LA CROISADE réalisé par Louis Garrel, disponible en DVD et Blu-ray le 3 mai 2022 chez Ad Vitam.
Acteurs : Laetitia Casta, Joseph Engel, Louis Garrel, Ilinka Lony, Julia Boème, Lionel Dray, Clémence Jeanguillaume, Lazare Minoungou, Farid Bouzenad…
Scénario : Jean-Claude Carrière & Louis Garrel
Photographie : Julien Poupard
Musique : Grégoire Hetzel
Durée : 1h07
Date de sortie initiale : 2021
LE FILM
Abel et Marianne découvrent que leur fils Joseph, 13 ans, a vendu en douce leurs objets les plus précieux. Ils comprennent rapidement que Joseph n’est pas le seul, ils sont des centaines d’enfants à travers le monde associés pour financer un mystérieux projet. Ils se sont donné pour mission de sauver la planète.
En 2015, pour son premier long métrage en tant que réalisateur, Louis Garrel, né en 1983, signait un vrai petit bijou romanesque, Les Deux amis, adaptation contemporaine de la pièce de théâtre Les Caprices de Marianne d’Alfred de Musset, coécrite avec Christophe Honoré. Pour ce coup d’essai, Louis Garrel transposait son court-métrage La Règle de trois, Prix Jean Vigo du Court Métrage en 2012, dans lequel on retrouvait déjà le trio vedette, à savoir Vincent Macaigne, Golshifteh Farahani et Louis Garrel lui-même. Avant cela, ce dernier avait également mis en scène son premier court métrage en 2008, Mes copains. Trois ans plus tard, sortait L’Homme fidèle, où Louis Garrel partageait l’affiche avec Lily-Rose – Grumpy Cat – Depp et sa compagne Laetitia Casta, triangle amoureux dont le coauteur n’était autre que l’illustre et regretté Jean-Claude Carrière. Décédé en février 2021, celui-ci tirera sa révérence avec La Croisade, troisième long-métrage de Louis Garrel donc, un de ces énièmes films dont le tournage a été interrompu par la Covid-19 et le confinement. On ne sait pas si Jean-Claude Carrière aura eu le temps de peaufiner l’histoire de La Croisade aux côtés de Louis Garrel, toujours est-il que le résultat s’avère plus concluant que L’Homme fidèle, ne serait-ce qu’en terme de direction d’acteurs, puisque les enfants et même Laetitia Casta sont très convaincants ici, ce qui n’était pas un pari forcément aisé à relever. Comédie « dans l’air du temps », autrement dit teinté de message écolo-bobo, La Croisade, s’il n’est pas non plus entièrement abouti, n’en reste pas moins sympathique et rafraîchissant.
En rentrant dans son appartement parisien, Abel découvre que la trottinette de son fils adolescent Joseph a disparu. Interrogé par son père et sa mère, Marianne, le garçon explique qu’il l’a revendue pour financer un ambitieux projet écologique lancé avec des amis. Il explique également, à la surprise de ses parents, que ses amis, comme lui, ont revendu leurs objets personnels mais aussi des biens, parfois de grande valeur, de leurs parents. D’abord très contrariés quand ils réalisent l’étendue de la situation, les parents finissent par s’intéresser au projet de Joseph.
Entre comédie décalée, film romantique et drame contemporain, La Croisade parvient à retenir l’attention du spectateur du début à la fin grâce à l’osmose des trois têtes d’affiche, le couple Garrel-Casta donc, mais aussi du jeune et très prometteur Joseph Engel, déjà présent dans L’Homme fidèle (d’ailleurs, on peut penser qu’il s’agit de la même famille) et que l’on retrouvera bientôt dans Falcon Lake, le premier long-métrage de Charlotte Le Bon. Mine de rien, Louis Garrel commence à instaurer un univers qui lui est propre, certes irrigué par quelques réminiscences de la Nouvelle vague, mais dont la petite musique devient reconnaissable. Passer derrière la caméra lui a fait du bien et l’a décoincé aussi à l’écran. Il n’a jamais été autant naturel et attachant que dans les trois films qu’il a mis en scène. Même chose, il a su rendre Laetitia Casta intéressante au , près de 25 ans après ses débuts calamiteux dans Astérix et Obélix contre César de Claude Zidi. Celle-ci a en effet pris de la bouteille, de l’expérience, son visage s’est marqué, sa voix est mieux posée, la maturité de comédienne est arrivée.
Comme dans Les Deux amis et L’Homme fidèle, on retrouve ce mélange des tons qui participait à leur réussite, ainsi que cette autodérision de Louis Garrel que l’on notait depuis son premier film. Si La Croisade est clairement divisé en deux parties et que la première est supérieure, cette « mission » se suit avec plaisir, la séquence où les parents découvrent le plan de sauvetage de la planète élaboré par leur rejeton et ses complices (tous épatants), mobilisés pour l’écologie et la sauvegarde de l’environnement, est aussi jolie qu’originale. Un projet mis en parallèle avec le discours How Dare You de Greta Tongues-Vertes, visible au détour d’un plan. Tout ce qui concerne le couple est sans doute moins palpitant et plus classique, mais l’alchimie entre Laetitia Casta et l’homme avec lequel elle partage sa vie est évidente.
Sur un rythme vif et porté par une belle composition de Grégoire Hetzel (Roubaix, une lumière, Sage femme, Les Innocentes), Louis Garrel livre une oeuvre légère, une fable délicate, utopique, tendre, ludique, teintée d’humour, aux répliques enlevées qui font mouche, maîtrisée autant dans le fond que dans sa forme. Séduisant et élégant.
LE BLU-RAY
Malgré son score – on peut le dire – catastrophique dans les salles, La Croisade dispose tout de même d’une sortie en Haute-Définition chez Ad Vitam ! Le Blu-ray prend la forme d’un boîtier classique de couleur bleue et la jaquette reprend le très beau visuel d’exploitation. Le menu principal est animé et musical.
Seule la bande-annonce est disponible en guise de bonus.
L’Image et le son
A l’aide de sa caméra (numérique, une première pour le réalisateur) à l’épaule, Louis Garrel a tenu à coller au plus près des personnages, de leurs émotions et de la hargne qui les anime. Ce genre de prises de vue donne systématiquement du fil à retordre lors du transfert d’un film, mais le pressage numérique de La Croisade s’en sort avec tous les honneurs. En dépit d’une compression pas toujours optimum et de très légers flous intempestifs, la palette colorimétrique est chatoyante tout du long et les gros plans ne manquent pas de précision. Les contrastes sont beaux et denses, la luminosité plaisante, les noirs concis et le master immaculé. Très belle photo encore une fois du talentueux chef opérateur Julien Poupard (Party Girl, Voie rapide, Le Prix du succès). Un très beau master, au piqué acéré.
Le confort acoustique est largement assuré grâce au mixage DTS-HD Master Audio 5.1. La musique bénéficie d’une très belle spatialisation, les dialogues solidement plantés sur la centrale et la balance frontale fluide et limpide. Les plages de silence sont impressionnantes, les ambiances naturelles ne sont pas oubliées et les effets annexes sont omniprésents. La piste stéréo est également de fort bon acabit et contentera largement ceux qui ne seraient pas équipés sur les enceintes latérales. L’éditeur joint aussi une piste audiodescription ainsi que les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant.