JUNIOR réalisé par Ivan Reitman, disponible en DVD et combo Blu-ray + DVD le 17 août 2021 chez Elephant Films.
Acteurs : Arnold Schwarzenegger, Danny DeVito, Emma Thompson, Frank Langella, Pamela Reed, Aida Turturro, James Eckhouse, Megan Cavanagh…
Scénario : Kevin Wade & Chris Conrad
Photographie : Adam Greenberg
Musique : James Newton Howard
Durée : 1h50
Date de sortie initiale: 1994
LE FILM
Les recherches du docteur Alex Hesse, un savant autrichien qui travaille aux États-Unis, sont sur le point d’aboutir, son traitement devrait enfin assurer aux femmes des grossesses sans risque. Mais les autorités estiment qu’elles ont assez attendu, et interrompent le financement du projet avant qu’il ait pu être testé sur les humains. Alex songe déjà à rentrer en Europe quand son associé, le gynécologue Larry Arbogast, lui suggère de vérifier les bienfaits de son traitement sur sa propre personne. Alex accepte de placer dans son abdomen un ovule fécondé, volé par Larry dans le stock du docteur Diana Reddin, et prénommé Junior. Désormais «enceint», Alex s’installe chez Larry, dont l’ex-épouse, Angela, attend aussi un enfant…
Sorti dans les salles américaines pour les fêtes de Noël 1990, Un flic à la maternelle – Kindergarten Cop engrange plus de 200 millions de dollars en bout de course pour un budget de trente millions, tandis que deux millions de français viennent rire aux aventures de John Kimble. Soit un score similaire à celui de Jumeaux – Twins deux ans auparavant. C’est donc une affaire qui roule entre Arnold Shwarzenegger et Ivan Reitman, le premier n’hésitant pas à faire un petit caméo dans le génial Président d’un jour – Dave du second en 1993. C’est peut-être à ce moment-là que les deux décident de remettre le couvert, mais en invitant leur complice Danny DeVito à venir les rejoindre pour une nouvelle comédie. Ce sera Junior. Longtemps mal aimé, y compris par l’auteur de ces mots, jugé insipide et incapable d’aller au-delà de son postulat de départ improbable (et cette fois encore lié à une manipulation génétique), cet opus nanti d’un très gros budget de 60 millions de dollars – dont un quart rien que pour la star – n’en rapporte que 35 millions sur le sol de l’Oncle Sam, mais s’en sort heureusement dans le reste du monde, parvenant même à amasser près de 110 millions au final. En l’état, surtout après le carton mondial de True Lies quatre mois auparavant, c’est un nouveau revers au box-office pour le Chêne Autrichien, un an après celui de Last Action Hero de John McTiernan. Si Ivan Reitman a toujours déclaré qu’il s’agissait de sa comédie préférée parmi les trois faites avec Arnold Schwarzenegger, Junior demeure souvent poussif et le duo reformé de Jumeaux ne retrouve pas l’étincelle qui en faisait une réussite. Toutefois, rétrospectivement, nous pouvons sauver la prestation désopilante d’Emma Thompson, dont alchimie avec Schwarzy est inattendue, ce dernier prenant aussi un évident plaisir à être « enceint » à l’écran. Est-ce en raison de la baisse qualitative de la comédie américaine depuis quinze ans, en dépit du sursaut provoqué par Judd Apatow, toujours est-il que nous redécouvrons aujourd’hui Junior, produit hollywoodien qui sentait bon ce parfum d’artisanat qui a quasiment disparu.
Le généticien et chercheur autrichien Dr. Alex Hesse (Arnold Schwarzenegger) et son collègue Larry Arbogast (Danny DeVito) inventent un médicament de fertilité, « Expectane », conçu pour réduire les risques de fausse couche. Avec le médicament non approuvé par la Food and Drug Administration, Hesse et Arbogast sont incapables de tester le médicament et ne peuvent pas poursuivre leurs recherches. Le chef du comité d’examen Noah Banes (Frank Langella) informe Arbogast que bien que la FDA ait nié l’expérimentation humaine, l’équipe a reçu un don de la généticienne Dr Diana Reddin (Emma Thompson) du département de cryogénie des ovules. Hesse prévoit de partir en Europe, mais Arbogast suggère qu’ils peuvent toujours réaliser l’expérience, la société canadienne Lyndon Pharmaceutical proposant de les financer à condition qu’ils trouvent un volontaire. Hesse s’interroge sur la probabilité qu’une femme prenne un médicament non approuvé, mais Arbogast suggère d’omettre le sexe du volontaire et convainc Hesse de devenir le cobaye de sa propre expérience à partir d’un ovule nommé « Junior ».Au fil des semaines, il se plaint à Arbogast de mamelons douloureux et discute sans cesse de promenades, de massages et de siestes. Il est « enceint ». Lorsque vient le temps pour Hesse de mettre fin à l’expérience et de communiquer les résultats à Lyndon Pharmaceutical, Hesse continue de prendre le médicament et décide de mener la grossesse à terme ; d’abord agacé, Arbogast accepte de le garder caché. Hesse développe une relation avec Reddin et révèle sa grossesse à Angela, l’ex-femme d’Arbogast. Pendant ce temps, Banes tente de s’attribuer le mérite de l’expérience.
Junior repose sur un scénario nawak de Kevin Wade (Coup de foudre à Manhattan – Maid in Manhattan de Wayne Wang, Working Girl de Mike Nichols) et Chris Conrad (inconnu au bataillon), qui compile un peu tous les clichés liés à la maternité vue par la gent masculine. Mais bien avant Arnold Schwarzenegger, un autre comédien avait déjà été enceint au cinéma, Marcello Mastroianni dans le méconnu L’Événement le plus important depuis que l’homme a marché sur la Lune, réalisé par Jacques Demy en 1973. En 1971, Catherine Deneuve et Agnès Varda sont toutes les deux enceintes. L’occasion pour leurs compagnons d’écouter leurs compagnes s’extasier devant leurs ventres arrondis et surtout de se demander comment eux en tant qu’hommes réagiraient si on leur annonçait qu’ils attendaient également un enfant. Cela allait donner naissance à une comédie originale bombardée de couleurs fluo, des costumes aux papiers peints. Mais à l’instar de Junior, si l’on rit pas mal dans la première partie qui amène son sujet progressivement grâce à l’abattage des comédiens, tout s’effondrait après, comme si les auteurs ne parvenaient pas à tirer profit de leur idée originale. Chez Ivan Reitman, Arnold Schwarzenegger promène efficacement son œil ahuri et son ventre rebondi tandis qu’Emma Thompson, entre Au nom du père – In the Name of the Father de Jim Sheridan et Raison et Sentiments – Sense and Sensibility d’Ang Lee (pour lequel elle recevra l’Oscar du meilleur scénario adapté), excelle dans le registre de la comédie et compose son personnage burlesque avec délice et énergie. Finalement, c’est Danny DeVito qui a peu de choses à défendre et qui sert la soupe à son imposant partenaire. Parmi les seconds rôles, se distinguent Frank Langella (déjà présent dans Président d’un jour) et Pamela Reed, complice d’Arnold Schwarzenegger dans Un flic à la maternelle.
En fait, devant Junior, on ne peut pas s’empêcher de penser qu’Ivan Reitman aurait pu (aurait dû ?) pousser le bouchon bien plus loin. Car l’effet de « surprise » étant passé, le rythme s’essouffle, les situations s’enlisent jusqu’au final partant véritablement en sucette. Junior se revoit comme une curiosité, on s’y embête moins que dans nos souvenirs, mais il s’agit bel et bien de la moins bonne (on préfère dire cela à « la pire ») comédie de Schwarzy, qui écoutera ses fans (criant alors au scandale) et les rassurera en leur promettant de revenir au cinéma d’action. Ce qu’il fera en juin 1996 avec L’Effaceur – Eraser de Chuck Russell.
LE BLU-RAY
Junior n’a pas attendu longtemps pour apparaître en DVD chez Universal Pictures, puisque le film d’Ivan Reitman était disponible dès 2000. Depuis, moult rééditions ont suivi, y compris une chez MEP Vidéo en 2012. 2021, Junior revient en édition Standard et pour la première fois en Blu-ray en France chez Elephant Films. Boîtier avec surétui, jaquette réversible. Le menu principal est fixe et musical.
A l’instar de sa présentation de Jumeaux, Julien Comelli a encore tendance ici (15’) à s’égarer quelque peu, en parlant par exemple de Demolition Man avec Sylvester Stallone pour parler des « gros bras » qui s’essayaient alors à la comédie. Le journaliste en culture-pop se penche sur la fin de la parenthèse comique pour Sly et Schwarzy, avant d’en venir plus précisément à Junior, « qui avait connu un succès commercial moindre et qui allait au bout d’un paroxysme, puisque quoi de plus invraisemblable que de montrer Arnold Schwarzenegger tomber « enceint » ». Julien Comelli indique trouver le comédien très bon dans ce film mal aimé, « qui n’est pas un navet, mais qui souffre d’une réputation un peu terne, surtout quand on le compare inévitablement à Jumeaux ». Il estime que « Junior aurait pu être beaucoup plus frappadingue », déclare que Brian Levant (qui cartonnera la même année avec La Famille Pierrafeu – The Flintstones et avec lequel Shwarzy tournera finalement La Course au jouet) devait à l’origine faire le film, mais que la star hollywoodienne a fait le forcing pour qu’Ivan Reitman le mette en scène, puis parle du sujet de l’homme enceint au cinéma et donc du film de Jacques Demy que nous évoquons dans notre critique. Le casting est aussi passé au peigne fin avec un beau focus sur Emma Thompson (« l’OVNI du film »), tandis que la fin originale (tournée et rejetée) où le personnage d’Arnold Schwarzenegger devait avorter est dévoilée.
L’éditeur reprend le minuscule making of promotionnel (6’), qui compile les interviews des comédiens et d’Ivan Reitman, avec des images de tournage, parfois sur la musique des…Goonies.
L’interactivité se clôt sur un lot de bandes-annonces.
L’Image et le son
Elephant Films reprend le même master HD édité par Universal Studios aux Etats-Unis en 2018. Un Blu-ray qui s’en sort pas trop mal. Passé un générique grumeleux et au piqué émoussé, la colorimétrie – même si un peu atténuée à l’origine – s’impose, en dépit de visages un peu rosés, les séquences en extérieur sont beaucoup plus convaincantes avec des détails multiples, un relief plus explicite, des contours mieux définis. Le grand chef-opérateur Adam Greenberg (Le Justicier de minuit, Aux frontières de l’aube, Terminator 2 : Le Jugement Dernier) voit sa photo joliment restituée, dignes du support HD. Si la profondeur de champ n’est guère exploitée, certains gros plans étonnent par leur précision, la clarté est de mise, les contrastes probants, la copie stable et les noirs denses. N’oublions pas non plus la bonne propreté de la copie.
Penchons-nous tout d’abord sur la version originale proposée en DTS-HD Master Audio 5.1. Immersive dès la première séquence, cette piste offre de très belles ambiances intimistes bien que les voix des comédiens auraient pu être un poil plus ardentes sur la centrale. La partition de James Newton Howard (Space Jam, Une vie cachée, Detroit) est spatialisée, sans oublier les effets latéraux. Junior contient un lot conséquent de séquences en intérieur où l’action est évidemment canalisée sur les frontales. Les fans de la version française (avec Daniel Beretta et Daniel Russo qui s’éclatent à fond) trouveront une piste Stéréo fluide, riche et bien équilibrée.
Une réflexion sur « Test Blu-ray / Junior, réalisé par Ivan Reitman »