la bande-annonce.

L’Image et le son

Les brillants partis pris esthétiques stylisés du chef opérateur David Ungaro sont habilement restitués, mais entraînent un piqué aléatoire et quelque peu émoussé, ainsi que de légères pertes de la définition. Les visages sont détaillés à souhait, la profondeur de champ est superbe et les contrastes sont d’une densité jamais démentie. Les séquences diurnes s’en sortent haut la main et l’on regrette très sincèrement de ne pas pouvoir bénéficier de La Gravité en Haute-Définition.

Le mixage Dolby Digital 5.1 se révèle particulièrement sobre, mais instaure un confort acoustique suffisant. Les dialogues sont percutants sur la centrale, la spatialisation musicale évidente, les latérales soutiennent l’ensemble comme il se doit, tandis que le caisson de basses intervient à bon escient. Signalons également la présence d’une piste 2.0, une autre en Audiodescription et des sous-titres français destinés aux spectateurs sourds et malentendants.

Crédits images : © Blaq Out /Une fille productions / Trésor Cinéma / Captures DVD : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

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